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UE79 - Construire une histoire du handicap et de la surdité à travers les siècles


Lieu et planning


  • 54 bd Raspail
    Salle AS1_08
    54 bd Raspail 75006 Paris
    annuel / bimensuel (1re/3e/5e), mardi 16:00-18:00
    du 29 novembre 2022 au 6 juin 2023
    Nombre de séances : 12

    • Mardi 29 novembre 2022
    • Mardi 6 décembre 2022
    • Mardi 3 janvier 2023
    • Mardi 17 janvier 2023
    • Mardi 31 janvier 2023
    • Mardi 7 février 2023
    • Mardi 7  mars 2023
    • Mardi 21 mars 2023
    • Mardi 4 avril 2023
    • Mardi 16 mai 2023
    • Mardi 30 mai 2023
    • Mardi 6 juin 2023 : séance reportée

Description


Dernière modification : 26 mai 2023 09:36

Type d'UE
Séminaires DR/CR
Disciplines
Anthropologie historique, Anthropologie sociale, ethnographie et ethnologie, Histoire, Sociologie
Page web
-
Langues
français lsf
Mots-clés
Handicap Histoire Histoire culturelle Langue des signes Mobilisation(s) Sourds Transnational
Aires culturelles
Afrique Amériques Europe France Transnational/transfrontières
Intervenant·e·s

Le séminaire « Construire une histoire du handicap et de la surdité à travers les siècles » a été mis en place dès 2021 à partir d’un constat : alors que les synthèses sur l’histoire du handicap et de la surdité à toutes les époques historiques se multiplient actuellement dans la littérature anglo-saxonne, aucun ouvrage collectif recouvrant ces deux champs d’étude n’a été publié dans la sphère francophone depuis le début des années 2000.

Les tentatives pour rassembler la communauté scientifique s’intéressant à l’histoire du handicap et de la surdité de l’espace francophone n’ont pas pu aboutir et les réseaux existants se structurent plutôt autour de thématiques particulières (cécité, surdité) ou se limitent à une période historique (comme le XXe siècle).

Par exemple, l’histoire du handicap et celle de la surdité à l’époque contemporaine ont pris des chemins divergents. Du côté de la surdité, l’historiographie a fondé ses approches sur une conception socio-anthropologique des sourds et de la langue des signes en laissant le concept de surdité rivé à une histoire médicale de la déficience ou tout au moins, à une histoire de catégories technico-institutionnelles et à sa critique. Du côté de l’histoire du handicap, une partie de la recherche s’est centrée sur l’histoire institutionnelle du handicap et sur les politiques publiques de sa prise en charge. La Deaf History et la Disability History, ont construit ainsi leurs propres réseaux scientifiques internationaux et leurs propres épistémologies avec une certaine distanciation, voire parfois de manière hermétique. Si les histoires du handicap et de la surdité s’entremêlent au cours de l’époque contemporaine (l’origine de l’éducation des sourds et des aveugles remonte au XVIIIe siècle, les sourds luttent d’ailleurs aux côtés des aveugles pour conquérir le droit à une éducation gratuite, laïque et obligatoire au cours des années 1930), les historiographies de l’une comme de l’autre ne se croisent que rarement. 

Ce séminaire mensuel a pour objectif de remédier à ces états de fait, en faisant converger des historien·e·s qui, depuis les vingt dernières années, renouvellent les deux champs de recherche par des approches, des méthodes et des objets nouveaux.

Concernant la période médiévale, par exemple, la plupart des ouvrages publiés jusqu’à présent sont soit des études approfondies centrées sur des cas particuliers, soit des propos assez généraux sur la société étudiée. De plus, les thématiques centrales divergent selon les époques : les chercheurs intéressé·e·s par les époques médiévale et moderne prêtent un intérêt considérable au poids de la religion, ce qui n’est pas le cas pour l’époque contemporaine. La littérature historique sur la période contemporaine a évolué d’un intérêt pour les politiques publiques, l’action des institutions éducatives, celle des associations ou la trajectoire biographique ou l’action des grands personnages historiques (médecins, éducateurs), vers des approches transnationales ou davantage biographiques, ou vers des approches plus intersectorielles, prenant en compte le genre ou la race. Dans le paradigme intersectionnel, le « handicap » ne constitue que l’une des multiples caractéristiques identitaires de l’individu. Seuls quelques travaux historiques ont pour l’instant pris en compte ce mode de pensée interdisciplinaire.

Nous souhaitons poursuivre et formaliser l’élan de l’année universitaire précédente, afin de contribuer à la fois à la diffusion des travaux récents ou en cours ; à la formation des jeunes chercheurs ; ainsi qu’à la structuration d’un réseau francophone de recherche sur l’histoire du handicap et de la surdité toutes périodes historiques confondues.

La constitution d’un réseau francophone est d’autant plus urgente que le champ disciplinaire de l’histoire du handicap et de la surdité connaît actuellement un renouvellement considérable des méthodes et des approches scientifiques. Pendant de nombreuses années, le handicap a été considéré sous l’angle de l’histoire sociale de la marginalité, de la pauvreté et de la déviance. Dans les années 2000, les chercheurs ont clairement admis que la signification et donc l’expérience du handicap changeaient au fil du temps dans une culture donnée et entre cultures différentes. La littérature sur le handicap s’est rapidement développée après 2005, en s’appuyant sur une approche qui présente le handicap comme un phénomène socioculturel. Dans ces ouvrages, le handicap est mis en contraste avec la normativité au niveau conceptuel : il est conçu comme ce qui s’écarte des « normes » culturellement constituées à un moment donné. En tant qu’histoire culturelle, l’histoire du handicap et de la surdité doit prendre en compte les continuités et les changements passés, en cultivant une vision à long terme entre les époques préhistoriques et contemporaines, révélant les significations plurielles du handicap et de la surdité à travers les siècles. Elle aurait avantage à considérer également les significations du handicap et de la surdité des territoires non occidentaux, afin de mieux cerner la manière dont les nombreuses vagues de migrations ont interprété le handicap et la surdité. Cette approche culturelle permet aussi de mettre en lumière la participation individuelle et collective des personnes aux rituels sociaux à différentes époques, une participation qui peut aussi être éclairée par des disciplines comme l’archéologie, rarement mobilisées.

 

Mardi 29 novembre 2022 : Nouvelles perspectives historiographiques (Fabrice Bertin, Gildas Brégain & Ninon Dubourg)

  • Introduction (40 minutes environ)
  • Pierre-Henri Ortiz (Université d'Angers), « Possibilités et difficultés de l'histoire de la folie dans les périodes anciennes : une histoire sans archives, sans cas et donc sans "sujet"  »
    L’histoire sociale de la maladie mentale et de la folie dans l’Antiquité et au Moyen Âge reste à faire. Dans cette communication, je propose de revenir sur l’historiographie de la folie dans l’Antiquité, sur ce que l’état des sources permet d’espérer, et sur certaines difficultés méthodologiques que doit affronter la recherche sur ce sujet

Mardi 6 décembre 2022 : Handicap et inégalités sociales

  • Didier Lett (Université Paris-Cité), « Genre, pauvreté et handicap dans les Marches (Italie) au XVe siècle »
    Les registres de délibérations communales des villes marchésanes du XVe siècle (je prendrai l’exemple de Macerata et de San Severino) contiennent des suppliques que des citadins adressent aux autorités municipales pour obtenir des dégrèvements de taxes. Parmi les raisons invoquées de cette requête figurent, pour les hommes comme pour les femmes la trop grande pauvreté. Si le veuvage est très souvent à l’origine des demandes féminines, ce sont la vieillesse, le handicap moteur et la cécité qui motivent les hommes dont la masculinité paraît très altérée.
  • Anna Gili (Université de Padoue), « L'interprétation médicale de la surdité et de la cécité dans le Kitāb al-Malakī d'al-Maǧūsī »
    Le Kitāb al-Malakī, encyclopédie composée dans la deuxième moitié du Xe siècle par Alī ibn al-ʿAbbas al-Maǧūsī, est la première œuvre de langue arabe qui vise à tracer un panorama global et complet de la science médicale. Dans ce cadre, la cécité et la surdité, conçues en tant que affections des organes de sens (œil et oreille), sont décrites et expliquées de manière approfondie. L’auteur présente une catégorisation très complexe des symptômes, des causes, des états pathologiques de la cécité et de la surdité : ma contribution a donc pour objectif l’analyse des différents chapitres concertantes ce sujet. Le Kitāb al-Malakī s’avèrera un cas d’étude exemplaire pour mieux comprendre comment les médecins ont conceptualisé ces formes d’handicap et ont essayé de les rendre compréhensibles et maîtrisables.

Mardi 3 janvier 2023 : Représentations visuelles du handicap

  • Jules Masson Mourey (Université d’Aix-Marseille), « Les pieds-bots de la vallée des Merveilles : hypothèses autour d’une iconographie néolithique »
    Les hautes vallées de la région du mont Bego, dans les Alpes méridionales, abritent un très important corpus d’images rupestres de la Préhistoire récente (IVe-IIe millénaire avant J.-C.). Parmi ces milliers de gravures, quatre anthropomorphes au moins, attribués au Néolithique final, partagent une singularité : leurs pieds sont tournés vers l’intérieur. L’anomalie anatomique n’est pas sans rappeler la pathologie du pied bot varus équin bilatéral. Si l’hypothèse d’identification est exacte, et sachant le contexte qui accompagne ces représentations – à savoir l’accomplissement de la métallurgie du cuivre dans le nord de l’Italie et le sud de l’arc alpin –, il faudrait peut-être distinguer là les plus anciennes occurrences des affections orthopédiques dont souffrent, par nature, les forgerons mythologiques.
  • Anna Russakoff (American University of Paris), « Représentations de la cécité dans l’art médiéval (XIIIe et XIVe siècles) ».
    Les aveugles ne peuvent pas facilement se représenter ; mais les représentations d’eux sont nombreuses dans l’art médiéval. Les illustrations les plus fréquentes concernent les miracles de Jésus Christ dans le Nouveau Testament. Mais il y a beaucoup d’autres miracles qui concernent les aveugles qui ont recouvré leur vue, notamment dans les Miracles de la Vierge Marie de Gautier de Coinci, le Speculum historiale de Vincent de Beauvais, et les contes dans le Ci nous dit, un grand manuscrit à Chantilly en deux tomes richement illustrés. Il y a aussi les images des pèlerins handicapés, comme dans les marges du psautier Luttrell, les aveugles souvent représentés avec un chien, une canne, et un bol pour mendier. Le thème de la cécité est aussi lié à l’antisémitisme ; on voit les images de la « Synagoga » avec ses yeux bandés, comme dans la célèbre sculpture à Strasbourg. De la symbolique aux miracles et à la vie quotidienne, cette communication va montrer la complexité visuelle de représenter la cécité à la fin du Moyen Âge.

Mardi 17 janvier 2023 : Microhistoires et historiographies

  • Fabrice Bertin, « Donner à voir : Auguste Bébian, précurseur des Deaf Studies ? »
    Appréhender les personnes sourdes non comme des personnes handicapées mais plutôt comme une minorité culturelle et linguistique ; tel est l’objet des Deaf Studies. Bien que le concept soit apparu de façon récente (années 1960), dans la sphère anglo-saxonne, il convient de se souligner qu’Auguste Bébian a été sans doute le premier pédagogue à se positionner en ce sens.Cette communicatioln vise à compléter l’historiographie sourde et à redonner sa place à un homme de l’ombre.
  • Anatole Le Bras (Université de Strasbourg), « Aliénation mentale et handicap au XIXe siècle. Relire l’histoire des aliénés à l’aune des disability studies »
    Malgré la richesse de leurs renouvellements historiographiques lors des dernières décennies, l’histoire de la psychiatrie et l’histoire du handicap restent deux domaines relativement étanches. En prenant pour point d’observation les asiles d’aliénés français de la seconde moitié du XIXe siècle, cette communication a pour objet de réfléchir à la fécondité et aux limites d’un rapprochement entre les catégories de handicap et d’aliénation mentale. Dans cette perspective, nous proposerons quelques réflexions sur l’histoire parallèle des institutions psychiatriques, des diagnostics (comme celui d’idiotie) et des concepts de handicap mental et psychique. Nous nous demanderons aussi ce que peuvent apporter les disability studies à notre regard sur les internés des asiles du XIXe siècle, en envisageant notamment la question de leur incapacité juridique.

Mardi 31 janvier 2023 : Polémiques et handicap

  • Anaïs Bourgeat (Universités de Genève et Lyon 2), « Le phénomène des possessions démoniaques en France au XVIIe siècle. Le cas de Pierre Creusé entre "possession" et "maladie prodigieuse” »
    Au XVIIe siècle les sorciers ne sont plus les seuls sur le devant de la scène démoniaque, ils sont à présent supplantés par les possédés qui sont prolixes en paroles et révélations eschatologiques. Les affaires de possessions qui se multiplient tout au long de ce siècle scandalisent et interrogent car elles prennent place dans des couvents et impliquent des religieuses qui, dans des mouvements de possessions collectives, accusent des « prêtres-sorciers ». Cependant, qu’en est-il des affaires plus discrètes, celles dont les possédés ne sont pas des religieuses catholiques mais un jeune garçon protestant, un apprenti forgeron ou encore une tisserande ? Dans cette communication je propose de revenir sur ces possessions individuelles, et plus particulièrement sur le cas très complexe de Pierre Creusé, qui permettent de sortir du cadre des « grandes affaires » et de venir questionner le modèle de la possession en France au XVIIe siècle.
  • David Doat (Université Catholique de Lille), « Infirmité et préhistoire : retour sur une polémique précurseur de la bioarchéologie du soin »
    La bioarchéologie du soin est une sous-discipline de la bioarchéologie née en 2015, dont l’objet est l’étude des comportements de soin dans le passé, à partir d’études de cas et au moyen des outils de l’anthropologie, de l’archéologie et de la paléopathologie. Je propose de revenir, dans le cadre de mon intervention, sur la naissance de ce nouveau champ de recherche en bioarchéologie, ainsi que sur la polémique épistémologique, méthodologique et idéologique qui, depuis les années 1970, a constitué le terrain d’émergence de cette nouvelle et jeune sous-discipline de la bioarchéologie. Nous verrons à cet égard que les disability studies ne sont pas étrangères à cette polémique, et qu’entre l’interdiction d’inférer ou le risque inverse de projeter un présent dans un passé lointain, la bioarchéologie du soin tente de suivre un chemin de crête qui se fonde à la fois sur une réflexion théorique au sujet des conceptions de l’infirmité, du handicap et de leurs biais épistémiques, et sur une méthodologie qui intègre ses propres limites aux différentes étapes de sa mise en œuvre.

Mardi 7 février 2023 : Identification du handicap

  • Bénédicte Lhoyer (École du Louvre), « L’Égypte pharaonique face à la différence et au handicap »
    Comment les Anciens Egyptiens percevaient-ils le handicap au cours des quatre millénaires que dura leur civilisation ? Cette question cruciale commence à faire l'objet d'études plus approfondies à la lumière des sources archéologiques et des outils scientifiques modernes. Notre intervention souhaite mettre en lumière ces témoignages de la différence à travers l'art, la langue et les corps.
  • Hélène Coqueugniot (CNRS - EPHE-PSL), « Le handicap et sa prise en charge aux temps préhistoriques, quelles preuves ? »
    Les états de santé des populations du passé constituent un champ de recherche en plein développement pour les sciences archéologiques. L’identification de traces de maladie ou de traumatismes sur des squelettes anciens permet d’en discuter les conséquences fonctionnelles, d’évaluer le degré d’un handicap et de poser l’hypothèse d’une prise en charge. Pour les temps paléolithiques, ces interprétations sont particulièrement complexes : comment mettre en relation la survie d’un homme préhistorique malade ou infirme et la nature des soins apportés par les membres de son groupe, uniquement à partir de quelques indices osseux ? L’objectif de ce séminaire est de discuter, du point de vue paléoanthropologique, d’exemples paléolithiques de handicaps.

Mardi 7 mars 2023 : Différences

  • Evelyne Samama (Université de Versailles Saint-Quentin), « Les mots pour le dire : le lexique antique de la surdité »
    La communication étudiera les différents termes du lexique antique de la surdité et leur utilisation dans le discours.
  • Damien Jeanne (Université de Caen Normandie), « De la lèpre au covid : Penser la place des malades et la place du soin de la chrétienté médiévale à la société contemporaine : continuités et ruptures »
    La lèpre est emblématique : elle passait pour faire fuir les passants ; les lépreux étaient censés porter le mauvais œil et l’historiographie des Lumières les considéraient comme devant être séparés des valides. Ces stéréotypes ont la vie dure. Par la richesse exceptionnelle de ses sources, la Normandie offre un terrain d'enquête privilégié pour comprendre comment les gens du Moyen Âge portaient plutôt l’impératif du soin et non celui du sacrifice.

Mardi 21 mars 2023 : Genre et handicap

  • Ninon Dubourg (Fnrs - Université de Liège), « Prêtres handicapés dans l'histoire du Décret de Gratien (1160) au Code de droit canonique de 1983 »
    L’accès aux lieux de culte est fortement encadré dans la plupart des religions (panthéon égyptien, hellénisme grec, polythéisme romain), d’autant plus lorsqu’il est question de servir le ou les dieu(x). C’est pourquoi l’étude du handicap des personnes actives dans le culte catholique est révélatrice de la discrimination opérée par la Vatican sur la longue durée. En effet, du Ve au XXe siècle, les personnes handicapées ne peuvent pas être ministres de Dieu : on leur interdit l’entrée dans l’état clérical, mais aussi tout rôle actif en cas de handicap acquis lorsqu’elles sont déjà détentrices d’une cure.
  • Clément Collard (Sciences Po), « Mutilés de guerre et masculinités pendant la 1re WW »
    L'enjeu de cette intervention consistera à relire les processus mis en place en faveur du retour au travail des mutilés de la Première Guerre mondiale à l'aune du genre. Il s'agira notamment de montrer en quoi la rééducation et la réintégration professionnelles des invalides de la guerre est pensée dans le cadre d'une division genrée du travail, au regard des métiers privilégiés pour leur réinsertion. Cela s'explique à la fois par des considérations économiques mais aussi par la volonté de préserver la masculinité de ceux qui sont perçus comme des héros. Cependant, dans l'entre-deux-guerres, les législations sociales en faveur des victimes de la guerre concernent autant les mutilés que les veuves, ce qui pose de nouvelles problématiques en matière de genre.

Mardi 4 avril 2023 : Surdicécité

  • Catherine Baroin (Université de Rouen Normandie), « Surdité et cécité dans la vie publique et privée du citoyen romain »
    L'idée est d'examiner, dans une perspective anthropologique, les représentations de la surdité et de la cécité dans le monde romain, d’après des sources textuelles, pour la fin de la République et le début de l'Empire : pourquoi surdité et cécité sont-elles considérées comme des défauts, des faiblesses du corps ? Qu’est-ce qu’elles interdisent au citoyen, sur le plan pratique et sur le plan symbolique ? Y a-t-il des figures emblématiques de sourds et d’aveugles dans l’historiographie romaine ? L’exposé s’appuiera notamment sur les travaux de Caroline Husquin.
  • Soline Vennetier (EHESS), « Surdicécité et mobilisations collectives transnationales à la fin du XXe siècle »
    À partir de l'étude des mobilisations collectives ayant contribué depuis les années 1960 à la construction transnationale du champ de la surdicécité comme situation singulière, non réductible à la simple addition de la surdité et de la cécité, l'exposé mettra en évidence la part collective de cette histoire et la dimension construite du statut social et politique des personnes sourdaveugles. Issu d'un travail doctoral en cours autour de ces questions, il proposera également quelques réflexions méthodologiques et historiographiques sur l'histoire de la surdicécité et des personnes sourdaveugles.

Mardi 16 mai 2023 : Handicap et migrations

  • Gildas Brégain (CNRS – Université Rennes II), « Les luttes des tuberculeux nord-africains soignés en institutions »
    Cette communication s'intéressera aux mobilisations collectives des tuberculeux nord-africains (algériens, tunisiens, marocains) au sein des sanatoriums. Je m'intéresserais en particulier aux comité des malades nord-africains du sanatorium de Brevannes, et des relations de ce comité avec l'Amicale locale de la Fédération nationale de Lutte antituberculeuse (FNLA). Ces relations, au départ empreintes de racisme et de préjugés colonialistes de la part de l'Amicale locale de la FNLA, se transforment rapidement, avec la participation de certains nord-africains au sein du bureau de l'Amicale locale de la FNLA, et la prise en compte partielle de leurs revendications (respect des rites musulmans, composition des menus, etc.).
  • Mariana Scarfone (Université de Strasbourg), « Histoire des migrants psychiatrisés »
    On s’attachera à retracer les spécificités et les transformations des paradigmes et des pratiques de la psychiatrie française au contact du phénomène migratoire au cours du XXe siècle, en analysant les discours des médecins à l'égard des patients immigrés, notamment nord-africains, ainsi que les dossiers cliniques individuels.

Mardi 30 mai 2023 : Histoire du sport, handicap et surdité

  • Yacine Tajri (Université Gustave Eiffel), « Vers la scolarisation de la rééducation physique pour les élèves "déficients" dans les années 1940 : trier et redresser les corps »
    Cette présentation a pour ambition de questionner la pratique physique des élèves jugés « déficients » par les autorités médicales et pédagogiques afin de leur proposer une éducation physique spécialisée dans le cadre de l’école dans les années 1940. En croisant différentes sources issues pour la plupart des archives nationales (versements du ministère de l’Éducation nationale ; Jeunesse et Sports), il s’agira de montrer la manière dont les autorités vichyssoises élaborent une rééducation physique des élèves qui ne répondent pas aux critères de la normalité physique de cette période, construite pas des médecins notamment.
  • Didier Séguillon (U. Nanterre), « Le sport silencieux, un élément clé de l’identité sourde dans la première partie du XXe siècle »
    Si pour le sociologue Bernard Mottez, l’identité est un rapport et non une qualification individuelle comme l’entend le sens commun, la question de l’identité sourde est alors non pas qui suis-je mais, qui suis-je par rapport aux autres et que sont les autres, par rapport à moi ? C’est à ce questionnement que notre intervention se propose de réponse et ce, en interrogeant l’histoire du sport silencieux dans la première moitié du XXe siècle, ses filiations, sa constitution aussi, son développement, et enfin, sa reconnaissance nationale et internationale.

Mardi 6 juin 2023 :

Séance reportée


Master


  • Séminaires de recherche – Histoire-Histoire du monde/histoire des mondes – M1/S1-M2/S3
    Suivi et validation – annuel mensuelle = 6 ECTS
    MCC – fiche de lecture
  • Séminaires de recherche – Histoire-Histoire et sciences sociales – M1/S1-M2/S3
    Suivi et validation – annuel mensuelle = 6 ECTS
    MCC – fiche de lecture
  • Séminaires de recherche – Savoirs en sociétés-Santé, médecine et questions sociales – M1/S1-S2-M2/S3-S4
    Suivi et validation – annuel mensuelle = 6 ECTS
    MCC – fiche de lecture

Renseignements


Contacts additionnels
gildas.bregain@ehesp.fr ninon.dubourg@gmail.com
Informations pratiques

s'adresser à fabrice.bertin@ehess.fr; ninon.dubourg@gmail.com; gildas.bregain@ehesp.fr

Direction de travaux des étudiants

sur rendez-vous.

Réception des candidats

sur rendez-vous.

Pré-requis

Aucun


Compte rendu


Ce séminaire a été mis en place en avril 2021 par deux chercheurs, Ninon Dubourg, docteur en histoire médiévale, chargée de mission et de recherche à l’université de Liège et Gildas Brégain, docteur en histoire contemporaine et chargé de recherche au CNRS. Son intitulé « Construire une histoire du handicap et de la surdité » vise à combler un retard de la recherche francophone et rapprocher la Disability Historie de la Deaf Historie, ce qui est inédit.

Inscrit à l’offre de formation de l’EHESS dès la rentrée universitaire 2021, Fabrice Bertin, docteur en histoire contemporaine et professeur d’histoire-géographie à l’École, devient c-référent pour cette unité d’enseignement. Plus de 23 chercheur·es, historien·nes pour la plupart, ont pu ainsi exposer des approches, des méthodes et des objets nouveaux lors de séances bi-mensuelles (à l’EHESS et à distance)

Le champ disciplinaire de l’histoire du handicap et de la surdité n’est plus considéré sous l’angle de l’histoire sociale de la marginalité, de la pauvreté et de la déviance seulement et connaît un bouleversement sans pareil de ses méthodes et des approches scientifiques. Pendant de nombreuses années, le handicap a été. Dans les années 2000, les chercheurs ont clairement admis que la signification et donc l’expérience du handicap changeaient au fil du temps dans une culture donnée et entre cultures différentes. La littérature sur le handicap s’est rapidement développée après 2005, en s’appuyant sur une approche qui présente le handicap comme un phénomène socioculturel. Dans ces ouvrages, le handicap est mis en contraste avec la normativité au niveau conceptuel : il est conçu comme ce qui s’écarte des « normes » culturellement constituées à un moment donné. En tant qu’histoire culturelle, l’histoire du handicap et de la surdité doit prendre en compte les continuités et les changements passés, en cultivant une vision à long terme entre les époques préhistoriques et contemporaines, révélant les significations plurielles du handicap et de la surdité à travers les siècles. Elle aurait avantage à considérer également les significations du handicap et de la surdité des territoires non occidentaux, afin de mieux cerner la manière dont les nombreuses vagues de migrations ont interprété le handicap et la surdité. Cette approche culturelle permet aussi de mettre en lumière la participation individuelle et collective des personnes aux rituels sociaux à différentes époques, une participation qui peut aussi être éclairée par des disciplines comme l’archéologie, rarement mobilisées.

Accessible à tou·tes (interprétation en LSF et sous-titrage en temps réel), organisé en séances mensuelles de 2 h, le caractère hybride de ces séminaires ont permis de rassembler plus de 300 inscrit·es à travers le monde, étudiant·es ou chercheur·es.

Dernière modification : 26 mai 2023 09:36

Type d'UE
Séminaires DR/CR
Disciplines
Anthropologie historique, Anthropologie sociale, ethnographie et ethnologie, Histoire, Sociologie
Page web
-
Langues
français lsf
Mots-clés
Handicap Histoire Histoire culturelle Langue des signes Mobilisation(s) Sourds Transnational
Aires culturelles
Afrique Amériques Europe France Transnational/transfrontières
Intervenant·e·s

Le séminaire « Construire une histoire du handicap et de la surdité à travers les siècles » a été mis en place dès 2021 à partir d’un constat : alors que les synthèses sur l’histoire du handicap et de la surdité à toutes les époques historiques se multiplient actuellement dans la littérature anglo-saxonne, aucun ouvrage collectif recouvrant ces deux champs d’étude n’a été publié dans la sphère francophone depuis le début des années 2000.

Les tentatives pour rassembler la communauté scientifique s’intéressant à l’histoire du handicap et de la surdité de l’espace francophone n’ont pas pu aboutir et les réseaux existants se structurent plutôt autour de thématiques particulières (cécité, surdité) ou se limitent à une période historique (comme le XXe siècle).

Par exemple, l’histoire du handicap et celle de la surdité à l’époque contemporaine ont pris des chemins divergents. Du côté de la surdité, l’historiographie a fondé ses approches sur une conception socio-anthropologique des sourds et de la langue des signes en laissant le concept de surdité rivé à une histoire médicale de la déficience ou tout au moins, à une histoire de catégories technico-institutionnelles et à sa critique. Du côté de l’histoire du handicap, une partie de la recherche s’est centrée sur l’histoire institutionnelle du handicap et sur les politiques publiques de sa prise en charge. La Deaf History et la Disability History, ont construit ainsi leurs propres réseaux scientifiques internationaux et leurs propres épistémologies avec une certaine distanciation, voire parfois de manière hermétique. Si les histoires du handicap et de la surdité s’entremêlent au cours de l’époque contemporaine (l’origine de l’éducation des sourds et des aveugles remonte au XVIIIe siècle, les sourds luttent d’ailleurs aux côtés des aveugles pour conquérir le droit à une éducation gratuite, laïque et obligatoire au cours des années 1930), les historiographies de l’une comme de l’autre ne se croisent que rarement. 

Ce séminaire mensuel a pour objectif de remédier à ces états de fait, en faisant converger des historien·e·s qui, depuis les vingt dernières années, renouvellent les deux champs de recherche par des approches, des méthodes et des objets nouveaux.

Concernant la période médiévale, par exemple, la plupart des ouvrages publiés jusqu’à présent sont soit des études approfondies centrées sur des cas particuliers, soit des propos assez généraux sur la société étudiée. De plus, les thématiques centrales divergent selon les époques : les chercheurs intéressé·e·s par les époques médiévale et moderne prêtent un intérêt considérable au poids de la religion, ce qui n’est pas le cas pour l’époque contemporaine. La littérature historique sur la période contemporaine a évolué d’un intérêt pour les politiques publiques, l’action des institutions éducatives, celle des associations ou la trajectoire biographique ou l’action des grands personnages historiques (médecins, éducateurs), vers des approches transnationales ou davantage biographiques, ou vers des approches plus intersectorielles, prenant en compte le genre ou la race. Dans le paradigme intersectionnel, le « handicap » ne constitue que l’une des multiples caractéristiques identitaires de l’individu. Seuls quelques travaux historiques ont pour l’instant pris en compte ce mode de pensée interdisciplinaire.

Nous souhaitons poursuivre et formaliser l’élan de l’année universitaire précédente, afin de contribuer à la fois à la diffusion des travaux récents ou en cours ; à la formation des jeunes chercheurs ; ainsi qu’à la structuration d’un réseau francophone de recherche sur l’histoire du handicap et de la surdité toutes périodes historiques confondues.

La constitution d’un réseau francophone est d’autant plus urgente que le champ disciplinaire de l’histoire du handicap et de la surdité connaît actuellement un renouvellement considérable des méthodes et des approches scientifiques. Pendant de nombreuses années, le handicap a été considéré sous l’angle de l’histoire sociale de la marginalité, de la pauvreté et de la déviance. Dans les années 2000, les chercheurs ont clairement admis que la signification et donc l’expérience du handicap changeaient au fil du temps dans une culture donnée et entre cultures différentes. La littérature sur le handicap s’est rapidement développée après 2005, en s’appuyant sur une approche qui présente le handicap comme un phénomène socioculturel. Dans ces ouvrages, le handicap est mis en contraste avec la normativité au niveau conceptuel : il est conçu comme ce qui s’écarte des « normes » culturellement constituées à un moment donné. En tant qu’histoire culturelle, l’histoire du handicap et de la surdité doit prendre en compte les continuités et les changements passés, en cultivant une vision à long terme entre les époques préhistoriques et contemporaines, révélant les significations plurielles du handicap et de la surdité à travers les siècles. Elle aurait avantage à considérer également les significations du handicap et de la surdité des territoires non occidentaux, afin de mieux cerner la manière dont les nombreuses vagues de migrations ont interprété le handicap et la surdité. Cette approche culturelle permet aussi de mettre en lumière la participation individuelle et collective des personnes aux rituels sociaux à différentes époques, une participation qui peut aussi être éclairée par des disciplines comme l’archéologie, rarement mobilisées.

 

Mardi 29 novembre 2022 : Nouvelles perspectives historiographiques (Fabrice Bertin, Gildas Brégain & Ninon Dubourg)

  • Introduction (40 minutes environ)
  • Pierre-Henri Ortiz (Université d'Angers), « Possibilités et difficultés de l'histoire de la folie dans les périodes anciennes : une histoire sans archives, sans cas et donc sans "sujet"  »
    L’histoire sociale de la maladie mentale et de la folie dans l’Antiquité et au Moyen Âge reste à faire. Dans cette communication, je propose de revenir sur l’historiographie de la folie dans l’Antiquité, sur ce que l’état des sources permet d’espérer, et sur certaines difficultés méthodologiques que doit affronter la recherche sur ce sujet

Mardi 6 décembre 2022 : Handicap et inégalités sociales

  • Didier Lett (Université Paris-Cité), « Genre, pauvreté et handicap dans les Marches (Italie) au XVe siècle »
    Les registres de délibérations communales des villes marchésanes du XVe siècle (je prendrai l’exemple de Macerata et de San Severino) contiennent des suppliques que des citadins adressent aux autorités municipales pour obtenir des dégrèvements de taxes. Parmi les raisons invoquées de cette requête figurent, pour les hommes comme pour les femmes la trop grande pauvreté. Si le veuvage est très souvent à l’origine des demandes féminines, ce sont la vieillesse, le handicap moteur et la cécité qui motivent les hommes dont la masculinité paraît très altérée.
  • Anna Gili (Université de Padoue), « L'interprétation médicale de la surdité et de la cécité dans le Kitāb al-Malakī d'al-Maǧūsī »
    Le Kitāb al-Malakī, encyclopédie composée dans la deuxième moitié du Xe siècle par Alī ibn al-ʿAbbas al-Maǧūsī, est la première œuvre de langue arabe qui vise à tracer un panorama global et complet de la science médicale. Dans ce cadre, la cécité et la surdité, conçues en tant que affections des organes de sens (œil et oreille), sont décrites et expliquées de manière approfondie. L’auteur présente une catégorisation très complexe des symptômes, des causes, des états pathologiques de la cécité et de la surdité : ma contribution a donc pour objectif l’analyse des différents chapitres concertantes ce sujet. Le Kitāb al-Malakī s’avèrera un cas d’étude exemplaire pour mieux comprendre comment les médecins ont conceptualisé ces formes d’handicap et ont essayé de les rendre compréhensibles et maîtrisables.

Mardi 3 janvier 2023 : Représentations visuelles du handicap

  • Jules Masson Mourey (Université d’Aix-Marseille), « Les pieds-bots de la vallée des Merveilles : hypothèses autour d’une iconographie néolithique »
    Les hautes vallées de la région du mont Bego, dans les Alpes méridionales, abritent un très important corpus d’images rupestres de la Préhistoire récente (IVe-IIe millénaire avant J.-C.). Parmi ces milliers de gravures, quatre anthropomorphes au moins, attribués au Néolithique final, partagent une singularité : leurs pieds sont tournés vers l’intérieur. L’anomalie anatomique n’est pas sans rappeler la pathologie du pied bot varus équin bilatéral. Si l’hypothèse d’identification est exacte, et sachant le contexte qui accompagne ces représentations – à savoir l’accomplissement de la métallurgie du cuivre dans le nord de l’Italie et le sud de l’arc alpin –, il faudrait peut-être distinguer là les plus anciennes occurrences des affections orthopédiques dont souffrent, par nature, les forgerons mythologiques.
  • Anna Russakoff (American University of Paris), « Représentations de la cécité dans l’art médiéval (XIIIe et XIVe siècles) ».
    Les aveugles ne peuvent pas facilement se représenter ; mais les représentations d’eux sont nombreuses dans l’art médiéval. Les illustrations les plus fréquentes concernent les miracles de Jésus Christ dans le Nouveau Testament. Mais il y a beaucoup d’autres miracles qui concernent les aveugles qui ont recouvré leur vue, notamment dans les Miracles de la Vierge Marie de Gautier de Coinci, le Speculum historiale de Vincent de Beauvais, et les contes dans le Ci nous dit, un grand manuscrit à Chantilly en deux tomes richement illustrés. Il y a aussi les images des pèlerins handicapés, comme dans les marges du psautier Luttrell, les aveugles souvent représentés avec un chien, une canne, et un bol pour mendier. Le thème de la cécité est aussi lié à l’antisémitisme ; on voit les images de la « Synagoga » avec ses yeux bandés, comme dans la célèbre sculpture à Strasbourg. De la symbolique aux miracles et à la vie quotidienne, cette communication va montrer la complexité visuelle de représenter la cécité à la fin du Moyen Âge.

Mardi 17 janvier 2023 : Microhistoires et historiographies

  • Fabrice Bertin, « Donner à voir : Auguste Bébian, précurseur des Deaf Studies ? »
    Appréhender les personnes sourdes non comme des personnes handicapées mais plutôt comme une minorité culturelle et linguistique ; tel est l’objet des Deaf Studies. Bien que le concept soit apparu de façon récente (années 1960), dans la sphère anglo-saxonne, il convient de se souligner qu’Auguste Bébian a été sans doute le premier pédagogue à se positionner en ce sens.Cette communicatioln vise à compléter l’historiographie sourde et à redonner sa place à un homme de l’ombre.
  • Anatole Le Bras (Université de Strasbourg), « Aliénation mentale et handicap au XIXe siècle. Relire l’histoire des aliénés à l’aune des disability studies »
    Malgré la richesse de leurs renouvellements historiographiques lors des dernières décennies, l’histoire de la psychiatrie et l’histoire du handicap restent deux domaines relativement étanches. En prenant pour point d’observation les asiles d’aliénés français de la seconde moitié du XIXe siècle, cette communication a pour objet de réfléchir à la fécondité et aux limites d’un rapprochement entre les catégories de handicap et d’aliénation mentale. Dans cette perspective, nous proposerons quelques réflexions sur l’histoire parallèle des institutions psychiatriques, des diagnostics (comme celui d’idiotie) et des concepts de handicap mental et psychique. Nous nous demanderons aussi ce que peuvent apporter les disability studies à notre regard sur les internés des asiles du XIXe siècle, en envisageant notamment la question de leur incapacité juridique.

Mardi 31 janvier 2023 : Polémiques et handicap

  • Anaïs Bourgeat (Universités de Genève et Lyon 2), « Le phénomène des possessions démoniaques en France au XVIIe siècle. Le cas de Pierre Creusé entre "possession" et "maladie prodigieuse” »
    Au XVIIe siècle les sorciers ne sont plus les seuls sur le devant de la scène démoniaque, ils sont à présent supplantés par les possédés qui sont prolixes en paroles et révélations eschatologiques. Les affaires de possessions qui se multiplient tout au long de ce siècle scandalisent et interrogent car elles prennent place dans des couvents et impliquent des religieuses qui, dans des mouvements de possessions collectives, accusent des « prêtres-sorciers ». Cependant, qu’en est-il des affaires plus discrètes, celles dont les possédés ne sont pas des religieuses catholiques mais un jeune garçon protestant, un apprenti forgeron ou encore une tisserande ? Dans cette communication je propose de revenir sur ces possessions individuelles, et plus particulièrement sur le cas très complexe de Pierre Creusé, qui permettent de sortir du cadre des « grandes affaires » et de venir questionner le modèle de la possession en France au XVIIe siècle.
  • David Doat (Université Catholique de Lille), « Infirmité et préhistoire : retour sur une polémique précurseur de la bioarchéologie du soin »
    La bioarchéologie du soin est une sous-discipline de la bioarchéologie née en 2015, dont l’objet est l’étude des comportements de soin dans le passé, à partir d’études de cas et au moyen des outils de l’anthropologie, de l’archéologie et de la paléopathologie. Je propose de revenir, dans le cadre de mon intervention, sur la naissance de ce nouveau champ de recherche en bioarchéologie, ainsi que sur la polémique épistémologique, méthodologique et idéologique qui, depuis les années 1970, a constitué le terrain d’émergence de cette nouvelle et jeune sous-discipline de la bioarchéologie. Nous verrons à cet égard que les disability studies ne sont pas étrangères à cette polémique, et qu’entre l’interdiction d’inférer ou le risque inverse de projeter un présent dans un passé lointain, la bioarchéologie du soin tente de suivre un chemin de crête qui se fonde à la fois sur une réflexion théorique au sujet des conceptions de l’infirmité, du handicap et de leurs biais épistémiques, et sur une méthodologie qui intègre ses propres limites aux différentes étapes de sa mise en œuvre.

Mardi 7 février 2023 : Identification du handicap

  • Bénédicte Lhoyer (École du Louvre), « L’Égypte pharaonique face à la différence et au handicap »
    Comment les Anciens Egyptiens percevaient-ils le handicap au cours des quatre millénaires que dura leur civilisation ? Cette question cruciale commence à faire l'objet d'études plus approfondies à la lumière des sources archéologiques et des outils scientifiques modernes. Notre intervention souhaite mettre en lumière ces témoignages de la différence à travers l'art, la langue et les corps.
  • Hélène Coqueugniot (CNRS - EPHE-PSL), « Le handicap et sa prise en charge aux temps préhistoriques, quelles preuves ? »
    Les états de santé des populations du passé constituent un champ de recherche en plein développement pour les sciences archéologiques. L’identification de traces de maladie ou de traumatismes sur des squelettes anciens permet d’en discuter les conséquences fonctionnelles, d’évaluer le degré d’un handicap et de poser l’hypothèse d’une prise en charge. Pour les temps paléolithiques, ces interprétations sont particulièrement complexes : comment mettre en relation la survie d’un homme préhistorique malade ou infirme et la nature des soins apportés par les membres de son groupe, uniquement à partir de quelques indices osseux ? L’objectif de ce séminaire est de discuter, du point de vue paléoanthropologique, d’exemples paléolithiques de handicaps.

Mardi 7 mars 2023 : Différences

  • Evelyne Samama (Université de Versailles Saint-Quentin), « Les mots pour le dire : le lexique antique de la surdité »
    La communication étudiera les différents termes du lexique antique de la surdité et leur utilisation dans le discours.
  • Damien Jeanne (Université de Caen Normandie), « De la lèpre au covid : Penser la place des malades et la place du soin de la chrétienté médiévale à la société contemporaine : continuités et ruptures »
    La lèpre est emblématique : elle passait pour faire fuir les passants ; les lépreux étaient censés porter le mauvais œil et l’historiographie des Lumières les considéraient comme devant être séparés des valides. Ces stéréotypes ont la vie dure. Par la richesse exceptionnelle de ses sources, la Normandie offre un terrain d'enquête privilégié pour comprendre comment les gens du Moyen Âge portaient plutôt l’impératif du soin et non celui du sacrifice.

Mardi 21 mars 2023 : Genre et handicap

  • Ninon Dubourg (Fnrs - Université de Liège), « Prêtres handicapés dans l'histoire du Décret de Gratien (1160) au Code de droit canonique de 1983 »
    L’accès aux lieux de culte est fortement encadré dans la plupart des religions (panthéon égyptien, hellénisme grec, polythéisme romain), d’autant plus lorsqu’il est question de servir le ou les dieu(x). C’est pourquoi l’étude du handicap des personnes actives dans le culte catholique est révélatrice de la discrimination opérée par la Vatican sur la longue durée. En effet, du Ve au XXe siècle, les personnes handicapées ne peuvent pas être ministres de Dieu : on leur interdit l’entrée dans l’état clérical, mais aussi tout rôle actif en cas de handicap acquis lorsqu’elles sont déjà détentrices d’une cure.
  • Clément Collard (Sciences Po), « Mutilés de guerre et masculinités pendant la 1re WW »
    L'enjeu de cette intervention consistera à relire les processus mis en place en faveur du retour au travail des mutilés de la Première Guerre mondiale à l'aune du genre. Il s'agira notamment de montrer en quoi la rééducation et la réintégration professionnelles des invalides de la guerre est pensée dans le cadre d'une division genrée du travail, au regard des métiers privilégiés pour leur réinsertion. Cela s'explique à la fois par des considérations économiques mais aussi par la volonté de préserver la masculinité de ceux qui sont perçus comme des héros. Cependant, dans l'entre-deux-guerres, les législations sociales en faveur des victimes de la guerre concernent autant les mutilés que les veuves, ce qui pose de nouvelles problématiques en matière de genre.

Mardi 4 avril 2023 : Surdicécité

  • Catherine Baroin (Université de Rouen Normandie), « Surdité et cécité dans la vie publique et privée du citoyen romain »
    L'idée est d'examiner, dans une perspective anthropologique, les représentations de la surdité et de la cécité dans le monde romain, d’après des sources textuelles, pour la fin de la République et le début de l'Empire : pourquoi surdité et cécité sont-elles considérées comme des défauts, des faiblesses du corps ? Qu’est-ce qu’elles interdisent au citoyen, sur le plan pratique et sur le plan symbolique ? Y a-t-il des figures emblématiques de sourds et d’aveugles dans l’historiographie romaine ? L’exposé s’appuiera notamment sur les travaux de Caroline Husquin.
  • Soline Vennetier (EHESS), « Surdicécité et mobilisations collectives transnationales à la fin du XXe siècle »
    À partir de l'étude des mobilisations collectives ayant contribué depuis les années 1960 à la construction transnationale du champ de la surdicécité comme situation singulière, non réductible à la simple addition de la surdité et de la cécité, l'exposé mettra en évidence la part collective de cette histoire et la dimension construite du statut social et politique des personnes sourdaveugles. Issu d'un travail doctoral en cours autour de ces questions, il proposera également quelques réflexions méthodologiques et historiographiques sur l'histoire de la surdicécité et des personnes sourdaveugles.

Mardi 16 mai 2023 : Handicap et migrations

  • Gildas Brégain (CNRS – Université Rennes II), « Les luttes des tuberculeux nord-africains soignés en institutions »
    Cette communication s'intéressera aux mobilisations collectives des tuberculeux nord-africains (algériens, tunisiens, marocains) au sein des sanatoriums. Je m'intéresserais en particulier aux comité des malades nord-africains du sanatorium de Brevannes, et des relations de ce comité avec l'Amicale locale de la Fédération nationale de Lutte antituberculeuse (FNLA). Ces relations, au départ empreintes de racisme et de préjugés colonialistes de la part de l'Amicale locale de la FNLA, se transforment rapidement, avec la participation de certains nord-africains au sein du bureau de l'Amicale locale de la FNLA, et la prise en compte partielle de leurs revendications (respect des rites musulmans, composition des menus, etc.).
  • Mariana Scarfone (Université de Strasbourg), « Histoire des migrants psychiatrisés »
    On s’attachera à retracer les spécificités et les transformations des paradigmes et des pratiques de la psychiatrie française au contact du phénomène migratoire au cours du XXe siècle, en analysant les discours des médecins à l'égard des patients immigrés, notamment nord-africains, ainsi que les dossiers cliniques individuels.

Mardi 30 mai 2023 : Histoire du sport, handicap et surdité

  • Yacine Tajri (Université Gustave Eiffel), « Vers la scolarisation de la rééducation physique pour les élèves "déficients" dans les années 1940 : trier et redresser les corps »
    Cette présentation a pour ambition de questionner la pratique physique des élèves jugés « déficients » par les autorités médicales et pédagogiques afin de leur proposer une éducation physique spécialisée dans le cadre de l’école dans les années 1940. En croisant différentes sources issues pour la plupart des archives nationales (versements du ministère de l’Éducation nationale ; Jeunesse et Sports), il s’agira de montrer la manière dont les autorités vichyssoises élaborent une rééducation physique des élèves qui ne répondent pas aux critères de la normalité physique de cette période, construite pas des médecins notamment.
  • Didier Séguillon (U. Nanterre), « Le sport silencieux, un élément clé de l’identité sourde dans la première partie du XXe siècle »
    Si pour le sociologue Bernard Mottez, l’identité est un rapport et non une qualification individuelle comme l’entend le sens commun, la question de l’identité sourde est alors non pas qui suis-je mais, qui suis-je par rapport aux autres et que sont les autres, par rapport à moi ? C’est à ce questionnement que notre intervention se propose de réponse et ce, en interrogeant l’histoire du sport silencieux dans la première moitié du XXe siècle, ses filiations, sa constitution aussi, son développement, et enfin, sa reconnaissance nationale et internationale.

Mardi 6 juin 2023 :

Séance reportée

  • Séminaires de recherche – Histoire-Histoire du monde/histoire des mondes – M1/S1-M2/S3
    Suivi et validation – annuel mensuelle = 6 ECTS
    MCC – fiche de lecture
  • Séminaires de recherche – Histoire-Histoire et sciences sociales – M1/S1-M2/S3
    Suivi et validation – annuel mensuelle = 6 ECTS
    MCC – fiche de lecture
  • Séminaires de recherche – Savoirs en sociétés-Santé, médecine et questions sociales – M1/S1-S2-M2/S3-S4
    Suivi et validation – annuel mensuelle = 6 ECTS
    MCC – fiche de lecture
Contacts additionnels
gildas.bregain@ehesp.fr ninon.dubourg@gmail.com
Informations pratiques

s'adresser à fabrice.bertin@ehess.fr; ninon.dubourg@gmail.com; gildas.bregain@ehesp.fr

Direction de travaux des étudiants

sur rendez-vous.

Réception des candidats

sur rendez-vous.

Pré-requis

Aucun

  • 54 bd Raspail
    Salle AS1_08
    54 bd Raspail 75006 Paris
    annuel / bimensuel (1re/3e/5e), mardi 16:00-18:00
    du 29 novembre 2022 au 6 juin 2023
    Nombre de séances : 12

    • Mardi 29 novembre 2022
    • Mardi 6 décembre 2022
    • Mardi 3 janvier 2023
    • Mardi 17 janvier 2023
    • Mardi 31 janvier 2023
    • Mardi 7 février 2023
    • Mardi 7  mars 2023
    • Mardi 21 mars 2023
    • Mardi 4 avril 2023
    • Mardi 16 mai 2023
    • Mardi 30 mai 2023
    • Mardi 6 juin 2023 : séance reportée

Ce séminaire a été mis en place en avril 2021 par deux chercheurs, Ninon Dubourg, docteur en histoire médiévale, chargée de mission et de recherche à l’université de Liège et Gildas Brégain, docteur en histoire contemporaine et chargé de recherche au CNRS. Son intitulé « Construire une histoire du handicap et de la surdité » vise à combler un retard de la recherche francophone et rapprocher la Disability Historie de la Deaf Historie, ce qui est inédit.

Inscrit à l’offre de formation de l’EHESS dès la rentrée universitaire 2021, Fabrice Bertin, docteur en histoire contemporaine et professeur d’histoire-géographie à l’École, devient c-référent pour cette unité d’enseignement. Plus de 23 chercheur·es, historien·nes pour la plupart, ont pu ainsi exposer des approches, des méthodes et des objets nouveaux lors de séances bi-mensuelles (à l’EHESS et à distance)

Le champ disciplinaire de l’histoire du handicap et de la surdité n’est plus considéré sous l’angle de l’histoire sociale de la marginalité, de la pauvreté et de la déviance seulement et connaît un bouleversement sans pareil de ses méthodes et des approches scientifiques. Pendant de nombreuses années, le handicap a été. Dans les années 2000, les chercheurs ont clairement admis que la signification et donc l’expérience du handicap changeaient au fil du temps dans une culture donnée et entre cultures différentes. La littérature sur le handicap s’est rapidement développée après 2005, en s’appuyant sur une approche qui présente le handicap comme un phénomène socioculturel. Dans ces ouvrages, le handicap est mis en contraste avec la normativité au niveau conceptuel : il est conçu comme ce qui s’écarte des « normes » culturellement constituées à un moment donné. En tant qu’histoire culturelle, l’histoire du handicap et de la surdité doit prendre en compte les continuités et les changements passés, en cultivant une vision à long terme entre les époques préhistoriques et contemporaines, révélant les significations plurielles du handicap et de la surdité à travers les siècles. Elle aurait avantage à considérer également les significations du handicap et de la surdité des territoires non occidentaux, afin de mieux cerner la manière dont les nombreuses vagues de migrations ont interprété le handicap et la surdité. Cette approche culturelle permet aussi de mettre en lumière la participation individuelle et collective des personnes aux rituels sociaux à différentes époques, une participation qui peut aussi être éclairée par des disciplines comme l’archéologie, rarement mobilisées.

Accessible à tou·tes (interprétation en LSF et sous-titrage en temps réel), organisé en séances mensuelles de 2 h, le caractère hybride de ces séminaires ont permis de rassembler plus de 300 inscrit·es à travers le monde, étudiant·es ou chercheur·es.