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UE631 - Les grandes controverses du droit constitutionnel contemporain
Lieu et planning
-
Bâtiment EHESS-Condorcet
EHESS, 2 cours des humanités 93300 Aubervilliers
Salle 25-A
2nd semestre / hebdomadaire, mardi 18:30-20:30
du 7 mars 2023 au 6 juin 2023
Nombre de séances : 12
Description
Dernière modification : 20 mai 2022 09:08
- Type d'UE
- Séminaires DE/MC
- Disciplines
- Droit et société
- Page web
- -
- Langues
- allemand anglais français italien
- Mots-clés
- -
- Aires culturelles
- Allemandes (études) Amérique du Nord Europe France
Intervenant·e·s
- Olivier Cayla [référent·e] directeur d'études, EHESS / Centre des savoirs sur le politique : recherches et analyses (CESPRA)
- Otto Pfersmann directeur d'études, EHESS / Laboratoire interdisciplinaire d'études sur les réflexivités. Fonds Yan-Thomas (LIER-FYT)
Avec l’émergence du constitutionnalisme moderne à la fin du XVIIIe siècle en Occident, la question de savoir si les actes des gouvernants sont ou non « constitutionnels » est apparue comme étant cruciale, car elle se comprenait comme étant une qualification juridique conditionnant l’obéissance des gouvernés ou leur désobéissance légitime. Cette question fondamentalement politique et juridique a ainsi alimenté des controverses doctrinales fameuses, de forme apparemment juridique, mais qui, du point de vue de certains théoriciens, restaient difficiles à trancher tant qu’elles demeuraient de simples « opinions » de professeurs de droit.
Avec la consécration, à l’époque contemporaine, de droits et principes fondamentaux formulés par des textes – constitutionnels ou de traités internationaux – spécifiques, que des juridictions nouvelles et spécialisées ont pour mission d’interpréter afin d’imposer aux gouvernants (notamment au législateur) l’obligation d’y conformer leurs actes, on avait pu espérer qu’il s’établisse une doctrine consolidée permettant une connaissance de plus en plus précise et structurée des données en cause. Or il se produit exactement le contraire : les controverses ne font que redoubler et gagner en complexité entre ceux qui cherchent à analyser, comprendre, restituer et systématiser les données du droit positif. Il devient aussi difficile de s’orienter dans les méandres des ordres juridiques que de se forger une opinion fondée et convaincante.
Animé par les deux juristes constitutionnalistes que compte l’EHESS et qui adoptent justement, sur ces questions, des vues controversées, ce séminaire développera l’ensemble de ces dimensions du débat contemporain et portera autant sur les questions relatives à la nature du système juridique que sur celle de la signification concrète des textes fondateurs et leur actualisation jurisprudentielle. Afin de mieux saisir ces enjeux, la discussion s’articulera autour de cas concrets décidés par des juridictions françaises, supranationales et étrangères, en particulier américaines, allemandes, italiennes et autrichiennes.
Le programme détaillé n'est pas disponible.
Master
-
Séminaires de recherche
– Systèmes juridiques et droits de l'homme - Théorie et analyse du droit
– M2/S4
Suivi et validation – semestriel hebdomadaire = 6 ECTS
MCC – fiche de lecture
Renseignements
- Contacts additionnels
- -
- Informations pratiques
- -
- Direction de travaux des étudiants
contacter les enseignants par courriel.
- Réception des candidats
sur rendez-vous.
- Pré-requis
Niveau M1 requis. Formation juridique souhaitée.
Compte rendu
Ce séminaire, animé par Olivier Cayla et Otto Pfersmann, portait sur les questions les plus âprement discutées entre constitutionnalistes et permettait ainsi de les apprécier en rapport avec des problématiques concrètes.
Les organisateurs partent de positions théoriques et méthodologiques antagonistes qu’il convenait de présenter et de confronter avant d’en montrer l’application concrète.
En matière de définition de l’objet il était possible d’opposer une démarche historique et substantielle à une conception formelle et centrée sur la hiérarchie des normes et ses paradoxes apparents.
Il s’agissait ensuite de confronter les voies de la connaissance du droit constitutionnel et donc des théories de l’interprétation. Les démarches réalistes ont été opposées aux théories normativistes et analytiques. Il était particulièrement intéressant de confronter l’usage des conceptions de John Austin et de John Searle dans des perspectives entièrement opposées.
Une large partie des travaux a ensuite porté sur les questions de continuité et de discontinuité constitutionnelle et par conséquent des théories de la révolution juridique. Plusieurs cas concret ont été discutés, en particulier le problème du passage de la Troisième République à la délégation d’une compétence constitutionnelle à Pétain en 1940, le rétablissement de la légalité républicaine en 1944 et la convocation d’une assemblée constituante en 1945. Tout aussi complexe se présente la transition entre la Quatrième et la Cinquième République qui connaît par la suite deux référendums organisés en vertus de dispositions que certains considèrent comme excluant une modification constitutionnelle et d’autres comme parfaitement en accord avec les principes de la Constitution de 1958. Il convenait aussi d’évoquer les éventuelles ruptures jurisprudentielles qui ne se présentent naturellement pas comme des changements constitutionnels et encore moins en discontinuité, mais qui peuvent très bien masquer des modifications majeures sous la forme d’une simple application à un cas concret.
La discussion de ces problèmes permettait une transition très actuelle vers l’analyse du cas israélien. Si la première Knesset n’adopte pas de Constitution, mais vote par la voie d’une résolution la transmission de la compétence constituante aux assemblées futures avec la mission d’élaborer au fur et à mesure des lois fondamentales, le débat israélien hérite de la question non résolue de la nature juridique de ces lois, de leur condition de vote et, éventuellement, de leur révision. Depuis que la Cour suprême a revendiqué dans une célèbre décision de 1994 la compétence d’un contrôle de constitutionnalité qui prendrait ces lois fondamentales comme normes de référence, on a pu observer une politisation exacerbée de ce débat maintenant au centre de la confrontation entre l’actuel gouvernement qui entend réviser la loi fondamentale sur le pouvoir judiciaire et limiter les compétences de la Cour suprême et l’opposition qui considère une telle modification comme juridiquement interdite. Le problème est maintenant dévolu au verdict de la Cour elle-même au moment où est rédigé ce rapport (septembre 2023).
Le problème de la politisation des controverses constitutionnelles a ensuite porté la discussion sur l’analyse du débat américain où un antagonisme croissant peut être observé sans que le monde académique n’arrive à proposer de solution, renforçant au contraire le caractère irréconciliable des points de vue. Cette situation a naturellement été rendue explosive par le revirement jurisprudentiel concernant le droit à l’interruption volontaire de grossesse qu’une célèbre décision semblait avoir consacré depuis 1973, mais que la Cour suprême, maintenant dominée par une majorité conservatrice a considéré comme erronée (Dobbs v. Jackson Women’s Health Organization (24 juin 2022) renvoyant le choix aux législateurs des États.
Une dernière partie du séminaire était consacré aux rapports entre droit constitutionnel des États-membres de l’Union Européenne et les exigences de primauté du droit de l’Union.
Publications
Otto Pfersmann
- « Le normativisme comme théorie de la science du droit », dans Quelles doctrines constitutionnelles aujourd’hui pour quel(s) droit(s) constitutionnel(s) demain, sous la dir. de Xavier Magnon et Stéphane Mouton, Paris, Mare et Martin, 2022, p. 21-47.
- « L’erreur française », Grief, n°9/1, 2022, p. 15-25.
- « Changement contre connaissance », Filosofia dei Diritti Umani - Philosophy of Human Rights, 2023 (1), p. 9-18.
- « L’incompletezza selettiva dello stato di diritto in chiave teorica e comparata: Austria, Germania, Francia et al. » dans Rule of Law come costituzionalismo, sous la dir. de Tommaso Frosini, Il Mulino, 2023, p. 69-87.
Dernière modification : 20 mai 2022 09:08
- Type d'UE
- Séminaires DE/MC
- Disciplines
- Droit et société
- Page web
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- Langues
- allemand anglais français italien
- Mots-clés
- -
- Aires culturelles
- Allemandes (études) Amérique du Nord Europe France
Intervenant·e·s
- Olivier Cayla [référent·e] directeur d'études, EHESS / Centre des savoirs sur le politique : recherches et analyses (CESPRA)
- Otto Pfersmann directeur d'études, EHESS / Laboratoire interdisciplinaire d'études sur les réflexivités. Fonds Yan-Thomas (LIER-FYT)
Avec l’émergence du constitutionnalisme moderne à la fin du XVIIIe siècle en Occident, la question de savoir si les actes des gouvernants sont ou non « constitutionnels » est apparue comme étant cruciale, car elle se comprenait comme étant une qualification juridique conditionnant l’obéissance des gouvernés ou leur désobéissance légitime. Cette question fondamentalement politique et juridique a ainsi alimenté des controverses doctrinales fameuses, de forme apparemment juridique, mais qui, du point de vue de certains théoriciens, restaient difficiles à trancher tant qu’elles demeuraient de simples « opinions » de professeurs de droit.
Avec la consécration, à l’époque contemporaine, de droits et principes fondamentaux formulés par des textes – constitutionnels ou de traités internationaux – spécifiques, que des juridictions nouvelles et spécialisées ont pour mission d’interpréter afin d’imposer aux gouvernants (notamment au législateur) l’obligation d’y conformer leurs actes, on avait pu espérer qu’il s’établisse une doctrine consolidée permettant une connaissance de plus en plus précise et structurée des données en cause. Or il se produit exactement le contraire : les controverses ne font que redoubler et gagner en complexité entre ceux qui cherchent à analyser, comprendre, restituer et systématiser les données du droit positif. Il devient aussi difficile de s’orienter dans les méandres des ordres juridiques que de se forger une opinion fondée et convaincante.
Animé par les deux juristes constitutionnalistes que compte l’EHESS et qui adoptent justement, sur ces questions, des vues controversées, ce séminaire développera l’ensemble de ces dimensions du débat contemporain et portera autant sur les questions relatives à la nature du système juridique que sur celle de la signification concrète des textes fondateurs et leur actualisation jurisprudentielle. Afin de mieux saisir ces enjeux, la discussion s’articulera autour de cas concrets décidés par des juridictions françaises, supranationales et étrangères, en particulier américaines, allemandes, italiennes et autrichiennes.
Le programme détaillé n'est pas disponible.
-
Séminaires de recherche
– Systèmes juridiques et droits de l'homme - Théorie et analyse du droit
– M2/S4
Suivi et validation – semestriel hebdomadaire = 6 ECTS
MCC – fiche de lecture
- Contacts additionnels
- -
- Informations pratiques
- -
- Direction de travaux des étudiants
contacter les enseignants par courriel.
- Réception des candidats
sur rendez-vous.
- Pré-requis
Niveau M1 requis. Formation juridique souhaitée.
-
Bâtiment EHESS-Condorcet
EHESS, 2 cours des humanités 93300 Aubervilliers
Salle 25-A
2nd semestre / hebdomadaire, mardi 18:30-20:30
du 7 mars 2023 au 6 juin 2023
Nombre de séances : 12
Ce séminaire, animé par Olivier Cayla et Otto Pfersmann, portait sur les questions les plus âprement discutées entre constitutionnalistes et permettait ainsi de les apprécier en rapport avec des problématiques concrètes.
Les organisateurs partent de positions théoriques et méthodologiques antagonistes qu’il convenait de présenter et de confronter avant d’en montrer l’application concrète.
En matière de définition de l’objet il était possible d’opposer une démarche historique et substantielle à une conception formelle et centrée sur la hiérarchie des normes et ses paradoxes apparents.
Il s’agissait ensuite de confronter les voies de la connaissance du droit constitutionnel et donc des théories de l’interprétation. Les démarches réalistes ont été opposées aux théories normativistes et analytiques. Il était particulièrement intéressant de confronter l’usage des conceptions de John Austin et de John Searle dans des perspectives entièrement opposées.
Une large partie des travaux a ensuite porté sur les questions de continuité et de discontinuité constitutionnelle et par conséquent des théories de la révolution juridique. Plusieurs cas concret ont été discutés, en particulier le problème du passage de la Troisième République à la délégation d’une compétence constitutionnelle à Pétain en 1940, le rétablissement de la légalité républicaine en 1944 et la convocation d’une assemblée constituante en 1945. Tout aussi complexe se présente la transition entre la Quatrième et la Cinquième République qui connaît par la suite deux référendums organisés en vertus de dispositions que certains considèrent comme excluant une modification constitutionnelle et d’autres comme parfaitement en accord avec les principes de la Constitution de 1958. Il convenait aussi d’évoquer les éventuelles ruptures jurisprudentielles qui ne se présentent naturellement pas comme des changements constitutionnels et encore moins en discontinuité, mais qui peuvent très bien masquer des modifications majeures sous la forme d’une simple application à un cas concret.
La discussion de ces problèmes permettait une transition très actuelle vers l’analyse du cas israélien. Si la première Knesset n’adopte pas de Constitution, mais vote par la voie d’une résolution la transmission de la compétence constituante aux assemblées futures avec la mission d’élaborer au fur et à mesure des lois fondamentales, le débat israélien hérite de la question non résolue de la nature juridique de ces lois, de leur condition de vote et, éventuellement, de leur révision. Depuis que la Cour suprême a revendiqué dans une célèbre décision de 1994 la compétence d’un contrôle de constitutionnalité qui prendrait ces lois fondamentales comme normes de référence, on a pu observer une politisation exacerbée de ce débat maintenant au centre de la confrontation entre l’actuel gouvernement qui entend réviser la loi fondamentale sur le pouvoir judiciaire et limiter les compétences de la Cour suprême et l’opposition qui considère une telle modification comme juridiquement interdite. Le problème est maintenant dévolu au verdict de la Cour elle-même au moment où est rédigé ce rapport (septembre 2023).
Le problème de la politisation des controverses constitutionnelles a ensuite porté la discussion sur l’analyse du débat américain où un antagonisme croissant peut être observé sans que le monde académique n’arrive à proposer de solution, renforçant au contraire le caractère irréconciliable des points de vue. Cette situation a naturellement été rendue explosive par le revirement jurisprudentiel concernant le droit à l’interruption volontaire de grossesse qu’une célèbre décision semblait avoir consacré depuis 1973, mais que la Cour suprême, maintenant dominée par une majorité conservatrice a considéré comme erronée (Dobbs v. Jackson Women’s Health Organization (24 juin 2022) renvoyant le choix aux législateurs des États.
Une dernière partie du séminaire était consacré aux rapports entre droit constitutionnel des États-membres de l’Union Européenne et les exigences de primauté du droit de l’Union.
Publications
Otto Pfersmann
- « Le normativisme comme théorie de la science du droit », dans Quelles doctrines constitutionnelles aujourd’hui pour quel(s) droit(s) constitutionnel(s) demain, sous la dir. de Xavier Magnon et Stéphane Mouton, Paris, Mare et Martin, 2022, p. 21-47.
- « L’erreur française », Grief, n°9/1, 2022, p. 15-25.
- « Changement contre connaissance », Filosofia dei Diritti Umani - Philosophy of Human Rights, 2023 (1), p. 9-18.
- « L’incompletezza selettiva dello stato di diritto in chiave teorica e comparata: Austria, Germania, Francia et al. » dans Rule of Law come costituzionalismo, sous la dir. de Tommaso Frosini, Il Mulino, 2023, p. 69-87.