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UE40 - Les usages du monde (5/5). Décrire la Terre qui change
Lieu et planning
-
Campus Condorcet-Centre de colloques
Centre de colloques, Cours des humanités 93300 Aubervilliers
Salle 3.07
1er semestre / hebdomadaire, lundi 08:30-12:30
du 7 novembre 2022 au 13 février 2023
Nombre de séances : 12
Description
Dernière modification : 15 juin 2022 07:34
- Type d'UE
- Séminaires DE/MC
- Disciplines
- Philosophie et épistémologie
- Page web
- -
- Langues
- -
- Mots-clés
- -
- Aires culturelles
- -
Intervenant·e·s
- Olivier Remaud [référent·e] directeur d'études, EHESS / Centre des savoirs sur le politique : recherches et analyses (CESPRA)
Les géosciences, les animismes autochtones et les nouveaux matérialismes démontrent combien l’inorganique et le biologique sont indissociables. Les plantes et les animaux interagissent avec les rochers, les lichens, les bactéries, les sols autant qu’avec les composants chimiques des mers ou du ciel. Mais aujourd’hui, la biosphère est menacée dans son intégrité et avec elle, l’ensemble des vivants. Comment décrire les situations « chtoniennes » (Donna Haraway) que les humains ont fabriquées ? Pouvons-nous raconter les changements que subit la planète comme nous le faisions auparavant (Amitav Ghosh) ? Une éducation à tous les “other others” (Deborah Bird Rose) qui ont rendu la planète habitable contribuerait-elle à réduire notre anxiété à l’égard du futur ?
Le programme détaillé n'est pas disponible.
Master
-
Séminaires de recherche
– Philosophie-Philosophie sociale et politique
– M1/S1-M2/S3
Suivi et validation – semestriel hebdomadaire = 12 ECTS
MCC – exposé oral, fiche de lecture
Renseignements
- Contacts additionnels
- -
- Informations pratiques
- -
- Direction de travaux des étudiants
- -
- Réception des candidats
- -
- Pré-requis
- -
Compte rendu
Dans le séminaire de cette année, il s’agissait d’abord de mettre en rapport deux modalités de changement qui affectent la planète Terre. D’un côté, les sciences, et notamment les travaux en minéralogie et en biogéologie de Robert Hazen et d’Isabelle Daniel, nous montrent qu’une série d’interactions entre les éléments, fruits du volcanisme, de l’hydrothermalisme et de la tectonique des plaques, a produit il y a environ 3,85 milliards d’années les premiers spasmes de la biosphère. Depuis ce temps-là, la Terre garde dans ses roches, ses glaces et autres milieux de vie, les traces de ses états sans cesse modifiés par d’autres êtres que nous. De l’autre côté, nos modèles de consommation actuels, notre obsession extractiviste et notre indifférence à l’égard de ce qui n’est pas nous, bouleversent les équilibres acquis de la Terre elle-même. Au point que nous vivons aujourd’hui, comme le rappelle l’anthropologue Gísli Pálsson, « dans la position étrange qui consiste à la fois à lire et à graver (notre) avenir dans les couches géologiques » (Ma maison au pied du volcan, trad. C. Chichereau, Gaïa, 2020, p. 251). Comment décrire et interpréter ensemble ces deux « régimes de temporalité » (François Hartog) qui s’entremêlent de plus en plus dans ce que l’on nomme l’« Anthropocène » ? Une attention au processus longs de la « géodiversité » (pour reprendre ce terme de Claire Portal et François Bétard) nous permettrait-elle de prendre conscience des urgences contemporaines, de réduire notre empreinte et d’éviter les désastres futurs ?
Notre hypothèse était qu’une telle attention supposerait déjà de raconter des histoires qui redonnent leur place sur Terre aux êtres jusqu’ici négligés, comme le souligne Amitav Ghosh (Le grand dérangement. D’autres récits à l’ère de la crise climatique, trad. M. Iserte & N. Haeringer, Wildproject, 2021). Dans ces histoires, les éléments et les entités naturelles – ouragans, pluies, feux, vents, neiges, glaciers, montagnes, fleuves, océans, nuages, etc. –, (re)deviendraient des personnages à part entière dans nos destins communs. Ainsi comprendrions-nous mieux la dynamique vaste et profonde des échanges qui animent le « système-Terre ». Nous admettrions enfin que nous ne sommes pas les seuls et que nous vivons parmi des collectifs non-humains.
Nous avons tenté d’illustrer cette hypothèse en reprenant les travaux d’Anna Lowenhaupt Tsing (autour du concept de « perturbation ») ainsi que ceux d’Elizabeth Rush (sur la montée des eaux et la destruction des écosystèmes littoraux), de Sarah Nuttall (sur les notions de « pluvialité » et d’« hydro-colonialisme ») et de Lynn Margulis (sur la « symbiose » dans l’évolution). Nous avons reposé la question cosmopolitique des « conditions d’existence » qui, selon Isabelle Stengers, concerne tous les assemblages, précaires par nature, d’humains et de non-humains, éléments inclus, unis par des liens de dépendance réciproque. Puis, nous avons sollicité les « études multispécifiques » qui se situent au croisement des sciences éthologiques et de l’anthropologie de la nature, en relisant les travaux de Deborah Bird Rose sur les chiens sauvages d’Australie et de Thom Van Dooren sur les corbeaux. Enfin, les séances dédiées aux éco-émotions, dont l’éco-anxiété, l’éco-chagrin ou l’éco-colère, nous ont invité à nous demander si l’imagination d’un « co-devenir » (concept central des études multispécifiques) n'était pas la clé des relations entre humains et non-humains dans un monde de plus en plus dégradé.
Publications
- Quand les montagnes dansent. Récits de la Terre intime, Arles, Actes Sud, collection « Mondes sauvages », postface de Valentine Goby, 2023, 240 p.
- Penser comme un iceberg, Arles, Actes Sud, réédition en collection de poche « Babel », postface d’Anne-Marie Garat, 2023, 240 p.
- « Raconter le vivant », dans Minor Universality, sous la dir. de M. Messling et J. Tinius, De Gruyter, Berlin-Boston, 2023, p. 351-366
- « Lueurs. Sur La Montagne » de Thomas Salvador, publié dans AOC (Analyse, Opinion, Critique), 21 février 2023 : https://aoc.media/critique/2023/02/21/lueurs-sur-la-montagne-de-thomas-salvador/
- « Trouble against trouble », dans Reparation, Restitution and the Politics of Memory/Réparation, restitution et les politiques de la mémoire, sous la dir. de M. Laarmann, C. Ndé Fongang, C. Seemann & L. Vordermayer, De Gruyter, Berlin-Boston, 2023, p. 245-255.
Dernière modification : 15 juin 2022 07:34
- Type d'UE
- Séminaires DE/MC
- Disciplines
- Philosophie et épistémologie
- Page web
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- Langues
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- Mots-clés
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- Aires culturelles
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Intervenant·e·s
- Olivier Remaud [référent·e] directeur d'études, EHESS / Centre des savoirs sur le politique : recherches et analyses (CESPRA)
Les géosciences, les animismes autochtones et les nouveaux matérialismes démontrent combien l’inorganique et le biologique sont indissociables. Les plantes et les animaux interagissent avec les rochers, les lichens, les bactéries, les sols autant qu’avec les composants chimiques des mers ou du ciel. Mais aujourd’hui, la biosphère est menacée dans son intégrité et avec elle, l’ensemble des vivants. Comment décrire les situations « chtoniennes » (Donna Haraway) que les humains ont fabriquées ? Pouvons-nous raconter les changements que subit la planète comme nous le faisions auparavant (Amitav Ghosh) ? Une éducation à tous les “other others” (Deborah Bird Rose) qui ont rendu la planète habitable contribuerait-elle à réduire notre anxiété à l’égard du futur ?
Le programme détaillé n'est pas disponible.
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Séminaires de recherche
– Philosophie-Philosophie sociale et politique
– M1/S1-M2/S3
Suivi et validation – semestriel hebdomadaire = 12 ECTS
MCC – exposé oral, fiche de lecture
- Contacts additionnels
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- Informations pratiques
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- Direction de travaux des étudiants
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- Réception des candidats
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- Pré-requis
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Campus Condorcet-Centre de colloques
Centre de colloques, Cours des humanités 93300 Aubervilliers
Salle 3.07
1er semestre / hebdomadaire, lundi 08:30-12:30
du 7 novembre 2022 au 13 février 2023
Nombre de séances : 12
Dans le séminaire de cette année, il s’agissait d’abord de mettre en rapport deux modalités de changement qui affectent la planète Terre. D’un côté, les sciences, et notamment les travaux en minéralogie et en biogéologie de Robert Hazen et d’Isabelle Daniel, nous montrent qu’une série d’interactions entre les éléments, fruits du volcanisme, de l’hydrothermalisme et de la tectonique des plaques, a produit il y a environ 3,85 milliards d’années les premiers spasmes de la biosphère. Depuis ce temps-là, la Terre garde dans ses roches, ses glaces et autres milieux de vie, les traces de ses états sans cesse modifiés par d’autres êtres que nous. De l’autre côté, nos modèles de consommation actuels, notre obsession extractiviste et notre indifférence à l’égard de ce qui n’est pas nous, bouleversent les équilibres acquis de la Terre elle-même. Au point que nous vivons aujourd’hui, comme le rappelle l’anthropologue Gísli Pálsson, « dans la position étrange qui consiste à la fois à lire et à graver (notre) avenir dans les couches géologiques » (Ma maison au pied du volcan, trad. C. Chichereau, Gaïa, 2020, p. 251). Comment décrire et interpréter ensemble ces deux « régimes de temporalité » (François Hartog) qui s’entremêlent de plus en plus dans ce que l’on nomme l’« Anthropocène » ? Une attention au processus longs de la « géodiversité » (pour reprendre ce terme de Claire Portal et François Bétard) nous permettrait-elle de prendre conscience des urgences contemporaines, de réduire notre empreinte et d’éviter les désastres futurs ?
Notre hypothèse était qu’une telle attention supposerait déjà de raconter des histoires qui redonnent leur place sur Terre aux êtres jusqu’ici négligés, comme le souligne Amitav Ghosh (Le grand dérangement. D’autres récits à l’ère de la crise climatique, trad. M. Iserte & N. Haeringer, Wildproject, 2021). Dans ces histoires, les éléments et les entités naturelles – ouragans, pluies, feux, vents, neiges, glaciers, montagnes, fleuves, océans, nuages, etc. –, (re)deviendraient des personnages à part entière dans nos destins communs. Ainsi comprendrions-nous mieux la dynamique vaste et profonde des échanges qui animent le « système-Terre ». Nous admettrions enfin que nous ne sommes pas les seuls et que nous vivons parmi des collectifs non-humains.
Nous avons tenté d’illustrer cette hypothèse en reprenant les travaux d’Anna Lowenhaupt Tsing (autour du concept de « perturbation ») ainsi que ceux d’Elizabeth Rush (sur la montée des eaux et la destruction des écosystèmes littoraux), de Sarah Nuttall (sur les notions de « pluvialité » et d’« hydro-colonialisme ») et de Lynn Margulis (sur la « symbiose » dans l’évolution). Nous avons reposé la question cosmopolitique des « conditions d’existence » qui, selon Isabelle Stengers, concerne tous les assemblages, précaires par nature, d’humains et de non-humains, éléments inclus, unis par des liens de dépendance réciproque. Puis, nous avons sollicité les « études multispécifiques » qui se situent au croisement des sciences éthologiques et de l’anthropologie de la nature, en relisant les travaux de Deborah Bird Rose sur les chiens sauvages d’Australie et de Thom Van Dooren sur les corbeaux. Enfin, les séances dédiées aux éco-émotions, dont l’éco-anxiété, l’éco-chagrin ou l’éco-colère, nous ont invité à nous demander si l’imagination d’un « co-devenir » (concept central des études multispécifiques) n'était pas la clé des relations entre humains et non-humains dans un monde de plus en plus dégradé.
Publications
- Quand les montagnes dansent. Récits de la Terre intime, Arles, Actes Sud, collection « Mondes sauvages », postface de Valentine Goby, 2023, 240 p.
- Penser comme un iceberg, Arles, Actes Sud, réédition en collection de poche « Babel », postface d’Anne-Marie Garat, 2023, 240 p.
- « Raconter le vivant », dans Minor Universality, sous la dir. de M. Messling et J. Tinius, De Gruyter, Berlin-Boston, 2023, p. 351-366
- « Lueurs. Sur La Montagne » de Thomas Salvador, publié dans AOC (Analyse, Opinion, Critique), 21 février 2023 : https://aoc.media/critique/2023/02/21/lueurs-sur-la-montagne-de-thomas-salvador/
- « Trouble against trouble », dans Reparation, Restitution and the Politics of Memory/Réparation, restitution et les politiques de la mémoire, sous la dir. de M. Laarmann, C. Ndé Fongang, C. Seemann & L. Vordermayer, De Gruyter, Berlin-Boston, 2023, p. 245-255.