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UE275 - Responsabilité : autour des liens entre les personnes et les choses (époques moderne et contemporaine)


Lieu et planning


  • Campus Condorcet-Centre de colloques
    Centre de colloques, Cours des humanités 93300 Aubervilliers
    Salle 25-A
    1er semestre / hebdomadaire, jeudi 16:30-18:30
    du 10 novembre 2022 au 9 février 2023
    Nombre de séances : 12


Description


Dernière modification : 17 mai 2022 17:27

Type d'UE
Séminaires DE/MC
Disciplines
Histoire, Sociologie
Page web
-
Langues
français
Mots-clés
Droit, normes et société Histoire Sociologie
Aires culturelles
Europe Ibérique (monde) Méditerranéens (mondes)
Intervenant·e·s
  • Simona Cerutti [référent·e]   directrice d'études, EHESS / Laboratoire de démographie et d'histoire sociale (CRH-LaDéHiS)
  • Emilia Schijman   chargée de recherche, CNRS / Centre Maurice-Halbwachs (CMH)
  • Alessandro Buono   professeur associé, Université de Pise

Le séminaire étudiera le concept de responsabilité comme clé d'entrée pour l'analyse des relations entre les personnes, les choses et leurs communautés d’appartenance, à travers une série de terrains engageant les époques modernes et contemporaines. Exercer activement une responsabilité sur une personne, une chose, ou être tenu pour responsable par cette personne ou cette chose : ces deux notions montrent que l’agency est loin d’être du côté du seul individu, et restituent toutes les contraintes que les choses sont en mesure de faire peser sur les statuts sociaux. 

Nous aborderons ces thèmes dans une perspective interdisciplinaire (histoire, sociologie, droit). La première partie du séminaire sera consacrée à des lectures de textes qui ont articulé la notion de responsabilité avec celle de don, de contrat, de dette, de transmission et de propriété. Par la suite, des études de cas seront présentées, qui mettent à l’épreuve la pertinence des concepts et des instruments d’analyse discutés.

Le programme sera disponible lors de la première séance du séminaire.


Master


  • Séminaires de recherche – Histoire-Histoire du monde/histoire des mondes – M1/S1-M2/S3
    Suivi et validation – semestriel hebdomadaire = 6 ECTS
    MCC – exposé oral
  • Séminaires de recherche – Histoire-Histoire et sciences sociales – M1/S1-M2/S3
    Suivi et validation – semestriel hebdomadaire = 6 ECTS
    MCC – exposé oral

Renseignements


Contacts additionnels
-
Informations pratiques

par courriel auprès des enseignants.

Direction de travaux des étudiants

rendez-vous par courriel : simona.cerutti@ehess.fr

Réception des candidats

Simona Cerutti : Jeudi de 10 h à 12 h, bureau B4-05, 54 bd Raspail et sur rendez-vous par courriel (simona.cerutti@ehess.fr)

Emilia Schijman : sur rendez-vous par courriel (emilia.schijman@ens.fr)

Alessandro Buono : sur rendez-vous par courriel (alessandro.buono@unipi.it)

Pré-requis

tous niveaux.


Compte rendu


Destiné à un public d’étudiants et de chercheurs en histoire, sociologie et droit, le séminaire de 2022-2023 a été centré sur la responsabilité en tant que clé d’analyse du lien social. Nous nous sommes départis d’une perspective anthropocentrique, en mettant l’accent sur la capacité des choses à créer et stabiliser des configurations sociales. À travers l’analyse d’une pluralité de cas d’études issus largement de nos recherches respectives, nous avons pu mesurer à quel point, dans des situations diverses (que nous avons essayé de qualifier), la tutelle des choses et leur prise en charge sont à l’origine de la formation de groups dont ces tâches dessinent les contours.

La première partie du séminaire a été consacrée à une lecture critique de l'Essai sur le don de Marcel Mauss. Par le biais d'une discussion commune, nous avons situé l'auteur dans le contexte de l'école durkheimienne, et essayé de reconstituer le cadre dans lequel s’inscrit sa réflexion autour de la possibilité de refonder les liens de réciprocité dans les sociétés libérales de la fin du XIXe et du début du XXe siècle.  Nous avons abordé certaines lectures critiques du concept de réciprocité sociale (issues des travaux de Pierre Bourdieu, Florence Weber, Stéphanie Frank, etc.), et notamment la proposition de recherche avancée par l’anthropologue Annette Weiner au cours des années.

Sa critique de la notion de réciprocité passe exactement par une lecture des travaux de Marcel Mauss, et la mise en discussion d’une « idéologie » de l’échange social qui, selon elle, la traverse ; celle-ci aurait pour effet d’avoir légitimé, dans le passé, les autorités établies (les églises ainsi que les aristocraties), et finalement, au XIXe siècle, d’avoir accompagné la division du travail capitaliste.  D’après Weiner, lire les données ethnographiques à partir de la notion de réciprocité, en tant que ciment social, signifie déplacer une théorie du processus évolutif créée pour rendre compte de la modernisation européenne, vers les sociétés dites primitives.  La proposition de Weiner consiste donc à remplacer la notion de réciprocité avec celle, beaucoup plus riche, de « reproduction ». 

À travers ce concept, qui nait de l’observation sur le terrain de la pluralité d’opérations accomplies par les acteurs sociaux pour instituer des formes de continuités et de stabilité dans les temps, Weiner montre l’enchevêtrement qui se réalise entre personnes et choses, entre entretien des relations sociale et soin porté aux choses, à leur conservation et leur transmission.

Le concept de reproduction nous a donc fourni une nouvelle clé d'entrée pour analyser de différents terrais de recherche qui, à leur tour, en ont mise à l’épreuve l’efficacité.

Dans la deuxième partie du séminaire, plusieurs séances ont été consacrées au thème de l'enchevêtrement entre personnes et choses, qui a été abordé à travers des lectures d’ouvrages d’historiens, d’anthropologues, de sociologues.  Les recherches des archéologues Ian Hodder et Bjørnar Olsen, qui portent sur le thème de l'enchaînement progressif des personnes aux soins des choses, nous ont été particulièrement utiles. En particulier, nous avons travaillé autour de la critique, qu’ils développent, de l'utilisation métaphorique de la « matérialité » caractérisant certaines approches historiennes et sociologiques (même les lectures prudentes et moins anthropocentriques telles que la Théorie de l'Acteur-Réseau).

Parallèlement, nous avons abordé une lecture critique de l’approche présentée par de David Graeber et David Wengrow, dans The Dawn of Everything (2021), qui constitue la contribution la plus récente à ce débat sur la relation entre individus et ressources matérielles. À partir de l’approche morphologique adopté par Marcel Mauss dans son analyse de sociétés indigènes de l’Amérique du Nord, les deux auteurs construisent un contre-récit de l'histoire de l'humanité ; celui-ci se fonde précisément sur le refus de l'enfermement des sociétés dans cette spirale de « reproduction » décrite aussi bien par Ian Hodder que par Annette Weiner.

La troisième et dernière partie du séminaire a été consacrée à la nouvelle perspective sur les relations entre personnes et choses qui a été ouverte par les travaux sociologiques sur le care.  La discussion avec Patricia Paperman, invitée au séminaire, a été importante, ainsi que la comparaison que nous avons pu établir entre ces études contemporaines et des recherches portant sur les sociétés européennes de l’époque moderne (avec les travaux de Bernard Dérouet en particulier).

En conclusion, des travaux d’étudiants ont repris des fils de cette perspective autour de la responsabilité liant des personnes et des choses, qui va être développée l’année prochaine.

Publications
  • «Préfacio» à A forma e o tempo. Decifrando Carlo Ginzburg, sous la dir. de D. F. Carneiro et Daniel Rezende Berbert Dias, Palameda, 2022.
    «Misericordia», dans Il lessico della modernità, sous la dir. de S. Bassi, Carocci, Rome, 2023.

Dernière modification : 17 mai 2022 17:27

Type d'UE
Séminaires DE/MC
Disciplines
Histoire, Sociologie
Page web
-
Langues
français
Mots-clés
Droit, normes et société Histoire Sociologie
Aires culturelles
Europe Ibérique (monde) Méditerranéens (mondes)
Intervenant·e·s
  • Simona Cerutti [référent·e]   directrice d'études, EHESS / Laboratoire de démographie et d'histoire sociale (CRH-LaDéHiS)
  • Emilia Schijman   chargée de recherche, CNRS / Centre Maurice-Halbwachs (CMH)
  • Alessandro Buono   professeur associé, Université de Pise

Le séminaire étudiera le concept de responsabilité comme clé d'entrée pour l'analyse des relations entre les personnes, les choses et leurs communautés d’appartenance, à travers une série de terrains engageant les époques modernes et contemporaines. Exercer activement une responsabilité sur une personne, une chose, ou être tenu pour responsable par cette personne ou cette chose : ces deux notions montrent que l’agency est loin d’être du côté du seul individu, et restituent toutes les contraintes que les choses sont en mesure de faire peser sur les statuts sociaux. 

Nous aborderons ces thèmes dans une perspective interdisciplinaire (histoire, sociologie, droit). La première partie du séminaire sera consacrée à des lectures de textes qui ont articulé la notion de responsabilité avec celle de don, de contrat, de dette, de transmission et de propriété. Par la suite, des études de cas seront présentées, qui mettent à l’épreuve la pertinence des concepts et des instruments d’analyse discutés.

Le programme sera disponible lors de la première séance du séminaire.

  • Séminaires de recherche – Histoire-Histoire du monde/histoire des mondes – M1/S1-M2/S3
    Suivi et validation – semestriel hebdomadaire = 6 ECTS
    MCC – exposé oral
  • Séminaires de recherche – Histoire-Histoire et sciences sociales – M1/S1-M2/S3
    Suivi et validation – semestriel hebdomadaire = 6 ECTS
    MCC – exposé oral
Contacts additionnels
-
Informations pratiques

par courriel auprès des enseignants.

Direction de travaux des étudiants

rendez-vous par courriel : simona.cerutti@ehess.fr

Réception des candidats

Simona Cerutti : Jeudi de 10 h à 12 h, bureau B4-05, 54 bd Raspail et sur rendez-vous par courriel (simona.cerutti@ehess.fr)

Emilia Schijman : sur rendez-vous par courriel (emilia.schijman@ens.fr)

Alessandro Buono : sur rendez-vous par courriel (alessandro.buono@unipi.it)

Pré-requis

tous niveaux.

  • Campus Condorcet-Centre de colloques
    Centre de colloques, Cours des humanités 93300 Aubervilliers
    Salle 25-A
    1er semestre / hebdomadaire, jeudi 16:30-18:30
    du 10 novembre 2022 au 9 février 2023
    Nombre de séances : 12

Destiné à un public d’étudiants et de chercheurs en histoire, sociologie et droit, le séminaire de 2022-2023 a été centré sur la responsabilité en tant que clé d’analyse du lien social. Nous nous sommes départis d’une perspective anthropocentrique, en mettant l’accent sur la capacité des choses à créer et stabiliser des configurations sociales. À travers l’analyse d’une pluralité de cas d’études issus largement de nos recherches respectives, nous avons pu mesurer à quel point, dans des situations diverses (que nous avons essayé de qualifier), la tutelle des choses et leur prise en charge sont à l’origine de la formation de groups dont ces tâches dessinent les contours.

La première partie du séminaire a été consacrée à une lecture critique de l'Essai sur le don de Marcel Mauss. Par le biais d'une discussion commune, nous avons situé l'auteur dans le contexte de l'école durkheimienne, et essayé de reconstituer le cadre dans lequel s’inscrit sa réflexion autour de la possibilité de refonder les liens de réciprocité dans les sociétés libérales de la fin du XIXe et du début du XXe siècle.  Nous avons abordé certaines lectures critiques du concept de réciprocité sociale (issues des travaux de Pierre Bourdieu, Florence Weber, Stéphanie Frank, etc.), et notamment la proposition de recherche avancée par l’anthropologue Annette Weiner au cours des années.

Sa critique de la notion de réciprocité passe exactement par une lecture des travaux de Marcel Mauss, et la mise en discussion d’une « idéologie » de l’échange social qui, selon elle, la traverse ; celle-ci aurait pour effet d’avoir légitimé, dans le passé, les autorités établies (les églises ainsi que les aristocraties), et finalement, au XIXe siècle, d’avoir accompagné la division du travail capitaliste.  D’après Weiner, lire les données ethnographiques à partir de la notion de réciprocité, en tant que ciment social, signifie déplacer une théorie du processus évolutif créée pour rendre compte de la modernisation européenne, vers les sociétés dites primitives.  La proposition de Weiner consiste donc à remplacer la notion de réciprocité avec celle, beaucoup plus riche, de « reproduction ». 

À travers ce concept, qui nait de l’observation sur le terrain de la pluralité d’opérations accomplies par les acteurs sociaux pour instituer des formes de continuités et de stabilité dans les temps, Weiner montre l’enchevêtrement qui se réalise entre personnes et choses, entre entretien des relations sociale et soin porté aux choses, à leur conservation et leur transmission.

Le concept de reproduction nous a donc fourni une nouvelle clé d'entrée pour analyser de différents terrais de recherche qui, à leur tour, en ont mise à l’épreuve l’efficacité.

Dans la deuxième partie du séminaire, plusieurs séances ont été consacrées au thème de l'enchevêtrement entre personnes et choses, qui a été abordé à travers des lectures d’ouvrages d’historiens, d’anthropologues, de sociologues.  Les recherches des archéologues Ian Hodder et Bjørnar Olsen, qui portent sur le thème de l'enchaînement progressif des personnes aux soins des choses, nous ont été particulièrement utiles. En particulier, nous avons travaillé autour de la critique, qu’ils développent, de l'utilisation métaphorique de la « matérialité » caractérisant certaines approches historiennes et sociologiques (même les lectures prudentes et moins anthropocentriques telles que la Théorie de l'Acteur-Réseau).

Parallèlement, nous avons abordé une lecture critique de l’approche présentée par de David Graeber et David Wengrow, dans The Dawn of Everything (2021), qui constitue la contribution la plus récente à ce débat sur la relation entre individus et ressources matérielles. À partir de l’approche morphologique adopté par Marcel Mauss dans son analyse de sociétés indigènes de l’Amérique du Nord, les deux auteurs construisent un contre-récit de l'histoire de l'humanité ; celui-ci se fonde précisément sur le refus de l'enfermement des sociétés dans cette spirale de « reproduction » décrite aussi bien par Ian Hodder que par Annette Weiner.

La troisième et dernière partie du séminaire a été consacrée à la nouvelle perspective sur les relations entre personnes et choses qui a été ouverte par les travaux sociologiques sur le care.  La discussion avec Patricia Paperman, invitée au séminaire, a été importante, ainsi que la comparaison que nous avons pu établir entre ces études contemporaines et des recherches portant sur les sociétés européennes de l’époque moderne (avec les travaux de Bernard Dérouet en particulier).

En conclusion, des travaux d’étudiants ont repris des fils de cette perspective autour de la responsabilité liant des personnes et des choses, qui va être développée l’année prochaine.

Publications
  • «Préfacio» à A forma e o tempo. Decifrando Carlo Ginzburg, sous la dir. de D. F. Carneiro et Daniel Rezende Berbert Dias, Palameda, 2022.
    «Misericordia», dans Il lessico della modernità, sous la dir. de S. Bassi, Carocci, Rome, 2023.