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UE189 - Anthropologie de la mémoire


Lieu et planning


  • Musée du quai Branly-Jacques Chirac
    37 quai Branly 75007 Paris
    Salle de cours 2
    annuel / hebdomadaire, mercredi 14:00-17:00
    du 14 décembre 2022 au 19 avril 2023
    Nombre de séances : 14


Description


Dernière modification : 16 mai 2022 14:54

Type d'UE
Séminaires DE/MC
Disciplines
Anthropologie sociale, ethnographie et ethnologie
Page web
-
Langues
anglais français
Mots-clés
Anthropologie et linguistique Anthropologie visuelle Mémoire
Aires culturelles
Amérique du Nord Amérique du Sud Océanie
Intervenant·e·s
  • Carlo Severi [référent·e]   directeur d'études (retraité·e), EHESS / Laboratoire d'anthropologie sociale (LAS)

Dans le but de préciser et d’enrichir le concept de mémoire sociale, nous avons, ces dernières années, identifié deux formes de tradition iconographique. L’une, liée à l’exercice conscient d’une mémoire, permet de penser autrement l’opposition entre l’oral et l’écrit. L’autre, qui implique la mise en place d’une agentivité attribuée aux images, renouvelle la théorie de l’action rituelle. En nous appuyant sur l’analyse de cas méso-américains, amazoniens et océaniens, nous allons cette année introduire une troisième forme de tradition iconographique, en présentant, une première ébauche d’une théorie relationnelle du sacrifice, fondée sur une nouvelle interprétation de l’aspect « magique » que Marcel Mauss attribuait à l’échange d’objets. À partir de ces nouvelles analyses, nous réfléchirons à une lecture critique, et à un développement possible, de certaines thèses majeures de La Pensée Sauvage de Claude Lévi-Strauss. 

Le programme détaillé n'est pas disponible.


Master


Cette UE n'est rattachée à aucune formation de master.


Renseignements


Contacts additionnels
-
Informations pratiques
-
Direction de travaux des étudiants

sur rendez-vous au Laboratoire d'anthropologie sociale, Collège de France, 52 Rue du Cardinal Lemoine 75005 Paris.

Réception des candidats

sur rendez-vous au Laboratoire d'anthropologie sociale, Collège de France, 52 Rue du Cardinal Lemoine 75005 Paris.

Pré-requis
-

Compte rendu


Les raisons du sacrifice. L’anthropologie de la mémoire comme château de cartes

Un château de cartes. Pourquoi cette image peut-elle être utile à décrire le travail de construction d’une théorie, celle d‘une anthropologie de la mémoire, auquel nous avons consacré notre séminaire pendant une vingtaine d’années ? D’abord, cette image signale qu’une théorie anthropologique  est fondée sur des faits observés sur un terrain, et sur la nature de la relation qui, sur ce terrain, a permis de les observer. Elle peut donc, à tout moment, tomber.

Mais l’image du château montre aussi que l’équilibre de l’édifice, lui, dépend de raisons internes. Chaque carte contribue à l’équilibre général du château, comme chaque pas de la formulation d’une théorie détermine sa cohérence. Adopter le point de vue d’un château de cartes conduit donc à étudier les relations entre les concepts que la théorie utilise. Dans cette perspective, étudier la position de chaque carte permet de reconstruire non plus l’évolution dans le temps du travail de construction qui a conduit à la formulation de la théorie, mais plutôt les relations des concepts entre eux, l’explicitation des choix qui ont conduit à leur formulation et les erreurs éventuelles de calcul qui mettent en péril l’ensemble.

Nous avons cette année tenté de soumettre l’anthropologie de la mémoire à ce type d’observation. La thèse que nous essayons de démontrer est que l’anthropologie de la mémoire fait émerger un type de pensée que d’autres perspectives anthropologiques ont systématiquement négligé.

Résumons donc notre thèse. Pour introduire son analyse de la pensée sauvage, Lévi-Strauss oppose deux thèmes classiques : le Totémisme et le Sacrifice. Dans l’univers du totémisme – soutient Lévi-Strauss – une pensée binaire s’exprime : les espèces animales sont prises par les groupes sociaux comme des figures de l’identité qui les distinguent les uns des autres. Lévi-Strauss compare ce système d’oppositions binaires (où il voit le vrai modèle de la pensée sauvage) au sacrifice où, selon une logique opposée à celle qui régit le Totémisme, les espèces animales peuvent se rassembler dans des groupes ou leurs différences n’opèrent plus. Au sein d’un sacrifice, écrit-Lévi Strauss en commentant les écrits d’Evans-Pritchard sur cette question, « un œuf vaut une poule, une poule une chèvre, une chèvre un bœuf ». En d’autres termes, les marques distinctives des espèces naturelles semblent disparaître, ou perdre de pertinence par rapport aux relations établies entre les acteurs du rituel : l’offrande peut s’incarner en une suite apparemment variable d’espèces animales, parce que la catégorie à laquelle elles appartiennent dans le contexte rituel, est porteur d’une subjectivité face à d’autres subjectivités. La porte est ouverte alors, au sein d’un modèle nouveau de pensée qui s’inspire d’une analyse du sacrifice, pour l’analyse d’une pensée de l’imitation, du mimétisme, de la métamorphose. D’autres configurations conceptuelles, liées à la compréhension du changement, du conflit culturel comme à l’interprétation de l’action rituelle surgissent. En nous appuyant sur plusieurs cas ethnographiques, nous avons montré comment l’anthropologie de la mémoire conduit à la compréhension de ces nouveaux faits et de ces nouvelles configurations conceptuelles, qu’on pourrait appeler les « raisons du sacrifice ».

Publications
  • « Structure et forme originaire », dans Les idées de l’anthropologie, sous la dir. de Descola et al., Paris, 2022, Éditions de l’EHESS, Nouvelle édition en format Poche, p. 203-250.
  • « Boas and Semper: From the Biology of Images to Primitive Art », dans Art and Anthropology, sous la dir. de Peter Probst et Joseph Imorde, Getty Publications, Los Angeles, 2023, p. 91-104.
  •  « Antenati a venire: Primitivismo, Antropologia e Storia dell’Arte globale », dans Cultura Visuale in Italia, sous la dir. de Cometa,. Coglitore et Cammarata, Milan, 2023, Meltemi, p. 389-409.

Dernière modification : 16 mai 2022 14:54

Type d'UE
Séminaires DE/MC
Disciplines
Anthropologie sociale, ethnographie et ethnologie
Page web
-
Langues
anglais français
Mots-clés
Anthropologie et linguistique Anthropologie visuelle Mémoire
Aires culturelles
Amérique du Nord Amérique du Sud Océanie
Intervenant·e·s
  • Carlo Severi [référent·e]   directeur d'études (retraité·e), EHESS / Laboratoire d'anthropologie sociale (LAS)

Dans le but de préciser et d’enrichir le concept de mémoire sociale, nous avons, ces dernières années, identifié deux formes de tradition iconographique. L’une, liée à l’exercice conscient d’une mémoire, permet de penser autrement l’opposition entre l’oral et l’écrit. L’autre, qui implique la mise en place d’une agentivité attribuée aux images, renouvelle la théorie de l’action rituelle. En nous appuyant sur l’analyse de cas méso-américains, amazoniens et océaniens, nous allons cette année introduire une troisième forme de tradition iconographique, en présentant, une première ébauche d’une théorie relationnelle du sacrifice, fondée sur une nouvelle interprétation de l’aspect « magique » que Marcel Mauss attribuait à l’échange d’objets. À partir de ces nouvelles analyses, nous réfléchirons à une lecture critique, et à un développement possible, de certaines thèses majeures de La Pensée Sauvage de Claude Lévi-Strauss. 

Le programme détaillé n'est pas disponible.

Cette UE n'est rattachée à aucune formation de master.

Contacts additionnels
-
Informations pratiques
-
Direction de travaux des étudiants

sur rendez-vous au Laboratoire d'anthropologie sociale, Collège de France, 52 Rue du Cardinal Lemoine 75005 Paris.

Réception des candidats

sur rendez-vous au Laboratoire d'anthropologie sociale, Collège de France, 52 Rue du Cardinal Lemoine 75005 Paris.

Pré-requis
-
  • Musée du quai Branly-Jacques Chirac
    37 quai Branly 75007 Paris
    Salle de cours 2
    annuel / hebdomadaire, mercredi 14:00-17:00
    du 14 décembre 2022 au 19 avril 2023
    Nombre de séances : 14

Les raisons du sacrifice. L’anthropologie de la mémoire comme château de cartes

Un château de cartes. Pourquoi cette image peut-elle être utile à décrire le travail de construction d’une théorie, celle d‘une anthropologie de la mémoire, auquel nous avons consacré notre séminaire pendant une vingtaine d’années ? D’abord, cette image signale qu’une théorie anthropologique  est fondée sur des faits observés sur un terrain, et sur la nature de la relation qui, sur ce terrain, a permis de les observer. Elle peut donc, à tout moment, tomber.

Mais l’image du château montre aussi que l’équilibre de l’édifice, lui, dépend de raisons internes. Chaque carte contribue à l’équilibre général du château, comme chaque pas de la formulation d’une théorie détermine sa cohérence. Adopter le point de vue d’un château de cartes conduit donc à étudier les relations entre les concepts que la théorie utilise. Dans cette perspective, étudier la position de chaque carte permet de reconstruire non plus l’évolution dans le temps du travail de construction qui a conduit à la formulation de la théorie, mais plutôt les relations des concepts entre eux, l’explicitation des choix qui ont conduit à leur formulation et les erreurs éventuelles de calcul qui mettent en péril l’ensemble.

Nous avons cette année tenté de soumettre l’anthropologie de la mémoire à ce type d’observation. La thèse que nous essayons de démontrer est que l’anthropologie de la mémoire fait émerger un type de pensée que d’autres perspectives anthropologiques ont systématiquement négligé.

Résumons donc notre thèse. Pour introduire son analyse de la pensée sauvage, Lévi-Strauss oppose deux thèmes classiques : le Totémisme et le Sacrifice. Dans l’univers du totémisme – soutient Lévi-Strauss – une pensée binaire s’exprime : les espèces animales sont prises par les groupes sociaux comme des figures de l’identité qui les distinguent les uns des autres. Lévi-Strauss compare ce système d’oppositions binaires (où il voit le vrai modèle de la pensée sauvage) au sacrifice où, selon une logique opposée à celle qui régit le Totémisme, les espèces animales peuvent se rassembler dans des groupes ou leurs différences n’opèrent plus. Au sein d’un sacrifice, écrit-Lévi Strauss en commentant les écrits d’Evans-Pritchard sur cette question, « un œuf vaut une poule, une poule une chèvre, une chèvre un bœuf ». En d’autres termes, les marques distinctives des espèces naturelles semblent disparaître, ou perdre de pertinence par rapport aux relations établies entre les acteurs du rituel : l’offrande peut s’incarner en une suite apparemment variable d’espèces animales, parce que la catégorie à laquelle elles appartiennent dans le contexte rituel, est porteur d’une subjectivité face à d’autres subjectivités. La porte est ouverte alors, au sein d’un modèle nouveau de pensée qui s’inspire d’une analyse du sacrifice, pour l’analyse d’une pensée de l’imitation, du mimétisme, de la métamorphose. D’autres configurations conceptuelles, liées à la compréhension du changement, du conflit culturel comme à l’interprétation de l’action rituelle surgissent. En nous appuyant sur plusieurs cas ethnographiques, nous avons montré comment l’anthropologie de la mémoire conduit à la compréhension de ces nouveaux faits et de ces nouvelles configurations conceptuelles, qu’on pourrait appeler les « raisons du sacrifice ».

Publications
  • « Structure et forme originaire », dans Les idées de l’anthropologie, sous la dir. de Descola et al., Paris, 2022, Éditions de l’EHESS, Nouvelle édition en format Poche, p. 203-250.
  • « Boas and Semper: From the Biology of Images to Primitive Art », dans Art and Anthropology, sous la dir. de Peter Probst et Joseph Imorde, Getty Publications, Los Angeles, 2023, p. 91-104.
  •  « Antenati a venire: Primitivismo, Antropologia e Storia dell’Arte globale », dans Cultura Visuale in Italia, sous la dir. de Cometa,. Coglitore et Cammarata, Milan, 2023, Meltemi, p. 389-409.