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UE178 - L'enquête biographique dans l'étude des sciences. Vie et travail scientifiques


Lieu et planning


  • Bâtiment EHESS-Condorcet
    Salle A527
    EHESS, 2 cours des humanités 93300 Aubervilliers
    1er semestre / hebdomadaire, lundi 15:30-17:30
    du 7 novembre 2022 au 20 février 2023
    Nombre de séances : 12

    La séance du 23 janvier est annulée et reportée au 20 février 2023


Description


Dernière modification : 18 janvier 2023 14:29

Type d'UE
Séminaires DR/CR
Disciplines
Anthropologie sociale, ethnographie et ethnologie, Histoire, Méthodes et techniques des sciences sociales, Sociologie
Page web
-
Langues
français
L’enseignement est uniquement dispensé dans cette langue.
Mots-clés
Épistémologie Études des sciences contemporaines Genre Histoire culturelle Histoire des sciences et des techniques Histoire intellectuelle Intellectuels Travail
Aires culturelles
Europe
Intervenant·e·s
  • Anne Collinot [référent·e]   chargée de recherche, CNRS / Centre Alexandre-Koyré. Histoire des sciences et des techniques (CAK)

Le séminaire poursuit sa réflexion sur l’enquête biographique comme outil de connaissance pour l’étude des sciences. Il s'agit d’examiner spécifiquement le « mode de vie » savant, en le situant dans la catégorie des existences vouées aux savoirs, comme celles des lettrés, des érudits ou des scientifiques.

Le séminaire est construit autour du concept d’œuvre-travail. Cependant que toute enquête biographique porte en elle la question cruciale du rapport entre la vie et l’œuvre, il s’agit de mettre en lumière le chaînon important mais souvent oublié, qui attache étroitement l’œuvre à la vie : ce chaînon est le travail. Bien que nul n’ignore la place du travail acharné dans la vie du savant, et que les biographies scientifiques manquent rarement d’évoquer la ténacité et l’opiniâtreté comme les qualités indispensables des chercheurs, il est opportun d’examiner attentivement les aspects pratiques et ordinaires du travail et de l’acharnement. La notion de travail est entendue jusque dans sa dimension la plus intime, avec tout ce qu’il suppose de persévérance, de constance, d’effort continu, c’est-à-dire de discipline quotidienne. La gestion de l’emploi du temps, l’aménagement des lieux de résidence, les pratiques de sociabilité donnent à voir la vie scientifique comme une construction homogène et conséquente. Les difficultés – et les satisfactions – du travail intellectuel impliquent d’organiser sa vie d’une certaine manière, mais aussi de dérober du temps à la vie, c’est-à-dire de donner une forme singulière à l’ensemble de sa vie, faisant de celle-ci un outil essentiel de la production intellectuelle. En dirigeant l’éclairage sur cet ensemble de déterminants du travail intellectuel, décisifs et néanmoins rarement objectivés, nous visons non seulement à lever le voile sur certaines des conditions de possibilité de l’œuvre, mais aussi à enrichir l’enquête biographique.

Le programme des séances sera fourni ultérieurement.


Master


  • Séminaires de recherche – Savoirs en sociétés-Histoire des sciences, des techniques et des savoirs – M1/S1-M2/S3
    Suivi et validation – semestriel hebdomadaire = 6 ECTS
    MCC – exposé oral, fiche de lecture

Renseignements


Contacts additionnels
-
Informations pratiques

par courriel.

Direction de travaux des étudiants

sur rendez-vous.

Réception des candidats

sur rendez-vous.

Pré-requis

le séminaire est ouvert aux chercheurs, aux doctorants, aux étudiants en master.


Compte rendu


Le séminaire poursuit la réflexion sur l’enquête biographique comme outil de connaissance pour l’étude des sciences. Nous avons continué d’examiner spécifiquement le « mode de vie » savant, en le situant dans la catégorie des existences vouées aux savoirs, comme celles des lettrés, des érudits ou des scientifiques.

J’ai d’abord présenté le concept d’œuvre-travail, situé au cœur de mes recherches. Cependant que toute enquête biographique porte en elle la question cruciale du rapport entre la vie et l’œuvre, il s’agit de mettre en lumière le lien important mais souvent négligé, qui attache étroitement l’œuvre à la vie : ce lien est le travail. Bien que nul n’ignore la place du travail acharné dans la vie du savant, et que les biographies scientifiques manquent rarement d’évoquer la ténacité et l’opiniâtreté comme les qualités indispensables des chercheurs, il est opportun d’examiner attentivement les aspects pratiques et ordinaires du travail et de l’acharnement. Les difficultés – et les satisfactions – du travail intellectuel impliquent de donner une forme singulière à l’ensemble de sa vie, faisant de celle-ci un outil essentiel de la production intellectuelle. En dirigeant l’éclairage sur cet ensemble de déterminants du travail intellectuel, décisifs et néanmoins rarement objectivés, le séminaire vise à lever le voile sur certaines des conditions de possibilité de l’œuvre, mais aussi à enrichir l’enquête biographique. 

Nous avons ainsi fait valoir une « niche » culturelle précise définies par des contraintes récurrentes, non-contextuelles du travail : les modalités pratiques, quotidiennes et ordinaires du travail que nous avons analysées sont générales et se retrouvent dans plusieurs cas inscrits dans la longue durée : Erasme, Lavoisier, Darwin, Frazer, Lévi-Strauss… Autant de cas sur lesquels nous nous sommes penchés, pour souligner les conditions pratiques et parfois psycho-affectives de la production d’une œuvre savante. Si la figure du savant est rapprochée de celle de l’artisan, une collectivité plus ou moins nombreuse se fait jour autour de lui qui l’accompagne dans sa vie domestique et intellectuelle. Inventée dans la seconde moitié du XVIIIe siècle et illustrée par plusieurs couples célèbres, la « société conjugale », formée par le savant et son épouse, est un modèle pérenne qui, des Lumières jusqu’à nos jours, a permis l’épanouissement de maintes œuvres. Sans se focaliser sur la figure de l’épouse-de-savant, nous avons exploré l’idée d’une collectivité construite sur mesure destinée à servir la production intellectuelle, en reconnaissant la variété de ses contours : l’union des époux, mais aussi la famille, un cercle amical, un cénacle de disciples, un groupe de collègues.

Plusieurs séances du séminaire ont été consacrées à évaluer les apports du concept d’œuvre-travail dans les cas précis des travaux des étudiants. En voici deux exemples.

On a cherché à préciser la figure du « savant aventurier » telle qu’elle s’est esquissée dans le contexte de la guerre franco-prussienne (1870-1871), alors qu’apparaît un rejet des figures de savants académiciens, assorti d’un renouvellement de la popularité de l’aventure, de l’invention, de la vie savante et extraordinaire. Il s’est donc agi de comprendre comment le savant donne à sa vie la forme singulière d’une « aventure scientifique ».

À partir d’un corpus de lettres adressées par le paléontologue Auguste Aymard (1808-1889), figure érudite en Haute-Loire, à Laurillard, de Blainville et d’autres savants parisiens, il a été possible de mettre en lumière la mise en scène du travail savant des « pauvres exilés au fond de leur province » par opposition aux  « privilégiés de la capitale » ainsi que la façon dont la représentation d’une opposition entre œuvre-travail provinciale et œuvre-travail parisienne pouvait être utilisée à des fins de négociation auprès des savants parisiens pour obtenir des moyens pour la recherche.

Publications

-

Dernière modification : 18 janvier 2023 14:29

Type d'UE
Séminaires DR/CR
Disciplines
Anthropologie sociale, ethnographie et ethnologie, Histoire, Méthodes et techniques des sciences sociales, Sociologie
Page web
-
Langues
français
L’enseignement est uniquement dispensé dans cette langue.
Mots-clés
Épistémologie Études des sciences contemporaines Genre Histoire culturelle Histoire des sciences et des techniques Histoire intellectuelle Intellectuels Travail
Aires culturelles
Europe
Intervenant·e·s
  • Anne Collinot [référent·e]   chargée de recherche, CNRS / Centre Alexandre-Koyré. Histoire des sciences et des techniques (CAK)

Le séminaire poursuit sa réflexion sur l’enquête biographique comme outil de connaissance pour l’étude des sciences. Il s'agit d’examiner spécifiquement le « mode de vie » savant, en le situant dans la catégorie des existences vouées aux savoirs, comme celles des lettrés, des érudits ou des scientifiques.

Le séminaire est construit autour du concept d’œuvre-travail. Cependant que toute enquête biographique porte en elle la question cruciale du rapport entre la vie et l’œuvre, il s’agit de mettre en lumière le chaînon important mais souvent oublié, qui attache étroitement l’œuvre à la vie : ce chaînon est le travail. Bien que nul n’ignore la place du travail acharné dans la vie du savant, et que les biographies scientifiques manquent rarement d’évoquer la ténacité et l’opiniâtreté comme les qualités indispensables des chercheurs, il est opportun d’examiner attentivement les aspects pratiques et ordinaires du travail et de l’acharnement. La notion de travail est entendue jusque dans sa dimension la plus intime, avec tout ce qu’il suppose de persévérance, de constance, d’effort continu, c’est-à-dire de discipline quotidienne. La gestion de l’emploi du temps, l’aménagement des lieux de résidence, les pratiques de sociabilité donnent à voir la vie scientifique comme une construction homogène et conséquente. Les difficultés – et les satisfactions – du travail intellectuel impliquent d’organiser sa vie d’une certaine manière, mais aussi de dérober du temps à la vie, c’est-à-dire de donner une forme singulière à l’ensemble de sa vie, faisant de celle-ci un outil essentiel de la production intellectuelle. En dirigeant l’éclairage sur cet ensemble de déterminants du travail intellectuel, décisifs et néanmoins rarement objectivés, nous visons non seulement à lever le voile sur certaines des conditions de possibilité de l’œuvre, mais aussi à enrichir l’enquête biographique.

Le programme des séances sera fourni ultérieurement.

  • Séminaires de recherche – Savoirs en sociétés-Histoire des sciences, des techniques et des savoirs – M1/S1-M2/S3
    Suivi et validation – semestriel hebdomadaire = 6 ECTS
    MCC – exposé oral, fiche de lecture
Contacts additionnels
-
Informations pratiques

par courriel.

Direction de travaux des étudiants

sur rendez-vous.

Réception des candidats

sur rendez-vous.

Pré-requis

le séminaire est ouvert aux chercheurs, aux doctorants, aux étudiants en master.

  • Bâtiment EHESS-Condorcet
    Salle A527
    EHESS, 2 cours des humanités 93300 Aubervilliers
    1er semestre / hebdomadaire, lundi 15:30-17:30
    du 7 novembre 2022 au 20 février 2023
    Nombre de séances : 12

    La séance du 23 janvier est annulée et reportée au 20 février 2023

Le séminaire poursuit la réflexion sur l’enquête biographique comme outil de connaissance pour l’étude des sciences. Nous avons continué d’examiner spécifiquement le « mode de vie » savant, en le situant dans la catégorie des existences vouées aux savoirs, comme celles des lettrés, des érudits ou des scientifiques.

J’ai d’abord présenté le concept d’œuvre-travail, situé au cœur de mes recherches. Cependant que toute enquête biographique porte en elle la question cruciale du rapport entre la vie et l’œuvre, il s’agit de mettre en lumière le lien important mais souvent négligé, qui attache étroitement l’œuvre à la vie : ce lien est le travail. Bien que nul n’ignore la place du travail acharné dans la vie du savant, et que les biographies scientifiques manquent rarement d’évoquer la ténacité et l’opiniâtreté comme les qualités indispensables des chercheurs, il est opportun d’examiner attentivement les aspects pratiques et ordinaires du travail et de l’acharnement. Les difficultés – et les satisfactions – du travail intellectuel impliquent de donner une forme singulière à l’ensemble de sa vie, faisant de celle-ci un outil essentiel de la production intellectuelle. En dirigeant l’éclairage sur cet ensemble de déterminants du travail intellectuel, décisifs et néanmoins rarement objectivés, le séminaire vise à lever le voile sur certaines des conditions de possibilité de l’œuvre, mais aussi à enrichir l’enquête biographique. 

Nous avons ainsi fait valoir une « niche » culturelle précise définies par des contraintes récurrentes, non-contextuelles du travail : les modalités pratiques, quotidiennes et ordinaires du travail que nous avons analysées sont générales et se retrouvent dans plusieurs cas inscrits dans la longue durée : Erasme, Lavoisier, Darwin, Frazer, Lévi-Strauss… Autant de cas sur lesquels nous nous sommes penchés, pour souligner les conditions pratiques et parfois psycho-affectives de la production d’une œuvre savante. Si la figure du savant est rapprochée de celle de l’artisan, une collectivité plus ou moins nombreuse se fait jour autour de lui qui l’accompagne dans sa vie domestique et intellectuelle. Inventée dans la seconde moitié du XVIIIe siècle et illustrée par plusieurs couples célèbres, la « société conjugale », formée par le savant et son épouse, est un modèle pérenne qui, des Lumières jusqu’à nos jours, a permis l’épanouissement de maintes œuvres. Sans se focaliser sur la figure de l’épouse-de-savant, nous avons exploré l’idée d’une collectivité construite sur mesure destinée à servir la production intellectuelle, en reconnaissant la variété de ses contours : l’union des époux, mais aussi la famille, un cercle amical, un cénacle de disciples, un groupe de collègues.

Plusieurs séances du séminaire ont été consacrées à évaluer les apports du concept d’œuvre-travail dans les cas précis des travaux des étudiants. En voici deux exemples.

On a cherché à préciser la figure du « savant aventurier » telle qu’elle s’est esquissée dans le contexte de la guerre franco-prussienne (1870-1871), alors qu’apparaît un rejet des figures de savants académiciens, assorti d’un renouvellement de la popularité de l’aventure, de l’invention, de la vie savante et extraordinaire. Il s’est donc agi de comprendre comment le savant donne à sa vie la forme singulière d’une « aventure scientifique ».

À partir d’un corpus de lettres adressées par le paléontologue Auguste Aymard (1808-1889), figure érudite en Haute-Loire, à Laurillard, de Blainville et d’autres savants parisiens, il a été possible de mettre en lumière la mise en scène du travail savant des « pauvres exilés au fond de leur province » par opposition aux  « privilégiés de la capitale » ainsi que la façon dont la représentation d’une opposition entre œuvre-travail provinciale et œuvre-travail parisienne pouvait être utilisée à des fins de négociation auprès des savants parisiens pour obtenir des moyens pour la recherche.

Publications

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