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UE152 - Conserver, mobiliser, restaurer la nature. Institutions, droits et savoirs
Lieu et planning
-
Bâtiment EHESS-Condorcet
Salle 25-B
EHESS, 2 cours des humanités 93300 Aubervilliers
annuel / bimensuel (1re/3e/5e), mardi 10:30-12:30
du 15 novembre 2022 au 18 avril 2023
Nombre de séances : 12La séance du 21 février 2023 est reportée au 28 février 2023, salle 50, bâtiment EHESS-Condorcet
Description
Dernière modification : 27 juillet 2022 18:39
- Type d'UE
- Séminaires DE/MC
- Disciplines
- Histoire
- Page web
- -
- Langues
- -
- Mots-clés
- Droit, normes et société Environnement Espace État et politiques publiques Milieu Rurales (études) Spatialisation, territoires
- Aires culturelles
- -
Intervenant·e·s
- Alice Ingold [référent·e] maîtresse de conférences, EHESS / Groupe de recherche sur l'histoire de l'environnement (CRH-GRHEN)
- Romain Grancher chargé de recherche, CNRS
Le séminaire sera co-animé par Alice Ingold (EHESS) et Romain Grancher (CNRS, FRAMESPA)
Quels savoirs président aux « politiques de la nature » qui cherchent aujourd’hui à conserver la nature, voire à la restaurer, après avoir longtemps cherché à la mobiliser ? En nouant ensemble la modernité comme période historique et la figure de la modernité comme mode de rapport au monde, les études environnementales ont mis à leur agenda des travaux cherchant à identifier les temporalités et les lieux pluriels d’une conscience écologique moderne. Ce faisant, les auteurs dessinent à chaque enquête une nouvelle cartographie des savoirs et dressent une nouvelle généalogie des disciplines. La naissance de l’économie politique est sans aucun doute la discipline qui a le plus focalisé l’attention des chercheurs. Des enquêtes ont souligné les liens étroits qu’elle a entretenus avec l’histoire naturelle, montrant comment des modalités inédites de description et d’inventaire de la nature se sont articulées à l’affirmation de l’économie politique et des savoirs de gouvernement. Dans la perspective d’une histoire renouvelée des énergies, ce sont les liens entre économie politique et géologie qui sont aujourd’hui explorés. Chacune de ces histoires intellectuelles porte l’attention sur la mise en savoirs de la nature. Elle conduit à examiner la pluralité des acteurs qui se posent alors en experts de la nature : naturalistes, forestiers, agronomes, ingénieurs, géologues, halieutes, etc. Dans une longue période d’expérimentations entre période moderne et XIXe siècle, la lisière entre savoirs pratiques et savoirs savants reste poreuse.
Le séminaire croisera deux lignes de travail qui porteront notamment sur des espaces maritime et fluviaux. Il s'agira de faire une place aux pratiques de la nature et aux savoirs de ces pratiques. Quels savoirs avaient pu développer les habitants, les paysans, les pêcheurs les riverains, etc. pour faire face aux contraintes de leurs milieux de vie ? Quelles étaient les expériences des limites écologiques dans les sociétés locales et par quelles sources peut-on y avoir accès ? Nous serons particulièrement attentifs aux logiques de production, de conservation et de transmission d’archives, qui permettent de rendre compte des savoirs savants mais aussi des savoirs écologiques locaux.
S’intéressant aux savoirs qui participent à une « réflexivité environnementale » moderne, la perspective des études environnementales néglige trop souvent des changements historiques essentiels, juridiques et institutionnels. Le séminaire s’attachera à interroger ces changements, dans l’ordre du droit, des institutions et des savoirs. Au travers de quels dispositifs politiques et juridiques les sociétés se sont-elles rapportées à leurs environnements entre Ancien Régime et période postrévolutionnaire ? Comment ces dispositifs ont-ils renvoyé à des partages en train de se faire entre État et société, entre État et marché, entre droit et économie, qui demandent aujourd’hui à être réévalués ?
Le séminaire proposera des présentations de dossiers d'archives, accompagnées de lectures historiographiques. On attend des auditeurs·auditrices qu'ils·elles lisent les lectures proposées à chaque séance.
Le programme détaillé n'est pas disponible.
Master
-
Séminaires de recherche
– Histoire-Histoire du monde/histoire des mondes
– M1/S1-S2-M2/S3-S4
Suivi et validation – annuel mensuelle = 6 ECTS
MCC – exposé oral -
Séminaires de recherche
– Histoire-Histoire et sciences sociales
– M1/S1-S2-M2/S3-S4
Suivi et validation – annuel bi-mensuelle = 6 ECTS
MCC – exposé oral -
Séminaires de recherche
– Savoirs en sociétés-Études environnementales
– M1/S1-S2-M2/S3-S4
Suivi et validation – annuel mensuelle = 6 ECTS
MCC – exposé oral -
Séminaires de recherche
– Savoirs en sociétés-Histoire des sciences, des techniques et des savoirs
– M1/S1-S2-M2/S3-S4
Suivi et validation – annuel mensuelle = 6 ECTS
MCC – exposé oral -
Séminaires de recherche
– Sciences économiques et sociales - Institutions, organisations, économie et société
– M1/S1-S2-M2/S3-S4
Suivi et validation – annuel mensuelle = 6 ECTS
MCC – exposé oral -
Séminaires de recherche
– Territoires et développement - Territoires, espaces, sociétés
– M1/S1-S2-M2/S3-S4
Suivi et validation – annuel mensuelle = 6 ECTS
MCC – exposé oral
Renseignements
- Contacts additionnels
- -
- Informations pratiques
- -
- Direction de travaux des étudiants
- -
- Réception des candidats
- -
- Pré-requis
- -
Compte rendu
Le séminaire s’est tenu pour la seconde et dernière année avec Romain Grancher (CRNS, FRAMESPA). Dans la perspective d’une histoire longue des politiques de « conservation », nous nous sommes interrogés sur « Ce que conserver veut dire » pour reprendre l’expression forgée par Romain Grancher (Grancher 2018), quand il interrogeait – à partir de la police des pêches – la complexité du terme et la pluralité de ses usages sous l’Ancien Régime. La « conservation » engageait un souci de « ménagement » de la ressource, ancré dans l’économie politique d’Ancien Régime, et visant tout autant sa protection que sa production et sa reproduction, ainsi que l’encadrement de son exploitation par des règles juridiques, techniques et d’équité sociale. La proposition du séminaire a été d’aborder ce vaste domaine des politiques de la « conservation » et du « ménagement » de la nature sur la longue durée, non à partir d’une posture – classique dans les études environnementales – d’une généalogie de l’environnementalisme, mais à partir d’une entrée par les sources et les conflits. Les enquêtes et dossiers d’archives présentés au cours des séances du séminaire ont été autant d’occasions de saisir la manière dont la production de savoirs sur des ressources et sur leur état (réel, imaginé, attendu) engageait aussi des manières de penser une pluralité de droits, de territoires, de juridictions et de collectifs.
Un premier temps du séminaire a porté sur les communs. Alice Ingold a interrogé la manière dont les communs ont pu être décrits comme une voie pratique de la conservation sans modèle de conservation. Cette lecture a été soumise à la critique à partir de l’histoire des communs hydrauliques en France, depuis les anciennes associations d’arrosage jusqu’aux associations syndicales. Le devenir de ces structures avant et après 1789 interroge la complexité d’un fait syndical rural avant – et après – son encadrement par l’État en 1865. Romain Grancher a poursuivi une série de questions sur les conditions d’accès aux ressources dites res nullius, à partir d’un dossier sur le partage des grèves sur les côtes de la Manche entre XVIe et XIXe siècle, interrogeant notamment la revendication de droits locaux sur les ressources communes de la mer. Alice Ingold a proposé de voir comment, dans la seconde moitié du XIXe siècle, tout un ensemble d’auteurs et d’enquêtes ont cherché à penser des formes de régulation des ressources communes qui fonctionneraient « au-delà de l’État ». Le modèle des prud’homies de pêches a ainsi fait l’objet d’une valorisation très précoce en dehors même du monde des pêches, et dont on trouve aujourd’hui une nouvelle formulation en droit autour de la réussite d’« ordres privés » alternatifs à la régulation par l’Etat. Alice Ingold a montré comment dès le XIXe siècle cette opposition à un modèle de régulation étatique a impulsé des enquêtes et des études valorisant les communs hydrauliques et leurs juridictions (collectifs hydrauliques, Tribunal des eaux en Espagne, etc.). Restituer les conflits d’accès aux ressources communes et les concurrences de juridictions pour la régulation de ces accès permet de déconstruire en partie la dimension « démocratique » et « populaire » souvent accordée à ces institutions, et largement construite au XIXe siècle.
Dans la seconde partie du séminaire, on s’est interrogé sur les figures d’un État « protecteur de la nature ». Romain Grancher l’a fait en critiquant le grand récit d’une mise sous contrôle étatique des environnements et des résistances coutumières, à partir du cas des pêches. Il a interrogé la longue durée des Inspections des pêches en France comme instrument de gouvernement de la nature entre XVIIe et XIXe siècle, en examinant la manière dont les savoirs halieutiques des pêcheurs y avaient été pris en compte et enrôlés. Alice Ingold a poursuivi ce questionnaire à partir de la place prise par les États dans la régulation des eaux courantes au XIXe siècle, au-delà de la définition d’un domaine public fluvial. Elle a notamment interrogé la promotion, dans les administrations préfectorales et par la voix des ingénieurs des Ponts et chaussées, d’un « bon aménagement des eaux » coïncidant largement avec le « plein emploi » des eaux et la maximisation de leur usage.
À l’occasion des Doctoriales des Sciences sociales de l’Eau (Rennes 2023), Alice Ingold a prononcé la conférence inaugurale « Qu’est-ce qu’un fleuve ? Remonter aux sources de l’histoire ».
Publications
- « Désenclaver l’histoire des Communs de l’histoire de l’État des Modernes. Associations syndicales de propriétaires entre "droit social" et "domestication administrative" », Revue du MAUSS, vol. 61, n° 1, 2023, p. 273-289.
- « Les canaux de la République ou les illusions de l'abondance. Infrastructures et dépendance à l'irrigation », Carnets du Paysage, 2023, n°42, p. 51-65.
Dernière modification : 27 juillet 2022 18:39
- Type d'UE
- Séminaires DE/MC
- Disciplines
- Histoire
- Page web
- -
- Langues
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- Mots-clés
- Droit, normes et société Environnement Espace État et politiques publiques Milieu Rurales (études) Spatialisation, territoires
- Aires culturelles
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Intervenant·e·s
- Alice Ingold [référent·e] maîtresse de conférences, EHESS / Groupe de recherche sur l'histoire de l'environnement (CRH-GRHEN)
- Romain Grancher chargé de recherche, CNRS
Le séminaire sera co-animé par Alice Ingold (EHESS) et Romain Grancher (CNRS, FRAMESPA)
Quels savoirs président aux « politiques de la nature » qui cherchent aujourd’hui à conserver la nature, voire à la restaurer, après avoir longtemps cherché à la mobiliser ? En nouant ensemble la modernité comme période historique et la figure de la modernité comme mode de rapport au monde, les études environnementales ont mis à leur agenda des travaux cherchant à identifier les temporalités et les lieux pluriels d’une conscience écologique moderne. Ce faisant, les auteurs dessinent à chaque enquête une nouvelle cartographie des savoirs et dressent une nouvelle généalogie des disciplines. La naissance de l’économie politique est sans aucun doute la discipline qui a le plus focalisé l’attention des chercheurs. Des enquêtes ont souligné les liens étroits qu’elle a entretenus avec l’histoire naturelle, montrant comment des modalités inédites de description et d’inventaire de la nature se sont articulées à l’affirmation de l’économie politique et des savoirs de gouvernement. Dans la perspective d’une histoire renouvelée des énergies, ce sont les liens entre économie politique et géologie qui sont aujourd’hui explorés. Chacune de ces histoires intellectuelles porte l’attention sur la mise en savoirs de la nature. Elle conduit à examiner la pluralité des acteurs qui se posent alors en experts de la nature : naturalistes, forestiers, agronomes, ingénieurs, géologues, halieutes, etc. Dans une longue période d’expérimentations entre période moderne et XIXe siècle, la lisière entre savoirs pratiques et savoirs savants reste poreuse.
Le séminaire croisera deux lignes de travail qui porteront notamment sur des espaces maritime et fluviaux. Il s'agira de faire une place aux pratiques de la nature et aux savoirs de ces pratiques. Quels savoirs avaient pu développer les habitants, les paysans, les pêcheurs les riverains, etc. pour faire face aux contraintes de leurs milieux de vie ? Quelles étaient les expériences des limites écologiques dans les sociétés locales et par quelles sources peut-on y avoir accès ? Nous serons particulièrement attentifs aux logiques de production, de conservation et de transmission d’archives, qui permettent de rendre compte des savoirs savants mais aussi des savoirs écologiques locaux.
S’intéressant aux savoirs qui participent à une « réflexivité environnementale » moderne, la perspective des études environnementales néglige trop souvent des changements historiques essentiels, juridiques et institutionnels. Le séminaire s’attachera à interroger ces changements, dans l’ordre du droit, des institutions et des savoirs. Au travers de quels dispositifs politiques et juridiques les sociétés se sont-elles rapportées à leurs environnements entre Ancien Régime et période postrévolutionnaire ? Comment ces dispositifs ont-ils renvoyé à des partages en train de se faire entre État et société, entre État et marché, entre droit et économie, qui demandent aujourd’hui à être réévalués ?
Le séminaire proposera des présentations de dossiers d'archives, accompagnées de lectures historiographiques. On attend des auditeurs·auditrices qu'ils·elles lisent les lectures proposées à chaque séance.
Le programme détaillé n'est pas disponible.
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Séminaires de recherche
– Histoire-Histoire du monde/histoire des mondes
– M1/S1-S2-M2/S3-S4
Suivi et validation – annuel mensuelle = 6 ECTS
MCC – exposé oral -
Séminaires de recherche
– Histoire-Histoire et sciences sociales
– M1/S1-S2-M2/S3-S4
Suivi et validation – annuel bi-mensuelle = 6 ECTS
MCC – exposé oral -
Séminaires de recherche
– Savoirs en sociétés-Études environnementales
– M1/S1-S2-M2/S3-S4
Suivi et validation – annuel mensuelle = 6 ECTS
MCC – exposé oral -
Séminaires de recherche
– Savoirs en sociétés-Histoire des sciences, des techniques et des savoirs
– M1/S1-S2-M2/S3-S4
Suivi et validation – annuel mensuelle = 6 ECTS
MCC – exposé oral -
Séminaires de recherche
– Sciences économiques et sociales - Institutions, organisations, économie et société
– M1/S1-S2-M2/S3-S4
Suivi et validation – annuel mensuelle = 6 ECTS
MCC – exposé oral -
Séminaires de recherche
– Territoires et développement - Territoires, espaces, sociétés
– M1/S1-S2-M2/S3-S4
Suivi et validation – annuel mensuelle = 6 ECTS
MCC – exposé oral
- Contacts additionnels
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- Informations pratiques
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- Direction de travaux des étudiants
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- Réception des candidats
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- Pré-requis
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Bâtiment EHESS-Condorcet
Salle 25-B
EHESS, 2 cours des humanités 93300 Aubervilliers
annuel / bimensuel (1re/3e/5e), mardi 10:30-12:30
du 15 novembre 2022 au 18 avril 2023
Nombre de séances : 12La séance du 21 février 2023 est reportée au 28 février 2023, salle 50, bâtiment EHESS-Condorcet
Le séminaire s’est tenu pour la seconde et dernière année avec Romain Grancher (CRNS, FRAMESPA). Dans la perspective d’une histoire longue des politiques de « conservation », nous nous sommes interrogés sur « Ce que conserver veut dire » pour reprendre l’expression forgée par Romain Grancher (Grancher 2018), quand il interrogeait – à partir de la police des pêches – la complexité du terme et la pluralité de ses usages sous l’Ancien Régime. La « conservation » engageait un souci de « ménagement » de la ressource, ancré dans l’économie politique d’Ancien Régime, et visant tout autant sa protection que sa production et sa reproduction, ainsi que l’encadrement de son exploitation par des règles juridiques, techniques et d’équité sociale. La proposition du séminaire a été d’aborder ce vaste domaine des politiques de la « conservation » et du « ménagement » de la nature sur la longue durée, non à partir d’une posture – classique dans les études environnementales – d’une généalogie de l’environnementalisme, mais à partir d’une entrée par les sources et les conflits. Les enquêtes et dossiers d’archives présentés au cours des séances du séminaire ont été autant d’occasions de saisir la manière dont la production de savoirs sur des ressources et sur leur état (réel, imaginé, attendu) engageait aussi des manières de penser une pluralité de droits, de territoires, de juridictions et de collectifs.
Un premier temps du séminaire a porté sur les communs. Alice Ingold a interrogé la manière dont les communs ont pu être décrits comme une voie pratique de la conservation sans modèle de conservation. Cette lecture a été soumise à la critique à partir de l’histoire des communs hydrauliques en France, depuis les anciennes associations d’arrosage jusqu’aux associations syndicales. Le devenir de ces structures avant et après 1789 interroge la complexité d’un fait syndical rural avant – et après – son encadrement par l’État en 1865. Romain Grancher a poursuivi une série de questions sur les conditions d’accès aux ressources dites res nullius, à partir d’un dossier sur le partage des grèves sur les côtes de la Manche entre XVIe et XIXe siècle, interrogeant notamment la revendication de droits locaux sur les ressources communes de la mer. Alice Ingold a proposé de voir comment, dans la seconde moitié du XIXe siècle, tout un ensemble d’auteurs et d’enquêtes ont cherché à penser des formes de régulation des ressources communes qui fonctionneraient « au-delà de l’État ». Le modèle des prud’homies de pêches a ainsi fait l’objet d’une valorisation très précoce en dehors même du monde des pêches, et dont on trouve aujourd’hui une nouvelle formulation en droit autour de la réussite d’« ordres privés » alternatifs à la régulation par l’Etat. Alice Ingold a montré comment dès le XIXe siècle cette opposition à un modèle de régulation étatique a impulsé des enquêtes et des études valorisant les communs hydrauliques et leurs juridictions (collectifs hydrauliques, Tribunal des eaux en Espagne, etc.). Restituer les conflits d’accès aux ressources communes et les concurrences de juridictions pour la régulation de ces accès permet de déconstruire en partie la dimension « démocratique » et « populaire » souvent accordée à ces institutions, et largement construite au XIXe siècle.
Dans la seconde partie du séminaire, on s’est interrogé sur les figures d’un État « protecteur de la nature ». Romain Grancher l’a fait en critiquant le grand récit d’une mise sous contrôle étatique des environnements et des résistances coutumières, à partir du cas des pêches. Il a interrogé la longue durée des Inspections des pêches en France comme instrument de gouvernement de la nature entre XVIIe et XIXe siècle, en examinant la manière dont les savoirs halieutiques des pêcheurs y avaient été pris en compte et enrôlés. Alice Ingold a poursuivi ce questionnaire à partir de la place prise par les États dans la régulation des eaux courantes au XIXe siècle, au-delà de la définition d’un domaine public fluvial. Elle a notamment interrogé la promotion, dans les administrations préfectorales et par la voix des ingénieurs des Ponts et chaussées, d’un « bon aménagement des eaux » coïncidant largement avec le « plein emploi » des eaux et la maximisation de leur usage.
À l’occasion des Doctoriales des Sciences sociales de l’Eau (Rennes 2023), Alice Ingold a prononcé la conférence inaugurale « Qu’est-ce qu’un fleuve ? Remonter aux sources de l’histoire ».
Publications
- « Désenclaver l’histoire des Communs de l’histoire de l’État des Modernes. Associations syndicales de propriétaires entre "droit social" et "domestication administrative" », Revue du MAUSS, vol. 61, n° 1, 2023, p. 273-289.
- « Les canaux de la République ou les illusions de l'abondance. Infrastructures et dépendance à l'irrigation », Carnets du Paysage, 2023, n°42, p. 51-65.