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UE914 - Gouverner le « progrès » et ses dégâts (1810-2021). Histoire et sciences sociales


Lieu et planning


  • Bâtiment EHESS-Condorcet
    EHESS, 2 cours des humanités 93300 Aubervilliers
    Salle A527
    annuel / mensuel (3e), mardi 09:30-13:30
    du 19 octobre 2021 au 19 avril 2022
    Nombre de séances : 6


Description


Dernière modification : 1 avril 2022 09:58

Type d'UE
Séminaires DR/CR
Disciplines
Histoire, Sociologie
Page web
-
Langues
français
Mots-clés
Action publique Agriculture Biopolitique Capitalisme Environnement Études des sciences contemporaines Genre Histoire des sciences et des techniques Histoire environnementale Industrie Institutions Marché Médecine Politiques publiques Pollution Risques Santé Santé environnementale Sciences Sociologie
Aires culturelles
Amérique du Nord Europe Transnational/transfrontières
Intervenant·e·s
  • Sara Aguiton [référent·e]   chargée de recherche, CNRS / Centre Alexandre-Koyré. Histoire des sciences et des techniques (CAK)
  • Anne Rasmussen   directrice d'études, EHESS / Centre Alexandre-Koyré. Histoire des sciences et des techniques (CAK)
  • Sezin Topçu   chargée de recherche, CNRS / Centre d'étude des mouvements sociaux (CEMS)

Les formes de gouvernement des rapports entre technoscience, environnement, industrie, risque et société, à l’œuvre depuis les deux derniers siècles, font apparaître des tensions majeures. Celles-ci sont de trois ordres. D’abord entre fait libéral (l'autonomie croissante des individus) et fait politique, phénomènes d'individualisation et nécessités de solutions collectives. Ensuite, entre fait productif et fait politique, entre logiques de marchés et logiques de régulation, entre liberté d’entreprendre et d’innover et importance des contrôles politiques. Enfin entre bénéfices et dégâts du progrès, promesses et conséquences sanitaires, environnementales et sociétales négatives. En d'autres termes, on observe une triple tension entre sociétés et individus, économie et politique, innovation et « précaution ».

Le but de ce séminaire est d’aborder ces questions à partir d’objets, de périodes et d’échelles différentes, de déplier, éclater ou approfondir nos catégories (controverses, risques, progrès, modernité réflexive, économicisation, co-production, néolibéralisme, résilience…), de considérer autant les espaces nationaux que les acteurs globaux et leurs modes de gouvernement, autant les savoirs, expertises et dispositifs de gouvernement mobilisés que les flux de matière, de capitaux, d’énergie, de marchandises, de déchets et toxiques effectivement déployés. Les séances croiseront en général deux perspectives, l'une historienne, l'autre sur le contemporain. Nous visons à animer un collectif intellectuel croisant l’histoire des sciences et des techniques, les études sociales des sciences et STS, l'histoire de la santé et de la biomédecine, les études des risques et des régulations ainsi que l’histoire environnementale.

19 octobre : Les médicaments entre marché, régulation et genre

  • Boris Hauray (CNRS, IRIS) autour de Conflict of Interest and Medicine: Knowledge, Practices and Mobilizations (Routledge, 2021)
  • Sezin Topçu (CNRS, CEMS) : "Médicaments hors AMM, santé reproductive et ignorance genrée : l'affaire Cytotec en France"

Discutante : Ilana Löwy (Inserm, Cermes3)

16 novembre : Les mouvements environnementaux et le droit à l'épreuve de l'Anthropocène 

  • Sandrine Revet (CERI-SciencesPo): "Protéger et réparer le fleuve par le droit. Représentations de la nature et de ses gardiens dans le Chocó, en Colombie (Atrato)"
  • Paul Jobin (Academia Sinica, Taiwan): "L'Anthropocène vue d'Asie et les alternatives à l'éco-fascisme"

Discutant : Francis Chateauraynaud (Ehess, GSPR)

18 janvier : Technologies de gouvernement du "développement" aux Suds

  • Marielle Debos (Paris Nanterre, ISP) : "La biométrie électorale en Afrique: l’impossible quête de la technologie parfaite"
  • Quentin Déforge (IFRIS, CAK) : "La fabrique d'une gouvernementalité transnationale. Le "Partenariat pour un Gouvernement Ouvert" en Tunisie et en Argentine"

Disuctant : Boris Samuel (IRD, CESSMA)

15 février : Agriculture, élevage et environnement

  • Thomas Leroux (CNRS, CRH) : "Des milliers de vaches dans Paris : hygiène publique et zootechnie (1800-1840)". 
  • Léo Magnin (INRAE, AGIR) : "Gouverner les haies. L'expérience de la Politique agricole commune 2014-2020".

Discutante : Delphine Berdah (Paris Saclay, EST)

15 mars : Agir sur les comportements ? Enjeux et pratiques de l’empowerment dans les mondes du travail et de l’éducation

  • Lucie Gerber (CNRS, SAGE) : "L’art de s’affirmer. Compétences sociales et style comportemental à l’ère de la culture thérapeutique"  
  • Nicolas Marquis et Gaspard Wiseur (Université Saint-Louis de Bruxelles, CASPER) : "De nouvelles manières d’agir sur/avec autrui dans le champ de l’éducation : quelques éléments de compréhension des recompositions de l’environnement moral"

Discutante : Anne Rasmussen (Ehess, CAK)

19 avril : Surveillance numérique : marchés et régulations

  • Laurène Le Cozanet (IFRIS, CEMS) : "La CNIL, une institution d'anticipation ? La protection des libertés face aux 'menaces' de l'informatique"
  • Myrtille Picaud (Futurs Urbains, LATTS) : "Surveillance sans frontières ? Enjeux politiques, économiques et urbains du développement des dispositifs numériques de sécurité"

Discutante : Anne Bellon (UTC, COSTECH)


Master


  • Séminaires de recherche – Savoirs en sociétés-Études environnementales – M1/S1-S2-M2/S3-S4
    Suivi et validation – annuel mensuelle = 6 ECTS
    MCC – fiche de lecture
  • Séminaires de recherche – Savoirs en sociétés-Histoire des sciences, des techniques et des savoirs – M1/S1-S2-M2/S3-S4
    Suivi et validation – annuel mensuelle = 6 ECTS
    MCC – fiche de lecture
  • Séminaires de recherche – Savoirs en sociétés-Santé, médecine et questions sociales – M1/S1-S2-M2/S3-S4
    Suivi et validation – annuel mensuelle = 6 ECTS
    MCC – fiche de lecture

Renseignements


Contacts additionnels
sezin.topcu@ehess.fr
Informations pratiques

Contacter par courriel les organisatrices pour toute demande d'information ou prise de rendez-vous.

Direction de travaux des étudiants
-
Réception des candidats
-
Pré-requis

Le séminaire est ouvert aux étudiant·e·s en master, doctorant·e·s, chercheur·e·s, et toute personne intéressée sur demande.


Compte rendu


Le séminaire a poursuivi son étude des tensions à l’œuvre, depuis le XIXe siècle, dans les rapports entre technoscience, environnement, industrie, risque et société, abordées à partir d’objets, de périodes et d’échelles différents. Les six séances, conçues comme des demi-journées d’étude, croisaient deux perspectives, l'une historienne, l'autre sociologique et/ou politiste, suivies d’une discussion.

La première séance a porté sur l’économie politique des médicaments et les formes de pouvoir, y compris genré, qu’ils conduisent à exercer. Boris Hauray (CNRS, IRIS) a proposé une généalogie de la notion de conflit d’intérêt depuis son émergence aux Etats-Unis dans les années 1950. Il a mis l’accent sur la matérialité et l’impact sociétal des régulations récentes, au croisement des enjeux d’économie politique et de transformations des savoirs pharmaceutiques. Sezin Topçu a présenté sa recherche sur un médicament qui a fait l’objet de vives controverses dans les années 2013-2016, le Cytotec, utilisé pour le déclenchement des accouchements à partir des années 1990. L’affaire suscitée par ce médicament hors AMM donne à voir des problématisations de conflits d’intérêt liés à ses usages, et une guerre des savoirs et ignorances entre professionnel.le.s de santé, agences de régulation et collectifs féministes et de victimes. La dimension genrée de ces ignorances instruit sur le gouvernement des risques iatrogènes induits par les médicaments, ce qu’a notamment commenté Ilana Löwy, (Inserm, Cermes3).

La séance suivante a été consacrée aux désastres environnementaux et à la réparation juridique et citoyenne en Amérique latine et en Asie. Sandrine Revet (CERI-SciencesPo) a présenté les mobilisations pour la réparation du fleuve Atrato (en Colombie), très fortement pollué en raison d’un extractivisme intensif, ce qui a mené la Cour constitutionnelle colombienne à le déclarer sujet de droit en 2016. Elle s’intéresse à l’équipement scientifique, en particulier anthropologique, qui sous-tend cette décision juridique majeure, et à l’action militante, autour de la bioculturalité, des « gardiens » locaux pour la « réparer ». L’exposé de Paul Jobin (Academia Sinica, Taiwan) a porté sur les mobilisations environnementales en Asie, analysés en tant qu’alternatives à « l’écofascisme », présentées dans l’ouvrage qu’il a coordonné, Environmental Movements and Politics of the Asian Anthropocene (Taylor&Francis, 2021). Francis Chateauraynaud (Ehess, GSPR) a évoqué d’autres exemples de destruction-réparation écologiques, notamment à partir de son enquête sur l’effondrement du barrage de Mariana au Brésil.

La troisième séance a porté sur les technologies de gouvernement du « développement » aux Suds. Marielle Debos (Paris Nanterre, ISP), au sujet de la biométrie électorale en Afrique, a décrit le « petit monde de la biométrie » issu du secteur d’armement. L’industrie de la biométrie a construit l’Afrique comme un espace exceptionnel où la technologie est promue comme un moyen de démocratisation et de sécurisation des élections, tout en engendrant des coûts exorbitants pour les économies nationales concernées. L’intervention de Quentin Deforge (IFRIS, CAK) s’est focalisée sur les technologies de surveillance (monitoring) et de discipline (accountability) des institutions politiques mobilisées (Chili, Tunisie, Ukraine, Mexique…), en particulier le Open Government Partnership déployé par l’administration Obama en 2011, qui prône une forte participation de la société civile dans la conduite des réformes envisagées par les agences de gouvernance transnationale. L’embarquement des ONG dans le contrôle des institutions permet à ces agences de gouverner (et réformer) à distance les espaces nationaux concernés. Boris Samuel (IRD, CESSMA) a discuté du potentiel démocratique controversé de la biométrie et de la particularité de la « société civile » sollicitée par les agences de gouvernance transnationale.

La quatrième séance était consacrée à l’étude des relations et des tensions entre les pratiques agricoles, d’élevage, et les questions environnementales. Thomas Le Roux (CNRS, CRH), à propos de l’élevage à Paris au XIXe siècle, a rendu compte de l’explosion démographique des bovins en ville après la Révolution et l’amoindrissement des régulations des nuisances urbaines. Il a décrit les usages de leur commerce, et les préoccupations grandissantes pour l’insalubrité et les épizooties. Léo Magnin (INRAE, AGIR) a présenté son travail sur la régulation du rôle des haies par la politique agricole dans un objectif d’écologisation de l’agriculture européenne. Il a mis en valeur les difficultés liées à l’établissement d’une infrastructure informationnelle dédiée, et les critiques de l’administration par les agriculteurs. La faiblesse des contrôles de l’administration mène à ce qu’il nomme une « écologisation spectrale ».

La séance suivante a été consacrée aux enjeux et pratiques de l’empowerment dans les mondes du travail et de l’éducation. Lucie Gerber (CNRS, SAGE) a exposé sa recherche sur les techniques managériales visant au développement de compétences sociales et d’« affirmation de soi » dans le monde de l’entreprise. Elle a exploré la trajectoire transatlantique de la formation à l’affirmation, depuis son émergence dans la clinique des troubles anxieux aux États-Unis dans les années 1950 jusqu’à son importation en France et sa transposition en entreprise au cours des années 1970 et 1980. Nicolas Marquis et Gaspard Wiseur (Université Saint-Louis de Bruxelles, CASPER), ont éclairé les technologies d’empowerment en tant que nouvelles manières d’agir sur/avec autrui. Ils en analysent la grammaire complexe et la manière dont elle conditionne l’action dans différents domaines de la vie publique qui font l’objet des enquêtes menées (santé mentale, parentalité et éducation) dans le cadre du programme ERC « CoachingRituals ». Anne Rasmussen s’est interrogée sur les corpus de techniques mobilisés dans ces démarches, et leur lien historique avec la thérapie comportementale.

La dernière séance du séminaire a porté sur les marchés et régulations de la surveillance numérique. Myrtille Picaud (Futurs Urbains, LATTS), a présenté les enjeux politiques, économiques et urbains des dispositifs numériques de sécurité déployés à Marseille (Projet Big Data Marseille) et à Nice (Projet Safe City). Les politiques de sécurité se différencient selon les spatialisations urbaines et les segments professionnels s’occupant de la sécurité urbaine. Elle s’est interrogée sur les implications en termes de la mutation du rôle de l’État (sécuritaire) dans la gestion de la vie publique. Laurène Le Cozanet (IFRIS, CEMS) a évoqué la politique de protection des libertés menée par la CNIL face aux « menaces » de l'informatique. Elle a finement analysé l’évolution des règles d’intervention de cette institution et décrit la manière dont son champ d’action quant à la gestion des fichiers publics s’est réduit au cours des décennies.  Anne Belon (UTC, COSTECH) a discuté des enjeux politiques et économiques à l’œuvre dans ces politiques publiques.

Dernière modification : 1 avril 2022 09:58

Type d'UE
Séminaires DR/CR
Disciplines
Histoire, Sociologie
Page web
-
Langues
français
Mots-clés
Action publique Agriculture Biopolitique Capitalisme Environnement Études des sciences contemporaines Genre Histoire des sciences et des techniques Histoire environnementale Industrie Institutions Marché Médecine Politiques publiques Pollution Risques Santé Santé environnementale Sciences Sociologie
Aires culturelles
Amérique du Nord Europe Transnational/transfrontières
Intervenant·e·s
  • Sara Aguiton [référent·e]   chargée de recherche, CNRS / Centre Alexandre-Koyré. Histoire des sciences et des techniques (CAK)
  • Anne Rasmussen   directrice d'études, EHESS / Centre Alexandre-Koyré. Histoire des sciences et des techniques (CAK)
  • Sezin Topçu   chargée de recherche, CNRS / Centre d'étude des mouvements sociaux (CEMS)

Les formes de gouvernement des rapports entre technoscience, environnement, industrie, risque et société, à l’œuvre depuis les deux derniers siècles, font apparaître des tensions majeures. Celles-ci sont de trois ordres. D’abord entre fait libéral (l'autonomie croissante des individus) et fait politique, phénomènes d'individualisation et nécessités de solutions collectives. Ensuite, entre fait productif et fait politique, entre logiques de marchés et logiques de régulation, entre liberté d’entreprendre et d’innover et importance des contrôles politiques. Enfin entre bénéfices et dégâts du progrès, promesses et conséquences sanitaires, environnementales et sociétales négatives. En d'autres termes, on observe une triple tension entre sociétés et individus, économie et politique, innovation et « précaution ».

Le but de ce séminaire est d’aborder ces questions à partir d’objets, de périodes et d’échelles différentes, de déplier, éclater ou approfondir nos catégories (controverses, risques, progrès, modernité réflexive, économicisation, co-production, néolibéralisme, résilience…), de considérer autant les espaces nationaux que les acteurs globaux et leurs modes de gouvernement, autant les savoirs, expertises et dispositifs de gouvernement mobilisés que les flux de matière, de capitaux, d’énergie, de marchandises, de déchets et toxiques effectivement déployés. Les séances croiseront en général deux perspectives, l'une historienne, l'autre sur le contemporain. Nous visons à animer un collectif intellectuel croisant l’histoire des sciences et des techniques, les études sociales des sciences et STS, l'histoire de la santé et de la biomédecine, les études des risques et des régulations ainsi que l’histoire environnementale.

19 octobre : Les médicaments entre marché, régulation et genre

  • Boris Hauray (CNRS, IRIS) autour de Conflict of Interest and Medicine: Knowledge, Practices and Mobilizations (Routledge, 2021)
  • Sezin Topçu (CNRS, CEMS) : "Médicaments hors AMM, santé reproductive et ignorance genrée : l'affaire Cytotec en France"

Discutante : Ilana Löwy (Inserm, Cermes3)

16 novembre : Les mouvements environnementaux et le droit à l'épreuve de l'Anthropocène 

  • Sandrine Revet (CERI-SciencesPo): "Protéger et réparer le fleuve par le droit. Représentations de la nature et de ses gardiens dans le Chocó, en Colombie (Atrato)"
  • Paul Jobin (Academia Sinica, Taiwan): "L'Anthropocène vue d'Asie et les alternatives à l'éco-fascisme"

Discutant : Francis Chateauraynaud (Ehess, GSPR)

18 janvier : Technologies de gouvernement du "développement" aux Suds

  • Marielle Debos (Paris Nanterre, ISP) : "La biométrie électorale en Afrique: l’impossible quête de la technologie parfaite"
  • Quentin Déforge (IFRIS, CAK) : "La fabrique d'une gouvernementalité transnationale. Le "Partenariat pour un Gouvernement Ouvert" en Tunisie et en Argentine"

Disuctant : Boris Samuel (IRD, CESSMA)

15 février : Agriculture, élevage et environnement

  • Thomas Leroux (CNRS, CRH) : "Des milliers de vaches dans Paris : hygiène publique et zootechnie (1800-1840)". 
  • Léo Magnin (INRAE, AGIR) : "Gouverner les haies. L'expérience de la Politique agricole commune 2014-2020".

Discutante : Delphine Berdah (Paris Saclay, EST)

15 mars : Agir sur les comportements ? Enjeux et pratiques de l’empowerment dans les mondes du travail et de l’éducation

  • Lucie Gerber (CNRS, SAGE) : "L’art de s’affirmer. Compétences sociales et style comportemental à l’ère de la culture thérapeutique"  
  • Nicolas Marquis et Gaspard Wiseur (Université Saint-Louis de Bruxelles, CASPER) : "De nouvelles manières d’agir sur/avec autrui dans le champ de l’éducation : quelques éléments de compréhension des recompositions de l’environnement moral"

Discutante : Anne Rasmussen (Ehess, CAK)

19 avril : Surveillance numérique : marchés et régulations

  • Laurène Le Cozanet (IFRIS, CEMS) : "La CNIL, une institution d'anticipation ? La protection des libertés face aux 'menaces' de l'informatique"
  • Myrtille Picaud (Futurs Urbains, LATTS) : "Surveillance sans frontières ? Enjeux politiques, économiques et urbains du développement des dispositifs numériques de sécurité"

Discutante : Anne Bellon (UTC, COSTECH)

  • Séminaires de recherche – Savoirs en sociétés-Études environnementales – M1/S1-S2-M2/S3-S4
    Suivi et validation – annuel mensuelle = 6 ECTS
    MCC – fiche de lecture
  • Séminaires de recherche – Savoirs en sociétés-Histoire des sciences, des techniques et des savoirs – M1/S1-S2-M2/S3-S4
    Suivi et validation – annuel mensuelle = 6 ECTS
    MCC – fiche de lecture
  • Séminaires de recherche – Savoirs en sociétés-Santé, médecine et questions sociales – M1/S1-S2-M2/S3-S4
    Suivi et validation – annuel mensuelle = 6 ECTS
    MCC – fiche de lecture
Contacts additionnels
sezin.topcu@ehess.fr
Informations pratiques

Contacter par courriel les organisatrices pour toute demande d'information ou prise de rendez-vous.

Direction de travaux des étudiants
-
Réception des candidats
-
Pré-requis

Le séminaire est ouvert aux étudiant·e·s en master, doctorant·e·s, chercheur·e·s, et toute personne intéressée sur demande.

  • Bâtiment EHESS-Condorcet
    EHESS, 2 cours des humanités 93300 Aubervilliers
    Salle A527
    annuel / mensuel (3e), mardi 09:30-13:30
    du 19 octobre 2021 au 19 avril 2022
    Nombre de séances : 6

Le séminaire a poursuivi son étude des tensions à l’œuvre, depuis le XIXe siècle, dans les rapports entre technoscience, environnement, industrie, risque et société, abordées à partir d’objets, de périodes et d’échelles différents. Les six séances, conçues comme des demi-journées d’étude, croisaient deux perspectives, l'une historienne, l'autre sociologique et/ou politiste, suivies d’une discussion.

La première séance a porté sur l’économie politique des médicaments et les formes de pouvoir, y compris genré, qu’ils conduisent à exercer. Boris Hauray (CNRS, IRIS) a proposé une généalogie de la notion de conflit d’intérêt depuis son émergence aux Etats-Unis dans les années 1950. Il a mis l’accent sur la matérialité et l’impact sociétal des régulations récentes, au croisement des enjeux d’économie politique et de transformations des savoirs pharmaceutiques. Sezin Topçu a présenté sa recherche sur un médicament qui a fait l’objet de vives controverses dans les années 2013-2016, le Cytotec, utilisé pour le déclenchement des accouchements à partir des années 1990. L’affaire suscitée par ce médicament hors AMM donne à voir des problématisations de conflits d’intérêt liés à ses usages, et une guerre des savoirs et ignorances entre professionnel.le.s de santé, agences de régulation et collectifs féministes et de victimes. La dimension genrée de ces ignorances instruit sur le gouvernement des risques iatrogènes induits par les médicaments, ce qu’a notamment commenté Ilana Löwy, (Inserm, Cermes3).

La séance suivante a été consacrée aux désastres environnementaux et à la réparation juridique et citoyenne en Amérique latine et en Asie. Sandrine Revet (CERI-SciencesPo) a présenté les mobilisations pour la réparation du fleuve Atrato (en Colombie), très fortement pollué en raison d’un extractivisme intensif, ce qui a mené la Cour constitutionnelle colombienne à le déclarer sujet de droit en 2016. Elle s’intéresse à l’équipement scientifique, en particulier anthropologique, qui sous-tend cette décision juridique majeure, et à l’action militante, autour de la bioculturalité, des « gardiens » locaux pour la « réparer ». L’exposé de Paul Jobin (Academia Sinica, Taiwan) a porté sur les mobilisations environnementales en Asie, analysés en tant qu’alternatives à « l’écofascisme », présentées dans l’ouvrage qu’il a coordonné, Environmental Movements and Politics of the Asian Anthropocene (Taylor&Francis, 2021). Francis Chateauraynaud (Ehess, GSPR) a évoqué d’autres exemples de destruction-réparation écologiques, notamment à partir de son enquête sur l’effondrement du barrage de Mariana au Brésil.

La troisième séance a porté sur les technologies de gouvernement du « développement » aux Suds. Marielle Debos (Paris Nanterre, ISP), au sujet de la biométrie électorale en Afrique, a décrit le « petit monde de la biométrie » issu du secteur d’armement. L’industrie de la biométrie a construit l’Afrique comme un espace exceptionnel où la technologie est promue comme un moyen de démocratisation et de sécurisation des élections, tout en engendrant des coûts exorbitants pour les économies nationales concernées. L’intervention de Quentin Deforge (IFRIS, CAK) s’est focalisée sur les technologies de surveillance (monitoring) et de discipline (accountability) des institutions politiques mobilisées (Chili, Tunisie, Ukraine, Mexique…), en particulier le Open Government Partnership déployé par l’administration Obama en 2011, qui prône une forte participation de la société civile dans la conduite des réformes envisagées par les agences de gouvernance transnationale. L’embarquement des ONG dans le contrôle des institutions permet à ces agences de gouverner (et réformer) à distance les espaces nationaux concernés. Boris Samuel (IRD, CESSMA) a discuté du potentiel démocratique controversé de la biométrie et de la particularité de la « société civile » sollicitée par les agences de gouvernance transnationale.

La quatrième séance était consacrée à l’étude des relations et des tensions entre les pratiques agricoles, d’élevage, et les questions environnementales. Thomas Le Roux (CNRS, CRH), à propos de l’élevage à Paris au XIXe siècle, a rendu compte de l’explosion démographique des bovins en ville après la Révolution et l’amoindrissement des régulations des nuisances urbaines. Il a décrit les usages de leur commerce, et les préoccupations grandissantes pour l’insalubrité et les épizooties. Léo Magnin (INRAE, AGIR) a présenté son travail sur la régulation du rôle des haies par la politique agricole dans un objectif d’écologisation de l’agriculture européenne. Il a mis en valeur les difficultés liées à l’établissement d’une infrastructure informationnelle dédiée, et les critiques de l’administration par les agriculteurs. La faiblesse des contrôles de l’administration mène à ce qu’il nomme une « écologisation spectrale ».

La séance suivante a été consacrée aux enjeux et pratiques de l’empowerment dans les mondes du travail et de l’éducation. Lucie Gerber (CNRS, SAGE) a exposé sa recherche sur les techniques managériales visant au développement de compétences sociales et d’« affirmation de soi » dans le monde de l’entreprise. Elle a exploré la trajectoire transatlantique de la formation à l’affirmation, depuis son émergence dans la clinique des troubles anxieux aux États-Unis dans les années 1950 jusqu’à son importation en France et sa transposition en entreprise au cours des années 1970 et 1980. Nicolas Marquis et Gaspard Wiseur (Université Saint-Louis de Bruxelles, CASPER), ont éclairé les technologies d’empowerment en tant que nouvelles manières d’agir sur/avec autrui. Ils en analysent la grammaire complexe et la manière dont elle conditionne l’action dans différents domaines de la vie publique qui font l’objet des enquêtes menées (santé mentale, parentalité et éducation) dans le cadre du programme ERC « CoachingRituals ». Anne Rasmussen s’est interrogée sur les corpus de techniques mobilisés dans ces démarches, et leur lien historique avec la thérapie comportementale.

La dernière séance du séminaire a porté sur les marchés et régulations de la surveillance numérique. Myrtille Picaud (Futurs Urbains, LATTS), a présenté les enjeux politiques, économiques et urbains des dispositifs numériques de sécurité déployés à Marseille (Projet Big Data Marseille) et à Nice (Projet Safe City). Les politiques de sécurité se différencient selon les spatialisations urbaines et les segments professionnels s’occupant de la sécurité urbaine. Elle s’est interrogée sur les implications en termes de la mutation du rôle de l’État (sécuritaire) dans la gestion de la vie publique. Laurène Le Cozanet (IFRIS, CEMS) a évoqué la politique de protection des libertés menée par la CNIL face aux « menaces » de l'informatique. Elle a finement analysé l’évolution des règles d’intervention de cette institution et décrit la manière dont son champ d’action quant à la gestion des fichiers publics s’est réduit au cours des décennies.  Anne Belon (UTC, COSTECH) a discuté des enjeux politiques et économiques à l’œuvre dans ces politiques publiques.