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UE89 - L’espace, analyseur du monde social


Lieu et planning


  • Campus Condorcet-Centre de colloques
    Salle 3.10
    Centre de colloques, Cours des humanités 93300 Aubervilliers
    annuel / bimensuel (1re/3e/5e), mardi 16:30-18:30
    du 16 novembre 2021 au 7 juin 2022
    Nombre de séances : 12

    NB : salle polyvalente 50, Centre de colloques, les 30 novembre, 7 décembre, 4 et 18 janvier, 1er et 15 février


Description


Dernière modification : 19 novembre 2021 15:11

Type d'UE
Séminaires DE/MC
Disciplines
Anthropologie sociale, ethnographie et ethnologie, Histoire
Page web
-
Langues
français
Mots-clés
Administration Architecture Dynamiques sociales Politiques publiques Urbaines (études) Ville
Aires culturelles
Europe
Intervenant·e·s
  • Isabelle Backouche [référent·e]   directrice d'études, EHESS / Centre de recherches historiques (CRH)
  • Christian Topalov   directeur d'études, EHESS - directeur de recherche (retraité·e), CNRS / Centre Maurice-Halbwachs (CMH)

« La ville n’est ni un milieu ni un environnement, mais l’expression de pratiques, et de relations sociales », Bernard Lepetit, « Histoire urbaine et espace », Espace géographique, n° 1, 1980, p. 45.

« Une société n’est pas dans l’espace comme une bille dans une boîte », Raymond Ledrut, L’espace en question, Paris, 1976, p. 11.

L’espace n’est pas un réceptacle vide ou un décor. Ce n’est pas non plus seulement un environnement matériel et un cadre symbolique que les pratiques sociales façonnent. C’est, plus largement, une catégorie de la pratique. C’est pourquoi les phénomènes sociaux, dans leur diversité, peuvent gagner en intelligibilité si on les analyse en prenant en compte leurs dimensions spatiales : dans cette perspective, l’espace devient un analyseur du monde social. Du moins est-ce ainsi que les sciences sociales parfois le regardent et c’est ce point de vue que voudrait mettre en œuvre cette année le séminaire.

Nous y présentons et discuterons un ensemble de recherches empiriques sur les villes, les espaces et territoires, les circulations. Elles témoignent de ce que l’espace n’est pas seulement l’objet de spécialités constituées (histoire urbaine, sociologie urbaine, géographie sociale, notamment), mais se trouve utilement mobilisé dans une grande variété de travaux pour en construire l’objet, les dispositifs d’enquête, le cadre interprétatif.

Approches spatiales et redéfinition des objets

16 novembre 2021 : Isabelle Backouche "L’histoire des villes : de Caen au XVIIIe siècle (1975) à la Trace du fleuve (2000)"

30 novembre 2021 (salle polyvalente 50) : Christian Topalov "La culture ouvrière : genèse de la catégorie de « quartier ouvrier traditionnel » chez les sociologues des années 1955-1965 (Young et Wilmott, Gans, Coing)"

7 décembre 2021 (salle polyvalente 50) : Gaspard Lion (Université Sorbonne Paris Nord, Experice/Cerlis Paris 13) et Joanie Cayouette-Remblière (Ined) "Socialisations par l’espace, socialisation à l’espace. Les dimensions spatiales de la (trans)formation des individus. Présentation du dossier paru dans Sociétés Contemporaines (2019, n°115)."

4 janvier 2022 (salle polyvalente 50) : Kamel Boukir (EHESS) "La spatialisation de l'expérience morale: l'esprit de localité des « mecs de cité »"

L’espace comme observatoire du temps

18 janvier 2022 (salle polyvalente 50) : Isabelle Backouche "Le temps des politiques : raccorder sur un espace des séquences temporelles et des politiques publiques segmentées (l’îlot 16 et le Marais, Paris)"

1er février 2022 (salle polyvalente 50) : Christian Topalov "Le temps des marchés immobiliers : les toponymes urbains comme trace de l’histoire sociale des espaces à Londres"

15 février 2022 (salle polyvalente 50) : Nicolas Offenstadt (Université Paris I) "Le temps englouti : enquête sur les traces d’un pays disparu (la République démocratique allemande)"

15 mars 2022 : Eleonora Canepari (Université d’Aix-Marseille) "Le temps des migrations : les migrations observées sur la longue durée à partir d’un immeuble d’habitation (Rome, Naples, Marseille, Tunis)"

29 mars 2022 : Travaux étudiants

Approches spatiales des mouvements sociaux

5 avril 2022 : Magali della Suda (CNRS-Centre Emile Durkheim) et Etienne Walker (IUT d'Alençon) "L'espace, une catégorie d'analyse et un enjeu pour le mouvement social des Gilets jaunes"

19 avril 2022 : Adèle Mommeja (CNRS-CESSP) "Protéger l’Empire. Penser les liens entre espace et violences de masse en contexte colonial"

17 mai 2022 : Amen Jaffer (Lahore University of Management. Sciences – LUMS) "How space matters in the formation of political communities : inquiries into old and new low-income neighbourhoods in Lahore"

31 mai 2022 : Fabrice Ripoll (Université Paris-Est Créteil) "Analyser les mouvements sociaux par leur dimension spatiale. Enquêtes dans la France des années 1990-2000"

7 juin 2022 : Travaux d’étudiants


Master


  • Séminaires de recherche – Histoire-Histoire du monde/histoire des mondes – M1/S1-S2-M2/S3-S4
    Suivi et validation – annuel bi-mensuelle = 6 ECTS
    MCC – restitution écrite de la méthodologie du travail personnel
  • Séminaires de recherche – Histoire-Histoire et sciences sociales – M1/S1-S2-M2/S3-S4
    Suivi et validation – annuel bi-mensuelle = 6 ECTS
    MCC – restitution écrite de la méthodologie du travail personnel
  • Séminaires de recherche – Sciences sociales-Pratiques de l'interdisciplinarité en sciences sociales – M1/S1-S2-M2/S3-S4
    Suivi et validation – annuel bi-mensuelle = 6 ECTS
    MCC – restitution écrite de la méthodologie du travail personnel
  • Séminaires de recherche – Territoires et développement - Territoires, espaces, sociétés – M1/S1-S2-M2/S3-S4
    Suivi et validation – annuel bi-mensuelle = 6 ECTS
    MCC – restitution écrite de la méthodologie du travail personnel

Renseignements


Contacts additionnels
-
Informations pratiques

pour toute question contactez Isabelle Backouche.

Direction de travaux des étudiants

prendre rendez-vous par courriel avec Isabelle Backouche.

Réception des candidats

sur rendez vous pris par courriel, isabelle.backouche@ehess.fr

Pré-requis

tous les étudiants intéressés par la ville sont bienvenus au séminaire.


Compte rendu


Le séminaire qu’Isabelle Backouche et moi donnons ensemble est entré dans sa sixième année. Notre propos est d’illustrer la conjoncture scientifique actuelle en matière de travaux de sciences sociales sur les villes, tout en la resituant dans une histoire plus longue. L’objectif est de mieux comprendre la façon dont ont été construites les questions auxquelles la recherche s’efforce aujourd’hui de répondre et d’examiner de façon critique les définitions de l’objet dont nous sommes les héritiers et les acteurs. Après la trop longue période marquée par la pandémie, le séminaire s’est à nouveau tenu cette année dans des conditions normales. Deux séances (en mars et juin) ont été utilement consacrées à la discussion de travaux d’étudiants en master.  

Le séminaire a pris un tour méthodologique marqué avec le nouveau thème de l’année : « l’espace, analyseur du monde social ». L’espace, en effet, n’est pas un réceptacle vide ou un décor. Ce n’est pas non plus seulement un environnement matériel et un cadre symbolique que les pratiques sociales façonnent. C’est, plus largement, une catégorie de la pratique. C’est pourquoi les phénomènes sociaux, dans leur diversité, peuvent gagner en intelligibilité si on les analyse en prenant en compte leurs dimensions spatiales : dans cette perspective, l’espace devient un analyseur du monde social. Du moins est-ce ainsi que les sciences sociales parfois le regardent et c’est ce point de vue que voulait mettre en œuvre cette année le séminaire.

Il s’est ouvert par une série d’études de cas mettant en évidence la façon dont de nouvelles approches par l’espace ont conduit à redéfinir des objets pourtant solidement constitués par les traditions scientifiques dominantes de l’époque. Isabelle Backouche a examiné l’impact sur l’histoire des villes – et sur à son propre travail (la Trace du fleuve, 2000) – de la thèse de Jean-Claude Perrot (Caen au XVIIIe siècle, 1975) : en posant les « problèmes urbains » dans les termes des acteurs du temps et en observant les usages d’un espace au plus près des pratiques, la ville cesse d’être un décor pour devenir un objet de recherche. Christian Topalov a présenté le renouvellement de la vision savante du peuple des villes rendu possible par l’émergence, dans les années 1950 et 1960, d’une notion de « culture ouvrière » intimement liée à l’invention  d’un « quartier ouvrier traditionnel ». Gaspard Lion (Sorbonne Paris Nord) et Joanie Cayouette-Remblière (Ined) ont présenté un  dossier de Sociétés contemporaines traitant de la dimension spatiale de la socialisation des individus. Enfin, Kamel Boukir (EHESS) a traité de la spatialisation de l’expérience morale en s’appuyant sur une minutieuse ethnographie des réseaux familiaux et de classes d’âge dans une cité populaire.

Nous avons ensuite observé comment l’on pouvait utiliser l’espace comme un « observatoire du temps ». Isabelle Backouche a montré que l’on pouvait éclairer le temps des politiques en raccordant sur un espace (l’îlot 16, dans le Marais à Paris) des séquences temporelles et des politiques publiques considérées généralement de façon segmentée. Christian Topalov a reconstitué le temps long des marchés immobiliers à Londres (XVIIe-XXe siècles) en observant les cycles des noms toponymiques donnés aux opérations immobilières (square, gardens, place, etc.). Nicolas Offenstadt (Université Paris I) a retracé ses enquêtes sur un pays disparu, la RDA, à partir des traces spatiales laissées par celui-ci, avant d’élargir son propos au mouvement actuel d’enquêtes « urbex ». Enfin, Eleonora Canepari (Université Aix-Marseille) a suivi sur le temps long les usages successifs de mêmes immeubles par les voyageurs et migrants à Naples, Tunis et Marseille.

Dernier thème abordé, les approches spatiales des mouvements sociaux avec l’étude du « community organization movment » dans le Chicago des années 1910-1930 (Christian Topalov), des violences de l’OAS à Mostaganem (Adèle Mommeja, CESSP), des organisations communautaires dans les quartiers populaires de Lahore (Amen Jaffer, Lahore University of Management Sciences) et un retour amplement théorisé sur des travaux anciens sur ATTAC et les mouvements de chômeurs en France dans les années 1990-2000 (Fabrice Ripoll, Université Paris-Est).

Publications

Isabelle Backouche 

  • Voir le compte rendu du séminaire : Dans les marges. Histoire urbaine et statuts illégitimes

Christian Topalov 

  • « Enquêter sur le passé », Savoir/Agir, Paris, n° 57, septembre 2021 p. 21-29.
  •  « Philanthropie, réforme sociale et féminisme en 1900 : un même monde », Travail, genre et sociétés, Paris, n° 47, avril 2022 (« Hommage à Françoise Battagliola »), p. 19-24.
  • « Dylan Simon, Max Sorre, une écologie humaine. Penser la géographie comme science de l’homme, Éditions de la Sorbonne, 2021, 319 pages », Revue d’histoire des sciences humaines, Paris, n° 40, 2022, p. 305-309.

Dernière modification : 19 novembre 2021 15:11

Type d'UE
Séminaires DE/MC
Disciplines
Anthropologie sociale, ethnographie et ethnologie, Histoire
Page web
-
Langues
français
Mots-clés
Administration Architecture Dynamiques sociales Politiques publiques Urbaines (études) Ville
Aires culturelles
Europe
Intervenant·e·s
  • Isabelle Backouche [référent·e]   directrice d'études, EHESS / Centre de recherches historiques (CRH)
  • Christian Topalov   directeur d'études, EHESS - directeur de recherche (retraité·e), CNRS / Centre Maurice-Halbwachs (CMH)

« La ville n’est ni un milieu ni un environnement, mais l’expression de pratiques, et de relations sociales », Bernard Lepetit, « Histoire urbaine et espace », Espace géographique, n° 1, 1980, p. 45.

« Une société n’est pas dans l’espace comme une bille dans une boîte », Raymond Ledrut, L’espace en question, Paris, 1976, p. 11.

L’espace n’est pas un réceptacle vide ou un décor. Ce n’est pas non plus seulement un environnement matériel et un cadre symbolique que les pratiques sociales façonnent. C’est, plus largement, une catégorie de la pratique. C’est pourquoi les phénomènes sociaux, dans leur diversité, peuvent gagner en intelligibilité si on les analyse en prenant en compte leurs dimensions spatiales : dans cette perspective, l’espace devient un analyseur du monde social. Du moins est-ce ainsi que les sciences sociales parfois le regardent et c’est ce point de vue que voudrait mettre en œuvre cette année le séminaire.

Nous y présentons et discuterons un ensemble de recherches empiriques sur les villes, les espaces et territoires, les circulations. Elles témoignent de ce que l’espace n’est pas seulement l’objet de spécialités constituées (histoire urbaine, sociologie urbaine, géographie sociale, notamment), mais se trouve utilement mobilisé dans une grande variété de travaux pour en construire l’objet, les dispositifs d’enquête, le cadre interprétatif.

Approches spatiales et redéfinition des objets

16 novembre 2021 : Isabelle Backouche "L’histoire des villes : de Caen au XVIIIe siècle (1975) à la Trace du fleuve (2000)"

30 novembre 2021 (salle polyvalente 50) : Christian Topalov "La culture ouvrière : genèse de la catégorie de « quartier ouvrier traditionnel » chez les sociologues des années 1955-1965 (Young et Wilmott, Gans, Coing)"

7 décembre 2021 (salle polyvalente 50) : Gaspard Lion (Université Sorbonne Paris Nord, Experice/Cerlis Paris 13) et Joanie Cayouette-Remblière (Ined) "Socialisations par l’espace, socialisation à l’espace. Les dimensions spatiales de la (trans)formation des individus. Présentation du dossier paru dans Sociétés Contemporaines (2019, n°115)."

4 janvier 2022 (salle polyvalente 50) : Kamel Boukir (EHESS) "La spatialisation de l'expérience morale: l'esprit de localité des « mecs de cité »"

L’espace comme observatoire du temps

18 janvier 2022 (salle polyvalente 50) : Isabelle Backouche "Le temps des politiques : raccorder sur un espace des séquences temporelles et des politiques publiques segmentées (l’îlot 16 et le Marais, Paris)"

1er février 2022 (salle polyvalente 50) : Christian Topalov "Le temps des marchés immobiliers : les toponymes urbains comme trace de l’histoire sociale des espaces à Londres"

15 février 2022 (salle polyvalente 50) : Nicolas Offenstadt (Université Paris I) "Le temps englouti : enquête sur les traces d’un pays disparu (la République démocratique allemande)"

15 mars 2022 : Eleonora Canepari (Université d’Aix-Marseille) "Le temps des migrations : les migrations observées sur la longue durée à partir d’un immeuble d’habitation (Rome, Naples, Marseille, Tunis)"

29 mars 2022 : Travaux étudiants

Approches spatiales des mouvements sociaux

5 avril 2022 : Magali della Suda (CNRS-Centre Emile Durkheim) et Etienne Walker (IUT d'Alençon) "L'espace, une catégorie d'analyse et un enjeu pour le mouvement social des Gilets jaunes"

19 avril 2022 : Adèle Mommeja (CNRS-CESSP) "Protéger l’Empire. Penser les liens entre espace et violences de masse en contexte colonial"

17 mai 2022 : Amen Jaffer (Lahore University of Management. Sciences – LUMS) "How space matters in the formation of political communities : inquiries into old and new low-income neighbourhoods in Lahore"

31 mai 2022 : Fabrice Ripoll (Université Paris-Est Créteil) "Analyser les mouvements sociaux par leur dimension spatiale. Enquêtes dans la France des années 1990-2000"

7 juin 2022 : Travaux d’étudiants

  • Séminaires de recherche – Histoire-Histoire du monde/histoire des mondes – M1/S1-S2-M2/S3-S4
    Suivi et validation – annuel bi-mensuelle = 6 ECTS
    MCC – restitution écrite de la méthodologie du travail personnel
  • Séminaires de recherche – Histoire-Histoire et sciences sociales – M1/S1-S2-M2/S3-S4
    Suivi et validation – annuel bi-mensuelle = 6 ECTS
    MCC – restitution écrite de la méthodologie du travail personnel
  • Séminaires de recherche – Sciences sociales-Pratiques de l'interdisciplinarité en sciences sociales – M1/S1-S2-M2/S3-S4
    Suivi et validation – annuel bi-mensuelle = 6 ECTS
    MCC – restitution écrite de la méthodologie du travail personnel
  • Séminaires de recherche – Territoires et développement - Territoires, espaces, sociétés – M1/S1-S2-M2/S3-S4
    Suivi et validation – annuel bi-mensuelle = 6 ECTS
    MCC – restitution écrite de la méthodologie du travail personnel
Contacts additionnels
-
Informations pratiques

pour toute question contactez Isabelle Backouche.

Direction de travaux des étudiants

prendre rendez-vous par courriel avec Isabelle Backouche.

Réception des candidats

sur rendez vous pris par courriel, isabelle.backouche@ehess.fr

Pré-requis

tous les étudiants intéressés par la ville sont bienvenus au séminaire.

  • Campus Condorcet-Centre de colloques
    Salle 3.10
    Centre de colloques, Cours des humanités 93300 Aubervilliers
    annuel / bimensuel (1re/3e/5e), mardi 16:30-18:30
    du 16 novembre 2021 au 7 juin 2022
    Nombre de séances : 12

    NB : salle polyvalente 50, Centre de colloques, les 30 novembre, 7 décembre, 4 et 18 janvier, 1er et 15 février

Le séminaire qu’Isabelle Backouche et moi donnons ensemble est entré dans sa sixième année. Notre propos est d’illustrer la conjoncture scientifique actuelle en matière de travaux de sciences sociales sur les villes, tout en la resituant dans une histoire plus longue. L’objectif est de mieux comprendre la façon dont ont été construites les questions auxquelles la recherche s’efforce aujourd’hui de répondre et d’examiner de façon critique les définitions de l’objet dont nous sommes les héritiers et les acteurs. Après la trop longue période marquée par la pandémie, le séminaire s’est à nouveau tenu cette année dans des conditions normales. Deux séances (en mars et juin) ont été utilement consacrées à la discussion de travaux d’étudiants en master.  

Le séminaire a pris un tour méthodologique marqué avec le nouveau thème de l’année : « l’espace, analyseur du monde social ». L’espace, en effet, n’est pas un réceptacle vide ou un décor. Ce n’est pas non plus seulement un environnement matériel et un cadre symbolique que les pratiques sociales façonnent. C’est, plus largement, une catégorie de la pratique. C’est pourquoi les phénomènes sociaux, dans leur diversité, peuvent gagner en intelligibilité si on les analyse en prenant en compte leurs dimensions spatiales : dans cette perspective, l’espace devient un analyseur du monde social. Du moins est-ce ainsi que les sciences sociales parfois le regardent et c’est ce point de vue que voulait mettre en œuvre cette année le séminaire.

Il s’est ouvert par une série d’études de cas mettant en évidence la façon dont de nouvelles approches par l’espace ont conduit à redéfinir des objets pourtant solidement constitués par les traditions scientifiques dominantes de l’époque. Isabelle Backouche a examiné l’impact sur l’histoire des villes – et sur à son propre travail (la Trace du fleuve, 2000) – de la thèse de Jean-Claude Perrot (Caen au XVIIIe siècle, 1975) : en posant les « problèmes urbains » dans les termes des acteurs du temps et en observant les usages d’un espace au plus près des pratiques, la ville cesse d’être un décor pour devenir un objet de recherche. Christian Topalov a présenté le renouvellement de la vision savante du peuple des villes rendu possible par l’émergence, dans les années 1950 et 1960, d’une notion de « culture ouvrière » intimement liée à l’invention  d’un « quartier ouvrier traditionnel ». Gaspard Lion (Sorbonne Paris Nord) et Joanie Cayouette-Remblière (Ined) ont présenté un  dossier de Sociétés contemporaines traitant de la dimension spatiale de la socialisation des individus. Enfin, Kamel Boukir (EHESS) a traité de la spatialisation de l’expérience morale en s’appuyant sur une minutieuse ethnographie des réseaux familiaux et de classes d’âge dans une cité populaire.

Nous avons ensuite observé comment l’on pouvait utiliser l’espace comme un « observatoire du temps ». Isabelle Backouche a montré que l’on pouvait éclairer le temps des politiques en raccordant sur un espace (l’îlot 16, dans le Marais à Paris) des séquences temporelles et des politiques publiques considérées généralement de façon segmentée. Christian Topalov a reconstitué le temps long des marchés immobiliers à Londres (XVIIe-XXe siècles) en observant les cycles des noms toponymiques donnés aux opérations immobilières (square, gardens, place, etc.). Nicolas Offenstadt (Université Paris I) a retracé ses enquêtes sur un pays disparu, la RDA, à partir des traces spatiales laissées par celui-ci, avant d’élargir son propos au mouvement actuel d’enquêtes « urbex ». Enfin, Eleonora Canepari (Université Aix-Marseille) a suivi sur le temps long les usages successifs de mêmes immeubles par les voyageurs et migrants à Naples, Tunis et Marseille.

Dernier thème abordé, les approches spatiales des mouvements sociaux avec l’étude du « community organization movment » dans le Chicago des années 1910-1930 (Christian Topalov), des violences de l’OAS à Mostaganem (Adèle Mommeja, CESSP), des organisations communautaires dans les quartiers populaires de Lahore (Amen Jaffer, Lahore University of Management Sciences) et un retour amplement théorisé sur des travaux anciens sur ATTAC et les mouvements de chômeurs en France dans les années 1990-2000 (Fabrice Ripoll, Université Paris-Est).

Publications

Isabelle Backouche 

  • Voir le compte rendu du séminaire : Dans les marges. Histoire urbaine et statuts illégitimes

Christian Topalov 

  • « Enquêter sur le passé », Savoir/Agir, Paris, n° 57, septembre 2021 p. 21-29.
  •  « Philanthropie, réforme sociale et féminisme en 1900 : un même monde », Travail, genre et sociétés, Paris, n° 47, avril 2022 (« Hommage à Françoise Battagliola »), p. 19-24.
  • « Dylan Simon, Max Sorre, une écologie humaine. Penser la géographie comme science de l’homme, Éditions de la Sorbonne, 2021, 319 pages », Revue d’histoire des sciences humaines, Paris, n° 40, 2022, p. 305-309.