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UE693 - Mémoires et patrimonialisations des migrations


Lieu et planning


  • Campus Condorcet-Centre de colloques
    Centre de colloques, Cours des humanités 93300 Aubervilliers
    Salle 3.09
    annuel / bimensuel (2e/4e), jeudi 12:30-14:30
    du 14 octobre 2021 au 9 juin 2022
    Nombre de séances : 12


Description


Dernière modification : 5 avril 2022 06:31

Type d'UE
Séminaires DR/CR
Disciplines
Anthropologie sociale, ethnographie et ethnologie, Histoire, Sociologie
Page web
-
Langues
français
Mots-clés
Anthropologie Circulations Diaspora Histoire Mémoire Migration(s) Minorités Patrimoine Politique Sociologie Transnational
Aires culturelles
Afrique Amérique du Sud Arabe (monde) Contemporain (anthropologie du, monde) Europe Europe centrale et orientale Europe sud-orientale France Ibérique (monde) Maghreb Méditerranéens (mondes) Transnational/transfrontières
Intervenant·e·s

Depuis 2010, le séminaire « Mémoires et patrimonialisations des migrations » développe une réflexion sur les articulations entre mémoires singulières des migrations, mémoires collectives et patrimonialisations. Cette année sera consacrée à l’articulation entre deux thèmes : les migrations impériales et post-impériales d’une part, et la question de l’absence dans la patrimonialisation des mémoires des migrations d’autre part.

Les migrations impériales et post impériales renvoient à des contextes historiques de mobilité/immobilité sur la longue durée, voire à des déplacements successifs pour certains groupes et individus. Elles recouvrent des enjeux de territorialisation et de déterritorialisation, des stratégies et des tactiques - abandon, effacement, préservation et investissement, réappropriation - et des choix d’appartenance(s), complexifiant l’articulation entre phénomènes migratoires et processus mémoriels et de patrimonialisations. Dans le cadre de ce séminaire, on réfléchira en particulier au rôle présent de ces passés migratoires dans la construction de « l’autre » et dans les formes de rupture, de transformations et de continuité. L’idée est de comprendre les espaces singuliers de relations (conflictuelles, asymétriques, hiérarchisées…) qui se dessinent à différentes échelles et niveaux : entre anciennes puissances impériales et territoires anciennement colonisés, entre les populations qui les ont quittés, celles qui sont restées et celles qui coexistent encore, et entre les différentes générations.

Le second thème interroge l’absence liée aux déplacements migratoires dans les phénomènes mémoriels et patrimoniaux contemporains. De manière générale, le patrimoine et la mémoire, avec leurs dynamiques respectives, renvoient à l’idée de continuité qui tisse dans le présent et par la présence – de traces, de symboles, de souvenirs, de récits – un lien aux absents (ceux qui nous ont précédé et ceux qui adviendront) et plus généralement à l’absence. En prenant appui sur le cas des migrations impériales et post impériales, le séminaire questionnera la manière dont est construite, dans un cadre national, l’absence, réelle ou imaginée – des individus, de groupes, de langues, de cultures, d’histoires, de relations, d’un patrimoine, de paysages…- , notamment pour asseoir une présence et poser des liens supposément « naturels » entre patrimoine, nation et territoire. La réflexion portera à la fois sur ces constructions (sensibles, politiques…) et sur les formes patrimoniales et mémorielles qui viennent les troubler, réinventer et renégocier, resignifier et mettre au jour d’autres relations par-delà la séparation géographique et temporelle, la rareté, l’absence ou l’invisibilité des artefacts liés à des groupes contraints au départ ou invisibilisés. Elle nous engagera à examiner à nouveaux frais, dans le cadre de ce séminaire, des notions telles que patrimoine, ruines, traces, vestiges, décombres et empreintes.

Calendrier des séances :

Jeudi 14 octobre 2021 : Introduction

Jeudi 25 novembre 2021 : Michèle Baussant (CEFRES/ISP), « Youssef Ades : une plaque en bronze sur le banc d’une synagogue du Caire »

  • Résumé : Dans cette présentation, j’explore les formes de renouveaux liés au judaïsme et aux minorités juives en Egypte et hors Egypte,  en relation à la fois avec une histoire multiséculaire des Juifs en Egypte et le passé colonial récent. Cette histoire et ce passé constituent un héritage, à la fois facteur de division et de partage, de ruptures et de récupérations qui informent le présent. S’y surimposent les narrations liées à l’histoire d’Israël qui, à l’opposé, se caractérisent par une certaine unité et clôture discursives.  Je m’interroge en particulier sur les types d’artefacts et d’espaces mis en valeur, les histoires qui sont racontées, ainsi que sur ceux qui sont passés sous silence, pour construire une diaspora juive égyptienne d’un côté et de l’autre, sur place, une Egypte également pour partie juive.

Jeudi 9 décembre 2021 : Filomena Silvano (professeure à la Faculdade de Ciências Sociais e Humanas, Universidade NOVA de Lisboa, chercheure au CRIA, associée à l'URMIS), « Des choses qui ont traversé des océans : la construction de patrimoines familiaux dans un contexte migratoire post impérial (Mozambique, Portugal, Brésil) »

  • Résumé : Ma communication présente des résultats du projet de recherche « Mobilités transnationales et construction d’espaces domestiques », liant le Mozambique, le Portugal et le Brésil » (réalisé par Marta Rosales, Manuel Teles Grilo et moi-même). La recherche a été menée auprès de familles marquées par des déplacements transnationaux en contexte impérial et post impérial. Nous avons voulu comprendre le rôle qu’assument, dans la construction des identités de leurs membres, les objets qui les ont accompagnés. Les objets que les familles possèdent aujourd’hui ont joué deux rôles principaux: convoquer, par métonymie, les maisons africaines du passé et objectifier (Miller) la portugalité. Les objets donnent forme à une continuité matérielle, un cadre (Remy et Latour), qui permet de dépasser les ruptures spatiales, sociales et culturelles vécues, aussi bien qu’ils intègrent la construction de l’idée de « diaspora portugaise ». Je montrerai aussi qu’une partie de ces objets a subi, à l’intérieur de l’espace familial, un processus d’inaliénation (Wainer) proche de celui de patrimonialisation. 

Jeudi 13 janvier 2022 : Andréa Delaplace (ICOM-CAMOC et HIPAM), « Musées d’immigration : repenser le rôle du musée en tant que médiateur dans la construction identitaire »

  • Résumé : En tant qu’institutions mémorielles, les musées jouent un grand rôle dans la construction identitaire. Les représentations du passé et du patrimoine culturel local sont essentielles pour le développement de l’identité nationale ou régionale. Désormais, la transformation d’anciennes installations qui accueillaient les immigrés - comme Ellis Island à New York – dans des sites mémoriels qui mettent en scène leurs histoires. Grâce à cette patrimonialisation des mémoires d’immigrés, un nouveau discours sur l’immigration et l’identité se met en place : les mémoires souvent oubliées - un oubli volontaire parfois - trouvent leur place dans les musées et permettent de créer un récit narratif sur l’immigration à partir de récits personnels. Pourtant, la mise en musée de l’histoire de l’immigration reste un défi dans le paysage muséal international. Ainsi, plusieurs questions se posent: Qu’est-ce que le patrimoine de l’immigration ? Comment exposer l’immigration ? Les tentatives de représentation des immigrés reflètent-elles un paradigme national ?  

Jeudi 27 janvier 2022 :  Séance ouverte aux travaux d'étudiants

Barbara Gigi, « Les objets de l’émigration et leur contenu silencieux  »

  • Résumé : Dans ma présentation, j’essayerai d’expliquer comment j’ai utilisé les objets et leur silence (Delle Notti, Puccio-Den, 2016) pour dialoguer avec les membres d’une communauté diasporique de Siciliens aux Etats-Unis et comment cette démarche ethnographique m’a permis de saisir l’ambivalence du rapport qui lie ces émigrés à leur passé et à leur pays d’origine. La présence du passé (Kidron, 2009) contenu dans les objets liés à l’émigration a permis aux membres de cette communauté de “mettre des mots sur” (Hirschauer, 2006) les traumatismes de l'expérience “mafieuse" tout en leur permettant de témoigner l’attachement et l’amour pour leur propre pays d’origine. Les expériences ethnographiques que je partagerai feront référence à des membres appartenant à différentes générations.   

Jeudi 10 février 2022 : Anélie Prudor (LISST-Centre d'anthropologie sociale, Université Toulouse - Jean Jaurès) : « Du local au transfrontalier, la place des fosses communes du franquisme dans la construction d’une mémoire de l’Espagne républicaine (Espagne/France) »

  • Résumé : Dans cette communication, je présenterai les fosses communes du franquisme comme des espaces de mémoire condensant un éventail d’enjeux, entre deuil familial et revendications politiques et sociales, et réunissant des acteurs pluriels (descendants des fusillés, militants associatifs, représentants d’institutions, élus, etc.). Si ces fosses – leur exhumation et/ou leur « dignification » – revêtent un sens mémoriel spécifique à l’échelle locale, elles s’insèrent dans une volonté de reconnaissance nationale d’un pan de l’histoire républicaine espagnole et sont entourées de demandes mobilisant des référents internationaux (justice transitionnelle, droit pénal international, médecins et anthropologues légistes formés à l’étranger, etc.). En partant de ces lieux – cachés, passés sous silence, excavés, monumentalisés mais aussi objets de re-significations multiples – et par un jeu d’échelles, j’interrogerai la place prise par certains acteurs associatifs français, descendants de l’exil consécutif à la guerre d’Espagne (1936-1939), auprès de leurs homologues espagnols dans ce processus mémoriel. En somme, il s’agira de comprendre dans quelle mesure les fosses communes, espaces éminemment territorialisés, participent à la construction de mémoires (voulues) partagées à une échelle transfrontalière?

Jeudi 24 février 2022 :  Ana Carolina de Moura Delfim Maciel (Université d’État de Campinas (UNICAMP - Brésil) : « Mémoires, indices et suppressions dans les représentations du traumatisme  »

  • Résumé : Ana Carolina de Moura Delfim Maciel est historienne et documentariste. Elle préside la Chaire pour les réfugiés « Sérgio Vieira de Mello » de l’Université d’État de Campinas (UNICAMP - Brésil), une initiative de l’agence des Nations Unies pour les réfugiés. Elle est professeure titulaire du Programme de Master en Multimédias de l’UNICAMP, où elle coordonne le séminaire « Témoins, mémoires et mises sous silence. Le documentaire audiovisuel en tant que possibilité de récit des réfugiés ».

    A partir de l’analyse de récits audiovisuels, l’intervention portera sur le thème des déplacements forcés. Elle proposera diverses réflexions à partir d’images qui ont circulé dans la presse ou sur les réseaux sociaux. (L’intervention sera faite en français). 

Jeudi 10 mars 2022 : Alain Schnapp (Université Paris I, Panthéon-Sorbonne), «  L’Occident a-t-il inventé les ruines ? »

  • Résumé : Il n’existe pas plus d’homme sans mémoire que de sociétés sans ruines. Massives ou discrètes, inaltérables ou fragiles, les ruines font partie de notre environnement, elles conditionnent une part de notre action et de nos comportements sans parfois que nous en ayons connaissance. Elles sont un pont instable et constamment restauré entre la mémoire et l’oubli. Certaines sociétés comme l’Egypte ancienne confient à des monuments gigantesques et à des inscriptions imposantes la mémoire de leurs souverains, d’autres préfèrent pactiser avec le temps, comme les Mésopotamiens conscients de la vulnérabilité de leurs palais de briques crues qui préféraient enterrer dans le sol les briques de fondation porteuses d’inscriptions commémoratives.  D’autres comme les japonais du sanctuaire d’Isé vont encore plus loin en détruisant puis en reconstruisant à l’identique, en un cycle infini, leurs légères architectures de bois et de chaume. 
  • Égyptiens, Mésopotamiens, Chinois de l’Antiquité  pour leur compte se réfèrent à un passé impérial, constitué par la succession des règnes, l’accumulation évidente des vestiges et la continuité des traditions écrites. Des millénaires durant, les scribes ont pu déchiffrer les textes de leurs plus lointains prédécesseurs, ils ont pu garder avec les monuments des civilisations du passé un contact direct qui leur permettait de faire parler les choses, d’interpréter la fonction des monuments et d’en établir, avec plus ou moins de sûreté, la date de fondation. La pratique de l’écriture, transmise d’une génération à l’autre, est la marque de cette relation à l’Antiquité. Elle rend possible la constitution d’un savoir antiquaire qui est une nécessité dans le désir d’autopromotion, de justification et de permanence des pouvoirs. Les souverains proclament la stabilité de leur règne, la puissance de leurs armées, la connivence établie entre eux et leurs dieux. Ce faisant, ils s’adressent autant au présent qu’au futur car ils savent que, si imposants que soient leurs monuments, si vastes leurs palais, si solides leurs fortifications, un jour viendra où d’autres les occuperont, les réaménageront, voire les détruiront. Ils le savent d’autant mieux qu’ils ont procédé à des degrés divers de la même manière avec leurs prédécesseurs. Puisqu’ils ne peuvent se prémunir complètement d’une telle issue il leur convient de négocier la trace qu’ils laisseront à leurs successeurs. Construire des monuments gigantesques, les parer avec les matériaux les plus raffinés n’est pas suffisant. Pour plus de sûreté, il importe de frapper les imaginations : la pyramide, le « palais sans rival », la « grande muraille » sont chacune dans leur genre des constructions si imposantes qu’elles valent autant par l’ombre qu’elles produisent (au sens que Borges donne à ce mot dans La muraille et les livres) que par leurs qualités proprement architecturales. Ce type d’architecture a quelque chose de démesuré qui dépasse sa fin propre, il incarne une sorte de transgression qui constitue un outil de propagande autant qu’un instrument de mémoire.
  • Les Arabes du désert avant l’islam ont inventé un genre poétique qui met en scène le voyageur à la recherche des traces fragiles des campements où il a croisé une femme aimée. En partant à la recherche de ces vestiges presque invisibles, il entreprend une sorte d’anamnèse qui lui révèle la vanité des choses et la fragilité des souvenirs. Cette poésie atteint une perfection émotive et formelle aussi puissante que celle des Mésopotamiens, des Chinois, des Grecs et des Romains, mais elle refuse la diachronie ; ce qui est en jeu, ce sont les ruines de l’être et non des choses. Par la suite, avec l’islam, cette tradition poétique sera reprise sous une autre forme qui donnera sa place aux ruines sassanides ou romaines, si présentes dans les paysages du Proche-Orient. Un genre qui sera voué à la description des traces issues de la destruction des monuments les plus ambitieux pour mieux affirmer le caractère dérisoire de la condition humaine. Le paysage est un palimpseste de toutes les civilisations qui se sont succédé, et c’est le privilège du poète de pouvoir les interpréter. Comme il se penche sur les sites abandonnés, sur les tells qui indiquent la présence de cités oubliées, le poète islamique chante les odes à la mémoire des villes,  des cités merveilleuses et de leurs palais splendides que les guerres incessantes ont détruits. Il s’attache à saisir ce qu’il appelle « la séparation », l’expulsion des habitants et le souvenir qui habite les lieux abandonnés. Cette vision poétique du passé est liée à une approche historique qui privilégie la rupture contre la continuité, qu’il s’agisse de l’apparition de l’islam ou de la succession des dynasties et des souverains qui tentent d’affirmer leur singularité, leur refus d’être comparé à leurs prédécesseurs. En terre d’islam comme dans le monde chrétien les vestiges des civilisations polythéistes sont suspects. Certains veulent les éradiquer, mais d’autres proposent de les tolérer, voire de les protéger du fait de leurs qualités intrinsèques. Entre le calife qui ordonne sans succès de s’en prendre aux pyramides, et les souverains iraniens des XIe et XIIe siècles qui entreprennent d’ajouter leurs inscriptions commémoratives sur les ruines de Persépolis et autres grands sites de l’époque achéménide, il y a toute une gamme d’attitudes qui vont du rejet à l’apprivoisement du passé. L’histoire des ruines dans le monde islamique suit des chemins de traverse qui ne sont pas moins inventifs que ceux de l’Occident ou de la Chine. C’est ce dialogue entre monde classique, monde chinois et monde islamique qui fait la trame  de mon exposé.

Jeudi 24 mars 2022 : Neža Čebron Lipovec (University of Primorska, Slovenia), « Urban and architectural heritage of the post-WWII period in the contested area of Istria » et Petra Kavrečič (University of Primorska, Slovenia), « ACRO PELLEGRINAGGIO”. Visits to World War I Memorials on the Soča/Isonzo Front in the Interwar Period. » Séance en anglais

  • Cette séance s’inscrira dans la journée d’étude « The place of absence and the spaces of the absent : the legacies of the 20th century (de)population movements in Europe and beyond», organisée par le CERI. https://www.sciencespo.fr/agenda/ceri/fr?event=3230

Jeudi 14 avril 2022 : Sébastien Escande (coordinateur général du réseau Traces, directeur artistique d’ « images migrantes »), en collaboration avec Marina Chauliac : «Représentations de l’absence dans les documentaires sur les migrations »

  • Résumé : Nous observons aujourd’hui dans le monde du cinéma de nouvelles représentations de la migration : plus inclusives, plus intimes, complexifiant notre compréhension du sujet. Cette séance de séminaire qui se fera sous format d'atelier, sera consacrée à la façon dont les documentaires sur les migrations abordent aujourd’hui la question de l’absence. A travers un choix d’extraits de films, nous aborderons ainsi les types d’absences liées à l’exil (des personnes se préparant à partir, de celles ayant connu une expérience migratoire, ou encore des proches restés au pays). Seront également questionnés les choix formels du cinéma comme lieu de partage du sensible, les dispositifs de réalisation et la façon dont ils induisent notre perception du vécu.

Jeudi 12 mai 2022 : Olga Sezneva (University of Amsterdam Department of Sociology), « From Trophy to Patrimony: proprietary feelings and material emotions after forced migration » (provisional title) Séance en anglais

Jeudi 9 juin 2022 : Conclusion


Master


  • Séminaires de recherche – Anthropologie-Ethnologie et anthropologie sociale – M1/S1-S2-M2/S3-S4
    Suivi et validation – annuel bi-mensuelle = 6 ECTS
    MCC – discussion d'une séance et des textes proposés (écrit 5 pages, discussion orale facultative)
  • Séminaires de recherche – Études politiques – M1/S1-S2-M2/S3-S4
    Suivi et validation – annuel bi-mensuelle = 6 ECTS
    MCC – discussion d'une séance et des textes proposés (écrit 5 pages, discussion orale facultative)
  • Séminaires de recherche – Migrations – M1/S1-S2-M2/S3-S4
    Suivi et validation – annuel bi-mensuelle = 6 ECTS
    MCC – discussion d'une séance et des textes proposés (écrit 5 pages, discussion orale facultative)
  • Séminaires de recherche – Sociologie – M1/S1-S2-M2/S3-S4
    Suivi et validation – annuel bi-mensuelle = 6 ECTS
    MCC – discussion d'une séance et des textes proposés (écrit 5 pages, discussion orale facultative)

Renseignements


Contacts additionnels
marina.chauliac@culture.gouv.fr irene.dossantos@cnrs.fr
Informations pratiques

Évelyne Ribert, IIAC-LACI, par courriel : ribert@ehess.fr

Michèle Baussant, CEFRES, par courriel : michele.baussant@cnrs.fr

Catherine Perron, CERI, par courriel : catherine.perron@sciencespo.fr

Direction de travaux des étudiants

Sur rendez-vous :

Évelyne Ribert, IIAC-LACI, par courriel : ribert@ehess.fr

Réception des candidats

Sur rendez-vous par courriel :

Évelyne Ribert, IIAC-LACI, par courriel : ribert@ehess.fr

Michèle Baussant, CEFRES, par courriel : michele.baussant@cnrs.fr

Catherine Perron, CERI, par courriel : catherine.perron@sciencespo.fr

Pré-requis

Licence


Compte rendu


Le séminaire a été consacré cette année à l’articulation entre 2 thèmes : 1) les migrations impériales et post-impériales ; 2) l’absence dans la patrimonialisation des mémoires des migrations.

Les migrations traitées dans le premier  thème renvoient à des contextes historiques de mobilité/immobilité sur la longue durée, voire à des déplacements successifs pour certains groupes et individus. La réflexion a porté en particulier sur le rôle présent de ces passés migratoires dans la construction de « l’autre » et dans les formes de rupture, de transformations et de continuités.

Le second thème interroge l’absence liée aux déplacements migratoires dans les phénomènes mémoriels et patrimoniaux contemporains en prenant appui sur le cas des migrations impériales et post-impériales. Nous nous sommes intéressé·e·s aux modalités de construction, dans un cadre national, de l’absence, réelle ou imaginée – des individus, de groupes, de langues, de cultures, d’histoires, de relations, d’un patrimoine, de paysages…–, à leurs les enjeux, causes et effets. La réflexion a porté en particulier sur les constructions (sensibles, politiques…) et sur les formes patrimoniales et mémorielles qui viennent réinventer et renégocier, resignifier et mettre au jour dans le présent des relations passées, par-delà la séparation géographique et temporelle, l’absence ou l’invisibilité des artefacts liés à des groupes contraints au départ ou invisibilisés.

Un premier ensemble d’interventions – A. Schnapp sur les ruines, M. Baussant sur la mémoire de la présence juive en Égypte, A. Prudor sur les fosses communes du franquisme, N. Čebron Lipovec sur l’héritage architectural dans la région contestée de l’Istrie et P. Kavrečič sur les discontinuités territoriales de la nouvelle frontière italo-yougoslave – a ainsi interrogé cette (re)construction présente des mémoires par différents groupes d’acteurs, locaux, nationaux et transnationaux. À partir de ces passés, facteurs de division et de rupture, sont mis en avant certains lieux et artefacts, alors que d’autres sont tus. Mise en valeur et silence constituent deux formes, non exclusives et aux gradations multiples qui marquent les espaces et les mémoires liés aux exils massifs et rendent présente l’absence via des traces, parfois cachées, des ruines voire des monuments.

Nous avons ensuite réfléchi au rôle ambivalent des objets et à leur circulation pour tisser des liens avec les pays absents ou avec leurs propriétaires absents, dans le cadre de départs contraints. Les objets peuvent rappeler le lieu d’émigration et participer à la construction d’une identité diasporique en maintenant une continuité par-delà les ruptures comme dans l’intervention de F. Silvano à propos des migrations portugaises du Mozambique au Brésil. A. Delaplace souligne que les objets remplissent une fonction analogue dans les musées d’immigration. Dans les deux cas, les objets servent de support à la narration et sont patrimonialisés. Mais ils peuvent aussi être silencieux, témoigner de l’attachement au pays d’émigration et taire une partie du passé, comme dans le travail de B. Gigi sur une communauté diasporique de Siciliens aux États-Unis. Ou bien encore, comme le montre O. Sezneva, les objets restés sur place après le départ de leurs propriétaires sont parfois patrimonialisés comme témoignages du passé ou circulent pour devenir autre chose.

Enfin, trois séances étaient consacrées aux modes d’expression de l’absence croisée — de celles et ceux qui sont partis et de celles et ceux qui restent  — à travers l’audiovisuel ou l’écriture. L’intervention de S. Escande et M. Chauliac les explorait dans les documentaires, celle d’A. de Moura Delfim Maciel dans les images diffusées sur les réseaux sociaux et dans la presse et celle de M. Zagula à travers des concours autobiographiques organisés en Pologne. Dans les trois interventions, nous nous sommes interrogé·e·s sur les choix narratifs et de mises en scène pour parvenir à partager cette expérience avec le spectateur ou le lecteur.

Dernière modification : 5 avril 2022 06:31

Type d'UE
Séminaires DR/CR
Disciplines
Anthropologie sociale, ethnographie et ethnologie, Histoire, Sociologie
Page web
-
Langues
français
Mots-clés
Anthropologie Circulations Diaspora Histoire Mémoire Migration(s) Minorités Patrimoine Politique Sociologie Transnational
Aires culturelles
Afrique Amérique du Sud Arabe (monde) Contemporain (anthropologie du, monde) Europe Europe centrale et orientale Europe sud-orientale France Ibérique (monde) Maghreb Méditerranéens (mondes) Transnational/transfrontières
Intervenant·e·s

Depuis 2010, le séminaire « Mémoires et patrimonialisations des migrations » développe une réflexion sur les articulations entre mémoires singulières des migrations, mémoires collectives et patrimonialisations. Cette année sera consacrée à l’articulation entre deux thèmes : les migrations impériales et post-impériales d’une part, et la question de l’absence dans la patrimonialisation des mémoires des migrations d’autre part.

Les migrations impériales et post impériales renvoient à des contextes historiques de mobilité/immobilité sur la longue durée, voire à des déplacements successifs pour certains groupes et individus. Elles recouvrent des enjeux de territorialisation et de déterritorialisation, des stratégies et des tactiques - abandon, effacement, préservation et investissement, réappropriation - et des choix d’appartenance(s), complexifiant l’articulation entre phénomènes migratoires et processus mémoriels et de patrimonialisations. Dans le cadre de ce séminaire, on réfléchira en particulier au rôle présent de ces passés migratoires dans la construction de « l’autre » et dans les formes de rupture, de transformations et de continuité. L’idée est de comprendre les espaces singuliers de relations (conflictuelles, asymétriques, hiérarchisées…) qui se dessinent à différentes échelles et niveaux : entre anciennes puissances impériales et territoires anciennement colonisés, entre les populations qui les ont quittés, celles qui sont restées et celles qui coexistent encore, et entre les différentes générations.

Le second thème interroge l’absence liée aux déplacements migratoires dans les phénomènes mémoriels et patrimoniaux contemporains. De manière générale, le patrimoine et la mémoire, avec leurs dynamiques respectives, renvoient à l’idée de continuité qui tisse dans le présent et par la présence – de traces, de symboles, de souvenirs, de récits – un lien aux absents (ceux qui nous ont précédé et ceux qui adviendront) et plus généralement à l’absence. En prenant appui sur le cas des migrations impériales et post impériales, le séminaire questionnera la manière dont est construite, dans un cadre national, l’absence, réelle ou imaginée – des individus, de groupes, de langues, de cultures, d’histoires, de relations, d’un patrimoine, de paysages…- , notamment pour asseoir une présence et poser des liens supposément « naturels » entre patrimoine, nation et territoire. La réflexion portera à la fois sur ces constructions (sensibles, politiques…) et sur les formes patrimoniales et mémorielles qui viennent les troubler, réinventer et renégocier, resignifier et mettre au jour d’autres relations par-delà la séparation géographique et temporelle, la rareté, l’absence ou l’invisibilité des artefacts liés à des groupes contraints au départ ou invisibilisés. Elle nous engagera à examiner à nouveaux frais, dans le cadre de ce séminaire, des notions telles que patrimoine, ruines, traces, vestiges, décombres et empreintes.

Calendrier des séances :

Jeudi 14 octobre 2021 : Introduction

Jeudi 25 novembre 2021 : Michèle Baussant (CEFRES/ISP), « Youssef Ades : une plaque en bronze sur le banc d’une synagogue du Caire »

  • Résumé : Dans cette présentation, j’explore les formes de renouveaux liés au judaïsme et aux minorités juives en Egypte et hors Egypte,  en relation à la fois avec une histoire multiséculaire des Juifs en Egypte et le passé colonial récent. Cette histoire et ce passé constituent un héritage, à la fois facteur de division et de partage, de ruptures et de récupérations qui informent le présent. S’y surimposent les narrations liées à l’histoire d’Israël qui, à l’opposé, se caractérisent par une certaine unité et clôture discursives.  Je m’interroge en particulier sur les types d’artefacts et d’espaces mis en valeur, les histoires qui sont racontées, ainsi que sur ceux qui sont passés sous silence, pour construire une diaspora juive égyptienne d’un côté et de l’autre, sur place, une Egypte également pour partie juive.

Jeudi 9 décembre 2021 : Filomena Silvano (professeure à la Faculdade de Ciências Sociais e Humanas, Universidade NOVA de Lisboa, chercheure au CRIA, associée à l'URMIS), « Des choses qui ont traversé des océans : la construction de patrimoines familiaux dans un contexte migratoire post impérial (Mozambique, Portugal, Brésil) »

  • Résumé : Ma communication présente des résultats du projet de recherche « Mobilités transnationales et construction d’espaces domestiques », liant le Mozambique, le Portugal et le Brésil » (réalisé par Marta Rosales, Manuel Teles Grilo et moi-même). La recherche a été menée auprès de familles marquées par des déplacements transnationaux en contexte impérial et post impérial. Nous avons voulu comprendre le rôle qu’assument, dans la construction des identités de leurs membres, les objets qui les ont accompagnés. Les objets que les familles possèdent aujourd’hui ont joué deux rôles principaux: convoquer, par métonymie, les maisons africaines du passé et objectifier (Miller) la portugalité. Les objets donnent forme à une continuité matérielle, un cadre (Remy et Latour), qui permet de dépasser les ruptures spatiales, sociales et culturelles vécues, aussi bien qu’ils intègrent la construction de l’idée de « diaspora portugaise ». Je montrerai aussi qu’une partie de ces objets a subi, à l’intérieur de l’espace familial, un processus d’inaliénation (Wainer) proche de celui de patrimonialisation. 

Jeudi 13 janvier 2022 : Andréa Delaplace (ICOM-CAMOC et HIPAM), « Musées d’immigration : repenser le rôle du musée en tant que médiateur dans la construction identitaire »

  • Résumé : En tant qu’institutions mémorielles, les musées jouent un grand rôle dans la construction identitaire. Les représentations du passé et du patrimoine culturel local sont essentielles pour le développement de l’identité nationale ou régionale. Désormais, la transformation d’anciennes installations qui accueillaient les immigrés - comme Ellis Island à New York – dans des sites mémoriels qui mettent en scène leurs histoires. Grâce à cette patrimonialisation des mémoires d’immigrés, un nouveau discours sur l’immigration et l’identité se met en place : les mémoires souvent oubliées - un oubli volontaire parfois - trouvent leur place dans les musées et permettent de créer un récit narratif sur l’immigration à partir de récits personnels. Pourtant, la mise en musée de l’histoire de l’immigration reste un défi dans le paysage muséal international. Ainsi, plusieurs questions se posent: Qu’est-ce que le patrimoine de l’immigration ? Comment exposer l’immigration ? Les tentatives de représentation des immigrés reflètent-elles un paradigme national ?  

Jeudi 27 janvier 2022 :  Séance ouverte aux travaux d'étudiants

Barbara Gigi, « Les objets de l’émigration et leur contenu silencieux  »

  • Résumé : Dans ma présentation, j’essayerai d’expliquer comment j’ai utilisé les objets et leur silence (Delle Notti, Puccio-Den, 2016) pour dialoguer avec les membres d’une communauté diasporique de Siciliens aux Etats-Unis et comment cette démarche ethnographique m’a permis de saisir l’ambivalence du rapport qui lie ces émigrés à leur passé et à leur pays d’origine. La présence du passé (Kidron, 2009) contenu dans les objets liés à l’émigration a permis aux membres de cette communauté de “mettre des mots sur” (Hirschauer, 2006) les traumatismes de l'expérience “mafieuse" tout en leur permettant de témoigner l’attachement et l’amour pour leur propre pays d’origine. Les expériences ethnographiques que je partagerai feront référence à des membres appartenant à différentes générations.   

Jeudi 10 février 2022 : Anélie Prudor (LISST-Centre d'anthropologie sociale, Université Toulouse - Jean Jaurès) : « Du local au transfrontalier, la place des fosses communes du franquisme dans la construction d’une mémoire de l’Espagne républicaine (Espagne/France) »

  • Résumé : Dans cette communication, je présenterai les fosses communes du franquisme comme des espaces de mémoire condensant un éventail d’enjeux, entre deuil familial et revendications politiques et sociales, et réunissant des acteurs pluriels (descendants des fusillés, militants associatifs, représentants d’institutions, élus, etc.). Si ces fosses – leur exhumation et/ou leur « dignification » – revêtent un sens mémoriel spécifique à l’échelle locale, elles s’insèrent dans une volonté de reconnaissance nationale d’un pan de l’histoire républicaine espagnole et sont entourées de demandes mobilisant des référents internationaux (justice transitionnelle, droit pénal international, médecins et anthropologues légistes formés à l’étranger, etc.). En partant de ces lieux – cachés, passés sous silence, excavés, monumentalisés mais aussi objets de re-significations multiples – et par un jeu d’échelles, j’interrogerai la place prise par certains acteurs associatifs français, descendants de l’exil consécutif à la guerre d’Espagne (1936-1939), auprès de leurs homologues espagnols dans ce processus mémoriel. En somme, il s’agira de comprendre dans quelle mesure les fosses communes, espaces éminemment territorialisés, participent à la construction de mémoires (voulues) partagées à une échelle transfrontalière?

Jeudi 24 février 2022 :  Ana Carolina de Moura Delfim Maciel (Université d’État de Campinas (UNICAMP - Brésil) : « Mémoires, indices et suppressions dans les représentations du traumatisme  »

  • Résumé : Ana Carolina de Moura Delfim Maciel est historienne et documentariste. Elle préside la Chaire pour les réfugiés « Sérgio Vieira de Mello » de l’Université d’État de Campinas (UNICAMP - Brésil), une initiative de l’agence des Nations Unies pour les réfugiés. Elle est professeure titulaire du Programme de Master en Multimédias de l’UNICAMP, où elle coordonne le séminaire « Témoins, mémoires et mises sous silence. Le documentaire audiovisuel en tant que possibilité de récit des réfugiés ».

    A partir de l’analyse de récits audiovisuels, l’intervention portera sur le thème des déplacements forcés. Elle proposera diverses réflexions à partir d’images qui ont circulé dans la presse ou sur les réseaux sociaux. (L’intervention sera faite en français). 

Jeudi 10 mars 2022 : Alain Schnapp (Université Paris I, Panthéon-Sorbonne), «  L’Occident a-t-il inventé les ruines ? »

  • Résumé : Il n’existe pas plus d’homme sans mémoire que de sociétés sans ruines. Massives ou discrètes, inaltérables ou fragiles, les ruines font partie de notre environnement, elles conditionnent une part de notre action et de nos comportements sans parfois que nous en ayons connaissance. Elles sont un pont instable et constamment restauré entre la mémoire et l’oubli. Certaines sociétés comme l’Egypte ancienne confient à des monuments gigantesques et à des inscriptions imposantes la mémoire de leurs souverains, d’autres préfèrent pactiser avec le temps, comme les Mésopotamiens conscients de la vulnérabilité de leurs palais de briques crues qui préféraient enterrer dans le sol les briques de fondation porteuses d’inscriptions commémoratives.  D’autres comme les japonais du sanctuaire d’Isé vont encore plus loin en détruisant puis en reconstruisant à l’identique, en un cycle infini, leurs légères architectures de bois et de chaume. 
  • Égyptiens, Mésopotamiens, Chinois de l’Antiquité  pour leur compte se réfèrent à un passé impérial, constitué par la succession des règnes, l’accumulation évidente des vestiges et la continuité des traditions écrites. Des millénaires durant, les scribes ont pu déchiffrer les textes de leurs plus lointains prédécesseurs, ils ont pu garder avec les monuments des civilisations du passé un contact direct qui leur permettait de faire parler les choses, d’interpréter la fonction des monuments et d’en établir, avec plus ou moins de sûreté, la date de fondation. La pratique de l’écriture, transmise d’une génération à l’autre, est la marque de cette relation à l’Antiquité. Elle rend possible la constitution d’un savoir antiquaire qui est une nécessité dans le désir d’autopromotion, de justification et de permanence des pouvoirs. Les souverains proclament la stabilité de leur règne, la puissance de leurs armées, la connivence établie entre eux et leurs dieux. Ce faisant, ils s’adressent autant au présent qu’au futur car ils savent que, si imposants que soient leurs monuments, si vastes leurs palais, si solides leurs fortifications, un jour viendra où d’autres les occuperont, les réaménageront, voire les détruiront. Ils le savent d’autant mieux qu’ils ont procédé à des degrés divers de la même manière avec leurs prédécesseurs. Puisqu’ils ne peuvent se prémunir complètement d’une telle issue il leur convient de négocier la trace qu’ils laisseront à leurs successeurs. Construire des monuments gigantesques, les parer avec les matériaux les plus raffinés n’est pas suffisant. Pour plus de sûreté, il importe de frapper les imaginations : la pyramide, le « palais sans rival », la « grande muraille » sont chacune dans leur genre des constructions si imposantes qu’elles valent autant par l’ombre qu’elles produisent (au sens que Borges donne à ce mot dans La muraille et les livres) que par leurs qualités proprement architecturales. Ce type d’architecture a quelque chose de démesuré qui dépasse sa fin propre, il incarne une sorte de transgression qui constitue un outil de propagande autant qu’un instrument de mémoire.
  • Les Arabes du désert avant l’islam ont inventé un genre poétique qui met en scène le voyageur à la recherche des traces fragiles des campements où il a croisé une femme aimée. En partant à la recherche de ces vestiges presque invisibles, il entreprend une sorte d’anamnèse qui lui révèle la vanité des choses et la fragilité des souvenirs. Cette poésie atteint une perfection émotive et formelle aussi puissante que celle des Mésopotamiens, des Chinois, des Grecs et des Romains, mais elle refuse la diachronie ; ce qui est en jeu, ce sont les ruines de l’être et non des choses. Par la suite, avec l’islam, cette tradition poétique sera reprise sous une autre forme qui donnera sa place aux ruines sassanides ou romaines, si présentes dans les paysages du Proche-Orient. Un genre qui sera voué à la description des traces issues de la destruction des monuments les plus ambitieux pour mieux affirmer le caractère dérisoire de la condition humaine. Le paysage est un palimpseste de toutes les civilisations qui se sont succédé, et c’est le privilège du poète de pouvoir les interpréter. Comme il se penche sur les sites abandonnés, sur les tells qui indiquent la présence de cités oubliées, le poète islamique chante les odes à la mémoire des villes,  des cités merveilleuses et de leurs palais splendides que les guerres incessantes ont détruits. Il s’attache à saisir ce qu’il appelle « la séparation », l’expulsion des habitants et le souvenir qui habite les lieux abandonnés. Cette vision poétique du passé est liée à une approche historique qui privilégie la rupture contre la continuité, qu’il s’agisse de l’apparition de l’islam ou de la succession des dynasties et des souverains qui tentent d’affirmer leur singularité, leur refus d’être comparé à leurs prédécesseurs. En terre d’islam comme dans le monde chrétien les vestiges des civilisations polythéistes sont suspects. Certains veulent les éradiquer, mais d’autres proposent de les tolérer, voire de les protéger du fait de leurs qualités intrinsèques. Entre le calife qui ordonne sans succès de s’en prendre aux pyramides, et les souverains iraniens des XIe et XIIe siècles qui entreprennent d’ajouter leurs inscriptions commémoratives sur les ruines de Persépolis et autres grands sites de l’époque achéménide, il y a toute une gamme d’attitudes qui vont du rejet à l’apprivoisement du passé. L’histoire des ruines dans le monde islamique suit des chemins de traverse qui ne sont pas moins inventifs que ceux de l’Occident ou de la Chine. C’est ce dialogue entre monde classique, monde chinois et monde islamique qui fait la trame  de mon exposé.

Jeudi 24 mars 2022 : Neža Čebron Lipovec (University of Primorska, Slovenia), « Urban and architectural heritage of the post-WWII period in the contested area of Istria » et Petra Kavrečič (University of Primorska, Slovenia), « ACRO PELLEGRINAGGIO”. Visits to World War I Memorials on the Soča/Isonzo Front in the Interwar Period. » Séance en anglais

  • Cette séance s’inscrira dans la journée d’étude « The place of absence and the spaces of the absent : the legacies of the 20th century (de)population movements in Europe and beyond», organisée par le CERI. https://www.sciencespo.fr/agenda/ceri/fr?event=3230

Jeudi 14 avril 2022 : Sébastien Escande (coordinateur général du réseau Traces, directeur artistique d’ « images migrantes »), en collaboration avec Marina Chauliac : «Représentations de l’absence dans les documentaires sur les migrations »

  • Résumé : Nous observons aujourd’hui dans le monde du cinéma de nouvelles représentations de la migration : plus inclusives, plus intimes, complexifiant notre compréhension du sujet. Cette séance de séminaire qui se fera sous format d'atelier, sera consacrée à la façon dont les documentaires sur les migrations abordent aujourd’hui la question de l’absence. A travers un choix d’extraits de films, nous aborderons ainsi les types d’absences liées à l’exil (des personnes se préparant à partir, de celles ayant connu une expérience migratoire, ou encore des proches restés au pays). Seront également questionnés les choix formels du cinéma comme lieu de partage du sensible, les dispositifs de réalisation et la façon dont ils induisent notre perception du vécu.

Jeudi 12 mai 2022 : Olga Sezneva (University of Amsterdam Department of Sociology), « From Trophy to Patrimony: proprietary feelings and material emotions after forced migration » (provisional title) Séance en anglais

Jeudi 9 juin 2022 : Conclusion

  • Séminaires de recherche – Anthropologie-Ethnologie et anthropologie sociale – M1/S1-S2-M2/S3-S4
    Suivi et validation – annuel bi-mensuelle = 6 ECTS
    MCC – discussion d'une séance et des textes proposés (écrit 5 pages, discussion orale facultative)
  • Séminaires de recherche – Études politiques – M1/S1-S2-M2/S3-S4
    Suivi et validation – annuel bi-mensuelle = 6 ECTS
    MCC – discussion d'une séance et des textes proposés (écrit 5 pages, discussion orale facultative)
  • Séminaires de recherche – Migrations – M1/S1-S2-M2/S3-S4
    Suivi et validation – annuel bi-mensuelle = 6 ECTS
    MCC – discussion d'une séance et des textes proposés (écrit 5 pages, discussion orale facultative)
  • Séminaires de recherche – Sociologie – M1/S1-S2-M2/S3-S4
    Suivi et validation – annuel bi-mensuelle = 6 ECTS
    MCC – discussion d'une séance et des textes proposés (écrit 5 pages, discussion orale facultative)
Contacts additionnels
marina.chauliac@culture.gouv.fr irene.dossantos@cnrs.fr
Informations pratiques

Évelyne Ribert, IIAC-LACI, par courriel : ribert@ehess.fr

Michèle Baussant, CEFRES, par courriel : michele.baussant@cnrs.fr

Catherine Perron, CERI, par courriel : catherine.perron@sciencespo.fr

Direction de travaux des étudiants

Sur rendez-vous :

Évelyne Ribert, IIAC-LACI, par courriel : ribert@ehess.fr

Réception des candidats

Sur rendez-vous par courriel :

Évelyne Ribert, IIAC-LACI, par courriel : ribert@ehess.fr

Michèle Baussant, CEFRES, par courriel : michele.baussant@cnrs.fr

Catherine Perron, CERI, par courriel : catherine.perron@sciencespo.fr

Pré-requis

Licence

  • Campus Condorcet-Centre de colloques
    Centre de colloques, Cours des humanités 93300 Aubervilliers
    Salle 3.09
    annuel / bimensuel (2e/4e), jeudi 12:30-14:30
    du 14 octobre 2021 au 9 juin 2022
    Nombre de séances : 12

Le séminaire a été consacré cette année à l’articulation entre 2 thèmes : 1) les migrations impériales et post-impériales ; 2) l’absence dans la patrimonialisation des mémoires des migrations.

Les migrations traitées dans le premier  thème renvoient à des contextes historiques de mobilité/immobilité sur la longue durée, voire à des déplacements successifs pour certains groupes et individus. La réflexion a porté en particulier sur le rôle présent de ces passés migratoires dans la construction de « l’autre » et dans les formes de rupture, de transformations et de continuités.

Le second thème interroge l’absence liée aux déplacements migratoires dans les phénomènes mémoriels et patrimoniaux contemporains en prenant appui sur le cas des migrations impériales et post-impériales. Nous nous sommes intéressé·e·s aux modalités de construction, dans un cadre national, de l’absence, réelle ou imaginée – des individus, de groupes, de langues, de cultures, d’histoires, de relations, d’un patrimoine, de paysages…–, à leurs les enjeux, causes et effets. La réflexion a porté en particulier sur les constructions (sensibles, politiques…) et sur les formes patrimoniales et mémorielles qui viennent réinventer et renégocier, resignifier et mettre au jour dans le présent des relations passées, par-delà la séparation géographique et temporelle, l’absence ou l’invisibilité des artefacts liés à des groupes contraints au départ ou invisibilisés.

Un premier ensemble d’interventions – A. Schnapp sur les ruines, M. Baussant sur la mémoire de la présence juive en Égypte, A. Prudor sur les fosses communes du franquisme, N. Čebron Lipovec sur l’héritage architectural dans la région contestée de l’Istrie et P. Kavrečič sur les discontinuités territoriales de la nouvelle frontière italo-yougoslave – a ainsi interrogé cette (re)construction présente des mémoires par différents groupes d’acteurs, locaux, nationaux et transnationaux. À partir de ces passés, facteurs de division et de rupture, sont mis en avant certains lieux et artefacts, alors que d’autres sont tus. Mise en valeur et silence constituent deux formes, non exclusives et aux gradations multiples qui marquent les espaces et les mémoires liés aux exils massifs et rendent présente l’absence via des traces, parfois cachées, des ruines voire des monuments.

Nous avons ensuite réfléchi au rôle ambivalent des objets et à leur circulation pour tisser des liens avec les pays absents ou avec leurs propriétaires absents, dans le cadre de départs contraints. Les objets peuvent rappeler le lieu d’émigration et participer à la construction d’une identité diasporique en maintenant une continuité par-delà les ruptures comme dans l’intervention de F. Silvano à propos des migrations portugaises du Mozambique au Brésil. A. Delaplace souligne que les objets remplissent une fonction analogue dans les musées d’immigration. Dans les deux cas, les objets servent de support à la narration et sont patrimonialisés. Mais ils peuvent aussi être silencieux, témoigner de l’attachement au pays d’émigration et taire une partie du passé, comme dans le travail de B. Gigi sur une communauté diasporique de Siciliens aux États-Unis. Ou bien encore, comme le montre O. Sezneva, les objets restés sur place après le départ de leurs propriétaires sont parfois patrimonialisés comme témoignages du passé ou circulent pour devenir autre chose.

Enfin, trois séances étaient consacrées aux modes d’expression de l’absence croisée — de celles et ceux qui sont partis et de celles et ceux qui restent  — à travers l’audiovisuel ou l’écriture. L’intervention de S. Escande et M. Chauliac les explorait dans les documentaires, celle d’A. de Moura Delfim Maciel dans les images diffusées sur les réseaux sociaux et dans la presse et celle de M. Zagula à travers des concours autobiographiques organisés en Pologne. Dans les trois interventions, nous nous sommes interrogé·e·s sur les choix narratifs et de mises en scène pour parvenir à partager cette expérience avec le spectateur ou le lecteur.