UE512 - Linguistique et histoire. Agir avec les mots

• Bâtiment EHESS-Condorcet
  EHESS, 2 cours des humanités 93300 Aubervilliers
  Salle 50
  2nd semestre / hebdomadaire, vendredi 12:30-14:30
  du 11 mars 2022 au 10 juin 2022
  Nombre de séances : 12

Dernière modification : 17 mai 2022 16:05

Type d'UE

Séminaires DE/MC

Disciplines

Histoire, Linguistique, sémantique

Page web

-

Langues

français

Mots-clés

Action Analyse de discours Écriture Histoire Linguistique Littérature Politique Pragmatique Pratiques Témoignage Textes

Aires culturelles

-

• Séminaires de recherche – Arts, littératures et langages-Formes et objets (M1) – M1/S2-M2/S4
  Suivi et validation – semestriel hebdomadaire = 6 ECTS
  MCC – analyse d'un cas, fiche de lecture
• Séminaires de recherche – Arts, littératures et langages-Linguistique et écrit (M2) – M1/S2-M2/S4
  Suivi et validation – semestriel hebdomadaire = 6 ECTS
  MCC – analyse d'un cas, fiche de lecture
• Séminaires de recherche – Arts, littératures et langages-Pratiques, discours et usages (M1) – M1/S2-M2/S4
  Suivi et validation – semestriel hebdomadaire = 6 ECTS
  MCC – analyse d'un cas, fiche de lecture
• Séminaires de recherche – Études politiques – M1/S2-M2/S4
  Suivi et validation – semestriel hebdomadaire = 6 ECTS
  MCC – analyse de cas, fiche de lecture
• Séminaires de recherche – Histoire-Histoire du monde/histoire des mondes – M1/S2-M2/S4
  Suivi et validation – semestriel hebdomadaire = 6 ECTS
  MCC – analyse d'un cas, fiche de lecture
• Séminaires de recherche – Histoire-Histoire et sciences sociales – M1/S2-M2/S4
  Suivi et validation – semestriel hebdomadaire = 6 ECTS
  MCC – analyse d'un cas, fiche de lecture
• Séminaires de recherche – Philosophie-Philosophie du langage et de l'esprit – M1/S2-M2/S4
  Suivi et validation – semestriel hebdomadaire = 6 ECTS
  MCC – fiche de lecture, analyse d'un cas

Contacts additionnels

-

Informations pratiques

-

Direction de travaux des étudiants

sur rendez-vous

Réception des candidats

sur rendez-vous

Pré-requis

-

Le séminaire s’est intéressé aux relations entre l’analyse rhétorique et l’analyse illocutoire des textes, en partant de la profession de foi d’Hugo aux élections de juin 1848 et en se concentrant sur le rôle de ce que Ducrot appelle le locuteur-en-tant-que-tel. Comparant « je suis triste » et « hélas ! », Ducrot distingue en effet deux formes de présence du locuteur. Il peut être, comme dans « je suis triste », celui dont on parle : il s’agit alors du locuteur-en-tant-qu’être-du-monde et sa représentation appartient à ce qui est dit par l’énoncé. Mais le locuteur peut aussi apparaître, c’est le cas dans « hélas ! », comme celui qui parle : il s’agit alors du locuteur-en-tant-que-tel et sa présence dans le sens est montrée. Tandis que Ducrot n’effectue aucune distinction parmi tout ce qu’un énoncé montre du locuteur-en-tant-que-tel, le séminaire a au contraire conduit à distinguer, du point de vue de l’action avec les mots, deux manières de présenter le locuteur-en-tant-que-tel, deux manières qui affectent différemment l’action avec les mots. 

Un énoncé peut d’abord montrer l’activité du locuteur-en-tant-que-tel, et cela aussi bien au moyen de marques illocutoires (comme les verbes performatifs ou le mode indicatif) que par le registre du vocabulaire, la longueur des phrases, ou encore l’humour du style. Ainsi le locuteur-en-tant-que-tel de la période « Aujourd’hui je vis retiré comme un rat dans un fromage de Hollande ; et, qui pis est, je pense (pour la troisième fois) à me marier de nouveau » à la fois informe son interlocuteur de son prochain mariage et dit cela en faisant allusion à La Fontaine, en plaçant sa parole à côté de celle de La Fontaine. Cet extrait provient d’une lettre du poète ouvrier J.-A. Peyrottes à l’homme de lettres J.-B. Mary-Lafon, dont l’étude complète en séminaire a montré que ce que son auteur faisait alors n’était pas tant informer Mary-Lafon que parler d’écrivain à écrivain. Les diverses activités du locuteur-en-tant-que-tel sont toutes également aptes à prévaloir et constituer l’action entreprise avec les mots, qu’elles relèvent de ce que la rhétorique qualifie de construction d’ethos, ou de ce que l’approche austinienne qualifie d’acte illocutoire. De ce point de vue, aucune différenciation n’est à faire et nous rejoignons sur ce point les analyses de Ducrot.

Mais un énoncé peut également qualifier directement le locuteur-en-tant-que-tel. C’est par exemple le cas des attestations de sortie que le gouvernement imposait à cause du covid. L’énoncé « Je, soussigné Pierre Martin, né le 3 avril 1960 à Saulieu, et habitant 17 rue de Lancry à Paris, atteste sortir pour faire de l’exercice physique » ne dit pas des informations civiques sur l’être du monde qu’est Pierre Martin mais montre celui qui parle en citoyen. C’est en tant que citoyen que Pierre Martin atteste, par cet énoncé, faire de l’exercice et ce sont ces attestations-de-citoyens que le gouvernement attendait : le contrôlant, un policier n’aurait pas accepté que Pierre Martin se contente de lui répondre « J’atteste que je suis sorti pour faire de l’exercice ». En termes plus techniques, l’énoncé pris en exemple ne dit pas du locuteur-en-tant-qu’être-du-monde qu’il s’appelle Pierre Martin mais montre un locuteur-en-tant-que-tel citoyen. Par son moyen, Pierre Martin n’effectue pas une attestation individuelle mais produit une attestation-de-citoyen. La qualification du locuteur-en-tant-que-tel a transformé ce qui aurait été une simple action individuelle en participation politique. 

Publications

Marion Carel

• Avec Dinah Ribard, « Un mode d’action politique: l’énonciation chantée »,  Langage et Société, 2021, n° 174, p. 33-54.
• « La Théorie des Blocs Sémantiques », dans La sémantique au pluriel. Théories et méthodes, sous la dir. d'A. Biglari et D. Ducard, Presses Universitaires de Rennes, 2022, p. 45-73.
• Avec Louise Behe et Corentin Denuc, « De l’acte d’argumenter à l’évocation d’enchaînements argumentatifs : quelle place pour l’énonciation ? »  Humanidades e Inovação, 2022, vol. 9, n° 4, p. 33-47. traduit en portugais par L. Gomes dans le même ouvrage : « Do ato de argumentar à evocação de encadeamentos argumentativos: que lugar para a enunciação? » 

Dinah Ribard

• « Groupés, dégroupés », COnTEXTES [En ligne], 31 | 2021, mis en ligne le 15 octobre 2021, consulté le 15 octobre 2021. URL : http://journals.openedition.org/contextes/10415 ; DOI : https://doi.org/10.4000/contextes.10415
• Avec Marion Carel, « Un mode d’action politique : l’énonciation chantée », Langage et Société, n° 174, 2021/3, p. 33-54.
• « Témoignages de littérature : la poésie en pot de Jean-Antoine Peyrottes », Littera (Tokyo), 2022, vol. 7, p. 75-86, https://doi.org/10.20634/littera.7.0_75

• Séminaires de recherche – Arts, littératures et langages-Formes et objets (M1) – M1/S2-M2/S4
  Suivi et validation – semestriel hebdomadaire = 6 ECTS
  MCC – analyse d'un cas, fiche de lecture
• Séminaires de recherche – Arts, littératures et langages-Linguistique et écrit (M2) – M1/S2-M2/S4
  Suivi et validation – semestriel hebdomadaire = 6 ECTS
  MCC – analyse d'un cas, fiche de lecture
• Séminaires de recherche – Arts, littératures et langages-Pratiques, discours et usages (M1) – M1/S2-M2/S4
  Suivi et validation – semestriel hebdomadaire = 6 ECTS
  MCC – analyse d'un cas, fiche de lecture
• Séminaires de recherche – Études politiques – M1/S2-M2/S4
  Suivi et validation – semestriel hebdomadaire = 6 ECTS
  MCC – analyse de cas, fiche de lecture
• Séminaires de recherche – Histoire-Histoire du monde/histoire des mondes – M1/S2-M2/S4
  Suivi et validation – semestriel hebdomadaire = 6 ECTS
  MCC – analyse d'un cas, fiche de lecture
• Séminaires de recherche – Histoire-Histoire et sciences sociales – M1/S2-M2/S4
  Suivi et validation – semestriel hebdomadaire = 6 ECTS
  MCC – analyse d'un cas, fiche de lecture
• Séminaires de recherche – Philosophie-Philosophie du langage et de l'esprit – M1/S2-M2/S4
  Suivi et validation – semestriel hebdomadaire = 6 ECTS
  MCC – fiche de lecture, analyse d'un cas

Contacts additionnels

-

Informations pratiques

-

Direction de travaux des étudiants

sur rendez-vous

Réception des candidats

sur rendez-vous

Pré-requis

-

• Bâtiment EHESS-Condorcet
  EHESS, 2 cours des humanités 93300 Aubervilliers
  Salle 50
  2nd semestre / hebdomadaire, vendredi 12:30-14:30
  du 11 mars 2022 au 10 juin 2022
  Nombre de séances : 12

Le séminaire s’est intéressé aux relations entre l’analyse rhétorique et l’analyse illocutoire des textes, en partant de la profession de foi d’Hugo aux élections de juin 1848 et en se concentrant sur le rôle de ce que Ducrot appelle le locuteur-en-tant-que-tel. Comparant « je suis triste » et « hélas ! », Ducrot distingue en effet deux formes de présence du locuteur. Il peut être, comme dans « je suis triste », celui dont on parle : il s’agit alors du locuteur-en-tant-qu’être-du-monde et sa représentation appartient à ce qui est dit par l’énoncé. Mais le locuteur peut aussi apparaître, c’est le cas dans « hélas ! », comme celui qui parle : il s’agit alors du locuteur-en-tant-que-tel et sa présence dans le sens est montrée. Tandis que Ducrot n’effectue aucune distinction parmi tout ce qu’un énoncé montre du locuteur-en-tant-que-tel, le séminaire a au contraire conduit à distinguer, du point de vue de l’action avec les mots, deux manières de présenter le locuteur-en-tant-que-tel, deux manières qui affectent différemment l’action avec les mots. 

Un énoncé peut d’abord montrer l’activité du locuteur-en-tant-que-tel, et cela aussi bien au moyen de marques illocutoires (comme les verbes performatifs ou le mode indicatif) que par le registre du vocabulaire, la longueur des phrases, ou encore l’humour du style. Ainsi le locuteur-en-tant-que-tel de la période « Aujourd’hui je vis retiré comme un rat dans un fromage de Hollande ; et, qui pis est, je pense (pour la troisième fois) à me marier de nouveau » à la fois informe son interlocuteur de son prochain mariage et dit cela en faisant allusion à La Fontaine, en plaçant sa parole à côté de celle de La Fontaine. Cet extrait provient d’une lettre du poète ouvrier J.-A. Peyrottes à l’homme de lettres J.-B. Mary-Lafon, dont l’étude complète en séminaire a montré que ce que son auteur faisait alors n’était pas tant informer Mary-Lafon que parler d’écrivain à écrivain. Les diverses activités du locuteur-en-tant-que-tel sont toutes également aptes à prévaloir et constituer l’action entreprise avec les mots, qu’elles relèvent de ce que la rhétorique qualifie de construction d’ethos, ou de ce que l’approche austinienne qualifie d’acte illocutoire. De ce point de vue, aucune différenciation n’est à faire et nous rejoignons sur ce point les analyses de Ducrot.

Mais un énoncé peut également qualifier directement le locuteur-en-tant-que-tel. C’est par exemple le cas des attestations de sortie que le gouvernement imposait à cause du covid. L’énoncé « Je, soussigné Pierre Martin, né le 3 avril 1960 à Saulieu, et habitant 17 rue de Lancry à Paris, atteste sortir pour faire de l’exercice physique » ne dit pas des informations civiques sur l’être du monde qu’est Pierre Martin mais montre celui qui parle en citoyen. C’est en tant que citoyen que Pierre Martin atteste, par cet énoncé, faire de l’exercice et ce sont ces attestations-de-citoyens que le gouvernement attendait : le contrôlant, un policier n’aurait pas accepté que Pierre Martin se contente de lui répondre « J’atteste que je suis sorti pour faire de l’exercice ». En termes plus techniques, l’énoncé pris en exemple ne dit pas du locuteur-en-tant-qu’être-du-monde qu’il s’appelle Pierre Martin mais montre un locuteur-en-tant-que-tel citoyen. Par son moyen, Pierre Martin n’effectue pas une attestation individuelle mais produit une attestation-de-citoyen. La qualification du locuteur-en-tant-que-tel a transformé ce qui aurait été une simple action individuelle en participation politique. 

Publications

Marion Carel

• Avec Dinah Ribard, « Un mode d’action politique: l’énonciation chantée »,  Langage et Société, 2021, n° 174, p. 33-54.
• « La Théorie des Blocs Sémantiques », dans La sémantique au pluriel. Théories et méthodes, sous la dir. d'A. Biglari et D. Ducard, Presses Universitaires de Rennes, 2022, p. 45-73.
• Avec Louise Behe et Corentin Denuc, « De l’acte d’argumenter à l’évocation d’enchaînements argumentatifs : quelle place pour l’énonciation ? »  Humanidades e Inovação, 2022, vol. 9, n° 4, p. 33-47. traduit en portugais par L. Gomes dans le même ouvrage : « Do ato de argumentar à evocação de encadeamentos argumentativos: que lugar para a enunciação? » 

Dinah Ribard

• « Groupés, dégroupés », COnTEXTES [En ligne], 31 | 2021, mis en ligne le 15 octobre 2021, consulté le 15 octobre 2021. URL : http://journals.openedition.org/contextes/10415 ; DOI : https://doi.org/10.4000/contextes.10415
• Avec Marion Carel, « Un mode d’action politique : l’énonciation chantée », Langage et Société, n° 174, 2021/3, p. 33-54.
• « Témoignages de littérature : la poésie en pot de Jean-Antoine Peyrottes », Littera (Tokyo), 2022, vol. 7, p. 75-86, https://doi.org/10.20634/littera.7.0_75