Attention, les informations que vous consultez actuellement ne sont pas celles de l'année universitaire en cours. Consulter l'année universitaire 2023-2024.

UE334 - Genèse de l’État : écriture, administrations et sociétés au Proche-Orient ancien


Lieu et planning


  • INHA
    2 rue Vivienne 75002 Paris
    Salle Pierre-Jean Mariette
    annuel / bimensuel (1re/3e), vendredi 09:00-11:00
    du 5 novembre 2021 au 15 avril 2022
    Nombre de séances : 12


Description


Dernière modification : 9 juin 2021 07:09

Type d'UE
Séminaires DE/MC
Disciplines
Anthropologie historique, Histoire
Page web
-
Langues
français
Mots-clés
Anthropologie historique Antiquité (sciences de l’) Archéologie Culture matérielle Écriture Histoire Histoire économique et sociale
Aires culturelles
Asie Méditerranéens (mondes)
Intervenant·e·s
  • Grégory Chambon [référent·e]   directeur d'études, EHESS / Anthropologie et histoire des mondes antiques (AnHiMA)

S’il est généralement admis que l’État est une invention moderne, le fait étatique a une histoire beaucoup plus ancienne, qui remonte au Proche-Orient ancien. La complexification progressive du système socio-économique dans cette région, repérable dès la fin du IVe millénaire avec l’urbanisation croissante et la création de nouveaux outils pour gérer les produits agricoles et manufacturés, est maintenant devenu un topos. Or, l’approche fondée sur cette notion de complexification de la société consiste le plus souvent à repérer, de façon rétrospective, des éléments qui paraissent constitutifs de l’état aujourd’hui : les lois, l’autorité, l’administration, le service publique, l’écriture etc. Elle a entraîné en particulier l’utilisation dans la recherche actuelle d’un vocabulaire consensuel mais parfois mal défini, comme par exemple les termes de « cité-états », « royaumes », « couronne », qui semblent trouver leur légitimation dans un genre littéraire particulier, celui des inscriptions laissées par les dirigeants mésopotamiens pour la postérité, faisant l’éloge de leur hauts faits militaires, religieux et politiques.

Or, pendant plus de trois millénaires, les sources épigraphiques les plus abondantes en Mésopotamie sont celles issues de la documentation administrative, beaucoup plus en prise avec la réalité quotidienne des grands organismes comme les palais et les temples, mais aussi des domaines de particuliers. Ce séminaire est consacré à l’étude de ce type de documentation, qui ne constitue pas une simple réponse rationnelle à des besoins économiques déterminés, mais reflète une construction sociale et politique, qui n’est pas nécessairement neutre et factuelle. La gestion des ressources et des régimes fiscaux, mise en œuvre par les grands organismes, répond en effet aussi bien à des logiques économiques qu’à des préoccupations d’ordre idéologique pour créer et entretenir des liens sociaux complexe entre les administrateurs et les administrés. Nous nous proposons d’étudier cette genèse de « l’État » à travers plusieurs cas d’études de la documentation cunéiforme sur trois millénaires.

Le programme sera transmis à la rentrée.


Master


  • Séminaires de recherche – Histoire-Histoire du monde/histoire des mondes – M1/S1-S2-M2/S3-S4
    Suivi et validation – annuel bi-mensuelle = 6 ECTS
    MCC – fiche de lecture
  • Séminaires de recherche – Histoire-Histoire et sciences sociales – M1/S1-S2-M2/S3-S4
    Suivi et validation – annuel bi-mensuelle = 6 ECTS
    MCC – fiche de lecture
  • Séminaires de recherche – Savoirs en sociétés-Histoire des sciences, des techniques et des savoirs – M1/S1-S2-M2/S3-S4
    Suivi et validation – annuel bi-mensuelle = 6 ECTS
    MCC – fiche de lecture
  • Séminaires de recherche – Sciences économiques et sociales - Institutions, organisations, économie et société – M1/S1-S2-M2/S3-S4
    Suivi et validation – annuel bi-mensuelle = 6 ECTS
    MCC – fiche de lecture

Renseignements


Contacts additionnels
-
Informations pratiques

Renseignements par courriel

Direction de travaux des étudiants

Direction de travaux d'étudiants (doctorat, master) sur rendez-vous

Réception des candidats

Sur rendez-vous

Pré-requis

Pas de pré-requis


Compte rendu


Le séminaire de cette année concluait un cycle de réflexions de trois ans sur la genèse de l’État au Proche-Orient ancien.

Nous avons continué de travailler avec les étudiants sur la tension dans l’historiographie entre une approche émique et une approche étique des réalités anciennes, afin de recontextualiser au mieux des pratiques et des modes d’intellection anciennes, avec lesquelles des pratiques postérieures et même parfois actuelles nous semblent souvent, a priori, en directe filiation : pratiques administratives (Chambon, Arkhipov et Ziegler 2021), gestion des flux de denrées, artisanat…

Les séances ont été consacrées à des études de cas contextualisées, géographiquement, culturellement et chronologiquement, qui croisaient autant que possible les données épigraphiques et archéologiques. Il s’agissait d’aller chercher des « faits étatiques » au cœur de pratiques diversifiées qui impliquaient une coordination, une gestion et une standardisation de processus sous une forme d’autorité sociale, politique ou économique. Nous nous sommes en particulier intéressés aux activités d’échanges de biens et de produits, qu’une vision moderne et téléologique qualifie trop rapidement de « pré-monétaires » et qui reposaient sur la notion complexe de valeurs consensuelles fondées sur la circulation du grain et du métal argent. Nous avons pu mettre en évidence que la principale préoccupation des autorités locales était de certifier la qualité de l’argent par différents procédés (marques sur l’argent, fiabilité des outils de mesure) et de garantir les dettes contractées par des particuliers.

Ce travail sur la circulation des biens et en particulier des matières précieuses a été considérablement enrichi par les conférences de Luca Peyronel de l’Université de Milan, professeur invité par l’EHESS. Elles ont permis de réfléchir sur les différents jeux d’échelles des échanges selon un point de vue « glocal », c’est-à-dire en prenant en compte à la fois l’existence de réseaux d’échanges au niveau global du Proche-Orient ancien dès la période du Bronze ancien, et la pérennité de traditions locales d’ordre stylistique ou artisanal dans la culture matérielle.

Une approche empirique similaire, du local au global, nous a permis de réfléchir à la notion de « ville », dont la définition même alimente les débats entre historiens, anthropologues et archéologues. Grâce à Barbara Chiti, archéologue postdoc à l’EHESS, nous avons étudié les notions d’urbanisation, d’urbanisme et de phénomène urbain, bien souvent comprise selon un point de vue moderne, en définissant plusieurs critères de distinction propre à une ville (taille, densité, différentiation sociale, organisation de l’espace publique, présence d’une architecture diversifiée etc.).

L’accent a été enfin mis sur le monde des artisans (orfèvres, sculpteurs, bâtisseurs…) pour essayer de définir leur relation au pouvoir. Alors que l’historiographie les compte habituellement parmi les serviteurs du palais, nous nous sommes aperçus  qu’ils entretenaient en réalité avec les administrations royales des relations complexes, fondées sur des besoins économiques, mais également sur leurs compétences et la valeur de leur travail (Chambon et Ramez 2022). Les documents administratifs, le plus souvent utilisées pour étudier le fonctionnement et les techniques des artisans, ne constituent en réalité pas des sources parfaitement fiables puisqu’ils étaient écrits par des comptables, dont le vocabulaire technique pouvait être limité et qui avaient avant tout des préoccupations administratives.

L’ensemble de ces réflexions sur les artefacts, les artisans et les lieux de production et transformation des matières nous a conduit, avec les étudiants, à définir le thème du séminaire de l’année 2022-2023, qui porte sur la culture matérielle au Proche-Orient ancien.

Publications
  • Avec Arkhipov Ilya et Ziegler Nele, Pratiques administratives et comptables au Proche-Orient à l’âge du Bronze, Publications de l’Institut du Proche-Orient Ancien du Collège de France 4, 2021.
  • Postface à la Genèse de l’écriture de Denise Schmandt-Besserat, édition Belles-Lettres, Paris, 2022, p. 217-266.
  •  « Prendre en compte des comptes : Scribes, tablettes cunéiformes et historiens du Proche-Orient ancien », Revue de synthèse, Tome 142, n°3-4, 2021, p. 342-385 (Prix Joseph Colleye de l’Histoire de la comptabilité 2022)
  • « Pourquoi écrire des comptes ? Étude de la comptabilité dans le palais de Mari au 18e siècle av. J.-C. », dans Administration et pratiques comptables au Proche-Orient (PIOL), sous la dir de P. Bordreuil, V. Matoïan et J. Tavernier, Leuven, 2022, p. 25, sous presse.
  • Avec Ramez Manon, « From accountants to craftsmen : reflections on the use of administrative texts for the history of craftsmanship », dans Material Culture of Babylonia 1, sous la dir de L. Cousin, L. Quillien et M. Ramez, 2022, p. 48.

Dernière modification : 9 juin 2021 07:09

Type d'UE
Séminaires DE/MC
Disciplines
Anthropologie historique, Histoire
Page web
-
Langues
français
Mots-clés
Anthropologie historique Antiquité (sciences de l’) Archéologie Culture matérielle Écriture Histoire Histoire économique et sociale
Aires culturelles
Asie Méditerranéens (mondes)
Intervenant·e·s
  • Grégory Chambon [référent·e]   directeur d'études, EHESS / Anthropologie et histoire des mondes antiques (AnHiMA)

S’il est généralement admis que l’État est une invention moderne, le fait étatique a une histoire beaucoup plus ancienne, qui remonte au Proche-Orient ancien. La complexification progressive du système socio-économique dans cette région, repérable dès la fin du IVe millénaire avec l’urbanisation croissante et la création de nouveaux outils pour gérer les produits agricoles et manufacturés, est maintenant devenu un topos. Or, l’approche fondée sur cette notion de complexification de la société consiste le plus souvent à repérer, de façon rétrospective, des éléments qui paraissent constitutifs de l’état aujourd’hui : les lois, l’autorité, l’administration, le service publique, l’écriture etc. Elle a entraîné en particulier l’utilisation dans la recherche actuelle d’un vocabulaire consensuel mais parfois mal défini, comme par exemple les termes de « cité-états », « royaumes », « couronne », qui semblent trouver leur légitimation dans un genre littéraire particulier, celui des inscriptions laissées par les dirigeants mésopotamiens pour la postérité, faisant l’éloge de leur hauts faits militaires, religieux et politiques.

Or, pendant plus de trois millénaires, les sources épigraphiques les plus abondantes en Mésopotamie sont celles issues de la documentation administrative, beaucoup plus en prise avec la réalité quotidienne des grands organismes comme les palais et les temples, mais aussi des domaines de particuliers. Ce séminaire est consacré à l’étude de ce type de documentation, qui ne constitue pas une simple réponse rationnelle à des besoins économiques déterminés, mais reflète une construction sociale et politique, qui n’est pas nécessairement neutre et factuelle. La gestion des ressources et des régimes fiscaux, mise en œuvre par les grands organismes, répond en effet aussi bien à des logiques économiques qu’à des préoccupations d’ordre idéologique pour créer et entretenir des liens sociaux complexe entre les administrateurs et les administrés. Nous nous proposons d’étudier cette genèse de « l’État » à travers plusieurs cas d’études de la documentation cunéiforme sur trois millénaires.

Le programme sera transmis à la rentrée.

  • Séminaires de recherche – Histoire-Histoire du monde/histoire des mondes – M1/S1-S2-M2/S3-S4
    Suivi et validation – annuel bi-mensuelle = 6 ECTS
    MCC – fiche de lecture
  • Séminaires de recherche – Histoire-Histoire et sciences sociales – M1/S1-S2-M2/S3-S4
    Suivi et validation – annuel bi-mensuelle = 6 ECTS
    MCC – fiche de lecture
  • Séminaires de recherche – Savoirs en sociétés-Histoire des sciences, des techniques et des savoirs – M1/S1-S2-M2/S3-S4
    Suivi et validation – annuel bi-mensuelle = 6 ECTS
    MCC – fiche de lecture
  • Séminaires de recherche – Sciences économiques et sociales - Institutions, organisations, économie et société – M1/S1-S2-M2/S3-S4
    Suivi et validation – annuel bi-mensuelle = 6 ECTS
    MCC – fiche de lecture
Contacts additionnels
-
Informations pratiques

Renseignements par courriel

Direction de travaux des étudiants

Direction de travaux d'étudiants (doctorat, master) sur rendez-vous

Réception des candidats

Sur rendez-vous

Pré-requis

Pas de pré-requis

  • INHA
    2 rue Vivienne 75002 Paris
    Salle Pierre-Jean Mariette
    annuel / bimensuel (1re/3e), vendredi 09:00-11:00
    du 5 novembre 2021 au 15 avril 2022
    Nombre de séances : 12

Le séminaire de cette année concluait un cycle de réflexions de trois ans sur la genèse de l’État au Proche-Orient ancien.

Nous avons continué de travailler avec les étudiants sur la tension dans l’historiographie entre une approche émique et une approche étique des réalités anciennes, afin de recontextualiser au mieux des pratiques et des modes d’intellection anciennes, avec lesquelles des pratiques postérieures et même parfois actuelles nous semblent souvent, a priori, en directe filiation : pratiques administratives (Chambon, Arkhipov et Ziegler 2021), gestion des flux de denrées, artisanat…

Les séances ont été consacrées à des études de cas contextualisées, géographiquement, culturellement et chronologiquement, qui croisaient autant que possible les données épigraphiques et archéologiques. Il s’agissait d’aller chercher des « faits étatiques » au cœur de pratiques diversifiées qui impliquaient une coordination, une gestion et une standardisation de processus sous une forme d’autorité sociale, politique ou économique. Nous nous sommes en particulier intéressés aux activités d’échanges de biens et de produits, qu’une vision moderne et téléologique qualifie trop rapidement de « pré-monétaires » et qui reposaient sur la notion complexe de valeurs consensuelles fondées sur la circulation du grain et du métal argent. Nous avons pu mettre en évidence que la principale préoccupation des autorités locales était de certifier la qualité de l’argent par différents procédés (marques sur l’argent, fiabilité des outils de mesure) et de garantir les dettes contractées par des particuliers.

Ce travail sur la circulation des biens et en particulier des matières précieuses a été considérablement enrichi par les conférences de Luca Peyronel de l’Université de Milan, professeur invité par l’EHESS. Elles ont permis de réfléchir sur les différents jeux d’échelles des échanges selon un point de vue « glocal », c’est-à-dire en prenant en compte à la fois l’existence de réseaux d’échanges au niveau global du Proche-Orient ancien dès la période du Bronze ancien, et la pérennité de traditions locales d’ordre stylistique ou artisanal dans la culture matérielle.

Une approche empirique similaire, du local au global, nous a permis de réfléchir à la notion de « ville », dont la définition même alimente les débats entre historiens, anthropologues et archéologues. Grâce à Barbara Chiti, archéologue postdoc à l’EHESS, nous avons étudié les notions d’urbanisation, d’urbanisme et de phénomène urbain, bien souvent comprise selon un point de vue moderne, en définissant plusieurs critères de distinction propre à une ville (taille, densité, différentiation sociale, organisation de l’espace publique, présence d’une architecture diversifiée etc.).

L’accent a été enfin mis sur le monde des artisans (orfèvres, sculpteurs, bâtisseurs…) pour essayer de définir leur relation au pouvoir. Alors que l’historiographie les compte habituellement parmi les serviteurs du palais, nous nous sommes aperçus  qu’ils entretenaient en réalité avec les administrations royales des relations complexes, fondées sur des besoins économiques, mais également sur leurs compétences et la valeur de leur travail (Chambon et Ramez 2022). Les documents administratifs, le plus souvent utilisées pour étudier le fonctionnement et les techniques des artisans, ne constituent en réalité pas des sources parfaitement fiables puisqu’ils étaient écrits par des comptables, dont le vocabulaire technique pouvait être limité et qui avaient avant tout des préoccupations administratives.

L’ensemble de ces réflexions sur les artefacts, les artisans et les lieux de production et transformation des matières nous a conduit, avec les étudiants, à définir le thème du séminaire de l’année 2022-2023, qui porte sur la culture matérielle au Proche-Orient ancien.

Publications
  • Avec Arkhipov Ilya et Ziegler Nele, Pratiques administratives et comptables au Proche-Orient à l’âge du Bronze, Publications de l’Institut du Proche-Orient Ancien du Collège de France 4, 2021.
  • Postface à la Genèse de l’écriture de Denise Schmandt-Besserat, édition Belles-Lettres, Paris, 2022, p. 217-266.
  •  « Prendre en compte des comptes : Scribes, tablettes cunéiformes et historiens du Proche-Orient ancien », Revue de synthèse, Tome 142, n°3-4, 2021, p. 342-385 (Prix Joseph Colleye de l’Histoire de la comptabilité 2022)
  • « Pourquoi écrire des comptes ? Étude de la comptabilité dans le palais de Mari au 18e siècle av. J.-C. », dans Administration et pratiques comptables au Proche-Orient (PIOL), sous la dir de P. Bordreuil, V. Matoïan et J. Tavernier, Leuven, 2022, p. 25, sous presse.
  • Avec Ramez Manon, « From accountants to craftsmen : reflections on the use of administrative texts for the history of craftsmanship », dans Material Culture of Babylonia 1, sous la dir de L. Cousin, L. Quillien et M. Ramez, 2022, p. 48.