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UE824 - Recherches sur les Lumières


Lieu et planning


  • Autre lieu Paris
    Institut historique allemand, 8 rue du Parc Royal 75003 Paris
    annuel / mensuel (2e), mardi 17:00-19:00
    du 13 octobre 2020 au 8 juin 2021


Description


Dernière modification : 28 mai 2020 14:10

Type d'UE
Séminaires DE/MC
Disciplines
Histoire
Page web
-
Langues
-
Mots-clés
-
Aires culturelles
-
Intervenant·e·s
  • Antoine Lilti [référent·e]   directeur d'études, EHESS / Groupe d'études sur les historiographies modernes (CRH-GEHM)
  • Thomas Maissen   directeur, Institut historique allemand

Ce séminaire doctoral, organisé en partenariat avec l'Institut historique allemand, permet aux étudiants travaillant sur les Lumières de présenter leur travail, ainsi que  de discuter des recherches en cours menées par des chercheurs confirmés. La thématique principale du séminaire est l'histoire intellectuelle et culturelle d'un long XVIIIe siècle, débutant avec la « crise de la conscience européenne » de la fin du XVIIe siècle, et englobant en aval la Révolution. Chaque séance est consacrée à la discussion d'un travail en cours, sur la base d'un texte ayant circulé parmi les participants.

Le programme détaillé n'est pas disponible.


Master


Cette UE n'est rattachée à aucune formation de master.


Renseignements


Contacts additionnels
-
Informations pratiques
-
Direction de travaux des étudiants
-
Réception des candidats
-
Pré-requis
-

Compte rendu


Le séminaire a présenté les résultats d’une enquête en cours sur les deux Tahitiens venus en Europe au XVIIIe siècle : Ahutoru, amené à Paris par Bougainville en 1769, et qui y a séjourné un an, et Maï, qui a passé deux ans à Londres, de 1774 à 1776, avant de retourner à Huahine lors du troisième séjour de Cook. L’enjeu de cette enquête est d’approcher, autant que possible, l’expérience qui a pu être celle de ces insulaires, qui ne furent ni des captifs ni des ambassadeurs, qui se sont embarqués de leur initiative, mais dans des conditions qu’ils ne maîtrisaient pas. En l’absence de tout témoignage de leur part, comment peut-on comprendre leurs motivations, leurs réactions, leurs espoirs ou leurs déceptions ? La tâche est ardue, elle implique de relire les sources européennes (notamment les journaux de voyage des navigateurs, mais aussi les témoignages des Européens lors du séjour de Ahutoru et Maï), mais elle permet de renverser le regard habituel sur l’exploration européenne du Pacifique en redonnant aux Polynésiens leur capacité d’initiative. Ainsi, plusieurs lieux communs historiographiques sont renversés, qu’il s’agisse de la dimension pacifique du séjour de Bougainville à Tahiti ou de la propension des Polynésiens à considérer les Européens comme des divinités.

Dans un second temps, le séminaire a porté sur la nature de la curiosité suscitée par les voyages de Ahutoru et Maï dans les cercles savants et mondains, à Paris et à Londres. Pour cela, il fallait reconstituer l’horizon d’attente, constitué par les savoirs géographiques et ethnographiques du XVIIIe siècle, mais aussi par la rivalité impériale entre la France et la Grande-Bretagne. Nous avons en particulier consacré une séance aux écrits du Président De Brosses sur l’exploration du continent austral. Puis nous avons étudié précisément les conditions du séjour d’Ahutoru et de Maï, en privilégiant certaines sources, comme les Observations de la Condamine sur le premier et les Journaux de Fanny Burney qui témoigne des efforts du second pour s’intégrer au mode de vie de la bonne société britannique.

Enfin, nous avons cherché à mettre en relation la rapide indifférence suscitée par Ahutoru et Maï, une fois passé l’intérêt des premières semaines, et le développement d’une fiction tahitienne, dont le modèle est donné par Diderot mais que l’on retrouve chez de nombreux auteurs et dans plusieurs spectacles à la fin du siècle (notamment la pantomime Omai, joué avec succès à Londres). Mieux qu’Ahutoru et Maï, les Tahitiens de papier, imaginés et rêvés par les Européens, permettaient de mettre en scène – et en récit – les ambivalences du modèle savant et impérial de la « civilisation ».
L’histoire des voyageurs polynésiens au XVIIIe siècle doit encore être élargie en prenant en compte les quatre Tahitiens emmenés à Lima par Boenechea en 1773, dont deux sont baptisés et retournent à Tahiti. Cette histoire étonnante, qui complexifie le récit traditionnellement franco-britannique des explorations du Pacifique au XVIIIe siècle, n’a pu être que brièvement abordée lors du séminaire et sera poursuivie par la suite.

 

Comme les années précédentes, ce séminaire à destination des doctorant·e·s travaillant sur l’histoire des Lumières a permis de discuter des travaux en cours de doctorants et de collègues. Le principe est celui d’un texte qui circule à l’avance, d’une présentation courte et d’une longue discussion. Le séminaire a abordé des thématiques variés, autour de l’histoire politique et intellectuelle des Lumières, dans une perspective historiographique attentive aux échanges franco-allemands, mais ouverte aussi à d’autres traditions historiographiques, grâce notamment à la présence de doctorant·e·s anglophones. Plusieurs séances ont porté sur les concepts de la modernité dans la pensée des Lumières (à partIr de la notion d’égalité civique, de l’épistémologie des voyageurs sceptiques ou encore de l’économie politique du libre marché), sur les représentations morales de la sexualité (autour de la notion de « débauche » et des figures de l’amour homosocial dans les cours européennes), enfin sur les mutations de la culture politique (depuis les représentations figurées de Britannia jusqu’aux correspondances politiques sous la Révolution française).

Publications
  • « In the Shadow of the Public : Enlightenment and the Pitfalls of Modernity », International Journal for History, Culture and Modernity, Brill, vol. 8, n° 3/4, 2020, p. 256-277.
  • « Les droits de l’homme et la fiction sentimentale », Sensibilités, Histoire critique et sciences sociales, « La chair du politique », 7/2020, p. 134-143.
  • « Comment peut-on être Tahitien ? Ahutoru à Paris (1769) », dans Paris et ses peuples, sous la dir. de Pacal Bastien, Paris, Publications de la Sorbonne, 2020, p. 171-185.
  • Avec Jean-Luc Chappey et Arnaud Orain, « Usages de l’absent : La figure de Lapérouse et la Révolution française », Annales. Histoire, Sciences Sociales, 76(1), p. 47-82.
  • Préface à Anais Pedron et Clare Siviter, Celebrity accross the Channel (1750-1850), Delaware University Press, 2021.
  • Préface à Jan Synowieki, Paris en ses jardins. Nature et culture urbaine dans Paris au XVIIIe siècle, Seyssel, Champ Vallon, 2021.

Dernière modification : 28 mai 2020 14:10

Type d'UE
Séminaires DE/MC
Disciplines
Histoire
Page web
-
Langues
-
Mots-clés
-
Aires culturelles
-
Intervenant·e·s
  • Antoine Lilti [référent·e]   directeur d'études, EHESS / Groupe d'études sur les historiographies modernes (CRH-GEHM)
  • Thomas Maissen   directeur, Institut historique allemand

Ce séminaire doctoral, organisé en partenariat avec l'Institut historique allemand, permet aux étudiants travaillant sur les Lumières de présenter leur travail, ainsi que  de discuter des recherches en cours menées par des chercheurs confirmés. La thématique principale du séminaire est l'histoire intellectuelle et culturelle d'un long XVIIIe siècle, débutant avec la « crise de la conscience européenne » de la fin du XVIIe siècle, et englobant en aval la Révolution. Chaque séance est consacrée à la discussion d'un travail en cours, sur la base d'un texte ayant circulé parmi les participants.

Le programme détaillé n'est pas disponible.

Cette UE n'est rattachée à aucune formation de master.

Contacts additionnels
-
Informations pratiques
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Direction de travaux des étudiants
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Réception des candidats
-
Pré-requis
-
  • Autre lieu Paris
    Institut historique allemand, 8 rue du Parc Royal 75003 Paris
    annuel / mensuel (2e), mardi 17:00-19:00
    du 13 octobre 2020 au 8 juin 2021

Le séminaire a présenté les résultats d’une enquête en cours sur les deux Tahitiens venus en Europe au XVIIIe siècle : Ahutoru, amené à Paris par Bougainville en 1769, et qui y a séjourné un an, et Maï, qui a passé deux ans à Londres, de 1774 à 1776, avant de retourner à Huahine lors du troisième séjour de Cook. L’enjeu de cette enquête est d’approcher, autant que possible, l’expérience qui a pu être celle de ces insulaires, qui ne furent ni des captifs ni des ambassadeurs, qui se sont embarqués de leur initiative, mais dans des conditions qu’ils ne maîtrisaient pas. En l’absence de tout témoignage de leur part, comment peut-on comprendre leurs motivations, leurs réactions, leurs espoirs ou leurs déceptions ? La tâche est ardue, elle implique de relire les sources européennes (notamment les journaux de voyage des navigateurs, mais aussi les témoignages des Européens lors du séjour de Ahutoru et Maï), mais elle permet de renverser le regard habituel sur l’exploration européenne du Pacifique en redonnant aux Polynésiens leur capacité d’initiative. Ainsi, plusieurs lieux communs historiographiques sont renversés, qu’il s’agisse de la dimension pacifique du séjour de Bougainville à Tahiti ou de la propension des Polynésiens à considérer les Européens comme des divinités.

Dans un second temps, le séminaire a porté sur la nature de la curiosité suscitée par les voyages de Ahutoru et Maï dans les cercles savants et mondains, à Paris et à Londres. Pour cela, il fallait reconstituer l’horizon d’attente, constitué par les savoirs géographiques et ethnographiques du XVIIIe siècle, mais aussi par la rivalité impériale entre la France et la Grande-Bretagne. Nous avons en particulier consacré une séance aux écrits du Président De Brosses sur l’exploration du continent austral. Puis nous avons étudié précisément les conditions du séjour d’Ahutoru et de Maï, en privilégiant certaines sources, comme les Observations de la Condamine sur le premier et les Journaux de Fanny Burney qui témoigne des efforts du second pour s’intégrer au mode de vie de la bonne société britannique.

Enfin, nous avons cherché à mettre en relation la rapide indifférence suscitée par Ahutoru et Maï, une fois passé l’intérêt des premières semaines, et le développement d’une fiction tahitienne, dont le modèle est donné par Diderot mais que l’on retrouve chez de nombreux auteurs et dans plusieurs spectacles à la fin du siècle (notamment la pantomime Omai, joué avec succès à Londres). Mieux qu’Ahutoru et Maï, les Tahitiens de papier, imaginés et rêvés par les Européens, permettaient de mettre en scène – et en récit – les ambivalences du modèle savant et impérial de la « civilisation ».
L’histoire des voyageurs polynésiens au XVIIIe siècle doit encore être élargie en prenant en compte les quatre Tahitiens emmenés à Lima par Boenechea en 1773, dont deux sont baptisés et retournent à Tahiti. Cette histoire étonnante, qui complexifie le récit traditionnellement franco-britannique des explorations du Pacifique au XVIIIe siècle, n’a pu être que brièvement abordée lors du séminaire et sera poursuivie par la suite.

 

Comme les années précédentes, ce séminaire à destination des doctorant·e·s travaillant sur l’histoire des Lumières a permis de discuter des travaux en cours de doctorants et de collègues. Le principe est celui d’un texte qui circule à l’avance, d’une présentation courte et d’une longue discussion. Le séminaire a abordé des thématiques variés, autour de l’histoire politique et intellectuelle des Lumières, dans une perspective historiographique attentive aux échanges franco-allemands, mais ouverte aussi à d’autres traditions historiographiques, grâce notamment à la présence de doctorant·e·s anglophones. Plusieurs séances ont porté sur les concepts de la modernité dans la pensée des Lumières (à partIr de la notion d’égalité civique, de l’épistémologie des voyageurs sceptiques ou encore de l’économie politique du libre marché), sur les représentations morales de la sexualité (autour de la notion de « débauche » et des figures de l’amour homosocial dans les cours européennes), enfin sur les mutations de la culture politique (depuis les représentations figurées de Britannia jusqu’aux correspondances politiques sous la Révolution française).

Publications
  • « In the Shadow of the Public : Enlightenment and the Pitfalls of Modernity », International Journal for History, Culture and Modernity, Brill, vol. 8, n° 3/4, 2020, p. 256-277.
  • « Les droits de l’homme et la fiction sentimentale », Sensibilités, Histoire critique et sciences sociales, « La chair du politique », 7/2020, p. 134-143.
  • « Comment peut-on être Tahitien ? Ahutoru à Paris (1769) », dans Paris et ses peuples, sous la dir. de Pacal Bastien, Paris, Publications de la Sorbonne, 2020, p. 171-185.
  • Avec Jean-Luc Chappey et Arnaud Orain, « Usages de l’absent : La figure de Lapérouse et la Révolution française », Annales. Histoire, Sciences Sociales, 76(1), p. 47-82.
  • Préface à Anais Pedron et Clare Siviter, Celebrity accross the Channel (1750-1850), Delaware University Press, 2021.
  • Préface à Jan Synowieki, Paris en ses jardins. Nature et culture urbaine dans Paris au XVIIIe siècle, Seyssel, Champ Vallon, 2021.