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UE756 - Enquêter sur le 11 septembre 2001. Enquêter sur le politique


Lieu et planning


  • 105 bd Raspail
    105 bd Raspail 75006 Paris
    Salle 10
    annuel / mensuel (3e), vendredi 10:00-13:00
    du 20 novembre 2020 au 18 juin 2021


Description


Dernière modification : 22 septembre 2020 06:37

Type d'UE
Séminaires DE/MC
Disciplines
Anthropologie sociale, ethnographie et ethnologie
Page web
-
Langues
français
Mots-clés
Anthropologie historique Comparatisme Droit, normes et société Éthique Guerre Philosophie politique
Aires culturelles
Afrique Maghreb Méditerranéens (mondes)
Intervenant·e·s
  • Alain Mahé [référent·e]   maître de conférences, EHESS / Centre d'étude des mouvements sociaux (CEMS)
  • Kamel Boukir   docteur, EHESS / Centre d'étude des mouvements sociaux (CEMS)
  • Cédric Terzi   maître de conférences, Université de Lille / Centre d'étude des mouvements sociaux (CEMS)

La réflexion sur l’amitié et sur l’inimitié appartient à la grande tradition philosophique depuis plus de deux mille ans. Les sciences sociales ont toujours été mal à l’aise avec ces concepts et elles leurs ont d’emblée substitué le concept de solidarité, théorisé sur le mode d’une interdépendance amorale. De fait, en sciences sociales – et tout particulièrement en anthropologie –, la question morale a été recouverte par l’analyse des modalités, diverses et variées, de l’échange, de l’alliance et du don. Le séminaire de cette année replacera la prédation et la complicité au cœur de ces analyses. C’est dire qu’il sera essentiellement consacré à la question de la vocation analytique des catégories morales et normatives. Ce faisant, ce sont évidemment les fondements même des sciences sociales qui seront rediscutés.

Le programme détaillé n'est pas disponible.


Master


  • Séminaires de recherche – Ethnologie et anthropologie sociale – M1/S1-S2-M2/S3-S4
    Suivi et validation – annuel mensuelle = 6 ECTS
    MCC – fiche de lecture

Renseignements


Contacts additionnels
-
Informations pratiques

le séminaire commencera le vendredi 20 novembre 2020 et de terminera le vendredi 18 juin 2021.

Direction de travaux des étudiants

sur rendez-vous uniquement.

Réception des candidats

contacter Alain Mahé par courriel.

Pré-requis
-

Compte rendu


Au cours des deux dernières décennies, tout semble indiquer que nos formes de vie politique se sont données le « complotisme » comme un problème majeur. Les événements du 11 septembre 2001 et les polémiques qui s’en sont suivies ont conféré une remarquable visibilité aux contestations des « vérités officielles » et aux raisonnements visant à dévoiler les machinations ourdies par des gouvernements d’États libéraux et démocratiques à l’encontre de leurs citoyens. Depuis, aucun événement majeur ne semble échapper à la dynamique du soupçon et à des confrontations de versions, au déploiement desquelles les plates-formes numériques offrent un environnement particulièrement propice.

Le retentissement de ces polémiques est à la hauteur des inquiétudes qu’elles soulèvent. Des lanceurs d’alerte ont dénoncé ce qu’ils considèrent comme un dévoiement du rationalisme critique qui menace la démocratie. Des commentateurs et des analystes ont tenté d’élucider l’origine de raisonnements souvent assimilés à des formes de négationnisme historique et associés à un « style paranoïaque » ou à des penchants politiques radicaux, qu’ils soient d’extrême-droite ou d’extrême-gauche. Des militants associatifs et des médias se sont donnés pour tâche de débusquer ces raisonnements et d’en épingler les auteurs. Des pouvoirs législatifs et exécutifs se sont emparés de ces questions, tentant de mettre en place de nouvelles formes de régulations des échanges médiatisés, ajustées aux enjeux soulevés par le développement des interfaces numériques. Les institutions de l’enseignement et de la recherche sont entrées en lutte contre le « complotisme » par des programmes d’information et de prévention destinées aux élèves et aux étudiants.

Bref, tout indique que le « complotisme » est désormais constitué comme un problème majeur, ne menaçant rien de moins que la pérennité des sociétés libérales et démocratiques. Il y a donc tout lieu de penser que l’étude des manières de poser ce problème et d’élaborer des mesures pour y faire face permettra de mieux comprendre quelques aspects cruciaux de nos formes de vie politique contemporaines.

Le séminaire de cette année nous a permis de retracer comment les autorités étatsuniennes et l’ONU sont intervenues dans les heures et les jours suivant le drame du 11 septembre 2001 et comment elles ont tenté de combler discursivement la béance ouverte par l’indétermination de la situation, en s’efforçant de fixer au plus vite le sens de l’événement face à l’effroi et la sidération suscités par l’irruption de l’inimaginable et sa diffusion en direct à la télévision. Nous avons étudié comment ces mesures, adoptées dans l’urgence et préalablement à toute enquête, ont durablement bousculé les procédures instituées. À ce sujet, nous avons prêté la plus grande attention à la manière dont un événement, d’abord envisagé comme un acte terroriste, a été constitué comme un acte de guerre appelant une « riposte », préfigurant les opérations militaires à mener en Afghanistan puis en Irak. Réciproquement, nous nous sommes attachés à la façon dont l’émergence et la stabilisation de cette configuration agonistique ont appelé les citoyens états-uniens à faire front et donc à établir une coalition, fondant le consensus nécessaire à l’adoption d’un arsenal législatif dont la figure de proue est le Patriot Act.

Les questions qui animent notre séminaire s’inscrivent dans une filiation de philosophie politique tissée au croisement d’une phénoménologie de la démocratie et d’une analyse pragmatiste des publics. Elles reprennent et prolongent l’inquiétude de Hannah Arendt au sujet de la vulnérabilité du « domaine public » dans la « société de masse ». Comment se fait-il que le travail considérable consenti pour individuer et élucider un événement historique majeur, portant durablement à conséquences, n’ait pas permis l’établissement d’une réalité commune ? Comment se fait-il que les enquêtes censées déterminer ce qui s’est réellement passé le 11 septembre 2001 se soient enrayées et aient alimenté la confrontation polémique entre des positions dogmatiques au lieu de contribuer à l’organisation d’une expérience publique pluraliste ?

Publications
  • Émile Masqueray et la crise allemande de la pensée française dans l’Algérie coloniale, Saint Denis, Bouchène, 2020, 216 p.
  • Les moments kabyles de l’anthropologie politique. République, droit et citoyenneté au village, Saint Denis, Bouchène, 2021, 366 p.

Dernière modification : 22 septembre 2020 06:37

Type d'UE
Séminaires DE/MC
Disciplines
Anthropologie sociale, ethnographie et ethnologie
Page web
-
Langues
français
Mots-clés
Anthropologie historique Comparatisme Droit, normes et société Éthique Guerre Philosophie politique
Aires culturelles
Afrique Maghreb Méditerranéens (mondes)
Intervenant·e·s
  • Alain Mahé [référent·e]   maître de conférences, EHESS / Centre d'étude des mouvements sociaux (CEMS)
  • Kamel Boukir   docteur, EHESS / Centre d'étude des mouvements sociaux (CEMS)
  • Cédric Terzi   maître de conférences, Université de Lille / Centre d'étude des mouvements sociaux (CEMS)

La réflexion sur l’amitié et sur l’inimitié appartient à la grande tradition philosophique depuis plus de deux mille ans. Les sciences sociales ont toujours été mal à l’aise avec ces concepts et elles leurs ont d’emblée substitué le concept de solidarité, théorisé sur le mode d’une interdépendance amorale. De fait, en sciences sociales – et tout particulièrement en anthropologie –, la question morale a été recouverte par l’analyse des modalités, diverses et variées, de l’échange, de l’alliance et du don. Le séminaire de cette année replacera la prédation et la complicité au cœur de ces analyses. C’est dire qu’il sera essentiellement consacré à la question de la vocation analytique des catégories morales et normatives. Ce faisant, ce sont évidemment les fondements même des sciences sociales qui seront rediscutés.

Le programme détaillé n'est pas disponible.

  • Séminaires de recherche – Ethnologie et anthropologie sociale – M1/S1-S2-M2/S3-S4
    Suivi et validation – annuel mensuelle = 6 ECTS
    MCC – fiche de lecture
Contacts additionnels
-
Informations pratiques

le séminaire commencera le vendredi 20 novembre 2020 et de terminera le vendredi 18 juin 2021.

Direction de travaux des étudiants

sur rendez-vous uniquement.

Réception des candidats

contacter Alain Mahé par courriel.

Pré-requis
-
  • 105 bd Raspail
    105 bd Raspail 75006 Paris
    Salle 10
    annuel / mensuel (3e), vendredi 10:00-13:00
    du 20 novembre 2020 au 18 juin 2021

Au cours des deux dernières décennies, tout semble indiquer que nos formes de vie politique se sont données le « complotisme » comme un problème majeur. Les événements du 11 septembre 2001 et les polémiques qui s’en sont suivies ont conféré une remarquable visibilité aux contestations des « vérités officielles » et aux raisonnements visant à dévoiler les machinations ourdies par des gouvernements d’États libéraux et démocratiques à l’encontre de leurs citoyens. Depuis, aucun événement majeur ne semble échapper à la dynamique du soupçon et à des confrontations de versions, au déploiement desquelles les plates-formes numériques offrent un environnement particulièrement propice.

Le retentissement de ces polémiques est à la hauteur des inquiétudes qu’elles soulèvent. Des lanceurs d’alerte ont dénoncé ce qu’ils considèrent comme un dévoiement du rationalisme critique qui menace la démocratie. Des commentateurs et des analystes ont tenté d’élucider l’origine de raisonnements souvent assimilés à des formes de négationnisme historique et associés à un « style paranoïaque » ou à des penchants politiques radicaux, qu’ils soient d’extrême-droite ou d’extrême-gauche. Des militants associatifs et des médias se sont donnés pour tâche de débusquer ces raisonnements et d’en épingler les auteurs. Des pouvoirs législatifs et exécutifs se sont emparés de ces questions, tentant de mettre en place de nouvelles formes de régulations des échanges médiatisés, ajustées aux enjeux soulevés par le développement des interfaces numériques. Les institutions de l’enseignement et de la recherche sont entrées en lutte contre le « complotisme » par des programmes d’information et de prévention destinées aux élèves et aux étudiants.

Bref, tout indique que le « complotisme » est désormais constitué comme un problème majeur, ne menaçant rien de moins que la pérennité des sociétés libérales et démocratiques. Il y a donc tout lieu de penser que l’étude des manières de poser ce problème et d’élaborer des mesures pour y faire face permettra de mieux comprendre quelques aspects cruciaux de nos formes de vie politique contemporaines.

Le séminaire de cette année nous a permis de retracer comment les autorités étatsuniennes et l’ONU sont intervenues dans les heures et les jours suivant le drame du 11 septembre 2001 et comment elles ont tenté de combler discursivement la béance ouverte par l’indétermination de la situation, en s’efforçant de fixer au plus vite le sens de l’événement face à l’effroi et la sidération suscités par l’irruption de l’inimaginable et sa diffusion en direct à la télévision. Nous avons étudié comment ces mesures, adoptées dans l’urgence et préalablement à toute enquête, ont durablement bousculé les procédures instituées. À ce sujet, nous avons prêté la plus grande attention à la manière dont un événement, d’abord envisagé comme un acte terroriste, a été constitué comme un acte de guerre appelant une « riposte », préfigurant les opérations militaires à mener en Afghanistan puis en Irak. Réciproquement, nous nous sommes attachés à la façon dont l’émergence et la stabilisation de cette configuration agonistique ont appelé les citoyens états-uniens à faire front et donc à établir une coalition, fondant le consensus nécessaire à l’adoption d’un arsenal législatif dont la figure de proue est le Patriot Act.

Les questions qui animent notre séminaire s’inscrivent dans une filiation de philosophie politique tissée au croisement d’une phénoménologie de la démocratie et d’une analyse pragmatiste des publics. Elles reprennent et prolongent l’inquiétude de Hannah Arendt au sujet de la vulnérabilité du « domaine public » dans la « société de masse ». Comment se fait-il que le travail considérable consenti pour individuer et élucider un événement historique majeur, portant durablement à conséquences, n’ait pas permis l’établissement d’une réalité commune ? Comment se fait-il que les enquêtes censées déterminer ce qui s’est réellement passé le 11 septembre 2001 se soient enrayées et aient alimenté la confrontation polémique entre des positions dogmatiques au lieu de contribuer à l’organisation d’une expérience publique pluraliste ?

Publications
  • Émile Masqueray et la crise allemande de la pensée française dans l’Algérie coloniale, Saint Denis, Bouchène, 2020, 216 p.
  • Les moments kabyles de l’anthropologie politique. République, droit et citoyenneté au village, Saint Denis, Bouchène, 2021, 366 p.