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UE569 - Anthropologie de la mémoire


Lieu et planning


  • Autre lieu Paris
    musée du quai Branly - Jacques Chirac, 37 Quai Branly 75007 Paris
    Salle 2
    1er semestre / hebdomadaire, mercredi 14:00-17:00
    du 2 décembre 2020 au 7 avril 2021


Description


Dernière modification : 7 avril 2021 16:43

Type d'UE
Séminaires DE/MC
Disciplines
Anthropologie sociale, ethnographie et ethnologie
Page web
-
Langues
anglais français
Mots-clés
Anthropologie et linguistique Anthropologie sociale Rituel
Aires culturelles
Amérique du Sud Océanie
Intervenant·e·s
  • Carlo Severi [référent·e]   directeur d'études, EHESS / Laboratoire d'anthropologie sociale (LAS)

Dans le but de préciser et d’enrichir le concept de mémoire sociale, nous avons, ces dernières années, identifié deux formes de tradition iconographique. L’une, liée à l’exercice conscient d’une mémoire, permet de penser autrement l’opposition entre l’oral et l’écrit. L’autre, qui implique la mise en place d’une agentivité attribuée aux images, renouvelle la théorie de l’action rituelle. En nous appuyant notamment sur l’analyse de cas méso-américains, amazoniens et océaniens, nous allons poursuivre ce chemin en présentant, d’une part, une nouvelle interprétation des pictographies complexes (Nahuatl et Maya) et d’autre part, une première ébauche d’une théorie relationnelle sacrifice. Nous consacrerons une partie des séminaires de cette année à une expérimentation comparative, concernant le concept de chamanisme, en Amérique indienne et ailleurs.

Le programme détaillé n'est pas disponible.


Master


  • Séminaires de recherche – Ethnologie et anthropologie sociale – M1/S1-M2/S3
    Suivi et validation – semestriel hebdomadaire = 0 ECTS
    MCC – fiche de lecture

Renseignements


Contacts additionnels
-
Informations pratiques

Inscription préalable obligatoire sur www.quaibranly.fr, rubrique « Étudier et rechercher »

 

Direction de travaux des étudiants

sur rendez-vous au Laboratoire d'anthropologie sociale, Collège de France, 52, rue du Cardinal Lemoine 75005 Paris.

Réception des candidats

contact par courriel.

Sur rendez-vous au Laboratoire d'anthropologie sociale, Collège de France, 52, rue du Cardinal Lemoine 75005 Paris.

Pré-requis

ouvert.


Compte rendu


Élaboré progressivement au cours de presque vingt ans de séminaire, le champ de l’anthropologie de la mémoire se prête aujourd’hui à une exposition plus systématique que chronologique. C’est ce que nous avons tenté de faire pendant l’année 2020-2021, en nous appuyant sur un groupe de concepts qui en définissent l’objet, les méthodes et quelques conclusions. Notre attention s’est donc focalisée non plus sur les étapes de nos recherches dans le temps, mais plutôt sur les rapports entre les concepts qu’il nous est arrivé de formuler, et sur la logique d’ensemble qui gouverne notre approche.

Notre point de départ concerne notre conception de l’anthropologie, dont le but le plus général est d’étendre le concept d’humanité. Analysant le fameux texte que Claude Lévi-Strauss a consacré, en 1962, à Rousseau en tant qu’ancêtre de l’anthropologie sociale, nous nous sommes attachés à préciser et à étendre, au sens politique autant que scientifique, cette perspective qui constitue l’idéal de l’approche anthropologique contemporaine. Nous y avons vu un double pari. Contre le colonialisme, Lévi-Strauss assignait à l’anthropologie la tâche d’inclure dans le concept d’humanité tous les peuples du monde. Contre l’humanisme de la Renaissance européenne, qui plaçait l’homme en maître de la nature, il plaidait aussi pour une anthropologie constamment consciente du fait que l’espèce humaine n’est pas la seule à habiter sur notre planète.

Nous nous sommes ensuite penchés sur le concept de comparaison. Sur ce point, le travail de rapprochement progressif de nos propres travaux sur le chamanisme amérindien avec les recherches menées aujourd’hui par Erik Mueggler (Ann Arbor, Michigan University) sur les traditions chamaniques Lolop (aire tibéto-birmane aujourd’hui en territoire chinois), nous a permis de mettre à jour une perspective qui, tout en évitant les généralisations hâtives et les interprétations symboliques faciles, rend possible la comparaison entre des traditions fort différentes. Cette perspective se fonde sur une pragmatique de l’énonciation, ainsi que sur l’exploration du caractère performatif du langage rituel. Cette expérimentation a d’ailleurs été conduite en dialogue direct avec E. Mueggler, qui a accepté de participer à nos débats.

On est passés, dans la dernière partie du séminaire, à l’exposition de nos choix en ce qui concerne le concept de mémoire sociale. Une fois élucidés les problèmes que pose l’existence de sociétés qui semblent nier l’exercice de la mémoire sociale (sociétés amazoniennes en particulier), nous avons proposé de distinguer entre les traditions à instructions négatives (prescrivant l’oubli plutôt que la mémorisation), qui frappent plutôt l’exercice de la mémoire individuelle, et le fantasme, tout à fait infondé, des sociétés privées de mémoire sociale. En nous appuyant sur un certain nombre de cas ethnographiques amazoniens (notamment Jivaros et Yanomami) nous en avons conclu que toute tradition se fonde sur une mémoire, même quand le contenu de ses instructions est négatif.
Nous avons ensuite avancé sur ce terrain en essayant d’élucider le concept de mémoire sociale. Une fois introduite une distinction entre mémoire mythique et image rituelle, nous avons constaté que, dans les deux cas, l’exercice d’une mémoire ne consiste pas en la seule « codification » de traces mnésiques (ou de « données » concernant le passé), mais implique toujours l’exercice actif d’une évocation/reconstruction de la trace mnésique. À partir de ces constats, nous nous sommes tournés vers une définition, en termes généraux et comparatistes, des techniques ou arts de la mémoire dans les sociétés amérindiennes et océaniennes. Nous avons reconnu qu’au-delà de leurs propriétés spécifiques, ces « arts » impliquent autant un exercice orienté de l’imagination qui préside à l’évocation du souvenir que la mise en place d’un ordre taxonomique, qui introduit un ordre dans les processus de codification. Pensée catégorielle et imagination orientée jouent un rôle égal dans ces techniques.

Cette focalisation sur les processus de pensée impliqués dans les pratiques de mémorisation nous a permis d’introduire une nouvelle perspective, qui concerne une anthropologie générale de la pensée. Ce nouveau thème fera l’objet de notre séminaire pour l’année 2021-2022.

 

Publications
  • « On Peace, Self-Love and Humanism », HAU : Journal of Ethnographic Theory, 2020, 10 (2), p. 294-297
    « Ritual Action Context and Comparison », HAU, 2020, 10 (3), p. 1099-1102.
    « Epilogue : Images, Ritual action, and Deep Time », dans Time and its Object. A Perspective from Melanesian and Amerindian Societies, sous la dir. de S. Kuechler et P. Fortis, Londres, Routledge, 2020, p. 1-9.
    « Pietra Viva. Mouvement implicite, semblant de vie et anthropologie de l’art », Perspective,/ 2020 – 2 / Danser, 2020, p. 143-154.
    « Dualités Coclé. Du parallélisme visuel à l’image double », L’Homme, 238, 2021, p. 21-

Dernière modification : 7 avril 2021 16:43

Type d'UE
Séminaires DE/MC
Disciplines
Anthropologie sociale, ethnographie et ethnologie
Page web
-
Langues
anglais français
Mots-clés
Anthropologie et linguistique Anthropologie sociale Rituel
Aires culturelles
Amérique du Sud Océanie
Intervenant·e·s
  • Carlo Severi [référent·e]   directeur d'études, EHESS / Laboratoire d'anthropologie sociale (LAS)

Dans le but de préciser et d’enrichir le concept de mémoire sociale, nous avons, ces dernières années, identifié deux formes de tradition iconographique. L’une, liée à l’exercice conscient d’une mémoire, permet de penser autrement l’opposition entre l’oral et l’écrit. L’autre, qui implique la mise en place d’une agentivité attribuée aux images, renouvelle la théorie de l’action rituelle. En nous appuyant notamment sur l’analyse de cas méso-américains, amazoniens et océaniens, nous allons poursuivre ce chemin en présentant, d’une part, une nouvelle interprétation des pictographies complexes (Nahuatl et Maya) et d’autre part, une première ébauche d’une théorie relationnelle sacrifice. Nous consacrerons une partie des séminaires de cette année à une expérimentation comparative, concernant le concept de chamanisme, en Amérique indienne et ailleurs.

Le programme détaillé n'est pas disponible.

  • Séminaires de recherche – Ethnologie et anthropologie sociale – M1/S1-M2/S3
    Suivi et validation – semestriel hebdomadaire = 0 ECTS
    MCC – fiche de lecture
Contacts additionnels
-
Informations pratiques

Inscription préalable obligatoire sur www.quaibranly.fr, rubrique « Étudier et rechercher »

 

Direction de travaux des étudiants

sur rendez-vous au Laboratoire d'anthropologie sociale, Collège de France, 52, rue du Cardinal Lemoine 75005 Paris.

Réception des candidats

contact par courriel.

Sur rendez-vous au Laboratoire d'anthropologie sociale, Collège de France, 52, rue du Cardinal Lemoine 75005 Paris.

Pré-requis

ouvert.

  • Autre lieu Paris
    musée du quai Branly - Jacques Chirac, 37 Quai Branly 75007 Paris
    Salle 2
    1er semestre / hebdomadaire, mercredi 14:00-17:00
    du 2 décembre 2020 au 7 avril 2021

Élaboré progressivement au cours de presque vingt ans de séminaire, le champ de l’anthropologie de la mémoire se prête aujourd’hui à une exposition plus systématique que chronologique. C’est ce que nous avons tenté de faire pendant l’année 2020-2021, en nous appuyant sur un groupe de concepts qui en définissent l’objet, les méthodes et quelques conclusions. Notre attention s’est donc focalisée non plus sur les étapes de nos recherches dans le temps, mais plutôt sur les rapports entre les concepts qu’il nous est arrivé de formuler, et sur la logique d’ensemble qui gouverne notre approche.

Notre point de départ concerne notre conception de l’anthropologie, dont le but le plus général est d’étendre le concept d’humanité. Analysant le fameux texte que Claude Lévi-Strauss a consacré, en 1962, à Rousseau en tant qu’ancêtre de l’anthropologie sociale, nous nous sommes attachés à préciser et à étendre, au sens politique autant que scientifique, cette perspective qui constitue l’idéal de l’approche anthropologique contemporaine. Nous y avons vu un double pari. Contre le colonialisme, Lévi-Strauss assignait à l’anthropologie la tâche d’inclure dans le concept d’humanité tous les peuples du monde. Contre l’humanisme de la Renaissance européenne, qui plaçait l’homme en maître de la nature, il plaidait aussi pour une anthropologie constamment consciente du fait que l’espèce humaine n’est pas la seule à habiter sur notre planète.

Nous nous sommes ensuite penchés sur le concept de comparaison. Sur ce point, le travail de rapprochement progressif de nos propres travaux sur le chamanisme amérindien avec les recherches menées aujourd’hui par Erik Mueggler (Ann Arbor, Michigan University) sur les traditions chamaniques Lolop (aire tibéto-birmane aujourd’hui en territoire chinois), nous a permis de mettre à jour une perspective qui, tout en évitant les généralisations hâtives et les interprétations symboliques faciles, rend possible la comparaison entre des traditions fort différentes. Cette perspective se fonde sur une pragmatique de l’énonciation, ainsi que sur l’exploration du caractère performatif du langage rituel. Cette expérimentation a d’ailleurs été conduite en dialogue direct avec E. Mueggler, qui a accepté de participer à nos débats.

On est passés, dans la dernière partie du séminaire, à l’exposition de nos choix en ce qui concerne le concept de mémoire sociale. Une fois élucidés les problèmes que pose l’existence de sociétés qui semblent nier l’exercice de la mémoire sociale (sociétés amazoniennes en particulier), nous avons proposé de distinguer entre les traditions à instructions négatives (prescrivant l’oubli plutôt que la mémorisation), qui frappent plutôt l’exercice de la mémoire individuelle, et le fantasme, tout à fait infondé, des sociétés privées de mémoire sociale. En nous appuyant sur un certain nombre de cas ethnographiques amazoniens (notamment Jivaros et Yanomami) nous en avons conclu que toute tradition se fonde sur une mémoire, même quand le contenu de ses instructions est négatif.
Nous avons ensuite avancé sur ce terrain en essayant d’élucider le concept de mémoire sociale. Une fois introduite une distinction entre mémoire mythique et image rituelle, nous avons constaté que, dans les deux cas, l’exercice d’une mémoire ne consiste pas en la seule « codification » de traces mnésiques (ou de « données » concernant le passé), mais implique toujours l’exercice actif d’une évocation/reconstruction de la trace mnésique. À partir de ces constats, nous nous sommes tournés vers une définition, en termes généraux et comparatistes, des techniques ou arts de la mémoire dans les sociétés amérindiennes et océaniennes. Nous avons reconnu qu’au-delà de leurs propriétés spécifiques, ces « arts » impliquent autant un exercice orienté de l’imagination qui préside à l’évocation du souvenir que la mise en place d’un ordre taxonomique, qui introduit un ordre dans les processus de codification. Pensée catégorielle et imagination orientée jouent un rôle égal dans ces techniques.

Cette focalisation sur les processus de pensée impliqués dans les pratiques de mémorisation nous a permis d’introduire une nouvelle perspective, qui concerne une anthropologie générale de la pensée. Ce nouveau thème fera l’objet de notre séminaire pour l’année 2021-2022.

 

Publications
  • « On Peace, Self-Love and Humanism », HAU : Journal of Ethnographic Theory, 2020, 10 (2), p. 294-297
    « Ritual Action Context and Comparison », HAU, 2020, 10 (3), p. 1099-1102.
    « Epilogue : Images, Ritual action, and Deep Time », dans Time and its Object. A Perspective from Melanesian and Amerindian Societies, sous la dir. de S. Kuechler et P. Fortis, Londres, Routledge, 2020, p. 1-9.
    « Pietra Viva. Mouvement implicite, semblant de vie et anthropologie de l’art », Perspective,/ 2020 – 2 / Danser, 2020, p. 143-154.
    « Dualités Coclé. Du parallélisme visuel à l’image double », L’Homme, 238, 2021, p. 21-