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UE310 - L'Europe du Sud-Est au prisme spatial. Chantiers de recherche


Lieu et planning


  • 105 bd Raspail
    105 bd Raspail 75006 Paris
    Salle 10
    annuel / mensuel (1re), jeudi 15:00-19:00
    du 5 novembre 2020 au 6 mai 2021


Description


Dernière modification : 1 juin 2021 09:21

Type d'UE
Séminaires DE/MC
Disciplines
Anthropologie historique, Anthropologie sociale, ethnographie et ethnologie, Géographie, Histoire
Page web
-
Langues
anglais français
Mots-clés
Analyse de discours Anthropologie historique Anthropologie sociale Anthropologie urbaine Circulations Empire Espace Espace social Fait religieux Genre Histoire Migration(s) Mobilisation(s) Mouvements sociaux Réseaux sociaux Transnational Urbaines (études) Ville
Aires culturelles
Europe Europe centrale et orientale Europe sud-orientale Méditerranéens (mondes) Musulmans (mondes) Transnational/transfrontières Turc (domaine)
Intervenant·e·s
  • Nathalie Clayer [référent·e]   directrice d'études, EHESS - directrice de recherche, CNRS / Centre d'études turques, ottomanes, balkaniques et centrasiatiques (CETOBaC)
  • Fabio Giomi   chargé de recherche, CNRS / Centre d'études turques, ottomanes, balkaniques et centrasiatiques (CETOBaC)

Dans le prolongement de l'année précédente, le séminaire aura pour but de présenter et de discuter des recherches en cours sur le Sud-Est européen (Turquie comprise) entre le XIXe et le XXIe siècle, c’est-à-dire de l’époque tardo-impériale au post-communisme. Dans une approche pluridisciplinaire, il s’agira d’aborder des objets variés (mouvements sociaux, fait religieux, développements économiques, relations de genre, etc.) en insistant sur leurs dimensions spatiales. On se concentrera donc sur l’imbrication des lieux et des rapports sociaux qui leur sont associés, c’est-à-dire sur les modalités à travers lesquelles les interactions sociales sont spatialisées. Le programme sera défini en fonction des intérêts scientifiques des participant·e·s qui prendront une part active dans l’organisation et l’animation des séances. Celles-ci pourront avoir différents formats : atelier de lecture, présentation des travaux en cours, intervention de collègues extérieurs, etc.

5 novembre 2020 : Penser les transformations économiques à travers les modèles et les pratiques d'entreprise. Salonique, Tuzla, Sarajevo

La séance propose des pistes pour une étude historique et anthropologique des transformations de la vie économique dans l’Europe du Sud-Est. Deux espaces, la Macédoine et la Bosnie, sont observés dans la diachronie, des dernières décennies du pouvoir ottoman à l'époque postsocialiste. Au-delà du décalage temporel manifeste, nos présentations dialoguent autour de la catégorie unifiante de « capitalisme », examinant comment celle-ci peut nous fournir des outils d’analyse pour aborder les interactions entre l’entreprise, industrielle et commerciale, et les contextes sociaux avec lesquels elle interagit.

La séance sera structurée en trois parties :

  • Andrea Umberto Gritti (CETOBaC, EHESS) : Marchands et industriels dans la Salonique ottomane : enjeux de méthode

Les thèses de Marx sur le commencement du processus de valorisation du capital se déroulant au sein de l’industrie moderne peuvent avoir été l’objet de plusieurs critiques par la pensée économique successive, qui a notamment mis en question leur emphase sur le moment de la production des marchandises. Celles-là ne sont pourtant déprivées de toute valeur heuristique, comme peut-il le démontrer l’examen d’un cas d’analyse – l’Europe ottomane au XIXe siècle – que les études d’histoire économique ont longtemps abordé en s’appuyant sur de récits diplomatiques impressionnistes et de données statistiques agrégées, souvent fort lacunaires. Mon intervention se propose, au contraire, de regarder la division sociale du travail se produire dans une région de l’Europe du Sud-Est à travers le prisme des activités manufacturières mises en place à Salonique par des négociants juifs d’origine livournaise. L’enracinement de ces affaires dans la sphère de la circulation est côtoyé par deux versants de ma présentation, qui examine en quelle mesure l’expansion du commerce méditerranéen favorise, en outre de l’accumulation d’un capital marchand dans les échelles du Levant, l’évolution des régimes foncières de l’arrière-pays ottoman et, par conséquent, les disponibilités en main-d’œuvre. L’approfondissement de plusieurs aspects de la production et la distribution des marchandises industrielles et des relations de travail instaurées au niveau des usines peut, de cette façon, élargir notre compréhension des transferts technologiques, des tendances démographiques et des dynamiques financières réagrégeant la société de l’Empire ottoman tardif.

  • Milana Čergić (Max-Planck-Institut für ethnologische Forschung, Halle): Continuations et disruptions en Bosnie-Herzégovine : penser les transformations économiques à travers une chaîne de supermarchés à Tuzla

Le développement économique dans le capitalisme demande une «destruction créative», écrivait l’économiste Joseph Schumpeter au début du XXème siècle. Les entrepreneurs sont, d'après lui, les porteurs principaux de ce développement, des individus qui avec leur sens de l'initiative créent de nouvelles « combinaisons ». Comment penser ce concept dans les transformations économiques postsocialistes ? Cette présentation propose une réflexion à travers une chaîne de supermarchés à Tuzla, créée en 1993. Nous discuterons ainsi l'introduction d’un nouveau capitalisme qui se sert des pratiques yougoslaves et qui a pu s’établir sous cette forme grâce aux connections d'un personnage local. Je propose d’interroger les interconnections entre capital, culte de la personne d’un entrepreneur et État en Bosnie-Herzégovine des années 1990 jusqu’à aujourd’hui.

  • Mehdi Belasri (CETOBaC, EHESS), Privatiser un centre-commercial en Bosnie-Herzégovine: de Sarajka à BBI

Sonia Hirt argumentant dans son texte que la ville post-socialiste est avant tout une ville post-publique et donc gérée par le privé, la question de la place des acteurs du privé dans la fabrique d’une ville comme Sarajevo se pose. Bien que peu mentionnée explicitement dans les travaux portant sur la ville post-socialiste, l’entreprise privée se retrouve au cœur de celle-ci. Comment la prendre en compte ? Comment l’entreprise en tant qu’acteur social transforme le territoire ? Par quels biais l’entreprise se révèle être un acteur de la fabrique de la ville à Sarajevo? Je compte apporter dans ma présentation des pistes de réflexion sur ces trois questions en étudiant la privatisation de l’emprise foncière d’un ancien centre-commercial datant de la période socialiste, Sarajka, détruit pendant le siège de la ville et racheté par une banque islamique au début des années 2000.

Afin de mieux contribuer à la discussion, les participant·e·s sont invité·e·s, s'ils/elles le souhaitent, à lire les textes suivants disponibles ici

  • Maurice Dobb, Studies in the development of capitalism, Routledge, London, 1946 [1930], Chapter 5, Capital accumulation and mercantilism, par. I, p. 177-186 ; Chapter 7, The Industrial Revolution and the Nineteenth Century, par. II, p. 281-300.

  • Joseph A. Schumpeter, Capitalism, socialism and democracy, Routledge, London and New York, 2000, Chapter 7, The process of creative disruption, p. 80-86. 

  • Sonja A. Hirt,  Iron curtains: gates, suburbs and privatization of space in the post-socialist city, Wiley-Blackwell, Oxford, 2012, p. 43-48.

3 décembre : Écrire l’itinérance 

Littérature de l’exil, littérature de voyage, les textes étudiés au cours de la séance racontent la fréquentation « d’espaces autres » (Michel Foucault, Architecture, Mouvement, Continuité, n°5, octobre 1984, pp. 46-49). Investissant des lieux supposément nouveaux et étrangers au regard de leurs origines nationales/régionales, les auteur·ices rencontré·e·s utilisent le medium de l’écriture pour reconfigurer les représentations des espaces présents et ou passés voire pour créer un « tiers-espace », – pour reprendre le concept de Homi Bhabha – concret ou métaphorique, qui bouleverse les hiérarchies politiques, les catégories traditionnelles ainsi que les pratiques spatiales du genre, de la langue ou encore de la religion. Traducteur·ices pour l’institution dominante qui publie leurs œuvres tout autant que pour leur auditoire, ces transfuges parviennent à conjuguer les grilles d’analyse pour faire le récit de vies sociales denses et minées de contradictions, où les appartenances territoriales et les identités nationales et sociales sont sans cesse interrogées et recréées.

  • Lola Sinoimeri (LEGS, Paris 8) : Pigeon, vole de Melinda Nadj Abonji : repenser l’espace et les identités européennes grâce au récit d’exil

À travers le roman d’inspiration autobiographique Pigeon vole (Tauben fliegen auf) de l’écrivaine contemporaine Melinda Nadj Abonji, autrice germanophone suisse d’origine hongroise (de Voïvodine), nous réfléchirons à la manière dont la mise en récit de l’expérience migratoire permet de faire se confronter voire de faire s’entremêler deux espaces européens (la Voïvodine et la Suisse) pour créer littérairement ce que l’on peut appeler un « tiers-espace » dans la lignée des théories postcoloniales de Homi Bhabha. Or, la confrontation et l’entremêlement des espaces va de pair avec la représentation de multiples voix et discours sur ces espaces qui dévoile alors les mécanismes de productions des discours dominants, que ce soit les discours d’ordre balkaniste en Suisse ou les discours nationalistes en ex-Yougoslavie.

  • Isabelle Linais (SciencesPo Paris) Raconter le hadj en Asie centrale soviétique : Fazliddin Muhammadiev (1965) et Kamil Ikramov (1989)

Au début du XXe siècle, les musulmans d’Asie centrale furent de plus en plus nombreux à pouvoir se rendre à La Mecque. La visite à la Maison d’Allah s’inscrivait alors dans un itinéraire plus large qui faisait du pèlerinage (hadj) une entreprise spirituelle, diplomatique et commerciale. Il a fallu attendre 1944 pour que moyennant sanction étatique, une dizaine de pèlerins soviétiques puissent se rendre à nouveau à La Mecque, après près de vingt ans d'interdiction. Tandis que les protagonistes de ce phénomène très restreint et contrôlé ont souvent été considérés comme des diplomates religieux aux ordres de Moscou, quelques manifestations littéraires de la Kaaba dans l’espace soviétique éclairent autrement l’attachement à cette destination. Évoluant de manière différente au sein des institutions de la littérature soviétique, le tadjik Fazliddin Muhammadiev et l’ouzbek Kamil Ikramov appartiennent tous deux à une génération née à la fin des années 1920. 

Dans Dar dunë pour le premier (1965), et Delo moego otca pour le second (1989), le hadj a fonction de lieu commun. Il autorise une critique de la société en renouant avec le genre classique du hajjnāma (récit de pèlerinage), et construit discrètement la mémoire de ceux qui ont disparu dans les années 1930, morts ou exilés. Écrite en russe pour la seconde, et traduite presque aussitôt en russe pour la première, les deux œuvres ont fait l’objet de lectures parfois divergentes, selon les contextes politiques et sociaux des années 1960 à 1990. Ce lieu commun est effet celui d’une littérature soviétique où à partir des années 1960, s’expriment des visions multiples de la citoyenneté, entre droit à la mémoire de trajectoires familiales brisées, exaltation des folklores nationaux, et acceptation d’une altérité religieuse formulée selon les termes de la critique.

  • Nathalie Clayer (EHESS-CNRS, CETOBaC) :  De la nature à l'exil, les voies de l'émancipation féminine dans l'autobiographie de Nexhmie Zaimi (1937)

En partant d’un prisme genre-corps-espace-agentivité qui renvoie à des outils proposés pour l’analyse des textes autobiographiques par Sidonie Smith et Julia Watson (Reading Autobiography. A Guide for Interpreting Life Narratives, 2010), et en m’appuyant plus particulièrement sur Guy Di Méo qui considère que le corps est un « espace générateur de l’espace social », qu’il est un organisme vivant, objet et sujet d’une écologie humaine, qu’il est aussi un médium des interactions dans l’espace social et qu’il est un lieu d’expression de la distinction sociale et d’incorporation du social, j’analyserai l’autobiographie d’une jeune femme albanaise exilée aux USA. Le régime de genre qu’elle associe à son pays d’origine est ainsi celui d’un contrôle du corps (voile, vêtements, regards, gestes, rire) et d’une ségrégation maintenant la femme dans un rôle et un espace domestiques, les limites étant données par l’enfance, le rêve et les moments de bouleversement de l’espace domestique. La nature apparaît alors comme l’espace non-touché par ce régime de genre. Le texte autobiographie a par ailleurs pour objet les transformations de ce régime, transformations que les acteurs associent eux-mêmes à la « modernisation », et qui, pour une jeune fille comme elle, relèvent de trois domaines principaux : l’éducation, la liberté de déplacement et la liberté corporelle. Le récit dévoile néanmoins les tensions qui en résultent et les transgressions que l’autrice est amenée, selon elle, à commettre elle-même. Ces transgressions sont symbolisées par deux types de mouvement dans l’espace : vertical (grimper dans un murier) et horizontal (s’exiler).

Afin de mieux contribuer à la discussion, les participant.e.s sont invité.e.s, s'ils/elles le souhaitent, à lire les textes suivants disponibles ici :

  • Guy Di Méo, « subjectivité, socialité, spatialité : le corps, cet impensé de la géographie », Annales de géographie,675, 5, 2010, p. 466-491.
  • Paolo Sartori, « Of Saints, Shrines, and tractors : Untangling the Meaning of Islam in Soviet Central Asia », Journal of Islamic Studies, 2019, p. 1-40.
  • Philipp Schröder & Manja Stephan-Emmrich, « The Institutionalization of Mobility: Well-being and Social Hierarchies in Central Asian Translocal Livelihoods », Mobilities, 2014, p. 1-24.

4 février 2021 : Histoires d'archives. France, Turquie, Yougoslavie

Depuis au moins le dernier quart du XXe siècle, les sciences sociales - l'archivistique, l'anthropologie et l'histoire notamment - ont profondément modifié la façon d’appréhender l’archive. Grâce à ce tournant intellectuel l'archive a cessé d'être considérée comme un simple réservoir de sources primaires, pour devenir une source en elle-même. Comme le disent Christine Jungen et Jihane Sfeir, les archives sont désormais à penser comme des « lieux matériels […] dans lesquels sont mises en branle des communautés d’humains, de pra­tiques et d’objets ; soit, en d’autres termes, des communautés sociales dans lesquelles circulent des choses aussi diverses que l’identité, le pouvoir, l’État, la mémoire, le patrimoine, mais aussi le vrai, l’histoire, le savoir, la technique… Des lieux, en somme, où sont assemblés et redéployés des réseaux et des positions, dans et sur le monde » (Archiver au Moyen Orient, IISMM et Karthala, Paris 2019, p. 6). Lors de cette séance, trois chercheur·euses travaillant sur des terrains différents - Turquie, France/Maghreb, Yougoslavie - nous parleront de leur propre archival turn, c’est-à-dire de leurs propre façon de penser et questionner l’archive.

La séance sera structurée autour de trois présentations individuelles :

  • Emmanuel Szurek (EHESS, CETOBaC) Comment les archives Basset sont arrivées à l’EHESS. Ethnographie historique d’un fonds d’archives familiales

Ma présentation portera sur un fonds d'archives orientalistes arrivé de Lorraine à l'EHESS entre 2014 et 2019 : les papiers de l'arabisant et berbérisant René Basset (1855-1924). Elle soulève d'abord des questions pratiques, en lien avec un travail de recherche collective mené actuellement à l'Ecole avec un groupe de collègues, d'étudiant·e·s et d'anciens étudiant·e·s, et qui doit déboucher sur la publication d'un ouvrage en 2022. Quel a été le sort des archives Basset avant leur arrivée à l'EHESS ? Quelles ont été les conditions de conservation du fonds ? Pourquoi les papiers Basset n’ont-t-ils jamais été exploités ? Quelles logiques générationnelles, sociales et patrimoniales ont finalement présidé à leur transmission à une institution universitaire, un siècle après la mort de leur créateur ? Plus fondamentalement, il s'agit d'interroger les relations croisées entre une famille et un fonds d'archives : comment une famille génère, gère ou néglige ses archives; comment la possession des archives configure et reconfigure le groupe familial. Répondre à ces questions suppose d’objectiver un groupe familial, ses dispositions sociales et psychologiques ; cela requiert également un retour réflexif sur mon enquête à Gérardmer (2007-2019) et sur mes propres coordonnées à la fois comme enquêteur et comme ami de la famille.

  • Ece Zerman (CETOBaC) Un regard réflexif sur les archives personnelles et familiales de la fin de l’Empire ottoman au début de la République de Turquie 

La réflexivité est sans doute une notion incontournable de la démarche anthropologique depuis plusieurs décennies. En histoire, en revanche, à l’exception de quelques études plus spécifiques consacrées à cet aspect, la relation réflexive de l’historien·ne avec les archives demeure moins questionnée ou explicitée. Ce que je souhaite faire dans cette intervention, c’est livrer, autant que possible, ma propre rencontre avec les archives dites familiales ou du « for privé » et expliciter le parcours de recherche qui m’a amenée à explorer ce type d’archives, à commencer par les archives de Said Bey (depuis 2009) et qui s’est poursuivi avec l’étude des carnets personnels. Je questionne également ce qu’est une archive personnelle et familiale en envisageant ce que les documents personnels et familiaux représentaient pour les contemporains de la fin du XIXet du début du XXesiècle et pour les descendants de familles qui en ont hérité. Si, dans la plupart des cas, l’historien·ne se trouve face à des archives qui se présentent comme un produit fini et dont les limites sont définies, la production des archives s’inscrit dans un processus plus long. Il s’agit, en ce sens, de revenir sur le processus de formation des archives et sur le rôle des différents acteurs qui y participent ainsi que de raconter leurs propres « histoires d’archives ». Les archives peuvent autant être définies par ce qu’elles excluent que ce qu’elles comportent ; on s’intéressera ainsi aux non-dits, effacés, cachés, voilés, exclus, rejetés des archives personnelles et familiales.

  • Fabio Giomi (CNRS, CETOBaC) : L’archive du fait associatif dans l’espace yougoslave

Dans mon intervention je me propose de présenter quelques réflexions autour de mon nouvel objet de recherche, l’archive associative, à partir de mon terrain habituel - celui yougoslave entre la mi-XIXe et la mi-XXe siècle.  Le terme « archive », ici, peut couvrir des lieux fort différents : un tiroir qui protège un ensemble de papiers dans la résidence d’un activiste ou de son descendant ; un fond associatif conservé dans une institution municipale ou étatique, une fondation privée dédiée à part entière aux activités d’un réseau d’associations. L’idée est de se pencher sur les fonds labellisés comme associatifs par les archivistes, et qui regorgent de statuts, rapports, échanges entre dirigeants et bénéficiaires, procès-verbaux de réunions et d’élections pour en interroger les spécificités. En suivant le travail d’Ann Stoler, l’archive sera à comprendre dans un sens très souple et inclusif : ces ensembles classés de sources seront à appréhender en dialogue constant avec les documents conservés dans les archives de l’Etat, des municipalités et des institutions religieuses, ainsi que les archives privées et familiales. En suivant les documents comme un fil que l'on tire, l’objectif est celui d’explorer les différentes « économies mixtes » – du welfare bien sûr, mais aussi de l’éducation, des loisirs, de la discipline etc. - dans lesquelles les associations sont partie prenante.

Afin de mieux contribuer à la discussion, les participant·e·s sont invité·e·s, s'ils/elles le souhaitent, à lire les textes suivants disponibles ici :

  • Arlette Farge, Le goût de l’archive, Éditions du Seuil, Paris 1989, p. 7-26.
  • Emmanuel Szurek, Comment les papiers Basset sont arrivés à l’EHESS. Ethnographie historique d’un fonds d’archives familiales (à ne pas faire circuler).
  • Antoinette Burton, Archive Stories. Facts, Fictions and the Writing of History, Duke University Press, Durham & London, 2005, p. 1-24.

4 mars 2021 : (Re)thinking Volunteerism in the Yugoslav Space. Ongoing Research, with Lucija Balikić (CEU), Isidora Grubački (CEU), Daša Ličen (University of Ljubljana) and Jovana Papović (EHESS, CETOBaC)

With a view that will range from the last third of the 19th century to the Second World War, this seminar aims to develop a conversation on the historical trajectory of the voluntary association in Southeastern Europe, with special reference to the Yugoslav space. Of particular interest to this seminar is the way in which voluntary associations become implicated in relationships to states and empires, and in the consolidation and politicization of collective identities.

  • Daša Ličen (University of Ljubljana): Habsburg Trieste's Slavjansko društvo as the First Slovene Association

Scholars have until recently been interpreting the Slavic Society (Slavjansko društvo) established in 1848 Trieste as one of the first Slovene nationalist organizations. I will, however, argue that this voluntary association has only in the eyes of the subsequent, late 19th and early 20th century national activists anachronistically been understood as Slovene. The Slavic Society can in a way indeed be understood as such because some of its members thought of themselves as primarily Slovene. Still, the archival sources reveal that, firstly, the notion of “Slovenness” kept changing throughout the second half of the 19th century and is hence not equal to its contemporary use and, secondly, that besides Slovene the Slavic Society wholly unproblematically accommodated also many other collective identifications; for instance, Panslavism, Illyrism, Yugoslavism, and other subsequently more or less successful national sentiments. Even more, the same members of the Slavic society could have simultaneously been adhering to multiple Slavic national movements.

  • Lucija Balikić (Central European University): Challenge From the Peripheries of Dualism: Southern Slav Sokols and the Daily Press in the Imperial Metropoles of Vienna and Budapest (1900-1914)

The presentation will provide an overview of the stances taken towards the Southern Slav Sokol associations in the daily press in Budapest and Vienna, roughly from the turn of century until the beginning of the First World War. Together with often racialized and antimodernist nationalist discourses framing the Sokol associations as a Slavic conspiracy, the sources reveal indicative differences in political thought between the two realms of the Dual Monarchy, and their deeply diverging understanding of societal democratization and the 'nationalities question'. Moreover, the particular differences between associational culture of Cisleithania and Transleithania will be described and outlined in the given context, through comparison of two distinct imperial periferies: Istria and Dalmatia on the one hand, and Croatia-Slavonia on the other.

  • Jovana Papovic (EHESS, CETOBaC): Physical culture - between discipline and outdoor freedom: the excursions of the Sokol youth in Interwar Yugoslavia

In this presentation I focus on the actions towards youth of the physical culture movement Sokol. A major associative actor of interwar Yugoslavia, the Sokol was a partner of the state, and it was largely involved in what we could call a "mixed economy of education", being one of the main instigators of the establishment of mandatory physical education in primary school curricula. I will particularly focus here on Sokol’s outdoor activities such as excursions and trips for underprivileged children. By drawing on monographs such as Moje Letovanje (My summer vacation) written by the head of the education section of the Sokols of Vojvodina, Velimir Popovic, but also drawing greatly on visual sources (photos and a movie) in order to find glances of a history from below, I aim to expose the paradoxes and contradictions that lay at the heart of the Sokol enterprise. Namely, even though the aim of the movement was to render youth into a political tool in the service of the state, and although its pedagogues insisted that the disciplinary dimension of the educational program was meant to strengthen the body and the spirit, by studying its implementation we find the persistence of varied forms of creative interpretation of physical culture on the part of the Sokol members, as well as new types of sociability that went beyond the official goals of the movement.

  • Isidora Grubački (Central European University Budapest): Conceptualization of feminism and the humanitarian/feminist dichotomy in the context of the interwar Yugoslav women’s movement 

This presentation focuses on the work of two women’s alliances in the 1920s Yugoslavia, the National Women’s Alliance and the Feminist Alliance. While the first was established in 1919 and consisted mainly, but not exclusively, of voluntary women’s associations, the second was established in 1923 and it aimed to – among other things - distance itself from the program of the voluntary associations. The presentation explores the discussions around their forming and restructurings, and asks how the concept of feminism was used, what it meant, and with which concepts it was closely linked in the Yugoslav public space in the 1920s. It suggests that in this context a dichotomy between humanitarian/voluntary women’s associations was conceptualized by the members of the feminist movement. More broadly, the presentation will raise the issues of the (dis)continuities of women’s organizing in the Yugoslav lands before and after World War I, the divergences within the broad Yugoslav women’s movement, and the usefulness of a conceptual approach to the history of feminism.

Jeudi 1er avril :

  • 15 h à 17 h : Espace et rapports interconfessionnelles (présentations de Matthieu Gosse et Clémence de Rouvray)
  • 17 h à 18 h : Exposés d'étudiants (Laetitia Albert et Mehmet Akgün)
  • 18 h à 19 h : L’émergence de la préhistoire égéenne au 19e siècle: questions, sources et traitement (présentation de Dimitra Douskos)

Résumés :

Matthieu Gosse (Université Paris Gustave Eiffel), "(Re)lire les massacres « hamidiens » au prisme spatial : Distorsions narratives autour des massacres d’Harput/Mamouret-ul Aziz et Diarbékir (1895)"

Les massacres « hamidiens » (1894-1896) dont les Arméniens ottomans ont été victimes ont suscité une forte émotion en Europe, singulièrement en France. De nombreuses publications (rapports consulaires, presse, pamphlets) ont longuement relaté et dénoncé la commission de ces massacres perçus, à l’époque, comme une manifestation de « fanatisme » musulman mis en mouvement par le sommet du pouvoir impérial ottoman : le « Sultan rouge » Abdülhamid II. Longtemps restés dans l’ombre de l’historiographie du Génocide de 1915, les massacres de 1894-1896 ont été l’objet de travaux récents qui ont remis en cause un certain nombre d’« idées fixes » procédant d’une grammaire narrative qui se cristallise dans les publications qui ont suivi les massacres. Ces travaux mettent au jour et examinent les discordances et distorsions des récits produits par les différents témoins et acteurs de ces violences de masse. Ces études de cas « micro » accordent une attention particulière à la dimension spatiale de ces massacres : réseaux de communications, circulation des informations, relations villes-campagnes, représentations de l’espace et des différents groupes sociaux qui l’habitent. Il s’agit donc de poursuivre et d’appliquer ces questionnements à un certain nombre de sources relatant les violences qui ont affecté les villes de Diarbékir et Harput/Mamouret-ul Aziz à l’automne 1895.

Clémence de Rouvray "Tenter de comprendre une dynamique intra-confessionnelle pour mieux appréhender les relations orthodoxes- romano et gréco-catholiques à Bucarest : la nomination de l’archevêque latin Raymond Netzhammer"

En Roumanie, les relations entre les trois confessions chrétiennes que sont les orthodoxes, les romano-catholiques (ou catholiques latins) et les gréco-catholiques ont toujours été complexes et délicates. Les premiers sont en effet considérés comme « des schismatiques», - les orthodoxes vus par les romano-catholiques - ; ces derniers appartiennent à « l’Église des étrangers », - les romano-catholiques vus par les orthodoxes- ; et enfin les troisièmes représentent « les tsiganes du catholicisme » - les gréco-catholiques vus par les romano-catholiques.  Cependant essayer d’appréhender la complexité de ces relations interconfessionnelles dans l’espace plus restreint qu’est Bucarest, c’est d’abord être obligé d’analyser les dynamiques intra-confessionnelles, en l’occurrence celles du catholicisme latin, et plus précisément celles à l’œuvre lors de la nomination de l’archevêque latin de Bucarest. Á cet égard, le choix du bénédictin de langue allemande Raymond Netzhammer offre un point d’observation privilégié. En effet de sa nomination en 1905 à sa démission forcée en 1924, en passant par les vicissitudes qu’il rencontre pendant la Première Guerre mondiale, l’espace restreint que représente l’archevêché latin s’avère en réalité être le terrain où ne cessent de s’entremêler différentes frontières (nationales et internationales, linguistiques et religieuses) à la croisée desquelles se trouve un homme en particulier, Vladimir J. Ghika. Comment cet homme, lui-même synthèse de cet espace religieux complexe (orthodoxe devenu catholique, à la fois de rites latin et oriental), seconde-t-il en partie le choix de la hiérarchie catholique latine, mais sert aussi les intérêts diplomatiques de la France et peut-être également les siens propres ?

Dimitra Douskos (CETOBaC), L’émergence de la préhistoire égéenne au 19e siècle : questions, sources et traitement

Mon travail porte sur l’histoire de la découverte de la préhistoire égéenne en Grèce au 19e siècle, une histoire compliquée par le fait qu’en Grèce les archéologues pensent qu’on ne peut découvrir qu’une seule chose, l’antiquité classique. Le point de départ de mon exploration est la question de comprendre pourquoi différentes campagnes de fouilles qui ont lieu dans le golfe de Santorin au fil du 19e siècle (1796, 1826-30, 1866-70, 1899) n’aboutissent pas à une reconnaissance scientifique, une question qui m’a rapidement obligée de m’intéresser à ce que les sites et les objets trouvés sont devenus - puisqu’ils n’ont pas connu le destin des autres découvertes archéologiques. Ceci m’a également obligée de me demander ce qu’on pouvait bien mettre sous le terme “préhistorique” à l’époque puisqu’on n’y mettait pas ce qu’on trouvait dans les sites archéologiques correspondants. Après la présentation de l’histoire de ces fouilles et du destin du terme “préhistorique” dans la région, je voudrais enfin discuter les diverses hypothèses d’appartenance ethnique qui ont été émises à l’époque pour comprendre qui pouvaient bien être les habitants de ces temps très reculés dont on retrouvait la trace. Ce qui semble pouvoir se résumer à la fin du 19e à un débat sur la préséance des Sémites ou des Aryens en vient à suivre au 20e, une trajectoire qui n’est pas celle que ces prémisses laissent imaginer. Combiné à l’apparition des chercheurs anglophones dans un débat qui avait jusqu’alors surtout eu lieu entre spécialistes français et allemands, le nationalisme grec prend à bien de moments le dessus pour ramener la centralité winckelmanienne de l’hellénisme et étouffer d’autres interprétations. Plus encore, j’aimerais surtout qu’on s’interroge sur la possibilité de remettre en question le modèle culturel dit diffusionniste qui a été déterminant et reste extrêmement prégnant à la fois en archéologie et en anthropologie historique, pour penser autrement la question de l'appartenance culturelle des premiers peuplements du monde égéen au néolithique et à l’âge du bronze.

jeudi 6 mai: les enjeux environnementaux dans les Balkans

La dernière séance de cette année sera structurée en deux parties:

- 15h à 17h : Exposés d'étudiants

Marijan Micakovic (EHESS): Climat global, environnement local : enjeux du "milieu de vie" en Serbie contemporaine

Signataire du protocole de Kyoto depuis 2007, candidate à l'adhésion à l'union européenne depuis 2011, la Serbie s'est engagée ces dernières années dans différents processus qui visent notamment à réduire les impacts négatifs des activités humaines sur l'environnement. Malgré les différents rapports et ébauches de plans nationaux qui sont présentés, la population se plaint de l'inaction des dirigeants et de l'inefficacité générale des mesures qui sont prises. Alors que les évènements climatiques extrêmes se font de plus en plus fréquents (inondations, vagues de chaleur, sécheresses) le militantisme écologique se développe et les manifestations et initiatives citoyennes de dépollution se multiplient. En vue d'une prochaine enquête de terrain dans le Sud du pays, nous passerons en revue les problématiques environnementales que connaît la Serbie contemporaine ainsi que la manière dont ils sont traités. Une attention particulière sera portée sur les différentes échelles d'action et de problématisation, de l'international au régional et des mesures étatiques au militantisme citoyen, afin de se faire une première idée de la situation sur place et des acteurs en jeu.

Balthazar Bragança (EHESS):  Genèse d'une catastrophe environnementale. Le cas du lac de Geamana en Roumanie

En examinant la littérature de certaines disciplines de sciences naturelles, de la spéléologie à l'hydrogéologie en passant par la biologie évolutive, de nombreuses études soulignent l'imprévisibilité des effets de l'activité humaine sur les milieux sur le long terme. Certes, le grand récit de l'Anthropocène ne cesse de prétendre que l'humain est devenu une force géologique de la Terre ; et de fait, la composition de tout une strate géologique portera les traces indélébiles des activités humaines pour quelques millénaires, si ce n'est davantage. Mais l'humain n'est de loin pas la seule force géologique, et toute force ne vient d'ailleurs jamais seule. À cet égard, toute une littérature scientifique se développe autour de l'idée que "la nature pourrait sélectionner des “relations“ bien plus que des individus ou des génomes" (Epel et Gilbert, 2008), et c'est pour mieux comprendre la nature de ces relations que je m'intéresse à l'environnement catastrophé de la vallée de Geamana dans le nord-ouest de la Roumanie. Après une brève présentation de la genèse d'une cette catastrophe environnementale, je m'efforcerai de préciser ma problématique de recherche, et d'explorer avec vous certains des enjeux sur divers échelles, ainsi que leur inter-dépendance. J'espère enfin vous faire part des défis méthodologiques qu'une telle recherche supposera une fois sur le terrain.

- 17h à 19h : Présentation par François Lerin (AIDA - Association Internationale pour le Développement de l'AgroEnvironnement) et Claire Bernard (Cirad, UMR Innovation) d'un numéro thématique de la revue Balkanologie en cours de préparation, portant sur « les enjeux environnementaux dans les Balkans » (cf. l’appel à communication : Balkanologie. Revue d’études interdisciplinaires | AFEBalk (hypotheses.org)

 


Master


  • Séminaires de recherche – Études politiques – M1/S1-S2-M2/S3-S4
    Suivi et validation – annuel mensuelle = 6 ECTS
    MCC – exposé oral, contrôle continu
  • Séminaires de recherche – Études sur le genre-Histoire – M1/S1-S2-M2/S3-S4
    Suivi et validation – annuel mensuelle = 6 ECTS
    MCC – exposé oral, fiche de lecture
  • Séminaires de recherche – Études sur le genre-Sociologie – M1/S1-S2-M2/S3-S4
    Suivi et validation – annuel mensuelle = 6 ECTS
    MCC – exposé oral, fiche de lecture
  • Séminaires de recherche – Histoire-Histoire du monde/histoire des mondes – M1/S1-S2-M2/S3-S4
    Suivi et validation – annuel mensuelle = 6 ECTS
    MCC – fiche de lecture, exposé oral
  • Séminaires de recherche – Histoire-Histoire et sciences sociales – M1/S1-S2-M2/S3-S4
    Suivi et validation – annuel mensuelle = 6 ECTS
    MCC – fiche de lecture, exposé oral
  • Séminaires de recherche – Territoires, espaces, sociétés – M1/S1-S2-M2/S3-S4
    Suivi et validation – annuel mensuelle = 6 ECTS
    MCC – exposé oral, fiche de lecture

Renseignements


Contacts additionnels
-
Informations pratiques
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Direction de travaux des étudiants
-
Réception des candidats
-
Pré-requis
-

Compte rendu


Organisé en six séances de quatre heures chacune, le cycle de séminaire de cette année a eu pour but de présenter et de discuter des recherches en cours sur le Sud-Est européen (Turquie comprise) entre le XIXeet le XXIe siècle. L’approche a été éminemment pluridisciplinaire : lors des séances, intervenant·es de différentes disciplines (histoire, sociologie, anthropologie, sciences politiques, géographie etc.) et champs (études sur le genre, études des nationalismes et du fait religieux, jeunesse etc.) ont abordé des objets variés (mouvements sociaux, archives, réseaux économiques, environnement, corps etc.) en insistant sur leurs dimensions spatiales.

Ainsi le séminaire a donné l’occasion de présenter au public de l’EHESS des recherches collectives en cours, en France ou à l’étranger, sur les sociétés balkaniques contemporaines. La séance intitulée Les enjeux environnementaux dans les Balkans (6 mai 2021), par exemple, nous a permis de discuter l’avancement d’un numéro de la revue Balkanologie. Revue d’études pluridisciplinaires coordonné par François Lerin et Claire Bernard et consacré justement aux enjeux environnementaux, à paraître décembre 2021. Afin de favoriser le dialogue entre chercheur·euses établi·e·s et étudiant·es en début de parcours de formation, nous avons associé à la séance Marijan Micakovic et Balthazar Bragança, qui développent leur recherche de M2 sur les mêmes questions dans différentes formations de l’EHESS. La séance a bien montré à quel point les thématiques (ainsi que les préoccupations) environnementales se sont désormais installées de façon permanente dans le domaine des études sur les Balkans, y compris dans l’espace francophone. La séance (Re)thinking Volunteerism in the Yugoslav Space. Ongoing Research (4 mars 2021), dans la même logique, a permis de se familiariser avec les recherches en cours de quatre chercheuses européennes – Jovana Papovic, Dasa Licen, Lucija Balikic, Isidora Grubacki – travaillant sur le fait associatif en Europe du Sud-Est, dans le cadre du projet européen COST Who Cares in Europe ? La séance a montré de façon convaincante combien l’espace yougoslave représente un cas d’étude heuristiquement productif pour repenser la trajectoire des sociétés civiles européennes. Mais le cycle de séminaires de cette année ne s’est pas limité à donner de la visibilité au travail collectif en cours - il a aussi contribué à le favoriser. C’est le cas, en particulier, des réflexions menées dans la séance Penser les transformations économiques à travers les modèles et les pratiques d’entreprise. Salonique, Tuzla, Sarajevo (5 novembre 2020), animée par Mehdi Belasri, Milana Cergic et Andrea Umberto Gritti, qui ont constitué la base pour la préparation d’un numéro de la revue Balkanologie sur les entrepreneurs comme objets des sciences sociales.

Une préoccupation transversale aux différentes séances a été celle de faire émerger de nouvelles thématiques afin d’enrichir davantage le champ des études balkaniques. La séance intitulée Écrire l’itinérance, a porté sur l’analyse de sources variées en littérature de l’exil (3 décembre 2020) et a réuni trois chercheuses – Nathalie Clayer, Lola Sinomeri, Isabelle Linais – travaillant sur des sources autobiographiques, montrant l’importance de ce genre de sources pour étudier la reconfiguration des représentations spatiales, le bouleversement des hiérarchies politiques et des catégories traditionnelles, notamment dans le domaine des relations de genre. La séance Histoires d’archives. France, Turquie, Yougoslavie (4 février 2021) a mis en dialogue trois recherches en cours de chercheur·euses du CETOBaC aillant le même objet en commun : l’archive. Portant sur la France, la (ex-)Yougoslavie et la Turquie respectivement, les interventions d’Emmanuel Szurek, Fabio Giomi et Ece Zerman ont contribué à montrer comment les sciences sociales de ces aires culturelles sont en train de connaître leur propre « tournant archivistique », et changent de façon significative leur façon de penser et questionner l’archive.

Le programme a été défini progressivement, en fonction des intérêts scientifiques des participant·e·s qui ont pris une part active dans l’organisation et l’animation des séances. Chaque séance a été consacrée à des activités variées : atelier de lecture, présentation des travaux en cours, intervention de collègues extérieurs, etc. Une séance (1er avril) a été consacrée à la présentation des recherches en cours des participant·es au séminaire. À cette occasion, Matthieu Gosse, Clémence de Rouvray, Dimitra Douskos, Laetitia Albert et Mehmet Akgün ont présenté l’état d’avancement de leurs recherches, en insistant sur les dimensions spatiales.

Publications
  • Avec Xavier Bougarel, Muslimani jugoistočne Evrope. Od imperija do balkanskih država, Novi Sad, Akademska Knjiga, 2020.
  • « Sufism, Urbanisation, and Sociability in Cities », dans Sufi Institutions, sous la dir. d’Alexandre Papas, Leiden-Boston, Brill, 2020, p. 227-238.
  • Avec Hannes Grandits, Xavier Bougarel et Fabio Giomi, « Patriarchal and Heroic Re- and Deconstructions. A Tribute to and Critical Reflections on Four Books of Karl Kaser », dans From the Highlands to Hollywood Multidisciplinary Perspectives on Southeastern Europe. Festschrift for Karl Kaser and SEEHA, sous la dir. de Siegfried Gruber, Dominik Gutmeyr, Sabine Jesner, Elife Krasniqi, Robert Pichler et Christian Promitzer, Wien-Zürich, Lit Verlag, 2020, p. 65-85.
  • « Introduction to the Special Issue : Powershifts, Practices and Memories of Violence in the Balkans », Journal of Balkan and Black Sea Studies, 2021, p. 13-18 <https://dergipark.org.tr/tr/pub/balkar/issue/63259/863898>
  • « Ottomans, Grecs et autres dans le Kamus al-alam de Şemseddin Sami (1891) », dans Les Ottomans par eux-mêmes, sous la dir. de Elisabetta Borromeo et Nicolas Vatin, Paris, Les Belles Lettres, 2020, p. 109-115 et « Albanais, Ottomans... et Grecs : la question de l’alphabet au lendemain de la révolution jeune-turque », ibid., p. 117-123.
  • « Kosovo », The Encyclopaedia of Islam, Third Edition, Part 2021-4, 2020, p. 88-92.

Dernière modification : 1 juin 2021 09:21

Type d'UE
Séminaires DE/MC
Disciplines
Anthropologie historique, Anthropologie sociale, ethnographie et ethnologie, Géographie, Histoire
Page web
-
Langues
anglais français
Mots-clés
Analyse de discours Anthropologie historique Anthropologie sociale Anthropologie urbaine Circulations Empire Espace Espace social Fait religieux Genre Histoire Migration(s) Mobilisation(s) Mouvements sociaux Réseaux sociaux Transnational Urbaines (études) Ville
Aires culturelles
Europe Europe centrale et orientale Europe sud-orientale Méditerranéens (mondes) Musulmans (mondes) Transnational/transfrontières Turc (domaine)
Intervenant·e·s
  • Nathalie Clayer [référent·e]   directrice d'études, EHESS - directrice de recherche, CNRS / Centre d'études turques, ottomanes, balkaniques et centrasiatiques (CETOBaC)
  • Fabio Giomi   chargé de recherche, CNRS / Centre d'études turques, ottomanes, balkaniques et centrasiatiques (CETOBaC)

Dans le prolongement de l'année précédente, le séminaire aura pour but de présenter et de discuter des recherches en cours sur le Sud-Est européen (Turquie comprise) entre le XIXe et le XXIe siècle, c’est-à-dire de l’époque tardo-impériale au post-communisme. Dans une approche pluridisciplinaire, il s’agira d’aborder des objets variés (mouvements sociaux, fait religieux, développements économiques, relations de genre, etc.) en insistant sur leurs dimensions spatiales. On se concentrera donc sur l’imbrication des lieux et des rapports sociaux qui leur sont associés, c’est-à-dire sur les modalités à travers lesquelles les interactions sociales sont spatialisées. Le programme sera défini en fonction des intérêts scientifiques des participant·e·s qui prendront une part active dans l’organisation et l’animation des séances. Celles-ci pourront avoir différents formats : atelier de lecture, présentation des travaux en cours, intervention de collègues extérieurs, etc.

5 novembre 2020 : Penser les transformations économiques à travers les modèles et les pratiques d'entreprise. Salonique, Tuzla, Sarajevo

La séance propose des pistes pour une étude historique et anthropologique des transformations de la vie économique dans l’Europe du Sud-Est. Deux espaces, la Macédoine et la Bosnie, sont observés dans la diachronie, des dernières décennies du pouvoir ottoman à l'époque postsocialiste. Au-delà du décalage temporel manifeste, nos présentations dialoguent autour de la catégorie unifiante de « capitalisme », examinant comment celle-ci peut nous fournir des outils d’analyse pour aborder les interactions entre l’entreprise, industrielle et commerciale, et les contextes sociaux avec lesquels elle interagit.

La séance sera structurée en trois parties :

  • Andrea Umberto Gritti (CETOBaC, EHESS) : Marchands et industriels dans la Salonique ottomane : enjeux de méthode

Les thèses de Marx sur le commencement du processus de valorisation du capital se déroulant au sein de l’industrie moderne peuvent avoir été l’objet de plusieurs critiques par la pensée économique successive, qui a notamment mis en question leur emphase sur le moment de la production des marchandises. Celles-là ne sont pourtant déprivées de toute valeur heuristique, comme peut-il le démontrer l’examen d’un cas d’analyse – l’Europe ottomane au XIXe siècle – que les études d’histoire économique ont longtemps abordé en s’appuyant sur de récits diplomatiques impressionnistes et de données statistiques agrégées, souvent fort lacunaires. Mon intervention se propose, au contraire, de regarder la division sociale du travail se produire dans une région de l’Europe du Sud-Est à travers le prisme des activités manufacturières mises en place à Salonique par des négociants juifs d’origine livournaise. L’enracinement de ces affaires dans la sphère de la circulation est côtoyé par deux versants de ma présentation, qui examine en quelle mesure l’expansion du commerce méditerranéen favorise, en outre de l’accumulation d’un capital marchand dans les échelles du Levant, l’évolution des régimes foncières de l’arrière-pays ottoman et, par conséquent, les disponibilités en main-d’œuvre. L’approfondissement de plusieurs aspects de la production et la distribution des marchandises industrielles et des relations de travail instaurées au niveau des usines peut, de cette façon, élargir notre compréhension des transferts technologiques, des tendances démographiques et des dynamiques financières réagrégeant la société de l’Empire ottoman tardif.

  • Milana Čergić (Max-Planck-Institut für ethnologische Forschung, Halle): Continuations et disruptions en Bosnie-Herzégovine : penser les transformations économiques à travers une chaîne de supermarchés à Tuzla

Le développement économique dans le capitalisme demande une «destruction créative», écrivait l’économiste Joseph Schumpeter au début du XXème siècle. Les entrepreneurs sont, d'après lui, les porteurs principaux de ce développement, des individus qui avec leur sens de l'initiative créent de nouvelles « combinaisons ». Comment penser ce concept dans les transformations économiques postsocialistes ? Cette présentation propose une réflexion à travers une chaîne de supermarchés à Tuzla, créée en 1993. Nous discuterons ainsi l'introduction d’un nouveau capitalisme qui se sert des pratiques yougoslaves et qui a pu s’établir sous cette forme grâce aux connections d'un personnage local. Je propose d’interroger les interconnections entre capital, culte de la personne d’un entrepreneur et État en Bosnie-Herzégovine des années 1990 jusqu’à aujourd’hui.

  • Mehdi Belasri (CETOBaC, EHESS), Privatiser un centre-commercial en Bosnie-Herzégovine: de Sarajka à BBI

Sonia Hirt argumentant dans son texte que la ville post-socialiste est avant tout une ville post-publique et donc gérée par le privé, la question de la place des acteurs du privé dans la fabrique d’une ville comme Sarajevo se pose. Bien que peu mentionnée explicitement dans les travaux portant sur la ville post-socialiste, l’entreprise privée se retrouve au cœur de celle-ci. Comment la prendre en compte ? Comment l’entreprise en tant qu’acteur social transforme le territoire ? Par quels biais l’entreprise se révèle être un acteur de la fabrique de la ville à Sarajevo? Je compte apporter dans ma présentation des pistes de réflexion sur ces trois questions en étudiant la privatisation de l’emprise foncière d’un ancien centre-commercial datant de la période socialiste, Sarajka, détruit pendant le siège de la ville et racheté par une banque islamique au début des années 2000.

Afin de mieux contribuer à la discussion, les participant·e·s sont invité·e·s, s'ils/elles le souhaitent, à lire les textes suivants disponibles ici

  • Maurice Dobb, Studies in the development of capitalism, Routledge, London, 1946 [1930], Chapter 5, Capital accumulation and mercantilism, par. I, p. 177-186 ; Chapter 7, The Industrial Revolution and the Nineteenth Century, par. II, p. 281-300.

  • Joseph A. Schumpeter, Capitalism, socialism and democracy, Routledge, London and New York, 2000, Chapter 7, The process of creative disruption, p. 80-86. 

  • Sonja A. Hirt,  Iron curtains: gates, suburbs and privatization of space in the post-socialist city, Wiley-Blackwell, Oxford, 2012, p. 43-48.

3 décembre : Écrire l’itinérance 

Littérature de l’exil, littérature de voyage, les textes étudiés au cours de la séance racontent la fréquentation « d’espaces autres » (Michel Foucault, Architecture, Mouvement, Continuité, n°5, octobre 1984, pp. 46-49). Investissant des lieux supposément nouveaux et étrangers au regard de leurs origines nationales/régionales, les auteur·ices rencontré·e·s utilisent le medium de l’écriture pour reconfigurer les représentations des espaces présents et ou passés voire pour créer un « tiers-espace », – pour reprendre le concept de Homi Bhabha – concret ou métaphorique, qui bouleverse les hiérarchies politiques, les catégories traditionnelles ainsi que les pratiques spatiales du genre, de la langue ou encore de la religion. Traducteur·ices pour l’institution dominante qui publie leurs œuvres tout autant que pour leur auditoire, ces transfuges parviennent à conjuguer les grilles d’analyse pour faire le récit de vies sociales denses et minées de contradictions, où les appartenances territoriales et les identités nationales et sociales sont sans cesse interrogées et recréées.

  • Lola Sinoimeri (LEGS, Paris 8) : Pigeon, vole de Melinda Nadj Abonji : repenser l’espace et les identités européennes grâce au récit d’exil

À travers le roman d’inspiration autobiographique Pigeon vole (Tauben fliegen auf) de l’écrivaine contemporaine Melinda Nadj Abonji, autrice germanophone suisse d’origine hongroise (de Voïvodine), nous réfléchirons à la manière dont la mise en récit de l’expérience migratoire permet de faire se confronter voire de faire s’entremêler deux espaces européens (la Voïvodine et la Suisse) pour créer littérairement ce que l’on peut appeler un « tiers-espace » dans la lignée des théories postcoloniales de Homi Bhabha. Or, la confrontation et l’entremêlement des espaces va de pair avec la représentation de multiples voix et discours sur ces espaces qui dévoile alors les mécanismes de productions des discours dominants, que ce soit les discours d’ordre balkaniste en Suisse ou les discours nationalistes en ex-Yougoslavie.

  • Isabelle Linais (SciencesPo Paris) Raconter le hadj en Asie centrale soviétique : Fazliddin Muhammadiev (1965) et Kamil Ikramov (1989)

Au début du XXe siècle, les musulmans d’Asie centrale furent de plus en plus nombreux à pouvoir se rendre à La Mecque. La visite à la Maison d’Allah s’inscrivait alors dans un itinéraire plus large qui faisait du pèlerinage (hadj) une entreprise spirituelle, diplomatique et commerciale. Il a fallu attendre 1944 pour que moyennant sanction étatique, une dizaine de pèlerins soviétiques puissent se rendre à nouveau à La Mecque, après près de vingt ans d'interdiction. Tandis que les protagonistes de ce phénomène très restreint et contrôlé ont souvent été considérés comme des diplomates religieux aux ordres de Moscou, quelques manifestations littéraires de la Kaaba dans l’espace soviétique éclairent autrement l’attachement à cette destination. Évoluant de manière différente au sein des institutions de la littérature soviétique, le tadjik Fazliddin Muhammadiev et l’ouzbek Kamil Ikramov appartiennent tous deux à une génération née à la fin des années 1920. 

Dans Dar dunë pour le premier (1965), et Delo moego otca pour le second (1989), le hadj a fonction de lieu commun. Il autorise une critique de la société en renouant avec le genre classique du hajjnāma (récit de pèlerinage), et construit discrètement la mémoire de ceux qui ont disparu dans les années 1930, morts ou exilés. Écrite en russe pour la seconde, et traduite presque aussitôt en russe pour la première, les deux œuvres ont fait l’objet de lectures parfois divergentes, selon les contextes politiques et sociaux des années 1960 à 1990. Ce lieu commun est effet celui d’une littérature soviétique où à partir des années 1960, s’expriment des visions multiples de la citoyenneté, entre droit à la mémoire de trajectoires familiales brisées, exaltation des folklores nationaux, et acceptation d’une altérité religieuse formulée selon les termes de la critique.

  • Nathalie Clayer (EHESS-CNRS, CETOBaC) :  De la nature à l'exil, les voies de l'émancipation féminine dans l'autobiographie de Nexhmie Zaimi (1937)

En partant d’un prisme genre-corps-espace-agentivité qui renvoie à des outils proposés pour l’analyse des textes autobiographiques par Sidonie Smith et Julia Watson (Reading Autobiography. A Guide for Interpreting Life Narratives, 2010), et en m’appuyant plus particulièrement sur Guy Di Méo qui considère que le corps est un « espace générateur de l’espace social », qu’il est un organisme vivant, objet et sujet d’une écologie humaine, qu’il est aussi un médium des interactions dans l’espace social et qu’il est un lieu d’expression de la distinction sociale et d’incorporation du social, j’analyserai l’autobiographie d’une jeune femme albanaise exilée aux USA. Le régime de genre qu’elle associe à son pays d’origine est ainsi celui d’un contrôle du corps (voile, vêtements, regards, gestes, rire) et d’une ségrégation maintenant la femme dans un rôle et un espace domestiques, les limites étant données par l’enfance, le rêve et les moments de bouleversement de l’espace domestique. La nature apparaît alors comme l’espace non-touché par ce régime de genre. Le texte autobiographie a par ailleurs pour objet les transformations de ce régime, transformations que les acteurs associent eux-mêmes à la « modernisation », et qui, pour une jeune fille comme elle, relèvent de trois domaines principaux : l’éducation, la liberté de déplacement et la liberté corporelle. Le récit dévoile néanmoins les tensions qui en résultent et les transgressions que l’autrice est amenée, selon elle, à commettre elle-même. Ces transgressions sont symbolisées par deux types de mouvement dans l’espace : vertical (grimper dans un murier) et horizontal (s’exiler).

Afin de mieux contribuer à la discussion, les participant.e.s sont invité.e.s, s'ils/elles le souhaitent, à lire les textes suivants disponibles ici :

  • Guy Di Méo, « subjectivité, socialité, spatialité : le corps, cet impensé de la géographie », Annales de géographie,675, 5, 2010, p. 466-491.
  • Paolo Sartori, « Of Saints, Shrines, and tractors : Untangling the Meaning of Islam in Soviet Central Asia », Journal of Islamic Studies, 2019, p. 1-40.
  • Philipp Schröder & Manja Stephan-Emmrich, « The Institutionalization of Mobility: Well-being and Social Hierarchies in Central Asian Translocal Livelihoods », Mobilities, 2014, p. 1-24.

4 février 2021 : Histoires d'archives. France, Turquie, Yougoslavie

Depuis au moins le dernier quart du XXe siècle, les sciences sociales - l'archivistique, l'anthropologie et l'histoire notamment - ont profondément modifié la façon d’appréhender l’archive. Grâce à ce tournant intellectuel l'archive a cessé d'être considérée comme un simple réservoir de sources primaires, pour devenir une source en elle-même. Comme le disent Christine Jungen et Jihane Sfeir, les archives sont désormais à penser comme des « lieux matériels […] dans lesquels sont mises en branle des communautés d’humains, de pra­tiques et d’objets ; soit, en d’autres termes, des communautés sociales dans lesquelles circulent des choses aussi diverses que l’identité, le pouvoir, l’État, la mémoire, le patrimoine, mais aussi le vrai, l’histoire, le savoir, la technique… Des lieux, en somme, où sont assemblés et redéployés des réseaux et des positions, dans et sur le monde » (Archiver au Moyen Orient, IISMM et Karthala, Paris 2019, p. 6). Lors de cette séance, trois chercheur·euses travaillant sur des terrains différents - Turquie, France/Maghreb, Yougoslavie - nous parleront de leur propre archival turn, c’est-à-dire de leurs propre façon de penser et questionner l’archive.

La séance sera structurée autour de trois présentations individuelles :

  • Emmanuel Szurek (EHESS, CETOBaC) Comment les archives Basset sont arrivées à l’EHESS. Ethnographie historique d’un fonds d’archives familiales

Ma présentation portera sur un fonds d'archives orientalistes arrivé de Lorraine à l'EHESS entre 2014 et 2019 : les papiers de l'arabisant et berbérisant René Basset (1855-1924). Elle soulève d'abord des questions pratiques, en lien avec un travail de recherche collective mené actuellement à l'Ecole avec un groupe de collègues, d'étudiant·e·s et d'anciens étudiant·e·s, et qui doit déboucher sur la publication d'un ouvrage en 2022. Quel a été le sort des archives Basset avant leur arrivée à l'EHESS ? Quelles ont été les conditions de conservation du fonds ? Pourquoi les papiers Basset n’ont-t-ils jamais été exploités ? Quelles logiques générationnelles, sociales et patrimoniales ont finalement présidé à leur transmission à une institution universitaire, un siècle après la mort de leur créateur ? Plus fondamentalement, il s'agit d'interroger les relations croisées entre une famille et un fonds d'archives : comment une famille génère, gère ou néglige ses archives; comment la possession des archives configure et reconfigure le groupe familial. Répondre à ces questions suppose d’objectiver un groupe familial, ses dispositions sociales et psychologiques ; cela requiert également un retour réflexif sur mon enquête à Gérardmer (2007-2019) et sur mes propres coordonnées à la fois comme enquêteur et comme ami de la famille.

  • Ece Zerman (CETOBaC) Un regard réflexif sur les archives personnelles et familiales de la fin de l’Empire ottoman au début de la République de Turquie 

La réflexivité est sans doute une notion incontournable de la démarche anthropologique depuis plusieurs décennies. En histoire, en revanche, à l’exception de quelques études plus spécifiques consacrées à cet aspect, la relation réflexive de l’historien·ne avec les archives demeure moins questionnée ou explicitée. Ce que je souhaite faire dans cette intervention, c’est livrer, autant que possible, ma propre rencontre avec les archives dites familiales ou du « for privé » et expliciter le parcours de recherche qui m’a amenée à explorer ce type d’archives, à commencer par les archives de Said Bey (depuis 2009) et qui s’est poursuivi avec l’étude des carnets personnels. Je questionne également ce qu’est une archive personnelle et familiale en envisageant ce que les documents personnels et familiaux représentaient pour les contemporains de la fin du XIXet du début du XXesiècle et pour les descendants de familles qui en ont hérité. Si, dans la plupart des cas, l’historien·ne se trouve face à des archives qui se présentent comme un produit fini et dont les limites sont définies, la production des archives s’inscrit dans un processus plus long. Il s’agit, en ce sens, de revenir sur le processus de formation des archives et sur le rôle des différents acteurs qui y participent ainsi que de raconter leurs propres « histoires d’archives ». Les archives peuvent autant être définies par ce qu’elles excluent que ce qu’elles comportent ; on s’intéressera ainsi aux non-dits, effacés, cachés, voilés, exclus, rejetés des archives personnelles et familiales.

  • Fabio Giomi (CNRS, CETOBaC) : L’archive du fait associatif dans l’espace yougoslave

Dans mon intervention je me propose de présenter quelques réflexions autour de mon nouvel objet de recherche, l’archive associative, à partir de mon terrain habituel - celui yougoslave entre la mi-XIXe et la mi-XXe siècle.  Le terme « archive », ici, peut couvrir des lieux fort différents : un tiroir qui protège un ensemble de papiers dans la résidence d’un activiste ou de son descendant ; un fond associatif conservé dans une institution municipale ou étatique, une fondation privée dédiée à part entière aux activités d’un réseau d’associations. L’idée est de se pencher sur les fonds labellisés comme associatifs par les archivistes, et qui regorgent de statuts, rapports, échanges entre dirigeants et bénéficiaires, procès-verbaux de réunions et d’élections pour en interroger les spécificités. En suivant le travail d’Ann Stoler, l’archive sera à comprendre dans un sens très souple et inclusif : ces ensembles classés de sources seront à appréhender en dialogue constant avec les documents conservés dans les archives de l’Etat, des municipalités et des institutions religieuses, ainsi que les archives privées et familiales. En suivant les documents comme un fil que l'on tire, l’objectif est celui d’explorer les différentes « économies mixtes » – du welfare bien sûr, mais aussi de l’éducation, des loisirs, de la discipline etc. - dans lesquelles les associations sont partie prenante.

Afin de mieux contribuer à la discussion, les participant·e·s sont invité·e·s, s'ils/elles le souhaitent, à lire les textes suivants disponibles ici :

  • Arlette Farge, Le goût de l’archive, Éditions du Seuil, Paris 1989, p. 7-26.
  • Emmanuel Szurek, Comment les papiers Basset sont arrivés à l’EHESS. Ethnographie historique d’un fonds d’archives familiales (à ne pas faire circuler).
  • Antoinette Burton, Archive Stories. Facts, Fictions and the Writing of History, Duke University Press, Durham & London, 2005, p. 1-24.

4 mars 2021 : (Re)thinking Volunteerism in the Yugoslav Space. Ongoing Research, with Lucija Balikić (CEU), Isidora Grubački (CEU), Daša Ličen (University of Ljubljana) and Jovana Papović (EHESS, CETOBaC)

With a view that will range from the last third of the 19th century to the Second World War, this seminar aims to develop a conversation on the historical trajectory of the voluntary association in Southeastern Europe, with special reference to the Yugoslav space. Of particular interest to this seminar is the way in which voluntary associations become implicated in relationships to states and empires, and in the consolidation and politicization of collective identities.

  • Daša Ličen (University of Ljubljana): Habsburg Trieste's Slavjansko društvo as the First Slovene Association

Scholars have until recently been interpreting the Slavic Society (Slavjansko društvo) established in 1848 Trieste as one of the first Slovene nationalist organizations. I will, however, argue that this voluntary association has only in the eyes of the subsequent, late 19th and early 20th century national activists anachronistically been understood as Slovene. The Slavic Society can in a way indeed be understood as such because some of its members thought of themselves as primarily Slovene. Still, the archival sources reveal that, firstly, the notion of “Slovenness” kept changing throughout the second half of the 19th century and is hence not equal to its contemporary use and, secondly, that besides Slovene the Slavic Society wholly unproblematically accommodated also many other collective identifications; for instance, Panslavism, Illyrism, Yugoslavism, and other subsequently more or less successful national sentiments. Even more, the same members of the Slavic society could have simultaneously been adhering to multiple Slavic national movements.

  • Lucija Balikić (Central European University): Challenge From the Peripheries of Dualism: Southern Slav Sokols and the Daily Press in the Imperial Metropoles of Vienna and Budapest (1900-1914)

The presentation will provide an overview of the stances taken towards the Southern Slav Sokol associations in the daily press in Budapest and Vienna, roughly from the turn of century until the beginning of the First World War. Together with often racialized and antimodernist nationalist discourses framing the Sokol associations as a Slavic conspiracy, the sources reveal indicative differences in political thought between the two realms of the Dual Monarchy, and their deeply diverging understanding of societal democratization and the 'nationalities question'. Moreover, the particular differences between associational culture of Cisleithania and Transleithania will be described and outlined in the given context, through comparison of two distinct imperial periferies: Istria and Dalmatia on the one hand, and Croatia-Slavonia on the other.

  • Jovana Papovic (EHESS, CETOBaC): Physical culture - between discipline and outdoor freedom: the excursions of the Sokol youth in Interwar Yugoslavia

In this presentation I focus on the actions towards youth of the physical culture movement Sokol. A major associative actor of interwar Yugoslavia, the Sokol was a partner of the state, and it was largely involved in what we could call a "mixed economy of education", being one of the main instigators of the establishment of mandatory physical education in primary school curricula. I will particularly focus here on Sokol’s outdoor activities such as excursions and trips for underprivileged children. By drawing on monographs such as Moje Letovanje (My summer vacation) written by the head of the education section of the Sokols of Vojvodina, Velimir Popovic, but also drawing greatly on visual sources (photos and a movie) in order to find glances of a history from below, I aim to expose the paradoxes and contradictions that lay at the heart of the Sokol enterprise. Namely, even though the aim of the movement was to render youth into a political tool in the service of the state, and although its pedagogues insisted that the disciplinary dimension of the educational program was meant to strengthen the body and the spirit, by studying its implementation we find the persistence of varied forms of creative interpretation of physical culture on the part of the Sokol members, as well as new types of sociability that went beyond the official goals of the movement.

  • Isidora Grubački (Central European University Budapest): Conceptualization of feminism and the humanitarian/feminist dichotomy in the context of the interwar Yugoslav women’s movement 

This presentation focuses on the work of two women’s alliances in the 1920s Yugoslavia, the National Women’s Alliance and the Feminist Alliance. While the first was established in 1919 and consisted mainly, but not exclusively, of voluntary women’s associations, the second was established in 1923 and it aimed to – among other things - distance itself from the program of the voluntary associations. The presentation explores the discussions around their forming and restructurings, and asks how the concept of feminism was used, what it meant, and with which concepts it was closely linked in the Yugoslav public space in the 1920s. It suggests that in this context a dichotomy between humanitarian/voluntary women’s associations was conceptualized by the members of the feminist movement. More broadly, the presentation will raise the issues of the (dis)continuities of women’s organizing in the Yugoslav lands before and after World War I, the divergences within the broad Yugoslav women’s movement, and the usefulness of a conceptual approach to the history of feminism.

Jeudi 1er avril :

  • 15 h à 17 h : Espace et rapports interconfessionnelles (présentations de Matthieu Gosse et Clémence de Rouvray)
  • 17 h à 18 h : Exposés d'étudiants (Laetitia Albert et Mehmet Akgün)
  • 18 h à 19 h : L’émergence de la préhistoire égéenne au 19e siècle: questions, sources et traitement (présentation de Dimitra Douskos)

Résumés :

Matthieu Gosse (Université Paris Gustave Eiffel), "(Re)lire les massacres « hamidiens » au prisme spatial : Distorsions narratives autour des massacres d’Harput/Mamouret-ul Aziz et Diarbékir (1895)"

Les massacres « hamidiens » (1894-1896) dont les Arméniens ottomans ont été victimes ont suscité une forte émotion en Europe, singulièrement en France. De nombreuses publications (rapports consulaires, presse, pamphlets) ont longuement relaté et dénoncé la commission de ces massacres perçus, à l’époque, comme une manifestation de « fanatisme » musulman mis en mouvement par le sommet du pouvoir impérial ottoman : le « Sultan rouge » Abdülhamid II. Longtemps restés dans l’ombre de l’historiographie du Génocide de 1915, les massacres de 1894-1896 ont été l’objet de travaux récents qui ont remis en cause un certain nombre d’« idées fixes » procédant d’une grammaire narrative qui se cristallise dans les publications qui ont suivi les massacres. Ces travaux mettent au jour et examinent les discordances et distorsions des récits produits par les différents témoins et acteurs de ces violences de masse. Ces études de cas « micro » accordent une attention particulière à la dimension spatiale de ces massacres : réseaux de communications, circulation des informations, relations villes-campagnes, représentations de l’espace et des différents groupes sociaux qui l’habitent. Il s’agit donc de poursuivre et d’appliquer ces questionnements à un certain nombre de sources relatant les violences qui ont affecté les villes de Diarbékir et Harput/Mamouret-ul Aziz à l’automne 1895.

Clémence de Rouvray "Tenter de comprendre une dynamique intra-confessionnelle pour mieux appréhender les relations orthodoxes- romano et gréco-catholiques à Bucarest : la nomination de l’archevêque latin Raymond Netzhammer"

En Roumanie, les relations entre les trois confessions chrétiennes que sont les orthodoxes, les romano-catholiques (ou catholiques latins) et les gréco-catholiques ont toujours été complexes et délicates. Les premiers sont en effet considérés comme « des schismatiques», - les orthodoxes vus par les romano-catholiques - ; ces derniers appartiennent à « l’Église des étrangers », - les romano-catholiques vus par les orthodoxes- ; et enfin les troisièmes représentent « les tsiganes du catholicisme » - les gréco-catholiques vus par les romano-catholiques.  Cependant essayer d’appréhender la complexité de ces relations interconfessionnelles dans l’espace plus restreint qu’est Bucarest, c’est d’abord être obligé d’analyser les dynamiques intra-confessionnelles, en l’occurrence celles du catholicisme latin, et plus précisément celles à l’œuvre lors de la nomination de l’archevêque latin de Bucarest. Á cet égard, le choix du bénédictin de langue allemande Raymond Netzhammer offre un point d’observation privilégié. En effet de sa nomination en 1905 à sa démission forcée en 1924, en passant par les vicissitudes qu’il rencontre pendant la Première Guerre mondiale, l’espace restreint que représente l’archevêché latin s’avère en réalité être le terrain où ne cessent de s’entremêler différentes frontières (nationales et internationales, linguistiques et religieuses) à la croisée desquelles se trouve un homme en particulier, Vladimir J. Ghika. Comment cet homme, lui-même synthèse de cet espace religieux complexe (orthodoxe devenu catholique, à la fois de rites latin et oriental), seconde-t-il en partie le choix de la hiérarchie catholique latine, mais sert aussi les intérêts diplomatiques de la France et peut-être également les siens propres ?

Dimitra Douskos (CETOBaC), L’émergence de la préhistoire égéenne au 19e siècle : questions, sources et traitement

Mon travail porte sur l’histoire de la découverte de la préhistoire égéenne en Grèce au 19e siècle, une histoire compliquée par le fait qu’en Grèce les archéologues pensent qu’on ne peut découvrir qu’une seule chose, l’antiquité classique. Le point de départ de mon exploration est la question de comprendre pourquoi différentes campagnes de fouilles qui ont lieu dans le golfe de Santorin au fil du 19e siècle (1796, 1826-30, 1866-70, 1899) n’aboutissent pas à une reconnaissance scientifique, une question qui m’a rapidement obligée de m’intéresser à ce que les sites et les objets trouvés sont devenus - puisqu’ils n’ont pas connu le destin des autres découvertes archéologiques. Ceci m’a également obligée de me demander ce qu’on pouvait bien mettre sous le terme “préhistorique” à l’époque puisqu’on n’y mettait pas ce qu’on trouvait dans les sites archéologiques correspondants. Après la présentation de l’histoire de ces fouilles et du destin du terme “préhistorique” dans la région, je voudrais enfin discuter les diverses hypothèses d’appartenance ethnique qui ont été émises à l’époque pour comprendre qui pouvaient bien être les habitants de ces temps très reculés dont on retrouvait la trace. Ce qui semble pouvoir se résumer à la fin du 19e à un débat sur la préséance des Sémites ou des Aryens en vient à suivre au 20e, une trajectoire qui n’est pas celle que ces prémisses laissent imaginer. Combiné à l’apparition des chercheurs anglophones dans un débat qui avait jusqu’alors surtout eu lieu entre spécialistes français et allemands, le nationalisme grec prend à bien de moments le dessus pour ramener la centralité winckelmanienne de l’hellénisme et étouffer d’autres interprétations. Plus encore, j’aimerais surtout qu’on s’interroge sur la possibilité de remettre en question le modèle culturel dit diffusionniste qui a été déterminant et reste extrêmement prégnant à la fois en archéologie et en anthropologie historique, pour penser autrement la question de l'appartenance culturelle des premiers peuplements du monde égéen au néolithique et à l’âge du bronze.

jeudi 6 mai: les enjeux environnementaux dans les Balkans

La dernière séance de cette année sera structurée en deux parties:

- 15h à 17h : Exposés d'étudiants

Marijan Micakovic (EHESS): Climat global, environnement local : enjeux du "milieu de vie" en Serbie contemporaine

Signataire du protocole de Kyoto depuis 2007, candidate à l'adhésion à l'union européenne depuis 2011, la Serbie s'est engagée ces dernières années dans différents processus qui visent notamment à réduire les impacts négatifs des activités humaines sur l'environnement. Malgré les différents rapports et ébauches de plans nationaux qui sont présentés, la population se plaint de l'inaction des dirigeants et de l'inefficacité générale des mesures qui sont prises. Alors que les évènements climatiques extrêmes se font de plus en plus fréquents (inondations, vagues de chaleur, sécheresses) le militantisme écologique se développe et les manifestations et initiatives citoyennes de dépollution se multiplient. En vue d'une prochaine enquête de terrain dans le Sud du pays, nous passerons en revue les problématiques environnementales que connaît la Serbie contemporaine ainsi que la manière dont ils sont traités. Une attention particulière sera portée sur les différentes échelles d'action et de problématisation, de l'international au régional et des mesures étatiques au militantisme citoyen, afin de se faire une première idée de la situation sur place et des acteurs en jeu.

Balthazar Bragança (EHESS):  Genèse d'une catastrophe environnementale. Le cas du lac de Geamana en Roumanie

En examinant la littérature de certaines disciplines de sciences naturelles, de la spéléologie à l'hydrogéologie en passant par la biologie évolutive, de nombreuses études soulignent l'imprévisibilité des effets de l'activité humaine sur les milieux sur le long terme. Certes, le grand récit de l'Anthropocène ne cesse de prétendre que l'humain est devenu une force géologique de la Terre ; et de fait, la composition de tout une strate géologique portera les traces indélébiles des activités humaines pour quelques millénaires, si ce n'est davantage. Mais l'humain n'est de loin pas la seule force géologique, et toute force ne vient d'ailleurs jamais seule. À cet égard, toute une littérature scientifique se développe autour de l'idée que "la nature pourrait sélectionner des “relations“ bien plus que des individus ou des génomes" (Epel et Gilbert, 2008), et c'est pour mieux comprendre la nature de ces relations que je m'intéresse à l'environnement catastrophé de la vallée de Geamana dans le nord-ouest de la Roumanie. Après une brève présentation de la genèse d'une cette catastrophe environnementale, je m'efforcerai de préciser ma problématique de recherche, et d'explorer avec vous certains des enjeux sur divers échelles, ainsi que leur inter-dépendance. J'espère enfin vous faire part des défis méthodologiques qu'une telle recherche supposera une fois sur le terrain.

- 17h à 19h : Présentation par François Lerin (AIDA - Association Internationale pour le Développement de l'AgroEnvironnement) et Claire Bernard (Cirad, UMR Innovation) d'un numéro thématique de la revue Balkanologie en cours de préparation, portant sur « les enjeux environnementaux dans les Balkans » (cf. l’appel à communication : Balkanologie. Revue d’études interdisciplinaires | AFEBalk (hypotheses.org)

 

  • Séminaires de recherche – Études politiques – M1/S1-S2-M2/S3-S4
    Suivi et validation – annuel mensuelle = 6 ECTS
    MCC – exposé oral, contrôle continu
  • Séminaires de recherche – Études sur le genre-Histoire – M1/S1-S2-M2/S3-S4
    Suivi et validation – annuel mensuelle = 6 ECTS
    MCC – exposé oral, fiche de lecture
  • Séminaires de recherche – Études sur le genre-Sociologie – M1/S1-S2-M2/S3-S4
    Suivi et validation – annuel mensuelle = 6 ECTS
    MCC – exposé oral, fiche de lecture
  • Séminaires de recherche – Histoire-Histoire du monde/histoire des mondes – M1/S1-S2-M2/S3-S4
    Suivi et validation – annuel mensuelle = 6 ECTS
    MCC – fiche de lecture, exposé oral
  • Séminaires de recherche – Histoire-Histoire et sciences sociales – M1/S1-S2-M2/S3-S4
    Suivi et validation – annuel mensuelle = 6 ECTS
    MCC – fiche de lecture, exposé oral
  • Séminaires de recherche – Territoires, espaces, sociétés – M1/S1-S2-M2/S3-S4
    Suivi et validation – annuel mensuelle = 6 ECTS
    MCC – exposé oral, fiche de lecture
Contacts additionnels
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Informations pratiques
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Direction de travaux des étudiants
-
Réception des candidats
-
Pré-requis
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  • 105 bd Raspail
    105 bd Raspail 75006 Paris
    Salle 10
    annuel / mensuel (1re), jeudi 15:00-19:00
    du 5 novembre 2020 au 6 mai 2021

Organisé en six séances de quatre heures chacune, le cycle de séminaire de cette année a eu pour but de présenter et de discuter des recherches en cours sur le Sud-Est européen (Turquie comprise) entre le XIXeet le XXIe siècle. L’approche a été éminemment pluridisciplinaire : lors des séances, intervenant·es de différentes disciplines (histoire, sociologie, anthropologie, sciences politiques, géographie etc.) et champs (études sur le genre, études des nationalismes et du fait religieux, jeunesse etc.) ont abordé des objets variés (mouvements sociaux, archives, réseaux économiques, environnement, corps etc.) en insistant sur leurs dimensions spatiales.

Ainsi le séminaire a donné l’occasion de présenter au public de l’EHESS des recherches collectives en cours, en France ou à l’étranger, sur les sociétés balkaniques contemporaines. La séance intitulée Les enjeux environnementaux dans les Balkans (6 mai 2021), par exemple, nous a permis de discuter l’avancement d’un numéro de la revue Balkanologie. Revue d’études pluridisciplinaires coordonné par François Lerin et Claire Bernard et consacré justement aux enjeux environnementaux, à paraître décembre 2021. Afin de favoriser le dialogue entre chercheur·euses établi·e·s et étudiant·es en début de parcours de formation, nous avons associé à la séance Marijan Micakovic et Balthazar Bragança, qui développent leur recherche de M2 sur les mêmes questions dans différentes formations de l’EHESS. La séance a bien montré à quel point les thématiques (ainsi que les préoccupations) environnementales se sont désormais installées de façon permanente dans le domaine des études sur les Balkans, y compris dans l’espace francophone. La séance (Re)thinking Volunteerism in the Yugoslav Space. Ongoing Research (4 mars 2021), dans la même logique, a permis de se familiariser avec les recherches en cours de quatre chercheuses européennes – Jovana Papovic, Dasa Licen, Lucija Balikic, Isidora Grubacki – travaillant sur le fait associatif en Europe du Sud-Est, dans le cadre du projet européen COST Who Cares in Europe ? La séance a montré de façon convaincante combien l’espace yougoslave représente un cas d’étude heuristiquement productif pour repenser la trajectoire des sociétés civiles européennes. Mais le cycle de séminaires de cette année ne s’est pas limité à donner de la visibilité au travail collectif en cours - il a aussi contribué à le favoriser. C’est le cas, en particulier, des réflexions menées dans la séance Penser les transformations économiques à travers les modèles et les pratiques d’entreprise. Salonique, Tuzla, Sarajevo (5 novembre 2020), animée par Mehdi Belasri, Milana Cergic et Andrea Umberto Gritti, qui ont constitué la base pour la préparation d’un numéro de la revue Balkanologie sur les entrepreneurs comme objets des sciences sociales.

Une préoccupation transversale aux différentes séances a été celle de faire émerger de nouvelles thématiques afin d’enrichir davantage le champ des études balkaniques. La séance intitulée Écrire l’itinérance, a porté sur l’analyse de sources variées en littérature de l’exil (3 décembre 2020) et a réuni trois chercheuses – Nathalie Clayer, Lola Sinomeri, Isabelle Linais – travaillant sur des sources autobiographiques, montrant l’importance de ce genre de sources pour étudier la reconfiguration des représentations spatiales, le bouleversement des hiérarchies politiques et des catégories traditionnelles, notamment dans le domaine des relations de genre. La séance Histoires d’archives. France, Turquie, Yougoslavie (4 février 2021) a mis en dialogue trois recherches en cours de chercheur·euses du CETOBaC aillant le même objet en commun : l’archive. Portant sur la France, la (ex-)Yougoslavie et la Turquie respectivement, les interventions d’Emmanuel Szurek, Fabio Giomi et Ece Zerman ont contribué à montrer comment les sciences sociales de ces aires culturelles sont en train de connaître leur propre « tournant archivistique », et changent de façon significative leur façon de penser et questionner l’archive.

Le programme a été défini progressivement, en fonction des intérêts scientifiques des participant·e·s qui ont pris une part active dans l’organisation et l’animation des séances. Chaque séance a été consacrée à des activités variées : atelier de lecture, présentation des travaux en cours, intervention de collègues extérieurs, etc. Une séance (1er avril) a été consacrée à la présentation des recherches en cours des participant·es au séminaire. À cette occasion, Matthieu Gosse, Clémence de Rouvray, Dimitra Douskos, Laetitia Albert et Mehmet Akgün ont présenté l’état d’avancement de leurs recherches, en insistant sur les dimensions spatiales.

Publications
  • Avec Xavier Bougarel, Muslimani jugoistočne Evrope. Od imperija do balkanskih država, Novi Sad, Akademska Knjiga, 2020.
  • « Sufism, Urbanisation, and Sociability in Cities », dans Sufi Institutions, sous la dir. d’Alexandre Papas, Leiden-Boston, Brill, 2020, p. 227-238.
  • Avec Hannes Grandits, Xavier Bougarel et Fabio Giomi, « Patriarchal and Heroic Re- and Deconstructions. A Tribute to and Critical Reflections on Four Books of Karl Kaser », dans From the Highlands to Hollywood Multidisciplinary Perspectives on Southeastern Europe. Festschrift for Karl Kaser and SEEHA, sous la dir. de Siegfried Gruber, Dominik Gutmeyr, Sabine Jesner, Elife Krasniqi, Robert Pichler et Christian Promitzer, Wien-Zürich, Lit Verlag, 2020, p. 65-85.
  • « Introduction to the Special Issue : Powershifts, Practices and Memories of Violence in the Balkans », Journal of Balkan and Black Sea Studies, 2021, p. 13-18 <https://dergipark.org.tr/tr/pub/balkar/issue/63259/863898>
  • « Ottomans, Grecs et autres dans le Kamus al-alam de Şemseddin Sami (1891) », dans Les Ottomans par eux-mêmes, sous la dir. de Elisabetta Borromeo et Nicolas Vatin, Paris, Les Belles Lettres, 2020, p. 109-115 et « Albanais, Ottomans... et Grecs : la question de l’alphabet au lendemain de la révolution jeune-turque », ibid., p. 117-123.
  • « Kosovo », The Encyclopaedia of Islam, Third Edition, Part 2021-4, 2020, p. 88-92.