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UE278 - Anthropologie et linguistique : convergences et recherches actuelles


Lieu et planning


  • 105 bd Raspail
    105 bd Raspail 75006 Paris
    Salle 1
    annuel / bimensuel (1re/3e), mercredi 13:00-15:00
    du 4 novembre 2020 au 19 mai 2021


Description


Dernière modification : 24 mai 2020 14:11

Type d'UE
Séminaires DE/MC
Disciplines
Anthropologie sociale, ethnographie et ethnologie, Linguistique, sémantique
Page web
http://tessitures.org/ 
Langues
français
Mots-clés
Anthropologie Anthropologie et linguistique Linguistique Littérature orale Pragmatique Sociologie Théâtre
Aires culturelles
Amérique du Nord Europe Inde
Intervenant·e·s
  • Michel de Fornel [référent·e]   directeur d'études, EHESS / Laboratoire interdisciplinaire d'études sur les réflexivités. Fonds Yan-Thomas (LIER-FYT)
  • Francis Zimmermann   directeur d'études (retraité·e), EHESS / Laboratoire interdisciplinaire d'études sur les réflexivités. Fonds Yan-Thomas (LIER-FYT)
  • Maud Verdier   maîtresse de conférences, Université Paul-Valéry Montpellier 3

Linguistes et anthropologues, nous étudierons ensemble la langue et ses usages dans différents contextes ethnographiques et les interactions conversationnelles dans différents cadres de participation aux actes de parole. Nous suivrons l’actualité de la recherche sur des questions intéressant l'anthropologie, la linguistique et la sociolinguistique. Questions classiques comme : les arts de la parole et le théâtre,  l'ethnopoétique, oralité et performance, la narrativité, musique et langage. Ou plus récentes : la multimodalité, l'empathie et la syntonie.

Le programme détaillé n'est pas disponible.


Master


  • Séminaires de recherche – Arts, littératures et langages-Linguistique et écrit – M1/S1-S2-M2/S3-S4
    Suivi et validation – annuel bi-mensuelle = 6 ECTS
    MCC – fiche de lecture
  • Séminaires de recherche – Ethnologie et anthropologie sociale – M1/S1-S2-M2/S3-S4
    Suivi et validation – annuel bi-mensuelle = 6 ECTS
    MCC – fiche de lecture

Renseignements


Contacts additionnels
-
Informations pratiques

Michel de Fornel ou Francis Zimmermann, par courriel

Direction de travaux des étudiants

sur rendez-vous

Réception des candidats

sur rendez-vous

Pré-requis

ouvert à tous les étudiants


Compte rendu


La problématique d’ensemble des séminaires de cette année, croisant l’anthropologie, la sociolinguistique et la philosophie en alternant formes brèves (le récit d’une expérience personnelle) et grandes formes (une œuvre littéraire), faisait converger les recherches actuelles sur le récit et particulièrement les récits d’expérience personnelle, les répétitions au théâtre, en particulier dans « l’écriture de plateau », et leur équivalent dans la composition rhapsodique d’œuvres littéraires transgressant les frontières entre l’écrit et l’oral, la fiction et la réalité. Nos présentations se sont entrecroisées au fil du temps, mais nous les classons ci-après par intervenant pour la clarté du compte rendu.

Michel de Fornel a ouvert l’enquête en partant du débat classique entre William Labov (Labov and Waletsky, Narrative Analysis, 1967) et Emanuel Schegloff (« Narrative Analysis » Thirty Years Later, 1997) sur l’analyse du récit. Il a présenté ensuite une recherche en cours sur le retelling de récits de la Shoah, la réitération de récits devant des publics différents et à des époques différentes, par des rescapés des camps d’extermination nazis. L’étude de certaines modifications narratives entre les versions permet d’approfondir les relations entre performance et mode d’attestation d’une expérience traumatisante, entre positioning et construction d’une mémoire collective. Au second semestre, poursuivant la réflexion sur le récit d’expérience personnelle en s’intéressant à des formes textuelles (journal intime, chronique) qui semblent mettre à mal les critères habituels de la narrativité, Michel de Fornel a présenté une autre de ses enquêtes en cours sur Le carnet des jours de guerre d’Auguste Long, journal personnel d’un poilu de la Grande Guerre.

Francis Zimmermann s’est intéressé aux écrivains pratiquant l’écriture rhapsodique. Dans les arts du spectacle, nous avons étudié depuis quelques années dans ce séminaire les reprises successives par lesquelles on monte une représentation théâtrale au cours d’une série de répétitions. Chaque répétition est déjà à elle seule une version à part entière du spectacle. Le spectacle en préparation est le point de fuite de la série des répétitions. Il est immanent à chacune des répétitions, il est tout entier dans chacune des répétitions. L’écriture rhapsodique produit en littérature l’équivalent de ces performances continuées que nous avons repérées au théâtre. Un roman composé de façon rhapsodique prend la forme d’une installation au sens du mot dans les arts plastiques : un agencement d’objets et d’éléments indépendants les uns des autres mais constituant un tout. Notre premier exemple fut pris chez Olga Tokarczuk dans son roman Les Pérégrins [2007] (traduction française, 2010), un roman faussement décousu, fondé sur la répétition d’un pérégrin à l’autre d’expériences vécues, faussement hétéroclites et en réalité homothétiques les unes des autres. Mais nous avons surtout repris dans cette perspective l’étude déjà amorcée l’an dernier de l’œuvre de Walter Benjamin. La problématique de la répétition est au cœur du célèbre essai, La Tâche du traducteur, que Benjamin publia en préambule à sa traduction allemande des Tableaux parisiens de Baudelaire qui fut comme une première répétition dans la gestation du Livre des passages.

Maud Verdier a consacré plusieurs séances du séminaire à l’analyse détaillée de récits de soi que produisent les comédiens de la Compagnie théâtrale de La Bulle Bleue à Montpellier qu’elle observe depuis plusieurs années. Dans cet ESAT artistique, qui permet à des personnes en situation de handicap mental ou psychique d’accéder à une activité professionnelle, les comédiens sont amenés à mobiliser non seulement leurs ressources physiques et techniques en tant que comédiens, mais aussi ce qu’ils sont en tant que personnes. Beaucoup de metteurs en scène s’appuient sur le matériau biographique, dans l’idée que s’y attache le sceau d’une authenticité. Les récits d’expériences personnelles sont utilisés dans l’écriture de plateau. L’improvisation est centrale dans les productions de la Bulle Bleue, d’autant que certains comédiens en situation de handicap ne peuvent pas apprendre leur texte par cœur. Le travail d’improvisation part d’événements réels survenant sur le plateau et de récits de vie, qui sont accueillis comme des propositions de jeu. Si ces propositions de jeu sont retenues, elles seront progressivement fixées au cours des répétitions successives. L’écriture de plateau, en intégrant ces propositions de jeu au texte de la pièce, modifie la question de savoir qui est l’auteur. Dès que metteur en scène et comédiens inventent leur propre partition textuelle, l’instance auctoriale est bouleversée. Tous participent du statut d’auteur de la pièce. Maud Verdier a souligné la double dimension rhapsodique du texte de la pièce : au niveau de l’écriture de plateau (le metteur en scène est un rhapsode, il collectionne citations, témoignages d’acteurs, etc., tout un matériau hétérogène), et au niveau des récits, qui sont par nature décousus. Le travail scénique et l’improvisation construisent au fil des répétitions un assemblage complexe de récits d’expérience personnelle, de textes de théâtre, d’inscriptions sur le corps.

Nous avons eu le plaisir d’écouter pour conclure l’année, Émilie Arrago-Boruah qui s’est intéressée à ce qui restait de l’oral à l’écrit lorsqu’elle comparait les versions orales recueillies sur le terrain aux versions écrites d’un corpus de contes assamais. Parmi les conteurs qui ont couché leurs récits par écrit, disait Walter Benjamin, « les plus grands sont ceux dont le texte s’éloigne le moins de la parole des innombrables conteurs anonymes » (Le conteur, Œuvres III, folio, p. 116). Depuis quelques années dans le nord-est de l’Inde, en Assam, quelques feuillets circulent au sein d’une communauté de parole spécifique où Emile Arrago enregistre depuis 2005 de nombreux arts de la parole. Publiés en nombre limité d’exemplaires, deux de ces feuillets reproduisent un corpus de sept contes racontés à l’occasion d’un rituel féminin chaque année. Ces deux feuillets n’ont pas été écrits par la même personne, l’une d’elles est une conteuse vivant au sein de cette communauté de parole, l’autre un universitaire local. Quant à leur utilisation, ils servent à présent de texte de répétition ou de mémorisation avant leur performance qui s’oppose au texte figé par l’écriture. Dans la comparaison minutieuse des différentes versions écrites et orales, prenant en compte les différents contextes d’énonciation, Émilie Arrago reprenait dans une culture éloignée de la nôtre la problématique du retelling développée en début d’année par Michel de Fornel sur les récits de la Shoah.

 

Publications

Michel de Fornel

  • « De l’usage de la science-fiction en anthropologie », L’Homme, n° 237, 2021, p. 143-154.
  •  Avec A. Ortiz-Caria, « Expliquer une pathologie ‘‘invisible’’. L’emploi d’une métaphore pour représenter la maladie d’Alzheimer en consultation gériatrique », Espaces Linguistiques, 2., 2021, p. 1-27.

 

Dernière modification : 24 mai 2020 14:11

Type d'UE
Séminaires DE/MC
Disciplines
Anthropologie sociale, ethnographie et ethnologie, Linguistique, sémantique
Page web
http://tessitures.org/ 
Langues
français
Mots-clés
Anthropologie Anthropologie et linguistique Linguistique Littérature orale Pragmatique Sociologie Théâtre
Aires culturelles
Amérique du Nord Europe Inde
Intervenant·e·s
  • Michel de Fornel [référent·e]   directeur d'études, EHESS / Laboratoire interdisciplinaire d'études sur les réflexivités. Fonds Yan-Thomas (LIER-FYT)
  • Francis Zimmermann   directeur d'études (retraité·e), EHESS / Laboratoire interdisciplinaire d'études sur les réflexivités. Fonds Yan-Thomas (LIER-FYT)
  • Maud Verdier   maîtresse de conférences, Université Paul-Valéry Montpellier 3

Linguistes et anthropologues, nous étudierons ensemble la langue et ses usages dans différents contextes ethnographiques et les interactions conversationnelles dans différents cadres de participation aux actes de parole. Nous suivrons l’actualité de la recherche sur des questions intéressant l'anthropologie, la linguistique et la sociolinguistique. Questions classiques comme : les arts de la parole et le théâtre,  l'ethnopoétique, oralité et performance, la narrativité, musique et langage. Ou plus récentes : la multimodalité, l'empathie et la syntonie.

Le programme détaillé n'est pas disponible.

  • Séminaires de recherche – Arts, littératures et langages-Linguistique et écrit – M1/S1-S2-M2/S3-S4
    Suivi et validation – annuel bi-mensuelle = 6 ECTS
    MCC – fiche de lecture
  • Séminaires de recherche – Ethnologie et anthropologie sociale – M1/S1-S2-M2/S3-S4
    Suivi et validation – annuel bi-mensuelle = 6 ECTS
    MCC – fiche de lecture
Contacts additionnels
-
Informations pratiques

Michel de Fornel ou Francis Zimmermann, par courriel

Direction de travaux des étudiants

sur rendez-vous

Réception des candidats

sur rendez-vous

Pré-requis

ouvert à tous les étudiants

  • 105 bd Raspail
    105 bd Raspail 75006 Paris
    Salle 1
    annuel / bimensuel (1re/3e), mercredi 13:00-15:00
    du 4 novembre 2020 au 19 mai 2021

La problématique d’ensemble des séminaires de cette année, croisant l’anthropologie, la sociolinguistique et la philosophie en alternant formes brèves (le récit d’une expérience personnelle) et grandes formes (une œuvre littéraire), faisait converger les recherches actuelles sur le récit et particulièrement les récits d’expérience personnelle, les répétitions au théâtre, en particulier dans « l’écriture de plateau », et leur équivalent dans la composition rhapsodique d’œuvres littéraires transgressant les frontières entre l’écrit et l’oral, la fiction et la réalité. Nos présentations se sont entrecroisées au fil du temps, mais nous les classons ci-après par intervenant pour la clarté du compte rendu.

Michel de Fornel a ouvert l’enquête en partant du débat classique entre William Labov (Labov and Waletsky, Narrative Analysis, 1967) et Emanuel Schegloff (« Narrative Analysis » Thirty Years Later, 1997) sur l’analyse du récit. Il a présenté ensuite une recherche en cours sur le retelling de récits de la Shoah, la réitération de récits devant des publics différents et à des époques différentes, par des rescapés des camps d’extermination nazis. L’étude de certaines modifications narratives entre les versions permet d’approfondir les relations entre performance et mode d’attestation d’une expérience traumatisante, entre positioning et construction d’une mémoire collective. Au second semestre, poursuivant la réflexion sur le récit d’expérience personnelle en s’intéressant à des formes textuelles (journal intime, chronique) qui semblent mettre à mal les critères habituels de la narrativité, Michel de Fornel a présenté une autre de ses enquêtes en cours sur Le carnet des jours de guerre d’Auguste Long, journal personnel d’un poilu de la Grande Guerre.

Francis Zimmermann s’est intéressé aux écrivains pratiquant l’écriture rhapsodique. Dans les arts du spectacle, nous avons étudié depuis quelques années dans ce séminaire les reprises successives par lesquelles on monte une représentation théâtrale au cours d’une série de répétitions. Chaque répétition est déjà à elle seule une version à part entière du spectacle. Le spectacle en préparation est le point de fuite de la série des répétitions. Il est immanent à chacune des répétitions, il est tout entier dans chacune des répétitions. L’écriture rhapsodique produit en littérature l’équivalent de ces performances continuées que nous avons repérées au théâtre. Un roman composé de façon rhapsodique prend la forme d’une installation au sens du mot dans les arts plastiques : un agencement d’objets et d’éléments indépendants les uns des autres mais constituant un tout. Notre premier exemple fut pris chez Olga Tokarczuk dans son roman Les Pérégrins [2007] (traduction française, 2010), un roman faussement décousu, fondé sur la répétition d’un pérégrin à l’autre d’expériences vécues, faussement hétéroclites et en réalité homothétiques les unes des autres. Mais nous avons surtout repris dans cette perspective l’étude déjà amorcée l’an dernier de l’œuvre de Walter Benjamin. La problématique de la répétition est au cœur du célèbre essai, La Tâche du traducteur, que Benjamin publia en préambule à sa traduction allemande des Tableaux parisiens de Baudelaire qui fut comme une première répétition dans la gestation du Livre des passages.

Maud Verdier a consacré plusieurs séances du séminaire à l’analyse détaillée de récits de soi que produisent les comédiens de la Compagnie théâtrale de La Bulle Bleue à Montpellier qu’elle observe depuis plusieurs années. Dans cet ESAT artistique, qui permet à des personnes en situation de handicap mental ou psychique d’accéder à une activité professionnelle, les comédiens sont amenés à mobiliser non seulement leurs ressources physiques et techniques en tant que comédiens, mais aussi ce qu’ils sont en tant que personnes. Beaucoup de metteurs en scène s’appuient sur le matériau biographique, dans l’idée que s’y attache le sceau d’une authenticité. Les récits d’expériences personnelles sont utilisés dans l’écriture de plateau. L’improvisation est centrale dans les productions de la Bulle Bleue, d’autant que certains comédiens en situation de handicap ne peuvent pas apprendre leur texte par cœur. Le travail d’improvisation part d’événements réels survenant sur le plateau et de récits de vie, qui sont accueillis comme des propositions de jeu. Si ces propositions de jeu sont retenues, elles seront progressivement fixées au cours des répétitions successives. L’écriture de plateau, en intégrant ces propositions de jeu au texte de la pièce, modifie la question de savoir qui est l’auteur. Dès que metteur en scène et comédiens inventent leur propre partition textuelle, l’instance auctoriale est bouleversée. Tous participent du statut d’auteur de la pièce. Maud Verdier a souligné la double dimension rhapsodique du texte de la pièce : au niveau de l’écriture de plateau (le metteur en scène est un rhapsode, il collectionne citations, témoignages d’acteurs, etc., tout un matériau hétérogène), et au niveau des récits, qui sont par nature décousus. Le travail scénique et l’improvisation construisent au fil des répétitions un assemblage complexe de récits d’expérience personnelle, de textes de théâtre, d’inscriptions sur le corps.

Nous avons eu le plaisir d’écouter pour conclure l’année, Émilie Arrago-Boruah qui s’est intéressée à ce qui restait de l’oral à l’écrit lorsqu’elle comparait les versions orales recueillies sur le terrain aux versions écrites d’un corpus de contes assamais. Parmi les conteurs qui ont couché leurs récits par écrit, disait Walter Benjamin, « les plus grands sont ceux dont le texte s’éloigne le moins de la parole des innombrables conteurs anonymes » (Le conteur, Œuvres III, folio, p. 116). Depuis quelques années dans le nord-est de l’Inde, en Assam, quelques feuillets circulent au sein d’une communauté de parole spécifique où Emile Arrago enregistre depuis 2005 de nombreux arts de la parole. Publiés en nombre limité d’exemplaires, deux de ces feuillets reproduisent un corpus de sept contes racontés à l’occasion d’un rituel féminin chaque année. Ces deux feuillets n’ont pas été écrits par la même personne, l’une d’elles est une conteuse vivant au sein de cette communauté de parole, l’autre un universitaire local. Quant à leur utilisation, ils servent à présent de texte de répétition ou de mémorisation avant leur performance qui s’oppose au texte figé par l’écriture. Dans la comparaison minutieuse des différentes versions écrites et orales, prenant en compte les différents contextes d’énonciation, Émilie Arrago reprenait dans une culture éloignée de la nôtre la problématique du retelling développée en début d’année par Michel de Fornel sur les récits de la Shoah.

 

Publications

Michel de Fornel

  • « De l’usage de la science-fiction en anthropologie », L’Homme, n° 237, 2021, p. 143-154.
  •  Avec A. Ortiz-Caria, « Expliquer une pathologie ‘‘invisible’’. L’emploi d’une métaphore pour représenter la maladie d’Alzheimer en consultation gériatrique », Espaces Linguistiques, 2., 2021, p. 1-27.