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UE151 - Sociologie historique de la violence au Moyen-Orient


Lieu et planning


  • 105 bd Raspail
    105 bd Raspail 75006 Paris
    Salle 7
    2nd semestre / hebdomadaire, lundi 11:00-13:00
    du 4 janvier 2021 au 22 mars 2021


Description


Dernière modification : 20 mai 2020 06:13

Type d'UE
Séminaires DE/MC
Disciplines
Histoire, Sociologie
Page web
-
Langues
-
Mots-clés
Action Historiographie Mémoire Minorités Nationalisme
Aires culturelles
Arabe (monde) Méditerranéens (mondes) Musulmans (mondes)
Intervenant·e·s
  • Hamit Bozarslan [référent·e]   directeur d'études, EHESS / Centre d'études turques, ottomanes, balkaniques et centrasiatiques (CETOBaC)
  • Gabriel Martinez-Gros   professeur des universités, Université Paris Nanterre

Le descriptif sommaire n'est pas disponible / Programme non communiqué

Longtemps négligés par les sciences sociales, les thèmes de la coercition comme expression extrême des rapports de domination et de la violence, sociale et politiques, attirent désormais un nombre important de chercheurs. Mais la fragmentation sociale, politique et territoriale, la banalisation de la violence auto-sacrificielle et l’esthétisation macabre de la cruauté sur nombre de terrains de conflit nous poussent aussi à réfléchir aux limites des approches qu’on pourrait définir de phénoménologiques. Partant notamment, mais pas exclusivement, des formes de violence qu’on observe au Moyen-Orient depuis le milieu des années 1990, notre séminaire aura pour ambition de problématiser les situations où « la violence domine tout » mais « ne tranche rien » et ne s’inscrit dans la durée qu’au prix de la destruction du « social » qui lui a donné naissance.


Master


  • Séminaires de recherche – Études politiques – M1/S2-M2/S4
    Suivi et validation – semestriel hebdomadaire = 6 ECTS
    MCC – fiche de lecture

Renseignements


Contacts additionnels
-
Informations pratiques
-
Direction de travaux des étudiants

Sur rendez-vous : écrire à Hamit Bozarslan

Réception des candidats

Sur rendez-vous : écrire à Hamit Bozarslan

Pré-requis
-

Compte rendu


Avec le déclenchement des révolutions arabes il y a dix ans, le Moyen-Orient entrait dans une nouvelle période historique qui prenait la relève de celle inaugurée en 1979 par la reconnaissance d’Israël par l’Égypte, l’insurrection messianique à La Mecque, l’invasion de l’Afghanistan par l’Armée rouge et la révolution iranienne. Les guerres et les contestations d’une extrême violence qui avaient vu le jour sous les effets combinés de ces « quatre coups » avaient dominé la décennie 1980, avant de faire place à une éphémère stabilisation dans la région. Une décennie après 2011, le cycle historique ouvert avec les révoltes arabes semble connaître un destin analogue.

Malgré la vague révolutionnaire qui secoua l’Irak, le Liban, l’Algérie et le Soudan en 2019-2020, une vision fataliste s’est substituée à l’attente d’une démocratisation par la révolution si vivement exprimée en 2011. De même, la transhumance djihadiste qui trouva son ultime expression dans la formation d’un « État islamique » à cheval sur l’Irak et la Syrie (2014-2017), la fragmentation confessionnelle ou territoriale observée dans ces deux pays, ainsi qu’au Yémen et en Libye, et le processus de brutalisation des sociétés arabes par les interventions iraniennes, russes, turques, émirano-saoudiennes, ont atteint leur paroxysme. Alors que les sociétés ne sont plus en mesure de payer le coût des guerres civiles et de la fragmentation militarisée qui les menacent dans leur existence même, les hégémons régionaux, encore solidement établis sur leurs socles, comme l’Arabie saoudite, ou économiquement et politiquement aux abois, comme l’Iran et la Turquie, ne sont plus capables de charger de sens leurs fuites en avant. Comme les Anciens Grecs, ils apprennent à leur dépends qu’une hubris qui refuse de se modérer par le nomos ne peut que déboucher sur la némésis, la vengeance des Dieux.

Dix ans après le début des contestations révolutionnaires qui commencèrent en Tunisie pour se propager par la suite dans une grande partie du monde arabe, force est de rappeler que le monde arabe se trouve toujours dans l’urgence de rompre avec l’autoritarisme massif, la violence nihiliste, notamment mais pas exclusivement djihadiste, et la fatigue sociale condamnant les sociétés à subir la tyrannie d’un temps terne et éternel… s’impose de nos jours comme hier. Et, plus que jamais, il importe de penser la société du demain comme celle de l’« incertitude démocratique » (Claude Lefort), de légitimer, négocier et institutionnaliser les conflits sociaux, économiques et politiques dans le cadre d’un État de droit lui-même en constante transformation, pour sortir de la « certitude » des règnes des raïs, des États-cartels ou de leurs opposants djihadistes ou « sectaires ».

Il convient de garder à l’esprit que le calme apparent qui règne au Moyen-Orient après une décennie de bouleversements peut être précaire, comme cela fut le cas au tournant de la décennie 1960, suivie de putschs en série en Irak et en Syrie et de la guerre des Six jours, ou encore de celui des années 1990, où nombre d’observateurs estimaient qu’après l’Europe de l’ouest (Espagne, Grèce, Portugal), l’Amérique latine et l’Europe de l’est, l’« oiseau de la démocratie » allait choisir le Moyen-Orient pour sa nouvelle demeure. La transhumance militaire djihadiste, les processus de confessionnalisation, l’émergence d’une économie prédatrice… autant de dynamiques lourdes qui ne cessèrent de s’amplifier depuis semblent s’épuiser ou se déplacent vers d’autres contrées, notamment en Afrique subsaharienne. Comme le montre la énième guerre dévastatrice dans la bande de Gaza en mai 2021, cependant, leur essoufflement n’est en rien signe d’une « pacification » et ne prémunit certainement pas la région contre des processus autrement plus dévastateurs qui pourraient voir le jour dans la décennie qui s’ouvre à nous.

Publications
  • L’anti-démocratie au 21ème siècle, Iran, Russie, Turquie, Paris, CNRS Éditions, 2021, 280 p.
  • Histoire de la Turquie. De l’Empire à nos jours, 3e édition actualisée, Paris, Tallandier, 2021, 703 p.
  • Avec C. Günes et V. Yadirgi, « Introduction » et « Dark Times: Kurdistan in the Turmoil of the Middle East, 1979-2003 », dans The Cambridge History of the Kurds, sous la dir. d'H. Bozarslan, C. Günes et V. Yadirgi, Cambridge, Cambridge University Press, 2021, p. 1-22 et 269-288.
  • « From Kemalism to the Armed Struggle : Radicalization of the Left in the 1960s », dans Turkey in Tourmoil. Social Change and Political Radicalism during the 1960s, sous la dir. de B. Pekesen, Lodenbourg, de Gruyter, 2020, p. 115-136.  
  • « De la Nahda à aujourd’hui : le nationalisme, la gauche et l’islamisme arabes face à l’Occident », dans Le Moyen-Orient et le monde. L’État du monde 2021, sous la dir. de B. Badie et D. Vidal, 2020, p. 31-38.
  • « Anti-démocarties et démocraties dans les années 2020 », Esprit, n° 468, 2020, p. 57-67.

Dernière modification : 20 mai 2020 06:13

Type d'UE
Séminaires DE/MC
Disciplines
Histoire, Sociologie
Page web
-
Langues
-
Mots-clés
Action Historiographie Mémoire Minorités Nationalisme
Aires culturelles
Arabe (monde) Méditerranéens (mondes) Musulmans (mondes)
Intervenant·e·s
  • Hamit Bozarslan [référent·e]   directeur d'études, EHESS / Centre d'études turques, ottomanes, balkaniques et centrasiatiques (CETOBaC)
  • Gabriel Martinez-Gros   professeur des universités, Université Paris Nanterre

Le descriptif sommaire n'est pas disponible / Programme non communiqué

Longtemps négligés par les sciences sociales, les thèmes de la coercition comme expression extrême des rapports de domination et de la violence, sociale et politiques, attirent désormais un nombre important de chercheurs. Mais la fragmentation sociale, politique et territoriale, la banalisation de la violence auto-sacrificielle et l’esthétisation macabre de la cruauté sur nombre de terrains de conflit nous poussent aussi à réfléchir aux limites des approches qu’on pourrait définir de phénoménologiques. Partant notamment, mais pas exclusivement, des formes de violence qu’on observe au Moyen-Orient depuis le milieu des années 1990, notre séminaire aura pour ambition de problématiser les situations où « la violence domine tout » mais « ne tranche rien » et ne s’inscrit dans la durée qu’au prix de la destruction du « social » qui lui a donné naissance.

  • Séminaires de recherche – Études politiques – M1/S2-M2/S4
    Suivi et validation – semestriel hebdomadaire = 6 ECTS
    MCC – fiche de lecture
Contacts additionnels
-
Informations pratiques
-
Direction de travaux des étudiants

Sur rendez-vous : écrire à Hamit Bozarslan

Réception des candidats

Sur rendez-vous : écrire à Hamit Bozarslan

Pré-requis
-
  • 105 bd Raspail
    105 bd Raspail 75006 Paris
    Salle 7
    2nd semestre / hebdomadaire, lundi 11:00-13:00
    du 4 janvier 2021 au 22 mars 2021

Avec le déclenchement des révolutions arabes il y a dix ans, le Moyen-Orient entrait dans une nouvelle période historique qui prenait la relève de celle inaugurée en 1979 par la reconnaissance d’Israël par l’Égypte, l’insurrection messianique à La Mecque, l’invasion de l’Afghanistan par l’Armée rouge et la révolution iranienne. Les guerres et les contestations d’une extrême violence qui avaient vu le jour sous les effets combinés de ces « quatre coups » avaient dominé la décennie 1980, avant de faire place à une éphémère stabilisation dans la région. Une décennie après 2011, le cycle historique ouvert avec les révoltes arabes semble connaître un destin analogue.

Malgré la vague révolutionnaire qui secoua l’Irak, le Liban, l’Algérie et le Soudan en 2019-2020, une vision fataliste s’est substituée à l’attente d’une démocratisation par la révolution si vivement exprimée en 2011. De même, la transhumance djihadiste qui trouva son ultime expression dans la formation d’un « État islamique » à cheval sur l’Irak et la Syrie (2014-2017), la fragmentation confessionnelle ou territoriale observée dans ces deux pays, ainsi qu’au Yémen et en Libye, et le processus de brutalisation des sociétés arabes par les interventions iraniennes, russes, turques, émirano-saoudiennes, ont atteint leur paroxysme. Alors que les sociétés ne sont plus en mesure de payer le coût des guerres civiles et de la fragmentation militarisée qui les menacent dans leur existence même, les hégémons régionaux, encore solidement établis sur leurs socles, comme l’Arabie saoudite, ou économiquement et politiquement aux abois, comme l’Iran et la Turquie, ne sont plus capables de charger de sens leurs fuites en avant. Comme les Anciens Grecs, ils apprennent à leur dépends qu’une hubris qui refuse de se modérer par le nomos ne peut que déboucher sur la némésis, la vengeance des Dieux.

Dix ans après le début des contestations révolutionnaires qui commencèrent en Tunisie pour se propager par la suite dans une grande partie du monde arabe, force est de rappeler que le monde arabe se trouve toujours dans l’urgence de rompre avec l’autoritarisme massif, la violence nihiliste, notamment mais pas exclusivement djihadiste, et la fatigue sociale condamnant les sociétés à subir la tyrannie d’un temps terne et éternel… s’impose de nos jours comme hier. Et, plus que jamais, il importe de penser la société du demain comme celle de l’« incertitude démocratique » (Claude Lefort), de légitimer, négocier et institutionnaliser les conflits sociaux, économiques et politiques dans le cadre d’un État de droit lui-même en constante transformation, pour sortir de la « certitude » des règnes des raïs, des États-cartels ou de leurs opposants djihadistes ou « sectaires ».

Il convient de garder à l’esprit que le calme apparent qui règne au Moyen-Orient après une décennie de bouleversements peut être précaire, comme cela fut le cas au tournant de la décennie 1960, suivie de putschs en série en Irak et en Syrie et de la guerre des Six jours, ou encore de celui des années 1990, où nombre d’observateurs estimaient qu’après l’Europe de l’ouest (Espagne, Grèce, Portugal), l’Amérique latine et l’Europe de l’est, l’« oiseau de la démocratie » allait choisir le Moyen-Orient pour sa nouvelle demeure. La transhumance militaire djihadiste, les processus de confessionnalisation, l’émergence d’une économie prédatrice… autant de dynamiques lourdes qui ne cessèrent de s’amplifier depuis semblent s’épuiser ou se déplacent vers d’autres contrées, notamment en Afrique subsaharienne. Comme le montre la énième guerre dévastatrice dans la bande de Gaza en mai 2021, cependant, leur essoufflement n’est en rien signe d’une « pacification » et ne prémunit certainement pas la région contre des processus autrement plus dévastateurs qui pourraient voir le jour dans la décennie qui s’ouvre à nous.

Publications
  • L’anti-démocratie au 21ème siècle, Iran, Russie, Turquie, Paris, CNRS Éditions, 2021, 280 p.
  • Histoire de la Turquie. De l’Empire à nos jours, 3e édition actualisée, Paris, Tallandier, 2021, 703 p.
  • Avec C. Günes et V. Yadirgi, « Introduction » et « Dark Times: Kurdistan in the Turmoil of the Middle East, 1979-2003 », dans The Cambridge History of the Kurds, sous la dir. d'H. Bozarslan, C. Günes et V. Yadirgi, Cambridge, Cambridge University Press, 2021, p. 1-22 et 269-288.
  • « From Kemalism to the Armed Struggle : Radicalization of the Left in the 1960s », dans Turkey in Tourmoil. Social Change and Political Radicalism during the 1960s, sous la dir. de B. Pekesen, Lodenbourg, de Gruyter, 2020, p. 115-136.  
  • « De la Nahda à aujourd’hui : le nationalisme, la gauche et l’islamisme arabes face à l’Occident », dans Le Moyen-Orient et le monde. L’État du monde 2021, sous la dir. de B. Badie et D. Vidal, 2020, p. 31-38.
  • « Anti-démocarties et démocraties dans les années 2020 », Esprit, n° 468, 2020, p. 57-67.