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UE1059 - Écologie, classes sociales et territoires : perspectives sociologiques et politiques des cultures sociales de l’écologie


Lieu et planning


  • Campus Condorcet-Centre de colloques
    Centre de colloques, Cours des humanités 93300 Aubervilliers
    Salle 3.11
    2nd semestre / hebdomadaire, lundi 13:00-15:00
    du 1er mars 2021 au 14 juin 2021


Description


Dernière modification : 8 avril 2021 09:38

Type d'UE
Enseignements fondamentaux de master
Disciplines
Géographie, Sociologie
Page web
-
Langues
français
Mots-clés
Action publique Classes sociales Culture Environnement Politique Sociologie Spatialisation, territoires
Aires culturelles
-
Intervenant·e·s
  • Karl Berthelot [référent·e]   doctorant chargé d'enseignement, EHESS / Géographie-cités (GÉOCIT)

Ce séminaire vise à interroger les conditions de production des représentations et des pratiques sociales de l’écologie, à partir de ses fondements spatiaux et politiques. En poursuivant une approche socioconstructiviste, nous nous concentrerons sur les luttes d’assignations et de définition de l’écologie qui se jouent dans différents territoires, ainsi que sur les manières de conforter et/ou de dépasser des rapports de domination. Loin d’être un objet consensuel et dénué de tensions, l’écologie revêt des hiérarchies et des inégalités sociales, des appropriations et des dépossessions liées à ses fondements, dont les conceptions populaires sont largement invisibilisées. Ce séminaire sera l’occasion de confronter différentes politiques publiques au regard de territoires variés et d’acceptions sociales contrastées de l’écologie (Les Gilets Jaunes et le périurbain, la transition écologique et les quartiers populaires notamment au regard de la précarité énergétique et de la justice environnementale, l’écocitoyenneté et la consommation « éthique », les courants écoféministes, les quartiers « durables » et leurs injonctions écologiques…). Enfin, l’accent sera porté sur les engagements ordinaires et les (dé)politisations par l’écologie, axés sur l’ambivalence des classes populaires aux pouvoirs publics dans leur rapport de dépendance/d’autonomie et sur des luttes de subsistance en marge d’un cadre institutionnel et technique.

1er mars 2021 :  Construction sociale de l’écologie et enjeux de luttes interclassistes : caractérisation des « cultures sociales de l’écologie »

Cette séance introductive constituera un temps d’échange sur la notion de « cultures sociales de l’écologie » et rendra compte du champ d’étude socio-constructiviste sur l’écologie. à partir des différents textes proposés, il s’agira de se départir de prénotions autour d’une définition restrictive de la « sensibilité environnementale » tout en restituant ses conditions sociales de réalisation. Nous tenterons ici de baliser les logiques de hiérarchisations sociales à l’œuvre dans les luttes définitionnelles de l’écologie. Il conviendra également de revenir sur les appréhensions plus ordinaires des représentations et pratiques de l’écologie, au-delà de leurs systèmes de références scientifiques, techniques ou militantes. Ces prises sociales donnent à voir d’autres postures politiques plus discrètes au regard d’enjeux propres aux classes sociales et aux territoires. Quelques interrogations nous permettront d’alimenter cette séance : comment caractériser des « cultures sociales de l’écologie », sous leurs aspects plus ordinaires et au-delà d’une approche rationnelle ? Dans quelle mesure peut-on interpréter sociologiquement les rapports situés des classes sociales à l’écologie ? Que disent les rapports sociaux à l’écologie sur le classement des (dis)positions sociales et culturelles d’individus, de leurs systèmes de valeurs et de leurs intériorisations de l’ordre social ?

8 mars 2021 : Écologie et classes moyennes/supérieures : l’engagement écocitoyen et la consommation éthique entre bonne éco-conscience, distinction sociale et moralisation écologique

L’étude des rapports des classes moyennes et supérieures à l’écologie indique des postures de distinction sociale, une reprise affirmée des discours et gestes de l’écocitoyenneté ainsi qu’une recherche de qualité de vie oscillant entre autolimitation et abondance. Ces attitudes s’illustrent notamment par des stratégies de consommation ostentatoire tout en s’inscrivant dans des trajectoires de promotion résidentielle. Pour ces milieux favorisés, s’il est en effet important de se sentir bien chez soi et d’y entretenir son bien-être, il l’est tout aussi d’entretenir des sociabilités et de « cultiver » un entre-soi afin d’imposer ses marques au sein de son milieu de vie. La bonne éco-conscience relative aux modes de vie des classes moyennes et supérieures traduirait plus largement une vision pacifiée et un type de politisation dépolitisante des fondements écologiques, hypothèse que nous questionnerons lors de cette séance. Ainsi, en tant que relais d’une écologie « adoucie » oscillant entre hédonisme, sobriété volontaire et pragmatisme, dans quelle mesure ces classes sociales participent-elles au renforcement du « bien-fondé » des valeurs marchandes et de la perpétuation d’un référentiel croissantiste ? Comment expliquer ce paradoxe de leur « engagement de façade » écologique (Hébel et Sessego, 2019) ? Enfin, en quoi leurs rapports à l’écologie peuvent-ils s’apparenter à des entreprises de moralisation écologique et de disqualification sociale, renvoyant par la même à des enjeux propres aux luttes de classe ?

15 mars 2021 : Gilets Jaunes et écologie : formes de vie populaires, influences militantes et traductions politiques 

  • Intervention de Maxime Gaborit (doctorant en science politique, Université Saint-Louis-Bruxelles, CResPo)

Depuis deux ans, les Gilets Jaunes ont joué un rôle décisif dans la formulation des enjeux écologiques. Né d'une protestation contre la taxe carbone, le mouvement a très vite été accusé d'être hostile à toute forme de transition écologique. Pourtant, sur les ronds-points, plutôt qu'une hostilité vis-à-vis des politiques écologistes, c'est une reformulation de ces problématiques que l'on a pu observer, à travers un discours valorisant des modes de vie populaires ancrés dans les territoires ruraux et périurbains, face aux modes de vie polluants des populations urbaines les plus aisées. Par ailleurs, au-delà de ces embryons d'écologie populaire, le mouvement a laissé une empreinte très forte sur le discours des principaux acteurs des politiques écologiques. Dans les mouvements contestataires et jusque dans les arènes de décision, les Gilets jaunes ont produit une série d'effets, en conduisant le mouvement pour le climat à faire émerger des slogans articulant justice sociale et justice environnementale (tel que le fameux « Fin du mois, fin du monde, même combat »), et en poussant les décideurs politiques à organiser la Convention Citoyenne pour le Climat, dont l'objectif était de proposer un ensemble de mesures visant à "réduire d'au moins 40% les émissions de gaz à effets de sphère d'ici 2030". En s'appuyant sur plusieurs enquêtes réalisées sur les Gilets jaunes, le mouvement pour le climat et la Convention Citoyenne pour le Climat, cette intervention cherchera à discuter la manière dont les Gilets jaunes ont d'abord reformulé les enjeux écologiques, en mettant en avant le rôle que jouent les positions de classes dans les modes de vie polluants et en valorisant une écologie populaire fondée sur la consommation locale, une fiscalité juste et un réaménagement du territoire. Nous montrerons ensuite comment les Gilets jaunes ont agi comme un révélateur des tensions au sein des militants pour le climat, qui vivent dans des territoires très différents, et comme un acteur majeur de la transformation de la fabrique des politiques climatiques, en apparaissant comme un élément décisif de la genèse de la Convention Citoyenne pour le Climat, et comme un spectre très présent lors des débats.  

22 mars 2021 : L'environnement dans la ville néolibérale : construction, évolution et diffusion des politiques urbaines de développement durable

  • Intervention de Vincent Béal (maitre de conférences en sociologie, Université de Strasbourg, SAGE)

Cette séance porte sur la montée en puissance des thématiques environnementales dans les politiques urbaines des villes occidentales. Longtemps secondaires sur les agendas politiques locaux, les enjeux environnementaux ont fait l’objet d’une première politisation dans les années 1970, puis d’une dynamique d’institutionnalisation, autour du mot d’ordre développement durable, dans les années 1990 et 2000. Si cette percée repose sur une transformation des sociétés urbaines, plus sensibles à l’écologie, elle s’explique avant tout par une évolution des manières d’appréhender l’environnement dans les politiques urbaines. Avec la vogue du développement durable, l’environnement a été enrôlé dans les projets entrepreneuriaux des élu.e.s des grandes villes, venant bien souvent accompagner l’émergence de la ville néolibérale. Pour comprendre cette dynamique, il s’agira dans un premier temps de présenter l’évolution des politiques urbaines d’environnement, puis dans un second temps d’analyser comment une vision techno-marchande de l’environnement s’est imposée à l’échelle internationale dans le cadre de la circulation entre villes de « modèles » et autres « bonnes pratiques ».

29 mars 2021 : Sensibiliser les quartiers sensibles : les politiques environnementales comme outil d’encadrement des classes populaires ? 

  • Intervention d'Hadrien Malier (doctorant en sociologie, EHESS, IRIS)

Depuis la fin des années 1990, le gouvernement des questions environnementales s’est largement appuyé sur un ensemble de discours et de politiques publiques cherchant à orienter les choix des consommateurs vers des pratiques plus « durables » ou « éco-responsables ». Cette séance s’intéressera aux dimensions à la fois classées et classantes de ce gouvernement des conduites qui, certes, cherche à responsabiliser les consommateurs, mais ne s’adresse pas à tous de la même façon. Pour cela, deux enquêtes ethnographiques menées en région parisienne seront mobilisées : une première portant sur trois « programmes d’accompagnement à l’adoption d’éco-gestes » ciblant des résidences d’habitat social, et une deuxième étudiant la façon dont des militants de groupes Alternatiba cherchent à sensibiliser leurs voisins populaires aux « alternatives ». Leur rapprochement permettra d'étudier la construction par les pouvoirs publics et par les militants écologistes des habitants de ces quartiers comme un public spécifique vis-à-vis des questions environnementales. La séance sera centrée en particulier sur la question suivante : dans quelle mesure les programmes de sensibilisation ciblant les fractions précaires des classes populaires s’inscrivent dans une tentative de les encadrer ?

Dans un premier temps, il s’agira de s’interroger sur les raisons pour lesquelles les programmes de sensibilisation par porte-à-porte n’existent qu’en quartier populaire. Qu’est-ce qui est visé, quelles sont les justifications mobilisées et comment les habitants sont-ils abordés ? Mais aussi, comment décrire le travail de sensibilisation entrepris ? Dans un second temps, on s’interrogera sur les effets de ce gouvernement des conduites et sur les capacités de résistance des personnes rencontrées. 

12 avril 2021 : La question des ruptures dans les modes de vie dans la transition écologique

  • Intervention de Michelle Dobré (professeure de sociologie, Université Caen-Normandie, CERREV)

Cet exposé propose une incursion dans la compréhension des conditions du changement de modes de vie et une réflexion sur la notion de rupture dans ce contexte. Il reprend des concepts classiques de la sociologie (« hystérésis » et « habitus », « formes sociales ») et un choix de données anciennes et récentes dans quelques domaines significatifs reliés à l’« écologisation » des pratiques domestiques (tri, alimentation, numérique). Il s’agit ici de proposer une problématisation socio-anthropologique de la question du changement des modes de vie près de vingt ans après la publication du livre L’écologie au quotidien – dont le sous-titre « Eléments pour une théorie sociologique de la résistance ordinaire » était et reste très significatif. C’est une perspective qui offre un recul intéressant sur les enjeux actuels de la « transition » écologique et la question de la stratification des dispositions au changement social.

3 mai 2021 : L’enjeu écologique au prisme des rapports de classe 

  • Intervention de Jean-Baptiste Comby (sociologue, maître de conférences à l'Université Paris 2, chercheur au Carism et au Cens)

Présentation à venir

10 mai  2021 : Courants de l’écoféminisme vernaculaire et éthiques du care (thématique à confirmer)

  • Intervention à confirmer

Présentation à venir

17 mai 2021 : Injonctions écologiques et rapports aux normes d’habiter au sein de quartiers « durables » : vers une gouvernementalisation néolibérale des conduites ? (titre provisoire)

  • Intervention de Nadine Roudil (professeure de sociologie, École nationale supérieure d’architecture de Paris Val-de-Seine, CRH-LAVUE)

Présentation à venir

31 mai : Séance 10. Se mobiliser pour la justice environnementale dans les quartiers populaires ? Vivre et lutter dans des environnements toxiques (le cas du South Bronx)

  • Intervention de Flaminia Paddeu, maitresse de conférences en géographie, Université Sorbonne Paris Nord (Pléïade)

Présentation à venir

7 juin 2021 : Les inégalités écologiques au prisme de la transition énergétique et de l’habita(n)t : focus sur la précarité énergétique (titre provisoire)

  • Intervention de Joseph Cacciari, ATER en sociologie, chercheur rattaché à l’IDHES, Université Paris Nanterre

Présentation à venir

14 juin 2021 : Les cultures sociales de l’écologie au sein d’un écoquartier en rénovation urbaine : mise en scène écocitoyenne, appropriations d’un espace populaire et hiérarchisations sociales par l’écologie

Présentation à venir


Master


  • Séminaires de tronc commun – Étude comparative du développement – M1/S2-M2/S4
    Suivi et validation – semestriel hebdomadaire = 6 ECTS
    MCC – exposé oral
  • Séminaires de tronc commun – Territoires, espaces, sociétés – M1/S2-M2/S4
    Suivi et validation – semestriel hebdomadaire = 6 ECTS
    MCC – exposé oral

Renseignements


Contacts additionnels
-
Informations pratiques
-
Direction de travaux des étudiants
-
Réception des candidats
-
Pré-requis
-

Compte rendu


Le séminaire « Écologie, classes sociales et territoires » s’est tenu en format hybride de mars à juin 2021 et s’est attaché à l’étude des conditions de production des rapports sociaux aux enjeux environnementaux. Cette dernière s’est appuyée sur de nombreux travaux statistiques, qualitatifs et empiriques centrés avant tout sur des cas occidentaux et principalement issus de la sociologie, mais également de la géographie et des sciences politiques. Ouvert en priorité à des étudiant.es en master au sein de l’EHESS, il a également été poursuivi par quelques doctorant.es et chercheur.ses en sciences sociales. De plus, ce séminaire a été enrichi par l’intervention de nombreux.ses chercheur.ses extérieur.es. L’objectif de ces séances était d’offrir un large éventail des appréhensions sociales liées aux problématiques écologiques, de leur rattachement aux conditions matérielles d’existence aux effets symboliques des relations de domination qu’elles impliquent en passant par les engagements et politisations qui en découlent. Ce séminaire a mis un certain pas de côté par rapport aux recherches portant sur les déclinaisons plus scientifiques et techniques de l’écologie.

La séance introductive a permis de baliser les hiérarchisations sociales « ordinaires » et les luttes de légitimation à l’œuvre à l’aune des enjeux environnementaux, en revenant sur les effets de la construction sociale et publique des attitudes et comportements dits « écologiques ». Plusieurs problématiques sur l’élaboration et les définitions de catégories gravitant autour de la « sensibilité environnementale » y ont été développées. L’analyse de ces stratifications sociales a notamment été complétée par l’intervention de Michelle Dobré à l’aide de ses enquêtes sur les modes de vie, entre inerties et capacités sociales de transformation. La séance suivante a été consacrée aux relations des classes moyennes et supérieures aux questions environnementales au regard des rétributions symboliques qu’elles génèrent. Elle s’est tenue à une analyse relationnelle des positions sociales et des logiques propres aux fractions de classe. Certaines séances ont ainsi été structurées à partir du sujet des rapports de classe à l’écologie, notamment grâce à l’intervention et aux travaux de Jean-Baptiste Comby.

Un autre axe d’étude relatif à la diffusion d’injonctions écologiques au sein de quartiers populaires et à leur réception par des milieux modestes a été retenu. Cette perspective de recherche a fait l’objet de plusieurs illustrations. Celle d’abord de l’institutionnalisation de certains modèles de « ville durable » et de la diffusion de politiques environnementales en Europe occidentale à partir des travaux de Vincent Béal. Mais également celles du travail d’encadrement effectué par des militants écologistes comme l’a exposé Hadrien Malier et des effets de moralisation et stigmatisation à l’encontre de classes populaires révélés par Nadine Roudil.

Enfin, le thème des mobilisations de justice socio-environnementale a été abordé afin de mieux saisir les articulations entre inégalités sociales et territoriales. Maxime Gaborit est notamment revenu sur la recomposition des enjeux écologiques à l’aune du mouvement des Gilets Jaunes, du poids des dispositions socio-territoriales de leurs manifestants à sa confrontation aux marches pour le climat. Flaminia Paddeu a quant à elle spécifié quelques résultats de sa thèse en soulignant comment l’imbrication entre formes de vulnérabilités socio-sanitaires et sources de pollution a pu faire émerger des mouvements de justice environnementale populaires dans le South Bronx, non sans quelques nuances dans leur représentativité. D’autres types d’engagement écologique s’expriment plus « discrètement », ce dont témoignent certaines pratiques écoféministes orientées par des quêtes d’autonomie et de subsistance et sur lesquelles Geneviève Pruvost est revenue lors de sa présentation.

Publications

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Dernière modification : 8 avril 2021 09:38

Type d'UE
Enseignements fondamentaux de master
Disciplines
Géographie, Sociologie
Page web
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Langues
français
Mots-clés
Action publique Classes sociales Culture Environnement Politique Sociologie Spatialisation, territoires
Aires culturelles
-
Intervenant·e·s
  • Karl Berthelot [référent·e]   doctorant chargé d'enseignement, EHESS / Géographie-cités (GÉOCIT)

Ce séminaire vise à interroger les conditions de production des représentations et des pratiques sociales de l’écologie, à partir de ses fondements spatiaux et politiques. En poursuivant une approche socioconstructiviste, nous nous concentrerons sur les luttes d’assignations et de définition de l’écologie qui se jouent dans différents territoires, ainsi que sur les manières de conforter et/ou de dépasser des rapports de domination. Loin d’être un objet consensuel et dénué de tensions, l’écologie revêt des hiérarchies et des inégalités sociales, des appropriations et des dépossessions liées à ses fondements, dont les conceptions populaires sont largement invisibilisées. Ce séminaire sera l’occasion de confronter différentes politiques publiques au regard de territoires variés et d’acceptions sociales contrastées de l’écologie (Les Gilets Jaunes et le périurbain, la transition écologique et les quartiers populaires notamment au regard de la précarité énergétique et de la justice environnementale, l’écocitoyenneté et la consommation « éthique », les courants écoféministes, les quartiers « durables » et leurs injonctions écologiques…). Enfin, l’accent sera porté sur les engagements ordinaires et les (dé)politisations par l’écologie, axés sur l’ambivalence des classes populaires aux pouvoirs publics dans leur rapport de dépendance/d’autonomie et sur des luttes de subsistance en marge d’un cadre institutionnel et technique.

1er mars 2021 :  Construction sociale de l’écologie et enjeux de luttes interclassistes : caractérisation des « cultures sociales de l’écologie »

Cette séance introductive constituera un temps d’échange sur la notion de « cultures sociales de l’écologie » et rendra compte du champ d’étude socio-constructiviste sur l’écologie. à partir des différents textes proposés, il s’agira de se départir de prénotions autour d’une définition restrictive de la « sensibilité environnementale » tout en restituant ses conditions sociales de réalisation. Nous tenterons ici de baliser les logiques de hiérarchisations sociales à l’œuvre dans les luttes définitionnelles de l’écologie. Il conviendra également de revenir sur les appréhensions plus ordinaires des représentations et pratiques de l’écologie, au-delà de leurs systèmes de références scientifiques, techniques ou militantes. Ces prises sociales donnent à voir d’autres postures politiques plus discrètes au regard d’enjeux propres aux classes sociales et aux territoires. Quelques interrogations nous permettront d’alimenter cette séance : comment caractériser des « cultures sociales de l’écologie », sous leurs aspects plus ordinaires et au-delà d’une approche rationnelle ? Dans quelle mesure peut-on interpréter sociologiquement les rapports situés des classes sociales à l’écologie ? Que disent les rapports sociaux à l’écologie sur le classement des (dis)positions sociales et culturelles d’individus, de leurs systèmes de valeurs et de leurs intériorisations de l’ordre social ?

8 mars 2021 : Écologie et classes moyennes/supérieures : l’engagement écocitoyen et la consommation éthique entre bonne éco-conscience, distinction sociale et moralisation écologique

L’étude des rapports des classes moyennes et supérieures à l’écologie indique des postures de distinction sociale, une reprise affirmée des discours et gestes de l’écocitoyenneté ainsi qu’une recherche de qualité de vie oscillant entre autolimitation et abondance. Ces attitudes s’illustrent notamment par des stratégies de consommation ostentatoire tout en s’inscrivant dans des trajectoires de promotion résidentielle. Pour ces milieux favorisés, s’il est en effet important de se sentir bien chez soi et d’y entretenir son bien-être, il l’est tout aussi d’entretenir des sociabilités et de « cultiver » un entre-soi afin d’imposer ses marques au sein de son milieu de vie. La bonne éco-conscience relative aux modes de vie des classes moyennes et supérieures traduirait plus largement une vision pacifiée et un type de politisation dépolitisante des fondements écologiques, hypothèse que nous questionnerons lors de cette séance. Ainsi, en tant que relais d’une écologie « adoucie » oscillant entre hédonisme, sobriété volontaire et pragmatisme, dans quelle mesure ces classes sociales participent-elles au renforcement du « bien-fondé » des valeurs marchandes et de la perpétuation d’un référentiel croissantiste ? Comment expliquer ce paradoxe de leur « engagement de façade » écologique (Hébel et Sessego, 2019) ? Enfin, en quoi leurs rapports à l’écologie peuvent-ils s’apparenter à des entreprises de moralisation écologique et de disqualification sociale, renvoyant par la même à des enjeux propres aux luttes de classe ?

15 mars 2021 : Gilets Jaunes et écologie : formes de vie populaires, influences militantes et traductions politiques 

  • Intervention de Maxime Gaborit (doctorant en science politique, Université Saint-Louis-Bruxelles, CResPo)

Depuis deux ans, les Gilets Jaunes ont joué un rôle décisif dans la formulation des enjeux écologiques. Né d'une protestation contre la taxe carbone, le mouvement a très vite été accusé d'être hostile à toute forme de transition écologique. Pourtant, sur les ronds-points, plutôt qu'une hostilité vis-à-vis des politiques écologistes, c'est une reformulation de ces problématiques que l'on a pu observer, à travers un discours valorisant des modes de vie populaires ancrés dans les territoires ruraux et périurbains, face aux modes de vie polluants des populations urbaines les plus aisées. Par ailleurs, au-delà de ces embryons d'écologie populaire, le mouvement a laissé une empreinte très forte sur le discours des principaux acteurs des politiques écologiques. Dans les mouvements contestataires et jusque dans les arènes de décision, les Gilets jaunes ont produit une série d'effets, en conduisant le mouvement pour le climat à faire émerger des slogans articulant justice sociale et justice environnementale (tel que le fameux « Fin du mois, fin du monde, même combat »), et en poussant les décideurs politiques à organiser la Convention Citoyenne pour le Climat, dont l'objectif était de proposer un ensemble de mesures visant à "réduire d'au moins 40% les émissions de gaz à effets de sphère d'ici 2030". En s'appuyant sur plusieurs enquêtes réalisées sur les Gilets jaunes, le mouvement pour le climat et la Convention Citoyenne pour le Climat, cette intervention cherchera à discuter la manière dont les Gilets jaunes ont d'abord reformulé les enjeux écologiques, en mettant en avant le rôle que jouent les positions de classes dans les modes de vie polluants et en valorisant une écologie populaire fondée sur la consommation locale, une fiscalité juste et un réaménagement du territoire. Nous montrerons ensuite comment les Gilets jaunes ont agi comme un révélateur des tensions au sein des militants pour le climat, qui vivent dans des territoires très différents, et comme un acteur majeur de la transformation de la fabrique des politiques climatiques, en apparaissant comme un élément décisif de la genèse de la Convention Citoyenne pour le Climat, et comme un spectre très présent lors des débats.  

22 mars 2021 : L'environnement dans la ville néolibérale : construction, évolution et diffusion des politiques urbaines de développement durable

  • Intervention de Vincent Béal (maitre de conférences en sociologie, Université de Strasbourg, SAGE)

Cette séance porte sur la montée en puissance des thématiques environnementales dans les politiques urbaines des villes occidentales. Longtemps secondaires sur les agendas politiques locaux, les enjeux environnementaux ont fait l’objet d’une première politisation dans les années 1970, puis d’une dynamique d’institutionnalisation, autour du mot d’ordre développement durable, dans les années 1990 et 2000. Si cette percée repose sur une transformation des sociétés urbaines, plus sensibles à l’écologie, elle s’explique avant tout par une évolution des manières d’appréhender l’environnement dans les politiques urbaines. Avec la vogue du développement durable, l’environnement a été enrôlé dans les projets entrepreneuriaux des élu.e.s des grandes villes, venant bien souvent accompagner l’émergence de la ville néolibérale. Pour comprendre cette dynamique, il s’agira dans un premier temps de présenter l’évolution des politiques urbaines d’environnement, puis dans un second temps d’analyser comment une vision techno-marchande de l’environnement s’est imposée à l’échelle internationale dans le cadre de la circulation entre villes de « modèles » et autres « bonnes pratiques ».

29 mars 2021 : Sensibiliser les quartiers sensibles : les politiques environnementales comme outil d’encadrement des classes populaires ? 

  • Intervention d'Hadrien Malier (doctorant en sociologie, EHESS, IRIS)

Depuis la fin des années 1990, le gouvernement des questions environnementales s’est largement appuyé sur un ensemble de discours et de politiques publiques cherchant à orienter les choix des consommateurs vers des pratiques plus « durables » ou « éco-responsables ». Cette séance s’intéressera aux dimensions à la fois classées et classantes de ce gouvernement des conduites qui, certes, cherche à responsabiliser les consommateurs, mais ne s’adresse pas à tous de la même façon. Pour cela, deux enquêtes ethnographiques menées en région parisienne seront mobilisées : une première portant sur trois « programmes d’accompagnement à l’adoption d’éco-gestes » ciblant des résidences d’habitat social, et une deuxième étudiant la façon dont des militants de groupes Alternatiba cherchent à sensibiliser leurs voisins populaires aux « alternatives ». Leur rapprochement permettra d'étudier la construction par les pouvoirs publics et par les militants écologistes des habitants de ces quartiers comme un public spécifique vis-à-vis des questions environnementales. La séance sera centrée en particulier sur la question suivante : dans quelle mesure les programmes de sensibilisation ciblant les fractions précaires des classes populaires s’inscrivent dans une tentative de les encadrer ?

Dans un premier temps, il s’agira de s’interroger sur les raisons pour lesquelles les programmes de sensibilisation par porte-à-porte n’existent qu’en quartier populaire. Qu’est-ce qui est visé, quelles sont les justifications mobilisées et comment les habitants sont-ils abordés ? Mais aussi, comment décrire le travail de sensibilisation entrepris ? Dans un second temps, on s’interrogera sur les effets de ce gouvernement des conduites et sur les capacités de résistance des personnes rencontrées. 

12 avril 2021 : La question des ruptures dans les modes de vie dans la transition écologique

  • Intervention de Michelle Dobré (professeure de sociologie, Université Caen-Normandie, CERREV)

Cet exposé propose une incursion dans la compréhension des conditions du changement de modes de vie et une réflexion sur la notion de rupture dans ce contexte. Il reprend des concepts classiques de la sociologie (« hystérésis » et « habitus », « formes sociales ») et un choix de données anciennes et récentes dans quelques domaines significatifs reliés à l’« écologisation » des pratiques domestiques (tri, alimentation, numérique). Il s’agit ici de proposer une problématisation socio-anthropologique de la question du changement des modes de vie près de vingt ans après la publication du livre L’écologie au quotidien – dont le sous-titre « Eléments pour une théorie sociologique de la résistance ordinaire » était et reste très significatif. C’est une perspective qui offre un recul intéressant sur les enjeux actuels de la « transition » écologique et la question de la stratification des dispositions au changement social.

3 mai 2021 : L’enjeu écologique au prisme des rapports de classe 

  • Intervention de Jean-Baptiste Comby (sociologue, maître de conférences à l'Université Paris 2, chercheur au Carism et au Cens)

Présentation à venir

10 mai  2021 : Courants de l’écoféminisme vernaculaire et éthiques du care (thématique à confirmer)

  • Intervention à confirmer

Présentation à venir

17 mai 2021 : Injonctions écologiques et rapports aux normes d’habiter au sein de quartiers « durables » : vers une gouvernementalisation néolibérale des conduites ? (titre provisoire)

  • Intervention de Nadine Roudil (professeure de sociologie, École nationale supérieure d’architecture de Paris Val-de-Seine, CRH-LAVUE)

Présentation à venir

31 mai : Séance 10. Se mobiliser pour la justice environnementale dans les quartiers populaires ? Vivre et lutter dans des environnements toxiques (le cas du South Bronx)

  • Intervention de Flaminia Paddeu, maitresse de conférences en géographie, Université Sorbonne Paris Nord (Pléïade)

Présentation à venir

7 juin 2021 : Les inégalités écologiques au prisme de la transition énergétique et de l’habita(n)t : focus sur la précarité énergétique (titre provisoire)

  • Intervention de Joseph Cacciari, ATER en sociologie, chercheur rattaché à l’IDHES, Université Paris Nanterre

Présentation à venir

14 juin 2021 : Les cultures sociales de l’écologie au sein d’un écoquartier en rénovation urbaine : mise en scène écocitoyenne, appropriations d’un espace populaire et hiérarchisations sociales par l’écologie

Présentation à venir

  • Séminaires de tronc commun – Étude comparative du développement – M1/S2-M2/S4
    Suivi et validation – semestriel hebdomadaire = 6 ECTS
    MCC – exposé oral
  • Séminaires de tronc commun – Territoires, espaces, sociétés – M1/S2-M2/S4
    Suivi et validation – semestriel hebdomadaire = 6 ECTS
    MCC – exposé oral
Contacts additionnels
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Informations pratiques
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Direction de travaux des étudiants
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Réception des candidats
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Pré-requis
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  • Campus Condorcet-Centre de colloques
    Centre de colloques, Cours des humanités 93300 Aubervilliers
    Salle 3.11
    2nd semestre / hebdomadaire, lundi 13:00-15:00
    du 1er mars 2021 au 14 juin 2021

Le séminaire « Écologie, classes sociales et territoires » s’est tenu en format hybride de mars à juin 2021 et s’est attaché à l’étude des conditions de production des rapports sociaux aux enjeux environnementaux. Cette dernière s’est appuyée sur de nombreux travaux statistiques, qualitatifs et empiriques centrés avant tout sur des cas occidentaux et principalement issus de la sociologie, mais également de la géographie et des sciences politiques. Ouvert en priorité à des étudiant.es en master au sein de l’EHESS, il a également été poursuivi par quelques doctorant.es et chercheur.ses en sciences sociales. De plus, ce séminaire a été enrichi par l’intervention de nombreux.ses chercheur.ses extérieur.es. L’objectif de ces séances était d’offrir un large éventail des appréhensions sociales liées aux problématiques écologiques, de leur rattachement aux conditions matérielles d’existence aux effets symboliques des relations de domination qu’elles impliquent en passant par les engagements et politisations qui en découlent. Ce séminaire a mis un certain pas de côté par rapport aux recherches portant sur les déclinaisons plus scientifiques et techniques de l’écologie.

La séance introductive a permis de baliser les hiérarchisations sociales « ordinaires » et les luttes de légitimation à l’œuvre à l’aune des enjeux environnementaux, en revenant sur les effets de la construction sociale et publique des attitudes et comportements dits « écologiques ». Plusieurs problématiques sur l’élaboration et les définitions de catégories gravitant autour de la « sensibilité environnementale » y ont été développées. L’analyse de ces stratifications sociales a notamment été complétée par l’intervention de Michelle Dobré à l’aide de ses enquêtes sur les modes de vie, entre inerties et capacités sociales de transformation. La séance suivante a été consacrée aux relations des classes moyennes et supérieures aux questions environnementales au regard des rétributions symboliques qu’elles génèrent. Elle s’est tenue à une analyse relationnelle des positions sociales et des logiques propres aux fractions de classe. Certaines séances ont ainsi été structurées à partir du sujet des rapports de classe à l’écologie, notamment grâce à l’intervention et aux travaux de Jean-Baptiste Comby.

Un autre axe d’étude relatif à la diffusion d’injonctions écologiques au sein de quartiers populaires et à leur réception par des milieux modestes a été retenu. Cette perspective de recherche a fait l’objet de plusieurs illustrations. Celle d’abord de l’institutionnalisation de certains modèles de « ville durable » et de la diffusion de politiques environnementales en Europe occidentale à partir des travaux de Vincent Béal. Mais également celles du travail d’encadrement effectué par des militants écologistes comme l’a exposé Hadrien Malier et des effets de moralisation et stigmatisation à l’encontre de classes populaires révélés par Nadine Roudil.

Enfin, le thème des mobilisations de justice socio-environnementale a été abordé afin de mieux saisir les articulations entre inégalités sociales et territoriales. Maxime Gaborit est notamment revenu sur la recomposition des enjeux écologiques à l’aune du mouvement des Gilets Jaunes, du poids des dispositions socio-territoriales de leurs manifestants à sa confrontation aux marches pour le climat. Flaminia Paddeu a quant à elle spécifié quelques résultats de sa thèse en soulignant comment l’imbrication entre formes de vulnérabilités socio-sanitaires et sources de pollution a pu faire émerger des mouvements de justice environnementale populaires dans le South Bronx, non sans quelques nuances dans leur représentativité. D’autres types d’engagement écologique s’expriment plus « discrètement », ce dont témoignent certaines pratiques écoféministes orientées par des quêtes d’autonomie et de subsistance et sur lesquelles Geneviève Pruvost est revenue lors de sa présentation.

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