UE833 - Le terrain comme mise en scène : l'enquête en cinéma, théâtre et performance (arts plastiques)

Intervenant·e·s

• Caterina Pasqualino [référent·e]   directrice de recherche, CNRS / Laboratoire d'anthropologie politique (LAP)
• Bernard Müller   Institut d'ethnologie de Cologne

Bon nombre de chercheur·e·s en sciences humaines, anthropologues, sociologues, géographes, archéologues ou mêmes psychologues, recourent à un dispositif singulier que l’on pourrait qualifier d’artistique pour poursuivre leur recherche : film, théâtre, opéra, concert, sonographie, performance, reconstitution, jeu de rôle, installation, partitions ou fictions littéraires, etc. Sans céder à la tentation artistique, ces démarches estiment ainsi atteindre une meilleure compréhension des faits sociaux, au plus près du réel. Dans une approche transversale aux sciences humaines et sociales, ce séminaire se propose de faire un état des lieux de ces propositions d’analyse du social, depuis leur apparition autour de 1980 dans les répliques de la « crise de la représentation ». Il parait essentiel de revenir, au cas par cas, sur les leviers épistémologiques qu’activent les diverses méthodes en recherches en sciences humaines et sociales par l’art, notamment sur les méthodes en anthropologie qui procèdent d’une forme de performance (au sens englobant que lui donnent les performance studies). 

Par la suspicion qu’elle a jetée sur la possibilité d’une science humaine objective, la crise de l’anthropologie des années 1980 (Clifford et Marcus, 1986) a au moins eu l’avantage de déclencher une étonnante créativité méthodologique. Dans cette brèche s’engouffrent quantité de démarches dites hybrides entre art et SHS. Ces méthodes, qui se proposent d’intégrer l’enquête à la production d’une forme artistique. On se propose cette année d’établir une cartographie de ces diverses propositions d’analyse du social. Parmi cette diversité de méthodes se distinguent les recherches en SHS, notamment en anthropologie, qui procèdent d’une forme de performance : film, théâtre, performance-reenactment ou encore exposition-installation. Ces démarches relèvent d’une exigence méthodologique qui a pour but d’améliorer la compréhension de faits sociaux ; sans céder à la « tentation artistique », ni à dénier à l’anthropologie sa qualité scientifique. Bien au contraire, il s’agit de lui offrir la possibilité de renouveler ses propriétés heuristiques et critiques, en explicitant autant faire se peut les circonstances dans lesquelles son savoir est produit, en définissant sa nature, à l’intérieur précisément du cadre donné par le processus-laboratoire de l’enquête artistique. Les séances du séminaire seront rythmées par des intervenants invités à rendre compte des étapes de la construction de leur objet recherche, au plus près du réel : processus, tâtonnements ou doutes.